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19/11/2019 | BELGIQUE | N°P.19.0538.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 19 novembre 2019, P.19.0538.N


N° P.19.0538.N
R. M.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Daan De Backer, avocat au barreau de Flandre occidentale,
contre
OFFICE NATIONAL DE SÉCURITÉ SOCIALE,
défendeur en cassation,
Me Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 25 avril 2019 par la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle, statuant en tant que juridiction de renvoi ensuite de l'arrêt de la Cour du 5 septembre 2017.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrê

t, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Antoine Lievens a fait rapport.
L'avocat général...

N° P.19.0538.N
R. M.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Daan De Backer, avocat au barreau de Flandre occidentale,
contre
OFFICE NATIONAL DE SÉCURITÉ SOCIALE,
défendeur en cassation,
Me Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 25 avril 2019 par la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle, statuant en tant que juridiction de renvoi ensuite de l'arrêt de la Cour du 5 septembre 2017.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Antoine Lievens a fait rapport.
L'avocat général Marc Timperman a conclu.
Le 8 novembre 2019, le demandeur a déposé au greffe de la Cour une note telle que visée à l'article 1107, alinéa 3, du Code judiciaire.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
1. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation des articles 35, alinéa 2, devenu l'article 35, § 1er, alinéa 3, de la loi du 27 juin 1969 révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs (respectivement en vigueur au cours des différentes parties de la période d'incrimination allant du 30 juin 1997 au 31 décembre 2009) et 236 du Code pénal social : l'arrêt condamne, à tort, le demandeur au paiement de dommages-intérêts dès lors que le mode de réparation spécifique prévu à l'article 35, alinéa 2, puis à l'article 35, § 1er, alinéa 3, de la loi du 27 juin 1969 exclut que le juge pénal condamne l'employeur, ses préposés ou mandataires, à une indemnité calculée sur la base des cotisations éludées, sur le fondement des articles 1382 du Code civil, 3 et 4 du titre préliminaire du Code de procédure pénale ; l'article 236 du Code pénal social prévoit uniquement la possibilité de condamner le débiteur des cotisations au paiement de celles-ci.
2. Jusqu'au 1er juillet 2011, le mode de réparation spécifique visé par le moyen, en cette branche, était régi par l'article 35 de la loi du 27 juin 1969. Depuis cette date, il est régi par l'article 236 du Code pénal social.
3. Selon l'article 236, alinéa 1er, du Code pénal social, dans sa version applicable du 1er juillet 2011 au 30 avril 2016, lorsque le tiers lésé ne s'est pas constitué partie civile, le juge qui prononce la peine prévue aux articles 218, 220 et 221 (et, à compter du 8 janvier 2018, aux articles 171/4, 218, 220, 223, § 1er, alinéa 1er, 1°, et 234, § 1er, 3°) ou qui constate la culpabilité du chef d'une infraction à ces dispositions, condamne d'office le débiteur des cotisations impayées à payer les arriérés de cotisations, les majorations de cotisations et les intérêts de retard.
4. Il résulte des termes de l'article 236, alinéa 1er, du Code pénal social que, si le tiers lésé s'est constitué partie civile, le juge ne peut prononcer de condamnation d'office et que le régime des articles 1382 et suivants du Code civil, 3 et 4 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, peut s'appliquer.
Le moyen qui, en cette branche, procède d'une autre prémisse juridique, manque en droit.
(...)
Quant à la quatrième branche :
9. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation de l'article 265 du Code des sociétés, devenu l'article XX.226 du Code de droit économique, ainsi que de la méconnaissance du principe général du droit lex specialis derogat generalibus : l'arrêt considère, à tort, que l'article 265 du Code des sociétés n'exclut pas que la responsabilité puisse également être engagée sur pied de l'article 1382 du Code civil ; en effet, la rupture de la personnalité juridique et de la responsabilité des gérants d'une société au titre des cotisations de sécurité sociale est exclusivement régie par les dispositions précitées ; en outre, conformément à l'article 265 du Code des sociétés, la pleine personnalité juridique d'une société à responsabilité limitée ne cesse, dans des conditions strictes, qu'à l'égard de faits datant d'à partir de 2006, et non, par conséquent, à l'égard des faits à apprécier en l'espèce.
10. Il n'existe pas de principe général du droit lex specialis derogat generalibus.
Dans la mesure où il invoque la méconnaissance de ce principe général du droit, le moyen, en cette branche, manque en droit.
11. Suivant l'article 265, § 2, alinéa 1er, du Code des sociétés, dans sa version applicable jusqu'au 30 avril 2018, l'Office national de Sécurité sociale et le curateur peuvent tenir les gérants, anciens gérants et toutes les autres personnes qui ont effectivement détenu le pouvoir de gérer la société comme étant personnellement et solidairement responsables pour la totalité ou une partie des cotisations sociales, majorations, intérêts de retard et de l'indemnité forfaitaire visée à l'article 54ter de l'arrêté royal du 28 novembre 1969 pris en exécution de la loi du 27 juin 1969 révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, dus au moment du prononcé de la faillite, s'il est établi qu'une faute grave qu'ils ont commise était à la base de la faillite, ou, si au cours de la période de cinq ans qui précède le prononcé de la faillite, les gérants, anciens gérants et responsables se sont trouvés dans la situation décrite à l'article 38, § 3octies, 8°, de la loi du 29 juin 1981 établissant les principes généraux de la sécurité sociale des travailleurs salariés.
Selon l'article XX.226, alinéa 1er, du Code de droit économique, l'Office national de Sécurité sociale ou le curateur peuvent tenir les administrateurs, gérants, délégués à la gestion journalière, membres du comité de direction ou du conseil de surveillance, actuels ou anciens, et toutes les autres personnes qui ont effectivement détenu le pouvoir de diriger l'entreprise comme étant personnellement et solidairement responsables pour la totalité ou une partie des cotisations sociales, en ce compris les intérêts de retard, dues au moment du prononcé de la faillite, s'il est établi qu'au cours de la période de cinq ans qui précède le prononcé de la faillite, ils ont été impliqués dans au moins deux faillites ou liquidations d'entreprises à l'occasion desquelles des dettes de sécurité sociale n'ont pas été honorées, pour autant qu'ils aient eu lors de la déclaration de faillite, dissolution ou entame de la liquidation desdites entreprises la qualité de dirigeant, ancien dirigeant, membre ou ancien membre d'un comité de direction ou de surveillance ou avaient ou avaient eu en ce qui concerne les affaires de l'entreprise, une fonction dirigeante effective.
12. Ces dispositions légales n'empêchent pas que ces personnes puissent être tenues pour responsables, sur pied de l'article 1382 du Code civil, du dommage causé par le non-paiement, par leur faute, des cotisations sociales visées.
Dans la mesure où il est déduit d'une autre prémisse juridique, le moyen, en cette branche, manque en droit.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de président, Peter Hoet, Antoine Lievens, Erwin Francis et Sidney Berneman, conseillers, et prononcé en audience publique du dix-neuf novembre deux mille dix-neuf par le conseiller faisant fonction de président Filip Van Volsem, en présence de l'avocat général Marc Timperman, avec l'assistance du greffier Kristel Vanden Bossche.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Françoise Roggen et transcrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.


Synthèse
Formation : Chambre 2n - tweede kamer
Numéro d'arrêt : P.19.0538.N
Date de la décision : 19/11/2019
Type d'affaire : Droit de la sécurité sociale - Autres

Analyses

Il résulte des termes de l'article 236, alinéa 1er, du Code pénal social, dans sa version applicable du 1er juillet 2011 au 30 avril 2016, que, si le tiers lésé s'est constitué partie civile, le juge ne peut prononcer de condamnation d'office et le régime des articles 1382 et suivants du Code civil, 3 et 4 de la loi du 7 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale, peut s'appliquer.

SECURITE SOCIALE - GENERALITES - Code pénal social - Atteintes au financement de la sécurité sociale - Constitution de partie civile par le tiers lésé - Conséquence [notice1]

Il n'existe pas de principe général du droit lex specialis derogat generalibus (1). (1) Cass. 8 mai 2012, RG P.11.0583.N, Pas. 2012, n° 281.

PRINCIPES GENERAUX DU DROIT - "Lex specialis derogat generalibus" - Valeur

Les articles 265, § 2, alinéa 1er, du Code des sociétés, dans sa version applicable jusqu'au 30 avril 2018, et XX.226, alinéa 1er, du Code de droit économique, n'empêchent pas que les personnes visées par ces dispositions puissent être tenues pour responsables, sur pied de l'article 1382 du Code civil, du dommage causé par le non-paiement, par leur faute, des cotisations de sécurité sociale.

SECURITE SOCIALE - GENERALITES - Cotisations de sécurité sociale - Non-paiement de cotisations sociales - Responsabilité des gérants, anciens gérants et administrateurs ainsi que d'autres personnes - Fondement [notice3]


Références :

[notice1]

ancien Code Civil - 21-03-1804 - Art. 1382 - 30 / No pub 1804032150 ;

Titre préliminaire du Code de procédure pénale - 17-04-1878 - Art. 3 et 4 - 01 / No pub 1878041750 ;

Loi - 06-06-2010 - Art. 236, al. 1er - 06 / No pub 2010009589

[notice3]

ancien Code Civil - 21-03-1804 - Art. 1382 - 30 / No pub 1804032150 ;

Code des sociétés - 07-05-1999 - Art. 265, § 2, al. 1er - 69 / No pub 1999A09646 ;

Code de droit économique - 28-02-2013 - Art. XX.226, al. 1er - 19 / No pub 2013A11134


Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-11-19;p.19.0538.n ?

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