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19/06/2002 | SUISSE | N°1P.270/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 juin 2002, 1P.270/2002


{T 0/2}
1P.270/2002 1P.434/2001
1P.274/2002 1P.436/2001
1P.278/2002 1P.438/2001/col

Séance du 19 juin 2002
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Nay, Aeschlimann, Reeb, Féraud, Catenazzi, Fonjallaz,
greffier Kurz.

B. ________,
recourant, représenté par Me François Mudry, avocat, rue de l'Athénée
22,
case postale 207, 1211 Genève 12,
la Masse en faillite de la succession répudiée de X.________,
recouran

te,
agissant par son administration spéciale, Office des poursuites et des
faillites Arve-Lac, rue de l'Hôtel-de-Vil...

{T 0/2}
1P.270/2002 1P.434/2001
1P.274/2002 1P.436/2001
1P.278/2002 1P.438/2001/col

Séance du 19 juin 2002
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Nay, Aeschlimann, Reeb, Féraud, Catenazzi, Fonjallaz,
greffier Kurz.

B. ________,
recourant, représenté par Me François Mudry, avocat, rue de l'Athénée
22,
case postale 207, 1211 Genève 12,
la Masse en faillite de la succession répudiée de X.________,
recourante,
agissant par son administration spéciale, Office des poursuites et des
faillites Arve-Lac, rue de l'Hôtel-de-Ville 11, 1211 Genève 3,
représentée
par Me Jacques Berta, avocat, boulevard Jacques-Dalcroze 2, 1204
Genève,
V.________, recourante, représentée par Me Denis Mathey, avocat,
boulevard
des Philosophes 17, 1205 Genève,

contre

Grand Conseil du canton de Genève, Chancellerie d'Etat, rue de
l'Hôtel-de-Ville 2, case postale 3964, 1211 Genève 3.

modifications de la loi genevoise sur les démolitions,
transformations et
rénovations d'habitations et de la loi d'application de la loi
fédérale sur
la poursuite pour dettes et la faillite

(recours de droit public contre la loi adoptée le 6 avril 2001 par le
Grand
Conseil du canton de Genève)

Faits:

A.
La loi genevoise sur les démolitions, transformations et rénovations
de
maisons d'habitation, du 25 janvier 1996 (ci-après: LDTR, RS/GE: L
5/20), a
pour but la préservation de l'habitat et des conditions de vie
existants, en
prévoyant notamment des restrictions quant à l'aliénation des
appartements
destinés à la location (art. 1 al. 2 let. c). Ces mesures figurent à
l'art.
39 (auparavant, art. 9A) de la loi, dont la teneur était la suivante:
Art. 39 Aliénation
1 L'aliénation, sous quelque forme que ce soit (notamment cession de
droits
de copropriété d'étages ou de partie d'étages, d'actions, de parts
sociales),
d'un appartement à usage d'habitation, jusqu'alors offert en
location, est
soumise à autorisation dans la mesure où l'appartement entre, à
raison de son
loyer ou de son type, dans une catégorie de logements où sévit la
pénurie.

Motifs de refus
2 Le département refuse l'autorisation lorsqu'un motif prépondérant
d'intérêt
public ou d'intérêt général s'y oppose. L'intérêt public et l'intérêt
général
résident dans le maintien, en période de pénurie de logements, de
l'affectation locative des appartements loués.

Exception
3...[Exception concernant l'acquisition du logement par le locataire
en
place]

Motifs d'autorisation
4 Le département autorise l'aliénation d'un appartement si celui-ci:
a) a été dès sa construction soumis au régime de la propriété par
étages ou à
une forme de propriété analogue;
b) était, le 30 mars 1985, soumis au régime de la propriété par
étages ou à
une forme de propriété analogue et qu'il avait déjà été cédé de
manière
individualisée;
c) n'a jamais été loué;
d) a fait une fois au moins l'objet d'une autorisation d'aliéner en
vertu de
la présente loi.

5... [Relogement du locataire]

B.
Le 6 avril 2001, le Grand Conseil genevois a adopté la loi n° 8188
modifiant
diverses dispositions de la LDTR, en particulier l'art. 39 al. 3 (le
locataire doit occuper effectivement le logement depuis trois ans au
moins),
ainsi que l'art. 39 al. 4 et 6 dont la nouvelle teneur est la
suivante:
Art. 39 al. 4 Motifs d'autorisation (nouvelle teneur)

4...[lettres a à d identiques]

L'autorisation ne porte que sur un appartement à la fois. Une
autorisation de
vente en bloc peut toutefois être accordée en cas de mise en vente
simultanée, pour des motifs d'assainissement financier, de plusieurs
appartements à usage d'habitation ayant été mis en propriété par
étages et
jusqu'alors offerts en location, avec pour condition que l'acquéreur
ne peut
les revendre que sous la même forme, sous réserve d'une autorisation
individualisée au sens du présent alinéa.

Art. 39 al. 6 Ventes forcées (nouveau)

6 En cas de vente aux enchères ou de gré à gré portant sur plusieurs
appartements à usage d'habitation ayant été mis en propriété par
étages et
jusqu'alors offerts en location, l'office des poursuites et faillites
est
tenu de les vendre en bloc, avec comme condition que l'acquéreur ne
peut les
revendre que sous la même forme, sous réserve de l'obtention d'une
autorisation individualisée au sens de l'alinéa 4. L'office doit
requérir
l'autorisation d'aliéner les appartements mis en vente aux enchères
avant de
procéder à la vente. Le registre foncier rejette les réquisitions de
transfert de propriété qui ne sont pas au bénéfice d'une autorisation
d'aliéner en force.
Cette modification porte également sur l'introduction d'un art. 37
dans la
loi d'application dans le canton de Genève de la loi fédérale sur la
poursuite pour dettes et la faillite, du 16 mars 1912 (ci-après:
LALP, RS/GE:
E 3/60), ainsi rédigé:
Art. 37 (nouveau)

1 Les préposés sont également tenus de respecter les dispositions
légales
cantonales applicables à la mise en vente d'objets immobiliers,
notamment la
LDTR.

2 En cas de vente de gré à gré ou aux enchères d'appartements à usage
d'habitation ayant été mis en propriété par étages et jusqu'alors
offerts en
location, le préposé est tenu de requérir au préalable l'autorisation
d'aliéner l'appartement mis en vente conformément à la loi précitée.

3 En cas de vente portant sur plusieurs appartements offerts en
location et
soumis au régime de la propriété par étages ou à une forme de
propriété
analogue au sens de l'art. 39, alinéa 1, de la loi précitée, l'office
des
poursuites et faillites est tenu de les vendre en bloc, conformément
à l'art.
39, alinéa 6, de la loi précitée. Il informe l'acquéreur qu'il ne
pourra les
revendre que sous la même forme, sous réserve de l'obtention d'une
autorisation individualisée au sens de l'art. 39, alinéa 4, de la loi
précitée. Cette mention doit figurer dans les publications de vente.

4 Les décisions prises par les offices des poursuites et faillites en
vertu
du présent article sont susceptibles d'un recours conformément aux
voies de
recours prévues dans la loi précitée (chapitre X).
Faute de référendum, cette modification législative a été promulguée
le 30
mai 2001 et déclarée exécutoire dès le lendemain, à l'exception de
l'art. 37
LALP, soumis à l'approbation de la Confédération.

C.
La loi n° 8188 fait l'objet de trois recours de droit public, déposés
par
B.________ (cause 1P.434/2001), par la masse en faillite de la
succession
répudiée de X.________ (ci-après: la masse en faillite, cause
1P.436/2001),
et par V.________ (cause 1P.438/2001). Invoquant la force dérogatoire
du
droit fédéral, ils concluent à l'annulation des art. 39 al. 6 LDTR,
et 37
LALP, sous suite de frais et dépens. B.________ conclut en outre à
l'annulation de l'art. 39 al. 4 LDTR.

Le Grand Conseil conclut au rejet des recours dans la mesure où ils
sont
recevables. Les parties ont répliqué, puis dupliqué. Invité à se
déterminer,
l'Office fédéral de la justice (OFJ) a indiqué que l'approbation
fédérale
avait été accordée, le 27 mars 2002, "sous la réserve que cette
modification
législative puisse faire l'objet d'une interprétation conforme au
droit
fédéral". En définitive, l'OFJ s'en remet à l'appréciation du Tribunal
fédéral, et renonce à se déterminer.

Après l'approbation fédérale, la loi n° 8188 a fait l'objet d'une
promulgation d'ensemble le 19 avril 2002, étendue à l'art. 37 LALP.
Les
recourants ont également recouru par actes des 15 et 17 mai 2002
(causes
1P.274, 278 et 270/2002). Il n'a pas été demandé de réponse à ces
recours,
matériellement identiques aux premiers.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Les trois premiers recours de droit public sont dirigés contre la
même loi,
et tendent à l'annulation des mêmes dispositions, pour des motifs
semblables.
Leur jonction s'impose, afin qu'il soit statué par un même arrêt. Il
en va de
même des trois recours suivants, interjetés après la promulgation de
l'ensemble de la loi n° 8188, les griefs soulevés étant identiques.

1.1 Formés dans les trente jours suivant la publication dans la
Feuille
d'avis officielle, les recours sont dirigés contre une loi soustraite
à la
sanction d'une autorité cantonale. Ils sont recevables sous l'angle
des art.
86 et 89 OJ. Dans la mesure où les premiers recours visent l'art. 37
LALP,
ils sont prématurés puisqu'ils ont été interjetés avant l'approbation
fédérale, qui a une portée constitutive (ATF 121 I 187 consid. 1b p.
189).
Cela ne prête toutefois pas à conséquence, car la jurisprudence
admet, dans
un tel cas, que la procédure est suspendue jusqu'à l'échéance du
délai de
recours (ATF 109 Ia 61 consid. 1c p. 65-66 et les arrêts cités). Il
n'était
dès lors pas nécessaire que les recourants forment de nouveaux
recours contre
la loi publiée après l'approbation fédérale.

1.2 La qualité pour recourir par la voie du recours de droit public se
détermine exclusivement d'après l'art. 88 OJ (ATF 126 I 43 consid. 1a
p. 44).
Selon cette disposition, la qualité pour agir appartient aux
particuliers et
aux collectivités lésés par des arrêtés ou décisions qui les
concernent
personnellement ou qui sont de portée générale. Lorsque le recours est
dirigé, comme en l'espèce, contre un arrêté de portée générale, la
qualité
pour recourir appartient à toute personne dont les intérêts
juridiquement
protégés sont effectivement touchés par l'acte attaqué ou pourront
l'être un
jour. Une simple atteinte virtuelle suffit, pourvu qu'il y ait un
minimum de
vraisemblance que le recourant puisse un jour se voir appliquer les
dispositions prétendument inconstitutionnelles (ATF 124 I 11 consid.
1b p.
13, 123 I 112 consid. 1b p. 115, 122 I 70 consid. 1b p. 73).
En l'espèce, la masse en faillite expose détenir onze parts de
propriété par
étages d'un immeuble à Genève, ainsi que de plusieurs lots de PPE dans
d'autres immeubles. Le 1er septembre 2000, elle a sollicité
l'autorisation de
vendre à V.________ le lot 4.03 correspondant à un appartement de
cinq pièces
dans l'immeuble précité, que dame V.________ occupe déjà à titre de
future
propriétaire. Le Département genevois de l'aménagement, de
l'équipement et du
logement (ci-après: DAEL) a autorisé la vente, le 12 octobre 2000,
mais la
section genevoise de l'ASLOCA a formé un recours auprès de la
commission de
recours en matière de constructions au motif qu'une vente
individualisée ne
serait pas possible. Dame V.________ est intervenue dans cette
procédure,
actuellement pendante. B.________ expose pour sa part qu'il était
créancier
de la société en nom collectif X.________ à raison de deux cédules
hypothécaires de 50'000 fr. chacune grevant un appartement constitué
en
propriété par étages à Genève. Une poursuite en réalisation de gage
immobilier a été intentée le 6 octobre 1998 et la réquisition de
vente a été
formée le 16 août 1999. X.________ étant tombée en faillite, le
recourant a
produit sa créance le 17 juillet 2000. Il est par ailleurs intervenu
dans la
procédure opposant la masse et dame V.________ à l'ASLOCA. Par la
suite,
B.________ a fait savoir qu'il avait produit dans la faillite de
X.________,
en tant que créancier gagiste.
Les recourants sont tous parties à une procédure relative à la vente
individualisée d'une part de PPE. Or, selon l'art. 2 de la loi n°
8188, les
dispositions de cette dernière s'appliquent non seulement aux demandes
d'autorisation présentées après son entrée en vigueur, mais aussi aux
procédures pendantes devant la commission ou le Tribunal
administratif. Ces
nouvelles dispositions ne font que concrétiser, comme le relève le
Grand
Conseil, une pratique - contestée - dans le canton de Genève qui
consiste à
soumettre à la LDTR la vente d'appartements dans le cadre d'une
réalisation
forcée. Par ailleurs, la masse en faillite, qui détient de nombreuses
parts
de PPE, pourrait à l'avenir voir appliquer les nouvelles dispositions
à la
vente de l'une d'entre elles. Il y a donc lieu d'admettre la qualité
pour
agir des trois recourants.

2.
Les recours sont dirigés tant contre la modification de la LDTR que
contre
celle de la LALP. L'arrêté de promulgation initial du Conseil d'Etat
est
toutefois limité à la première loi, l'approbation de la Confédération
étant
réservée à l'égard de la seconde. Interpellé à ce sujet, l'OFJ a
indiqué que
l'approbation a été accordée le 27 mars 2002, "sous la réserve que
cette
modification législative puisse faire l'objet d'une interprétation
conforme
au droit fédéral", et en partant du point de vue qu'un recours au
Tribunal
fédéral était encore possible contre la loi.

2.1 Selon l'art. 29 LP, la validité des lois et règlements édictés
par les
cantons en exécution de la loi est subordonnée à l'approbation de la
Confédération. Les compétences d'exécution des cantons sont énumérées
aux
art. 25 à 27 LP. Il s'agit de l'adoption des dispositions sur
l'organisation
(art. 1-3, 13, 23-24 LP), de certaines règles de procédure (art. 5
al. 3, 25
LP), des effets de droit public de la saisie infructueuse et de
l'ouverture
de la faillite (art. 26 LP), et de la représentation (art. 27 LP). A
cet
égard, l'approbation fédérale revêt un effet constitutif (ATF 124 III
428
consid. 3a p. 431-432).

2.2 Il n'est pas évident que l'art. 37 LALP
constitue véritablement
une
disposition prise en exécution de la LP. Comme le relève le Grand
Conseil, il
s'agit d'un simple rappel de la réglementation adoptée dans la LDTR,
sans
qu'il y ait exercice par le canton de l'une des compétences
d'exécution
énumérées ci-dessus. L'acte normatif en cause n'apparaît pas comme
"nécessaire à l'exécution du droit fédéral". La question peut demeurer
indécise à ce stade, car l'approbation donnée par la Confédération
n'empêche
pas le Tribunal fédéral de contrôler la constitutionnalité de la loi
en
cause. Même si cela ne ressort pas du texte actuel de l'art. 29 LP,
l'approbation est du ressort du Conseil fédéral, et ne figure pas -
contrairement aux constitutions cantonales - dans un acte soustrait à
la
juridiction constitutionnelle. L'approbation fédérale ne lie donc ni
les
autorités cantonales ni le Tribunal fédéral, que ce soit à l'occasion
d'un
contrôle concret ou abstrait (ATF 121 I 187 consid. 2 p. 190 et les
arrêts
cités, 104 Ia 480 consid. 3b p. 484, 103 Ia 130).

3.
Outre les art. 39 al. 6 LDTR et 37 LALP, B.________ critique l'art.
39 al. 4
LDTR en tant que cette disposition pourrait s'appliquer aux
procédures régies
par la LP. En cela, son grief ne diffère pas de ceux qui se
rapportent aux
deux autres dispositions attaquées. Il ressort d'ailleurs clairement
des
titres relatifs à chacun des alinéas de l'art. 39 LDTR que seul
l'alinéa 6
est applicable aux ventes forcées. Comme l'explique le Grand Conseil,
le
paragraphe ajouté à l'art. 39 al. 4 LDTR ne fait qu'expliciter la
pratique
actuelle permettant les ventes en bloc pour des motifs
d'assainissement
financier. Le grief d'imprécision que le recourant élève à l'encontre
de
cette disposition apparaît donc mal fondé, pour autant d'ailleurs
qu'il
satisfasse aux exigences de motivation (art. 90 al. 1 let. b OJ).

4.
4.1
Les recourants s'en prennent à l'art. 39 al. 6 LDTR. Selon eux,
l'obligation
de requérir l'autorisation du DAEL, respectivement l'obligation de
vendre en
bloc prévue par cette disposition violerait le droit fédéral,
notamment les
art. 107 et 108 de l'ordonnance du Tribunal fédéral sur la
réalisation forcée
des immeubles (ORFI, RS 281.42: obligation de réaliser les actifs de
la
manière la plus avantageuse; double mise à prix, d'abord séparément
puis en
bloc, et adjudication en fonction de l'offre la plus avantageuse;
limitation
des ventes à ce qui est nécessaire au désintéressement; pouvoir de
décision
au seul office des poursuites); la condition d'une revente sous la
même forme
serait elle aussi contraire au droit fédéral; les compétences
exclusives de
l'office des poursuites (art. 134 al. 1 LP) seraient violées, ainsi
que
l'art. 656 CC qui attribue un effet déclaratif à l'inscription au
registre
foncier. Les recourants se fondent sur un avis de droit du Professeur
Tanquerel, sur mandat du DAEL.

A l'encontre de l'art. 37 LALP, les recourants font valoir des motifs
identiques, en insistant sur le caractère exhaustif du droit fédéral
dans ce
domaine. Les recourants prennent l'exemple des art. 19 de la loi
fédérale sur
l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger (LFAIE, RS
211.412.41), et 67 de la loi fédérale sur le droit foncier rural
(LDFR, RS
211.412.11), qui prévoient que l'autorisation idoine doit être
requise après
l'adjudication. En prévoyant que les décisions des offices pourraient
faire
l'objet des recours prévus dans la LDTR, l'art. 37 al. 4 LALP
violerait en
outre l'art. 17 LP qui instaure la voie de la plainte.

4.2 Le Grand Conseil rappelle pour sa part la portée de l'arrêt rendu
par le
Tribunal fédéral le 1er avril 1987 dans la cause Armengol et consorts
(ATF
113 Ia 126) concernant l'ancien art. 9A LDTR. Dans la perspective de
lutter
contre la pénurie de logements locatifs, il n'était pas contraire au
droit
fédéral, en particulier à la garantie de la propriété, de soumettre à
autorisation l'aliénation d'appartements, qu'il s'agisse de ventes de
lots de
PPE ou de donations. Selon cet arrêt (consid. 7b/aa p. 134-135), "il
en va de
même en cas d'aliénation forcée, d'avancement d'hoirie, de partage ou
de
liquidation d'un régime matrimonial, pour autant que ces aliénations
aient
pour conséquence la transformation d'un appartement offert en
location en
logement soumis au régime de la propriété par étages". Justifiée par
un
intérêt public important, la disposition ne permettait toutefois pas,
selon
cet arrêt, une pesée suffisante des intérêts en présence, les motifs
de refus
de l'autorisation étant définis de manière trop rigide.

Le Grand Conseil estime que les modifications apportées à l'art. 39
LDTR ne
changent pas les conditions de fond posées à l'octroi de
l'autorisation
d'aliéner. L'art. 39 al. 6 LDTR ne ferait que poser certains critères
pour
décider de la vente individualisée ou en bloc. Dans un arrêt du 19
avril 1999
dans la cause UBS SA, le Tribunal fédéral avait admis que la vente en
bloc
puisse être imposée par l'autorité, compte tenu de l'intérêt public
évident
au maintien du parc locatif à Genève. L'art. 39 al. 6 LDTR
n'imposerait pas
forcément la vente en bloc puisque cette disposition réserve, in fine,
l'octroi d'une autorisation individualisée. Une pesée des intérêts
devrait
avoir lieu dans chaque cas, prenant en compte l'intérêt public évoqué
ci-dessus et l'intérêt privé, en distinguant selon que la vente
résulte d'une
faillite, d'une saisie ou d'une poursuite en réalisation de gage.
C'est ce
dernier cas, de loin le plus fréquent à Genève, qui serait
essentiellement
visé par la loi: le créancier-gagiste serait en général un
établissement
bancaire qui a consenti un prêt d'un montant excessif par rapport à
la valeur
du bien, et disposerait d'un gage collectif visant l'immeuble dans sa
totalité. Dans ce cas, le créancier comme le débiteur auraient
spéculé sur
une vente à terme, et ne disposeraient pas d'un intérêt à une revente
en
bloc, le produit de la vente ne couvrant de toute façon pas l'entier
de la
dette. L'intérêt purement financier ne devrait pas être protégé dans
de tels
cas. Il y aurait aussi un risque que l'art. 39 LDTR puisse être
contourné par
le biais de ventes forcées. Quant à l'art. 37 LALP, il ne
constituerait qu'un
rappel de l'art. 39 LDTR à l'intention des offices des poursuites et
faillites, qui auraient jusque-là refusé d'appliquer la LDTR. Le Grand
Conseil se fonde sur un avis de droit du Professeur Berenstein, pour
qui ces
dispositions seraient de celles qui sont visées à l'art. 22 al. 1 LP,
lequel
réserve les normes cantonales dérogatoires fondées sur un intérêt
public
pertinent et majeur, à l'instar de la LDFR et de la LFAIE.

4.3 Selon le principe de la force dérogatoire du droit fédéral, posé
à l'art.
49 Cst. (en remplacement de la règle déduite de l'art. 2 Disp. trans.
aCst.),
le droit fédéral prime le droit cantonal qui lui est contraire. Cela
signifie
que les cantons ne sont pas autorisés à légiférer dans les domaines
exhaustivement réglementés par le droit fédéral (ATF 128 I 46 consid.
5a p.
54, 127 I 60 consid. 4a p. 68 et les arrêts cités; Häfelin/Haller,
Schweizerisches Bundesstaatsrecht, Die neue Bundesverfassung, Zurich
2001, n.
1185 à 1187, p. 335/336). Dans les autres domaines, les cantons ne
peuvent
édicter de règles de droit qui éludent des prescriptions de droit
fédéral ou
qui en contredisent le sens ou l'esprit (ATF 128 I 46 précité, 125 II
56
consid. 2b p. 58, 315 consid. 2a p. 316; 124 I 107 consid. 2a p. 109;
123 I
313 consid. 2b p. 316), notamment par leur but ou par les moyens
qu'elles
mettent en oeuvre, ou qui empiètent sur des matières que le
législateur
fédéral a réglementées de façon exhaustive (ATF 112 Ia 401 consid.
4a; voir
aussi ATF 122 I 139 consid. 4a p. 145; 116 Ia 272 consid. 4a, 279
consid. b).

4.4 Saisi d'un recours impliquant le contrôle abstrait des normes
fondé sur
le principe de la force dérogatoire du droit fédéral, le Tribunal
fédéral
examine librement la conformité de la règle de droit cantonal avec le
droit
fédéral. Il n'annule cependant une disposition cantonale que si elle
ne se
prête à aucune application ou interprétation conforme à la
Constitution (ATF
125 II 440 consid. 1d p. 443; 123 I 313 consid. 2b p. 317; 122 I 343
consid.
3a p. 345 et les références citées).

4.5 Contrairement à ce que soutient le Grand Conseil, le Tribunal
fédéral ne
s'est pas encore penché sur la pratique consistant à soumettre à
l'autorisation préalable du DAEL la vente d'appartements dans le
cadre de
l'exécution forcée. L'arrêt Armengol précité mentionne certes que
toute vente
peut en principe être soumise à un régime d'autorisation, y compris
en cas
d'aliénation forcée. Il s'agit toutefois là d'un cas typique d'obiter
dictum,
car l'examen du Tribunal fédéral était alors strictement limité à la
question
du respect de la garantie de la propriété, comme en atteste le titre
du
considérant 6 de l'arrêt, ainsi que le texte même du considérant
7b/aa (p.
134) invoqué. Le respect de la force dérogatoire fait l'objet du
considérant
9 de cet arrêt, et la question de l'exécution forcée ne se posait
alors pas.
Dans l'arrêt UBS du 19 avril 1999 (consid. 2d), le Tribunal fédéral
s'est
volontairement abstenu d'examiner cette question, s'agissant d'une
revente
subséquente. On ne saurait, comme le fait le Grand Conseil, en
déduire que la
restriction imposée à ce stade aurait pu l'être a fortiori au moment
de la
vente aux enchères.

5.
La législation sur la poursuite pour dettes et la faillite est de la
compétence de la Confédération (art. 122 al. 1 Cst., art. 64 aCst.),
puisque,
du point de vue des compétences, ce domaine est rattaché au droit
civil
fédéral (ATF 115 III 1 consid. 4 p. 4; message relatif à la nouvelle
constitution fédérale, FF 1997 I p. 345). Pour le surplus, même s'il
tend à
la réalisation du droit matériel (Amonn, Grundriss des
Schuldbetreibungs- und
Konkursrechts, Berne 1993 p. 19), le droit de poursuite se rapporte à
la
phase finale d'une procédure civile et, comme celle-ci, tend à régler
l'intervention de l'Etat dans les rapports entre créanciers et
débiteurs. Il
s'agit, matériellement, d'une discipline autonome du droit public (cf.
Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour
dettes et la
faillite, Lausanne 1999 n° 6 ad art. 1-37; Marti, Commentaire
zurichois,
remarques préalables ad art. 5-6 CC, n. 160; ATF 118 Ia 118 consid.
1b p.
122, faisant une exception pour la procédure d'exequatur; message du
8 mai
1991 concernant la révision de la LP, FF 1991 III p. 5), de sorte que
les
dispositions contestées ne sont pas de celles qui sont réservées à
l'art. 6
CC. Cela n'est toutefois pas déterminant, l'essentiel étant que la
Confédération dispose dans ce domaine d'une compétence exclusive (ATF
108 II
180 consid. 2a p. 182 et les arrêts cités; message précité, FF 1991
III p.
50), les attributions d'exécution des cantons étant limitées aux
dispositions
d'organisation et de procédure mentionnées ci-dessus.

5.1 La vente forcée d'immeubles peut avoir lieu après une poursuite
par voie
de saisie, après une poursuite en réalisation de gage, ensuite d'une
faillite
ou dans le cadre d'un concordat. Dans le premier cas, les immeubles
sont
saisis lorsque les meubles ne suffisent pas à couvrir le montant de la
créance (art. 95 al. 2 LP). La réalisation a lieu dans les délais
prévus aux
art. 116 al. 1 et 133 al. 1 LP. L'office arrête les conditions des
enchères
d'après l'usage des lieux et de la manière la plus avantageuse (art.
134 LP).
Les conditions de vente peuvent être attaquées par la voie de la
plainte et
du recours aux autorités de surveillance, notamment au motif qu'elles
ne
permettraient pas d'escompter le résultat le plus avantageux
(Gilliéron, op.
cit., n° 15 ad art. 134 LP). Fondée sur l'art. 15 LP, l'ORFI précise
notamment les actes préparatoires (art. 25 à 32), les conditions de
vente
(art. 45 à 52) et les enchères et l'adjudication (art. 53 à 72). Les
conditions de vente doivent notamment préciser, lorsque la vente
porte sur
plusieurs immeubles, si ceux-ci sont mis en vente en bloc, par lots
ou par
parcelle (art. 45 al. 1 let. b ORFI). Dans la poursuite en
réalisation de
gage, la réalisation, dans le délai prévu à l'art. 145 LP, est
soumise aux
mêmes principes (art. 156 al. 1 LP). Les art. 106a à 108 ORFI portent
sur la
réalisation des immeubles en copropriété, et sur les droits de gages
portant
sur plusieurs immeubles. Dans le cas d'une faillite, l'immeuble tombe
dans la
masse et est réalisé par l'administration aux enchères publiques ou
de gré à
gré si les créanciers le jugent préférable (art. 256 al. 1 LP). Les
art. 134
à 137 LP sont notamment applicables par analogie aux enchères (art.
259 LP).

5.2 Ce simple rappel suffit à démontrer que l'art. 39 al. 6 LDTR, et
l'insertion d'une clause correspondante dans la LALP, posent
d'insurmontables
problèmes de compatibilité avec le droit fédéral. Si la modification
législative ne change rien aux conditions de fond de l'art. 39 LDTR,
elle les
étend aux procédures de réalisation forcée portant sur des parts de
PPE et
heurtent plusieurs principes essentiels prévalant dans ce domaine.

5.2.1 De manière générale, l'exigence d'une autorisation préalable du
DAEL
vient s'ajouter aux conditions fixées aux art. 134ss LP. Or, l'art.
135 LP
énumère les diverses conditions des enchères, précisées
de manière
très
détaillée aux art. 45 à 52 ORFI. Il n'y a pas, dans ce contexte, de
place
pour des conditions supplémentaires posées par le droit public
cantonal, tel
l'octroi d'une autorisation fondée sur la LDTR. Telle qu'elle est
prévue par
le droit cantonal, l'exigence d'une autorisation préalable institue
une
procédure incidente - comprenant également, le cas échéant, la voie de
recours prévue par la LDTR - dans le cadre de la réalisation forcée,
qui
n'est pas prévue par le droit fédéral; elle impose en outre
l'intervention
d'une autorité tierce (le DAEL), alors que toutes les mesures
d'exécution
doivent être prises par le seul office.

5.2.2 La réalisation répond à une exigence principale, à savoir
l'obtention
des conditions les plus avantageuses (art. 134 LP). L'office dispose
certes,
dans ce cadre, d'une certaine marge d'appréciation, mais celle-ci a
uniquement pour but la recherche de la solution économiquement la plus
avantageuse, permettant de retirer de la vente un prix le plus élevé
possible, dans l'intérêt des créanciers et débiteurs (ATF 126 III 33
consid.
2 p. 34). En dehors des exceptions - de droit fédéral - mentionnées
ci-dessous, l'office ne peut pas renoncer à la vente pour des motifs
étrangers au droit de poursuite. En cela, la condition d'une
autorisation
préalable accordée par le DAEL viole le droit fédéral. Une telle
procédure
pourrait retarder de manière inadmissible la réalisation forcée. Par
ailleurs, l'éventuel refus de l'autorisation mettrait en échec la
procédure
de réalisation voire, dans le cas de la faillite, paralyserait
indéfiniment
la clôture de la procédure.

Le Grand Conseil expose que la modification législative vise en
particulier
les poursuites en réalisation de gage faisant suite à des opérations
spéculatives, fréquentes à Genève. Il n'y a pas lieu de rechercher si
une
telle justification est acceptable, car la loi ne fait aucune
distinction
selon le mode de poursuite, et encore moins selon l'existence de
motifs
spéculatifs.

5.2.3 L'élément central de l'art. 39 al. 6 LDTR, soit l'obligation de
vendre
en bloc lorsque la vente porte sur plusieurs appartements en PPE, est
lui
aussi incompatible avec le droit fédéral. Selon le Grand Conseil, le
principe
de la vente en bloc ne serait pas absolu, dès lors qu'une autorisation
individualisée pourrait être obtenue aux conditions de l'art. 39 al.
4 LDTR.
Il conviendrait de distinguer, selon le Grand Conseil, les trois
causes de
ventes forcées: la faillite, la saisie ou la poursuite en réalisation
de
gage. La loi viserait essentiellement ce dernier cas, de loin le plus
fréquent à Genève, où le créancier-gagiste est un établissement
bancaire qui
a consenti un prêt d'un montant exagéré, spéculant sur une vente à
terme; le
produit de la vente ne couvrirait de toute façon pas l'entier de la
dette, de
sorte que la possibilité de limiter la vente à certains appartements
serait
purement théorique. L'intérêt financier ne devrait pas être protégé
dans de
tels cas. Il y aurait aussi un risque que l'art. 39 LDTR puisse être
contourné par le biais de telles ventes forcées.

5.2.4 Dans ses arrêts précédents (ATF 113 Ia 128 consid. 7a p.
133-134, 111
Ia 23 consid. 3a p. 26 et les arrêts cités), le Tribunal fédéral a
déjà
affirmé que la réglementation de la LDTR correspond à un intérêt
public
évident, et que celui-ci peut l'emporter sur l'intérêt de
l'aliénateur à
retirer de la vente le meilleur bénéfice (arrêt UBS précité, consid.
2f,
arrêt du 26 mars 1991 dans la cause SI F.). L'ensemble de cette
jurisprudence
se rapporte toutefois aux ventes ordinaires, pour lesquelles l'intérêt
purement économique de l'aliénateur peut céder le pas devant
l'intérêt public
lié à la conservation du parc immobilier locatif. Il en va autrement
en
matière d'exécution forcée, car la recherche des conditions les plus
favorables ne procède plus d'un simple intérêt privé, mais constitue
une
exigence imposée par le droit fédéral, dans l'intérêt non seulement du
créancier, mais aussi du débiteur, qu'il y a lieu de protéger en
évitant de
vendre plus d'immeubles qu'il n'est nécessaire pour satisfaire le
créancier
poursuivant en capital, intérêts et frais, tout en protégeant au
mieux les
intérêts du créancier poursuivant et d'éventuels autres créanciers de
rang
postérieurs (ATF 126 III 33 consid. 2 p. 34 concernant la poursuite en
réalisation de gage). L'interdiction de vendre plus d'immeubles que
nécessaire pour satisfaire le créancier poursuivant fait ainsi
obstacle à une
vente en bloc de tous les immeubles remis en gage, lorsque la créance
peut
être satisfaite par la vente de quelques immeubles seulement.
Lorsque la loi ne prévoit pas un mode de réalisation déterminé (cf.
par
exemple l'art. 106a ORFI qui impose la vente de l'immeuble entier)
l'office
doit choisir, entre la vente en bloc et la vente individualisée,
laquelle
apparaît la plus avantageuse, ce à quoi s'oppose par principe l'art.
39 al. 6
LDTR. Par ailleurs, la condition de revendre sous la même forme -
soit en
bloc -, outre qu'elle peut également avoir des répercussions sur la
valeur de
l'immeuble et entraver ainsi une réalisation aux meilleures conditions
possibles, n'apparaît pas comme une condition admissible au regard de
la LP.

5.2.5 Le Grand Conseil invoque également l'art. 22 al. 1 LP, dont la
teneur
est la suivante: "Sont nulles les mesures contraires à des
dispositions
édictées dans l'intérêt public ou dans l'intérêt de personnes qui ne
sont pas
parties à la procédure. Les autorités de surveillance constatent la
nullité
indépendamment de toute plainte". L'autorité intimée soutient que le
législateur fédéral aurait ainsi entendu réserver une possibilité
dérogatoire
fondée sur un intérêt public cantonal important, tel l'intérêt au
maintien de
logements bon marché et la lutte contre la pénurie de logements.

Cette opinion n'est pas défendable: l'art. 22 LP ne fonde en rien une
compétence des cantons pour déroger à la LP pour des motifs d'intérêt
public.
Cette disposition, comme l'indique son titre, régit la procédure de
plainte
et permet une intervention d'office de l'autorité de surveillance;
elle ne
fait que préciser, en s'inspirant de la jurisprudence du Tribunal
fédéral,
les causes et les conséquences de la nullité de différents actes de
poursuite. Les "dispositions" visées à l'art. 22 al. 1 LP n'ont pas le
caractère général que leur prête le Grand Conseil: il s'agit
essentiellement
des règles impératives du droit de poursuite que doivent respecter les
organes d'exécution forcée (FF 1991 III p. 45-46; voir les nombreux
exemples
cités par Gilliéron, op. cit. n° 11ss ad art. 22 LP). Il ne s'agit
dès lors
nullement d'une attribution de compétence en faveur des cantons.
Celles-ci,
dont la portée restreinte est rappelée ci-dessus, est définie aux
articles 23
et suivants de la LP.

5.2.6 On ne saurait non plus tenir l'art. 39 al. 6 LDTR pour une
simple
charge de droit cantonal dont le droit d'exécution forcée aurait à
tenir
compte (cf. art. 702 CC). Il ne s'agit pas en effet de restrictions
de droit
public à la propriété foncière et grevant directement celle-ci, mais
de
règles adressées directement aux offices de poursuite, sur la manière
dont
doivent être menées les aliénations forcées, et qui ne prennent effet
que
dans le cadre de la poursuite.

5.2.7 Le Grand Conseil relève enfin que la LFAIE et la LDFR instaurent
également un régime d'autorisation qui s'étend aux procédures de
réalisation
forcée. L'art. 19 LFAIE oblige l'adjudicataire à requérir
l'autorisation
d'acquisition après les enchères. L'art. 67 LDFR oblige également
l'adjudicataire à obtenir - préalablement ou non - l'autorisation
visée à
l'art. 61 de la loi (cf. ATF 123 III 406). Ces exemples vont
toutefois à
l'encontre de la démonstration de l'autorité intimée: les lois en
cause
émanent du législateur fédéral et ne posent dès lors aucun problème
de force
dérogatoire. Au demeurant, elles ont certes pour effet d'empêcher
l'acquisition, lors de réalisation forcée, par certaines personnes ou
à
certaines conditions, mais n'ont pas l'effet général que pourrait
avoir un
refus d'aliéner fondé sur la LDTR: en cas de refus d'autorisation, des
nouvelles enchères ont lieu, l'adjudicataire précédent étant
responsable
d'une éventuelle moins-value.

5.3 Si l'art. 39 al. 6 LDTR doit être déclaré contraire au droit
fédéral, il
en va évidemment de même de l'art. 37 LALP, qui ne constitue qu'un
simple
rappel de la disposition correspondante de la LDTR. L'art. 37 al. 4
LALP,
selon lequel les décisions de l'office prises en vertu de cette
disposition
peuvent faire l'objet des recours prévus par la LDTR, contredit
également
l'agencement des voies de droit prévu dans la LP, en particulier la
voie de
la plainte auprès de l'autorité de surveillance (art. 17 LP). Elle
doit être
annulée à ce titre également.

5.4 En définitive, les art. 39 al. 6 LDTR et 37 LALP, s'ils
poursuivent un
but d'intérêt public évident, compromettent la réalisation des
objectifs
essentiels de la LP, à savoir le désintéressement des créanciers
poursuivants, pour des motifs étrangers à la loi fédérale. N'étant pas
susceptibles d'une interprétation conforme à cette dernière, ils
doivent être
annulés dans leur totalité. Les recours doivent par conséquent être
admis. Il
n'est pas perçu d'émolument judiciaire, mais l'Etat de Genève versera
à
chacun des recourants une indemnité de dépens de 3000 fr.

Par ces motifs, vu l'art. 15 al. 3 OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Les recours de droit public sont admis et les art. 39 al. 6 LDTR et
37 LALP,
tels qu'adoptés dans la loi du 6 avril 2001 par le Grand Conseil du
canton de
Genève, sont annulés.

2.
Une indemnité de dépens de 3000 fr. est allouée à chacun des
recourants, à la
charge du canton de Genève.

3.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des
recourants et au
Grand Conseil du canton de Genève ainsi qu'à l'Office fédéral de la
justice.

Lausanne, le 19 juin 2002

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.270/2002
Date de la décision : 19/06/2002
1re cour de droit public

Analyses

Art. 49 Cst.; lois genevoises sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (LDTR), et d'application de la LP (LALP); réalisation forcée d'appartements en propriété par étages; obligation de vendre en bloc; autorisation d'aliéner. Art. 134 ss LP, art. 45 ss ORFI. L'obligation, faite à l'office des poursuites et faillites, de vendre en bloc les appartements et de requérir une autorisation préalable, est contraire au droit fédéral, en particulier à l'art. 134 LP (consid. 5).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-06-19;1p.270.2002 ?
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