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17/12/2020 | BELGIQUE | N°C.20.0183.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 17 décembre 2020, C.20.0183.F


N° C.20.0183.F
N. Z.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
T. A.,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile,
en présence de
R. M.,
partie appelée en déclaration d'arrêt commun.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi e

n cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 11 janvier 2019 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le président...

N° C.20.0183.F
N. Z.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
T. A.,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile,
en présence de
R. M.,
partie appelée en déclaration d'arrêt commun.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 11 janvier 2019 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le président de section Christian Storck a fait rapport.
L'avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Le moyen de cassation
Le demandeur présente un moyen libellé dans les termes suivants :
Disposition légale violée
Article 1054, alinéa 1er, du Code judiciaire, tel qu'il était d'application avant sa modification par la loi du 25 mai 2018
Décisions et motifs critiqués
L'arrêt dit l'appel du demandeur non recevable, le demandeur n'ayant pas la qualité de partie intimée au sens de l'article 1054, alinéa 1er, du Code judiciaire, aux motifs suivants :
« Le jugement entrepris a été signifié [au demandeur] le 1er août 2014 et celui-ci a interjeté appel par des conclusions déposées au greffe de la cour [d'appel] le 29 décembre 2016 ;
En vertu de l'article 1054, alinéa 1er, du Code judiciaire, dans sa version applicable au litige, la partie intimée peut former incidemment appel à tout moment contre toutes parties en cause devant le juge d'appel. Une partie n'est intimée au sens de cette disposition que lorsqu'un appel principal ou incident est dirigé contre elle, ce qui implique qu'une partie appelante a formulé devant le juge d'appel une prétention, autre qu'une demande en déclaration d'arrêt commun, qui est de nature à porter atteinte à ses intérêts [...] ;
Un appel principal a d'abord été formé par [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] le 25 septembre 2014 ; il est exclusivement dirigé contre [le défendeur] et tend à ce qu'[elle] soit déchargée de la condamnation prononcée contre elle par le premier juge. [La partie appelée en déclaration d'arrêt commun] n'y formule aucune prétention de nature à porter atteinte aux intérêts [du demandeur] ;
L'appel de [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] n'a dès lors pas eu pour conséquence de conférer [au demandeur] la qualité de partie intimée ou de ‘partie en cause', même si la requête lui a été notifiée et qu'il a été associé au calendrier de la mise en état ;
Vainement [le demandeur] soutient-il que, ‘depuis le dépôt des conclusions d'appel [du défendeur] en date du 27 février 2017', il a la qualité d'intimé dès lors que ‘[le défendeur] a sollicité [sa] condamnation [...] à le garantir jusqu'à concurrence de la moitié des condamnations solidaires ou in solidum à intervenir et à lui rembourser le montant dont il se serait éventuellement acquitté envers [le défendeur] jusqu'à concurrence de ce qui excède cinquante pour cent du montant de l'éventuelle condamnation à intervenir' ;
Des pièces de la procédure, il ressort que seule [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun], et non [le défendeur], a remis des conclusions de synthèse d'appel au greffe de la cour d'appel le 27 février 2017, aux termes desquelles elle forme, à titre subsidiaire, un recours contributoire contre [le demandeur] ;
Cette demande - nouvelle en degré d'appel et formée à titre subsidiaire - est introduite par [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun], appelant principal, à la suite du dépôt des conclusions [du demandeur] du 29 décembre 2016. Elle ne confère pas [au demandeur] la qualité d'intimé, en l'absence de lien d'instance entre [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] et lui au premier degré de juridiction ;
Il convenait dès lors que [le demandeur] fasse un appel principal dans les délais conformément au droit commun ;
Son appel principal formé le 29 décembre 2016 est irrecevable ».
Griefs
1. En vertu de l'article 1054, alinéa 1er, du Code judiciaire, la partie intimée peut former incidemment appel à tout moment contre toutes parties en cause devant le juge d'appel.
D'une part, une partie n'est intimée au sens de cette disposition que lorsqu'un appel principal ou incident est dirigé contre elle, ce qui implique qu'une partie a formulé devant le juge d'appel une prétention, autre qu'une demande en déclaration d'arrêt commun, qui est de nature à porter atteinte à ses intérêts.
Il suit de ce qui précède que la partie contre laquelle une demande en garantie a été formée par celui qui a interjeté appel est une partie intimée qui peut former un appel incident. La circonstance que cette demande est irrecevable - à défaut de lien d'instance entre ces parties en première instance - et que cette partie est donc irrégulièrement intimée n'énerve en rien ces considérations. Il y va du respect du contradictoire et des droits de la défense.
D'autre part, il suit de la disposition précitée que, si la recevabilité de l'appel incident doit en principe être appréciée au moment où il est formé, rien n'empêche la partie intimée de réitérer son appel incident, celui-ci pouvant être formé à tout moment jusqu'à la clôture des débats. La qualité de partie intimée acquise en raison d'une demande en garantie formée par l'appelant principal ne peut donc être anéantie par le fait qu'un appel incident a été formé antérieurement.
2. Il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que
- le défendeur a formé une demande fondée sur les articles 229, 5°, du Code des sociétés et 1382 du Code civil contre le demandeur et [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] ;
- le premier juge a déclaré la demande du défendeur recevable et fondée et a condamné solidairement le demandeur et [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] au paiement d'une somme d'argent ;
- par une requête du 25 septembre 2014, [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] a formé un appel principal contre le défendeur et mettant le demandeur à la cause, en vue d'être déchargée de la condamnation prononcée contre [elle] ;
- le demandeur a formé un appel incident par conclusions déposées au greffe de la cour d'appel le 29 décembre 2016 ;
- à la suite du dépôt de ces conclusions, [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] a formé, dans ses conclusions de synthèse d'appel du 27 février 2017, un recours contributoire contre le demandeur, demandant à la cour d'appel, à titre subsidiaire, de « condamner [le demandeur] à [la] garantir [...] jusqu'à concurrence de la moitié des condamnations solidaires ou in solidum à intervenir et à lui rembourser le montant dont il se serait éventuellement acquitté envers [le défendeur] jusqu'à concurrence de ce qui excède cinquante pour cent du montant de l'éventuelle condamnation à intervenir » ;
- le demandeur a réitéré son appel incident dans ses conclusions additionnelles du 20 juin 2017, relevant qu'« il n'est [...] pas douteux que, depuis le dépôt des conclusions d'appel du [défendeur] en date du 27 février 2017, [il] doit être considéré comme intimé ».
L'arrêt décide toutefois que la demande en garantie formée par [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] pour la première fois en degré d'appel et à titre subsidiaire à la suite du dépôt des conclusions du demandeur du 29 décembre 2016 ne confère pas à ce dernier la qualité d'intimé en l'absence de lien d'instance entre [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] et lui-même au premier degré de juridiction.
3. En statuant ainsi, alors que cette demande, fût-elle irrecevable à défaut de lien d'instance entre ces parties en première instance, suffit pour conférer au demandeur la qualité de partie intimée lui permettant de former incidemment appel à tout moment jusqu'à la clôture des débats, l'arrêt viole l'article 1054, alinéa 1er, du Code judiciaire, tel qu'il était applicable avant sa modification par la loi du 25 mai 2018.
III. La décision de la Cour
Seule une partie intimée peut, conformément à l'article 1054, alinéa 1er, du Code judiciaire, former appel incident.
Une partie n'est intimée au sens de cette disposition que lorsqu'un appel principal ou incident est dirigé contre elle.
La partie mise en cause en degré d'appel contre laquelle une partie appelante forme devant le juge d'appel une demande incidente nouvelle n'est pas une partie intimée.
L'arrêt, qui constate qu'après avoir formé un appel principal « exclusivement dirigé contre [le défendeur] », la partie appelée en déclaration d'arrêt commun a formé par conclusions contre le demandeur « un recours contributoire » alors qu'il n'y avait pas « de lien d'instance entre [eux] au premier degré de juridiction », justifie légalement sa décision que « cette demande - nouvelle en degré d'appel [...] - ne confère pas [au demandeur] la qualité d'intimé ».
Le moyen ne peut être accueilli.
Et le rejet du pourvoi prive d'intérêt la demande en déclaration d'arrêt commun.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi et la demande en déclaration d'arrêt commun ;
Condamne le demandeur aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de trois cent cinquante-neuf euros septante-sept centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l'aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l'État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, les conseillers Michel Lemal, Sabine Geubel, Ariane Jacquemin, et Maxime Marchandise, et prononcé en audience publique du dix-sept décembre deux mille vingt par le président de section Christian Storck, en présence de l'avocat général Philippe de Koster, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1f - première chambre
Numéro d'arrêt : C.20.0183.F
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Autres

Analyses

Seule une partie intimée peut, conformément à l'article 1054, alinéa 1er, du Code judiciaire, former appel incident; une partie n'est intimée au sens de cette disposition que lorsqu'un appel principal ou incident est dirigé contre elle; la partie mise en cause en degré d'appel contre laquelle une partie appelante forme devant le juge d'appel une demande incidente nouvelle n'est pas une partie intimée (1). (1) Voir les concl. du MP avant Cass.17 décembre 2020, RG C.19.0374.F, Pas. 2020, n° 785.

APPEL - MATIERE CIVILE (Y COMPRIS LES MATIERES COMMERCIALE ET SOCIALE) - Appel incident - Partie intimée - Notion - Demande incidente nouvelle formée contre une partie mise en cause en degré d'appel - Effet sur la qualité de cette partie [notice1]


Références :

[notice1]

Code Judiciaire - 10-10-1967 - Art. 1054, al. 1er - 01 / No pub 1967101052


Composition du Tribunal
Président : DELANGE MIREILLE
Greffier : DE WADRIPONT PATRICIA
Ministère public : WERQUIN THIERRY
Assesseurs : GEUBEL SABINE, JACQUEMIN ARIANE, MARCHANDISE MAXIME, LEMAL MICHEL

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-12-17;c.20.0183.f ?

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