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19/03/2020 | BELGIQUE | N°F.19.0025.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 19 mars 2020, F.19.0025.N


N° F.19.0025.N
NYRSTAR BELGIUM, s.a.,
Me Daniel Garabedian, avocat à la Cour de cassation,
contre
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances,
Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 8 mai 2018 par la cour d'appel d'Anvers.
Le 10 février 2020, l'avocat général Johan Van der Fraenen a déposé des conclusions.
Le conseiller Koenraad Moens a fait rapport.
L'avocat général Johan Van der Fraenen a conclu.
II. Les moyens de cassation
Da

ns la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse pr...

N° F.19.0025.N
NYRSTAR BELGIUM, s.a.,
Me Daniel Garabedian, avocat à la Cour de cassation,
contre
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances,
Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 8 mai 2018 par la cour d'appel d'Anvers.
Le 10 février 2020, l'avocat général Johan Van der Fraenen a déposé des conclusions.
Le conseiller Koenraad Moens a fait rapport.
L'avocat général Johan Van der Fraenen a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente deux moyens.
III. La décision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
1. Aux termes de l'article 49 du Code des impôts sur les revenus 1992, à titre de frais professionnels sont déductibles les frais que le contribuable a faits ou supportés pendant la période imposable en vue d'acquérir ou de conserver les revenus imposables et dont il justifie la réalité et le montant au moyen de documents probants ou, quand cela n'est pas possible, par tous autres moyens de preuve admis par le droit commun, sauf le serment.
2. En vertu de l'article 52, 2°, du Code des impôts sur les revenus 1992, constituent des frais professionnels les intérêts des capitaux empruntés à des tiers et engagés dans l'exploitation, ainsi que tous frais, rentes ou redevances analogues relatives à cette exploitation.
3. Ces dispositions légales s'appliquent en vertu de l'article 183 du Code des impôts sur les revenus 1992 à l'impôt des sociétés.
4. Les intérêts d'un emprunt contracté par une société pour financer une réduction de capital ou une distribution de dividendes peuvent constituer des frais professionnels, à condition que le contribuable prouve que les conditions d'application de l'article 49, alinéa 1er, du Code des impôts sur les revenus 1992 sont remplies.
5. Le moyen, en cette branche, qui suppose que de tels intérêts peuvent constituer des frais professionnels sur la base de l'article 52, 2°, du Code des impôts sur les revenus 1992 sans que les conditions de l'article 49, alinéa 1er, du Code des impôts sur les revenus 1992 doivent être remplies, se fonde sur une conception juridique erronée et manque par conséquent en droit.
Quant à la seconde branche :
6. Les frais liés à l'existence et au fonctionnement de la société, tels que les frais d'intérêts d'un emprunt contracté pour financer une réduction de capital ou une distribution de dividendes, ne sont pas nécessairement déductibles comme frais professionnels en application de l'article 49 du Code des impôts sur les revenus 1992. À cette fin, il est requis que la société prouve que ces charges d'intérêts tendent à acquérir ou conserver des revenus imposables.
Le moyen, en cette branche, qui suppose le contraire, se fonde sur une conception juridique erronée et manque par conséquent en droit.
[...]
Sur le second moyen :
Quant à la première branche :
Sur le premier rameau :
8. Une société qui contracte un emprunt pour financer les paiements résultant d'une décision de réduction du capital ou de distribution de dividendes a le droit de déduire les charges d'intérêts liées à cet emprunt comme frais professionnels en application de l'article 49 du Code des impôts sur les revenus 1992 si elle démontre que les charges d'intérêts, et non pas, donc, la réduction du capital ou la distribution de dividendes elles-mêmes, remplissent les conditions d'application de ladite disposition légale.
9. La seule circonstance qu'une société ne dispose pas de liquidités suffisantes au moment où elle doit effectuer des paiements et qu'elle contracte donc un emprunt afin d'effectuer ces paiements ne suffit pas à prouver que les charges d'intérêts liées à cet emprunt sont déductibles comme frais professionnels. La société doit en effet prouver que ces charges d'intérêts tendent à acquérir ou conserver des revenus imposables. Elle peut le faire en démontrant notamment que l'emprunt a été contracté pour éviter la perte d'actifs utilisés pour acquérir ou conserver des revenus imposables.
10. Les juges d'appel constatent que « [la demanderesse] fait valoir que l'emprunt ayant donné lieu aux charges d'intérêts a été contracté après la décision de réduction de capital et de distribution de dividendes afin de pouvoir, à défaut de liquidités suffisantes pour effectuer la réduction de capital et la distribution de dividendes en espèces, conserver tous les actifs générateurs de revenus [de la demanderesse] (et en particulier une créance intragroupe, diverses participations et tous ses actifs d'exploitation), plutôt que de devoir vendre ou distribuer en nature certains de ces actifs pour faire face à la dette contractée à la suite de la réduction de capital/distribution de dividendes ».
Les juges d'appel considèrent que « [la demanderesse] ne fournit pas de pièces d'où il ressortirait que l'emprunt a été effectivement contracté en vue d'acquérir ou de conserver ses éléments d'actif et que, par conséquent, les charges d'intérêts ont été effectuées ou supportées en vue d'acquérir ou de conserver des revenus imposables à partir de ces actifs ».
Même si les juges d'appel ne contestent pas que la demanderesse ne disposait pas de liquidités suffisantes au moment de la réduction de capital et de la distribution de dividendes pour effectuer les paiements aux actionnaires, ils ont ainsi pu exclure l'application de l'article 49 du Code des impôts sur les revenus 1992.
Dans cette mesure, le moyen, en ce rameau, ne peut être accueilli.
11. La motivation de l'arrêt en ce qui concerne l'application de l'article 49, alinéa 1er, du Code des impôts sur les revenus 1992 permet à la Cour de contrôler sa légalité.
Dans cette mesure, le moyen, en ce rameau, manque en fait.
[...]
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Eric Dirix, président, les conseillers Filip Van Volsem, Koenraad Moens, François Stévenart Meeûs et Sven Mosselmans, et prononcé en audience publique du dix-neuf mars deux mille vingt par le président de section Eric Dirix, en présence de l'avocat général Johan Van der Fraenen, avec l'assistance du greffier Mike Van Beneden.


Synthèse
Formation : Chambre 1n - eerste kamer
Numéro d'arrêt : F.19.0025.N
Date de la décision : 19/03/2020
Type d'affaire : Droit fiscal

Analyses

Les intérêts d'un emprunt contracté par une société pour financer une réduction de capital ou une distribution de dividendes ne peuvent constituer des frais professionnels sur la base de l'article 52, 2° du Code des impôts sur les revenus 1992 sans que le contribuable ne prouve que les conditions d'application de l'article 49, alinéa 1er, dudit code sont remplies (1). (1) Voir les concl. MP publiées à leur date dans AC.

IMPOTS SUR LES REVENUS - IMPOT DES SOCIETES - Détermination du revenu global net imposable - Frais professionnels - Intérêts visant à financer une réduction de capital ou une distribution de dividendes - Conditions de déductibilité [notice1]

La seule circonstance qu'une société ne dispose pas de liquidités suffisantes au moment où elle doit effectuer des paiements et qu'elle contracte donc un emprunt afin d'effectuer ces paiements ne suffit pas à prouver que les charges d'intérêts liées à cet emprunt sont déductibles comme frais professionnels; la société doit en effet prouver que ces charges d'intérêt tendent à à acquérir ou conserver des revenus imposables, ce qui peut se faire en démontrant notamment que l'emprunt a été contracté pour éviter la perte d'actifs utilisés pour acquérir ou conserver des revenus imposables (1). (1) Voir les concl. MP publiées à leur date dans AC.

IMPOTS SUR LES REVENUS - IMPOT DES SOCIETES - Détermination du revenu global net imposable - Frais professionnels - Intérêts visant à financer une réduction de capital ou une distribution de dividendes - Déduction - Charge de la preuve [notice2]


Références :

[notice1]

Côde des impôts sur les revenus 1992 - 12-06-1992 - Art. 49 et 52, 2° - 30 / No pub 1992003455

[notice2]

Côde des impôts sur les revenus 1992 - 12-06-1992 - Art. 49 - 30 / No pub 1992003455


Composition du Tribunal
Président : DIRIX ERIC
Greffier : VANDEN HENDE VANITY
Ministère public : VAN DER FRAENEN JOHAN
Assesseurs : VAN VOLSEM FILIP, MOENS KOENRAAD, STEVENART MEEUS FRANCOIS, MOSSELMANS SVEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-03-19;f.19.0025.n ?

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