LA COUR,
Vu l'arrêt attaqué, rendu le 21 janvier 1997 par la cour d'appel de Liège;
Sur le moyen pris de la violation des articles 1149, 1319, 1320, 1322, 1356, spécialement alinéa 2, du Code civil et 19, alinéa 1er, du Code judiciaire,
en ce que l'arrêt attaqué dit non fondée la demande reconventionnelle du demandeur en réparation du préjudice subi à cause du non-respect de la cadence convenue de livraison de produits hydrocarbonés commandés à la défenderesse, aux motifs "que l'arrêt du 29 juin 1987, en ce qu'il confie aux experts, pour le chantier Offagne-Recogne, la mission de 'dire si les quantités convenues de 1.000 tonnes par jour ont été livrées et dans la négative, déterminer les causes de cette carence', n'a pas tranché en droit la contestation relative à l'existence d'une obligation contractuelle des parties susceptible d'engendrer une obligation de réparation en cas d'inexécution fautive dommageable; que l'emploi du terme 'convenues' ne définit qu'une déclaration d'intention initiale des parties (...); qu'il échet, dans la recherche de l'intention contractuelle des parties, de tenir compte des éléments de la conclusion du contrat ainsi que des modalités de son exécution; qu'à ce dernier égard, la mesure d'expertise ordonnée par la cour s'imposait; qu'aucun aveu ne peut résulter de la position adoptée par (la défenderesse) devant le premier juge, l'interprétation des termes utilisés devant se faire dans la même recherche d'intention; (...) (que) en tout état de cause les experts relèvent que l'organisation du chantier telle qu'elle fut réalisée, si elle eût pu se révéler plus rentable, n'est toutefois pas à l'origine de pertes préjudiciables mais plutôt d'un manque à gagner en raison du non-écourtement des délais d'exécution du marché, par ailleurs respectés ...",
alors que, (...);
deuxième branche, la défenderesse a reconnu expressément, dans les conclusions déposées devant le tribunal de commerce de Liège, qu'"une cadence de 1.000 tonnes avait effectivement été convenue lors de pourparlers préalables au contrat pour la fourniture des enrobés ..." et que la défenderesse a d'ailleurs introduit une demande ampliative tendant à la réparation des pertes qu'elle a subies suite au non-respect des cadences journalières convenues; que la défenderesse a ainsi reconnu en justice, dans les conclusions déposées en son nom et signées par son conseil, titulaire d'un mandat ad litem, qu'une cadence de livraison de 1.000 tonnes par jour d'enrobés (produits hydrocarbonés) avait été contractuellement prévue; qu'en disant que "l'interprétation des termes utilisés devant se faire dans la même recherche d'intention" et en interprétant ainsi ces termes comme l'expression de "la soumission initiale des parties à leur bonne entente réciproque en cours d'exécution du marché", la cour d'appel a donné aux conclusions déposées devant le tribunal de commerce de Liège au nom de la défenderesse un sens et une portée inconciliables avec leurs termes, qui exprimaient clairement l'existence d'une convention relative à la cadence de livraison de 1.000 tonnes de produits par jour; que l'arrêt attaqué viole ainsi la foi due aux dites conclusions (violation des articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil); qu'en déniant la valeur probante des déclarations par lesquelles la défenderesse admettait en justice l'existence de ladite convention relative à la cadence de livraison des fournitures, la cour d'appel n'a pas reconnu à l'aveu judiciaire constitué par ces déclarations la "pleine foi" dont le fait bénéficier l'article 1356 du Code civil (violation de cet article 1356, spécialement alinéa 2, du Code civil);
Quant à la deuxième branche :
Attendu que, dans ses conclusions additionnelles déposées devant le premier juge, la défenderesse énonçait que si une cadence de 1.000 tonnes avait été effectivement convenue lors des pourparlers préalables au contrat pour la fourniture des enrobés, elle l'avait été à l'avantage des deux parties et devait être respectée par chacune d'elles;
Attendu qu'aux conclusions du demandeur considérant qu'il s'agit d'un aveu judiciaire par la défenderesse de l'existence d'une convention relative à la cadence journalière des fournitures, l'arrêt oppose qu'aucun aveu ne peut résulter de la position adoptée par la défenderesse devant le premier juge, l'interprétation des termes utilisés devant se faire dans la recherche de l'intention contractuelle des parties, compte tenu "des éléments de la conclusion du contrat ainsi que des modalités de son exécution";
Qu'au vu des circonstances qu'il énumère, l'arrêt conclut à "l'absence de programme détaillé pour la fourniture des enrobés (qui) ne peut s'expliquer que par la soumission initiale des parties à leur bonne entente réciproque en cours d'exécution du marché";
Attendu que, d'une part, préférant se fonder sur la commune intention des parties plutôt que sur le sens littéral des termes, la cour d'appel n'a pas donné du passage des conclusions de la défenderesse repris dans le moyen une interprétation inconciliable avec ses termes et n'a donc pas violé la foi due à ces conclusions;
Attendu que, d'autre part, considérant que la position adoptée par la défenderesse devant le premier juge ne constituait pas un aveu de l'existence d'une telle obligation contractuelle, l'arrêt ne méconnaît pas la valeur probante d'un tel aveu;
Que le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli;
PAR CES MOTIFS,
Rejette le pourvoi;
Condamne le demandeur aux dépens.