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19/04/2021 | BELGIQUE | N°F.20.0132.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 19 avril 2021, F.20.0132.F


N° F.20.0132.F
VILLE DE CHARLEROI, représentée par son collège communal, dont les bureaux sont établis à Charleroi, en l'hôtel de ville, place Charles II, 14-15,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,
contre
DKMY, société privée à responsabilité limitée,
défenderesse en cassation,
ayant pour conseil Maître Hugues Michel, avocat au barreau de Charleroi, dont le cabinet est établi à Ch

arleroi, rue Huart Chapel, 35/6, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant l...

N° F.20.0132.F
VILLE DE CHARLEROI, représentée par son collège communal, dont les bureaux sont établis à Charleroi, en l'hôtel de ville, place Charles II, 14-15,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,
contre
DKMY, société privée à responsabilité limitée,
défenderesse en cassation,
ayant pour conseil Maître Hugues Michel, avocat au barreau de Charleroi, dont le cabinet est établi à Charleroi, rue Huart Chapel, 35/6, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 24 avril 2020 par la cour d'appel de Mons.
Par ordonnance du 2 mars 2021, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le conseiller Sabine Geubel a fait rapport.
L'avocat général Bénédicte Inghels a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente deux moyens.
III. La décision de la Cour
Sur le second moyen :
Quant aux deux branches réunies :
L'arrêt constate qu'en vertu de l'article 2 du règlement-taxe, « la taxe vise les bars, soit les établissements au sein desquels est employé ‘du personnel poussant à la consommation (...), soit en consommant avec les clients, soit en provoquant la consommation de toute autre manière que par le service normal des clients ou par le seul exercice du chant ou de la danse' » et que, suivant l'article 4, « la taxe est fixée à 15.000 euros par établissement et par an » alors que, sous l'empire d'un ancien règlement frappant le même type d'établissements, le taux de la taxe se comptait « par personne occupée », ce qui aurait entraîné des difficultés, selon le règlement du 21 février 2011 auquel a succédé le règlement litigieux, pour « déterminer avec exactitude l'assiette de l'impôt vu la présence de personnel ‘travaillant en noir' et l'existence de déclarations peu fiables ».
Il précise qu'outre le but de la demanderesse « d'obtenir des recettes afin de se procurer les ressources nécessaires en vue du financement des dépenses de sa politique générale et de ses missions de service public », le préambule du règlement-taxe litigieux, qui évoque la faculté pour les communes de poursuivre « des objectifs d'incitation ou de dissuasion accessoires [aux] impératifs financiers », souligne les « enjeux à la fois éthique, financier et sécuritaire » de la taxe.
Il relève que la défenderesse « ne vise pas l'égalité des établissements concernés par la taxe par rapport à d'autres contribuables » mais dénonce une discrimination « des établissements entre eux par rapport à l'application du règlement » à défaut de « critères objectifs permettant de tenir compte de la capacité contributive de chaque établissement ».
Considérant que le taux forfaitaire unique a pour conséquence que le règlement « touche [...] de la même façon les exploitants de bars se trouvant dans des situations différentes en fonction de la superficie de leur établissement, de l'importance de leur personnel ou de leur chiffre d'affaires », l'arrêt conclut qu'en se bornant à évoquer l'existence de personnel « en noir », la demanderesse « ne fournit aucune justification » à cette discrimination.
Par ces énonciations, l'arrêt donne à connaître qu'en raison de son taux forfaitaire unique, la taxe frappe l'exercice d'une activité économique sans avoir égard au moindre indice qui rende compte de son ampleur, que ce soit par la superficie, par l'importance du personnel ou par le chiffre d'affaires, et qu'à défaut de tels indices, le règlement-taxe a pour effet de traiter de manière identique des établissements qui, tout en exerçant la même activité, se trouvent dans des situations essentiellement différentes du point de vue de leurs capacités contributives.
Il s'ensuit que, d'une part, l'arrêt ne cherche pas à déterminer si les établissements sont ou non dans des situations comparables en vue d'apprécier ensuite, à les supposer comparables, s'il existe, au regard du but de la taxe, une justification objective et raisonnable à la différence de traitement constatée, mais se place dans le cas inverse, celui du traitement identique de catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure instaurée, sont essentiellement différentes, d'autre part, il n'écarte pas une justification qui aurait été donnée au taux forfaitaire unique de la taxe mais considère que l'application de ce taux à l'ensemble des établissements taxés ne trouve aucune justification.
Le moyen, qui, en chacune de ses branches, procède d'une interprétation inexacte de l'arrêt, manque en fait.
Sur le premier moyen :
Les considérations vainement critiquées par le second moyen, d'où il ressort que le règlement-taxe litigieux « est contraire à la règle de l'égalité devant l'impôt énoncée à l'article 172 de la Constitution », suffisent à fonder la décision de l'arrêt que ce règlement « ne peut être appliqué ».
Dirigé contre des considérations surabondantes, le moyen, qui ne saurait entraîner la cassation, est dénué d'intérêt, partant, irrecevable.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de sept cent septante-sept euros quatre-vingt-huit centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l'aide juridique de deuxième ligne.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, le président de section Mireille Delange, les conseillers Marie-Claire Ernotte, Sabine Geubel et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du dix-neuf avril deux mille vingt et un par le président de section Christian Storck, en présence de l'avocat général Bénédicte Inghels, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.


Synthèse
Formation : Chambre 3f - troisième chambre
Numéro d'arrêt : F.20.0132.F
Date de la décision : 19/04/2021
Type d'affaire : Droit fiscal - Droit constitutionnel

Analyses

Lorsqu'en raison de son taux forfaitaire unique, la taxe frappe l'exercice d'une activité économique sans avoir égard au moindre indice qui rende compte de son ampleur, que ce soit par la superficie, par l'importance du personnel ou par le chiffre d'affaires, le règlement-taxe a pour effet de traiter de manière identique des établissements qui, tout en exerçant la même activité, se trouvent dans des situations essentiellement différentes du point de vue de leurs capacités contributives.

TAXES COMMUNALES, PROVINCIALES ET LOCALES - TAXES COMMUNALES - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 100 A FIN) - Article 172 - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 10 - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 11 [notice1]


Références :

[notice1]

Constitution 1994 - 17-02-1994 - Art. 10, 11 et 172 - 30 / No pub 1994021048


Composition du Tribunal
Président : STORCK CHRISTIAN
Greffier : BODY LUTGARDE
Ministère public : INGHELS BENEDICTE
Assesseurs : DELANGE MIREILLE, ERNOTTE MARIE-CLAIRE, GEUBEL SABINE, MORIS MARIELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-04-19;f.20.0132.f ?

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