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09/04/2002 | SUISSE | N°1A.63/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 09 avril 2002, 1A.63/2002


{T 0/2}
1A.63/2002/COL

Arrêt du 9 avril 2002
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Féraud, Catenazzi,
greffier Zimmermann.

A. ________,
recourant, représenté par Me Stéphane Cappi, avocat, rue des
Petits-Epineys
2, 1920 Martigny,

contre

Office fédéral de la justice, Division des affaires internationales,
Section
extraditions, Bundesrain 20,
3003 Berne.

extradition au Luxembourg>
(recours de droit administratif contre la décision de l'Office
fédéral de la
justice du 8 janvier 2002)

Faits:

A.
...

{T 0/2}
1A.63/2002/COL

Arrêt du 9 avril 2002
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Féraud, Catenazzi,
greffier Zimmermann.

A. ________,
recourant, représenté par Me Stéphane Cappi, avocat, rue des
Petits-Epineys
2, 1920 Martigny,

contre

Office fédéral de la justice, Division des affaires internationales,
Section
extraditions, Bundesrain 20,
3003 Berne.

extradition au Luxembourg

(recours de droit administratif contre la décision de l'Office
fédéral de la
justice du 8 janvier 2002)

Faits:

A.
Le 30 octobre 2001, Monique Stirn, Juge d'instruction auprès du
Tribunal
d'arrondissement de Luxembourg, a adressé à l'Office fédéral de la
justice
(ci-après: l'Office fédéral) deux demandes d'entraide judiciaire
fondées sur
la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale,
conclue le
20 avril 1959 à Strasbourg et entrée en vigueur le 20 mars 1967 pour
la
Suisse et le 16 février 1977 pour le Grand-Duché du Luxembourg (CEEJ;
RS
0.351.1). Ces demandes étaient présentées pour les besoins de la
procédure
ouverte contre des inconnus pour prise d'otage, vol avec violences et
menaces
d'armes montrées ou employées, extorsion, tentative d'extorsion et
infraction
à la loi luxembourgeoise sur les armes et les munitions. Selon
l'exposé des
faits joint aux demandes, trois personnes se sont présentées, le 17
octobre
2001, dans les locaux de la société X.________ à Luxembourg. Après
avoir
immobilisé trois employés de la société sous la menace de leurs
armes, les
assaillants ont emporté avec eux des documents concernant divers
clients de
la société. Ils ont, dans les jours suivants, réclamé une rançon de
1'000'000
d'euros en échange des documents volés, montant à faire virer sur un
compte
ouvert auprès de l'UBS à Martigny. L'enquête avait permis
d'identifier l'un
des auteurs présumés comme étant le ressortissant français
A.________, qui
avait également eu des contacts téléphoniques avec la banque Dexia à
Genève.
Les demandes tendaient notamment à la saisie du compte n° xxx ouvert
auprès
de l'UBS et à l'identification de comptes qui auraient été ouverts
auprès de
la banque Dexia.

Le 16 novembre 2001, l'Office fédéral a délégué l'exécution des
demandes au
canton de Genève comme canton directeur.

B.
Le 16 novembre 2001, Jean-Jacques Dolar, Procureur d'Etat auprès du
Parquet
du Tribunal d'arrondissement de Luxembourg, a transmis directement au
Juge
d'instruction pénale du Bas-Valais, sous la forme d'une télécopie, une
demande d'arrestation en vue d'extradition visant A.________. Sa
demande se
rapportait au même complexe de fait que celui visé dans les demandes
d'entraide du 30 octobre 2001. Le 16 novembre 2001, le Juge Stirn a
adressé
directement au Juge d'instruction du Bas-Valais, sous la forme d'une
télécopie, un mandat d'arrêt en vue d'extradition décerné contre
A.________.
Le 19 novembre 2001, le Juge d'instruction du Bas-Valais a transmis
ces
demandes à l'Office fédéral, en indiquant que A.________ devait se
présenter
le lendemain à l'UBS de Martigny. Le 19 novembre 2001, l'Office
fédéral a
invité les autorités luxembourgeoises à lui faire parvenir dans les
plus
brefs délais une demande d'arrestation en vue d'extradition par le
truchement
d'Interpol. Le 20 novembre 2001 à 7h, le bureau d'Interpol à
Luxembourg a
transmis à l'Office fédéral une copie du mandat d'arrêt du 16
novembre 2001,
ainsi qu'une prise de position du Procureur Dolar, datée du 20
novembre 2001,
indiquant notamment que des écoutes téléphoniques ordonnées dans le
cadre de
la procédure conduite par le Juge Stirn avaient révélé que le compte
n° xxx
sur lequel devait être viré le montant de la rançon réclamée avait
été ouvert
auprès de l'UBS à Martigny. Le 20 novembre 2001 à 8h30, le bureau
d'Interpol
à Luxembourg a demandé l'arrestation de A.________ en vue
d'extradition, en
confirmant qu'une demande formelle suivrait par la voie diplomatique.
Le 20
novembre 2001 à 8h45, les autorités luxembourgeoises ont informé
l'Office
fédéral que les développements de l'enquête avaient confirmé que
A.________
était arrivé à Genève la veille (soit le 19 novembre 2001), pour se
rendre à
l'UBS de Martigny où il devait être reçu le lendemain (soit le 20
novembre
2001) à 10h.

La police cantonale valaisanne a arrêté A.________ le 20 novembre
2001 à
Martigny. Entendu par le Juge d'instruction, A.________ a, dans un
premier
temps, consenti à une remise sans formalité au sens de l'art. 54 de
la loi
fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, du 20 mars
1981
(EIMP; RS 351.1).

Le 21 novembre 2001, l'Office fédéral a ordonné l'extradition sans
formalité
de A.________. Le même jour, Me Stéphane Cappi, avocat à Martigny, est
intervenu auprès de l'Office fédéral pour lui indiquer défendre
A.________,
lequel s'opposerait désormais à son extradition. L'Office fédéral a
renoncé à
la remise sans formalité de A.________ et ouvert la procédure
d'extradition.

Le 21 novembre 2001, le Ministère de la justice du Luxembourg a
transmis à
l'Office fédéral une demande formelle d'extradition, fondée sur la
Convention
européenne d'extradition, conclue à Paris le 13 décembre 1957, entrée
en
vigueur le 20 mars 1967 pour la Suisse et le 16 février 1977 pour le
Luxembourg (CEExtr.; RS 0.353.1). A cette demande étaient joints un
résumé
des faits établi le 20 novembre 2001 par le Procureur Dolar; le mandat
d'arrêt international du 16 novembre 2001; la prise de position du
Parquet du
16 novembre 2001; une copie des dispositions pénales luxembourgeoises
applicables.

Entendu le 30 novembre 2001 par le Juge d'instruction du Bas-Valais,
A.________ s'est opposé à son extradition.

Le 6 décembre 2001, le Juge d'instruction du Bas-Valais a communiqué à
l'Office fédéral un rapport et trois procès-verbaux d'audition
établis dans
le cadre de l'exécution des demandes d'entraide du 30 octobre 2001.

Le 14 décembre 2001, A.________ s'est opposé à son extradition, en
faisant
valoir, en bref, qu'il n'avait pas commis les délits mis à sa charge;
que les
faits auraient été commis en Suisse et que les autorités
luxembourgeoises
l'auraient attiré en Suisse pour obtenir son extradition, en
violation des
règles de l'éthique et de « l'esprit des conventions internationales
».
L'Office fédéral a invité le Juge d'instruction à se déterminer sur ce
dernier grief. Le 21 décembre 2001, le Juge d'instruction a indiqué
n'avoir
constaté aucune irrégularité dans la procédure; il s'est référé pour
le
surplus à une décision rendue le 7 décembre 2001 dans le cadre de la
procédure d'entraide. Le 7 janvier 2002, A.________ s'est déterminé;
il a
estimé que les pièces produites par le Juge d'instruction
confirmeraient sa
thèse d'une collusion entre les autorités suisses et luxembourgeoises.

Par note diplomatique n° 775/02 du 17 janvier 2002, l'Ambassade du
Luxembourg
à Berne a remis au Département fédéral des affaires étrangères une
nouvelle
demande formelle d'extradition.

Le 8 février 2002, l'Office fédéral a accordé l'extradition de
A.________ au
Luxembourg, pour les faits évoqués dans la demande du 21 novembre
2001, ainsi
que la remise des documents séquestrés lors de l'arrestation.

C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, A.________
demande
principalement au Tribunal fédéral de rejeter la demande
d'extradition et
d'ordonner sa libération immédiate; à titre subsidiaire, il requiert
que deux
documents remis aux autorités de l'Etat requérant le soient avec la
précision
qu'ils n'ont pas été saisis lors de son arrestation. Il invoque le
principe
de la bonne foi.

L'Office fédéral propose le rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 La Confédération suisse et le Grand Duché du Luxembourg sont tous
deux
parties à la CEExtr. et au Premier Protocole additionnel à celle-ci,
entré en
vigueur le 9 juin 1985 pour la Suisse et le 11 décembre 2001 pour le
Luxembourg (RS 0.353.11). Les dispositions de ces instruments
internationaux
l'emportent sur le droit autonome qui régit la matière, soit l'EIMP
et son
ordonnance d'exécution (OEIMP; RS 351.11). Celles-ci restent cependant
applicables aux questions non réglées, explicitement ou
implicitement, par le
droit conventionnel, et lorsque le droit interne est plus favorable à
l'entraide que la Convention (ATF 123 II 134 consid. 1a p. 136; 122
II 140
consid. 2 p. 142; 120 Ib 120 consid. 1a p. 122/123, 189 consid. 2a p.
191/192; 118 Ib 269 consid. 1a p. 271, et les arrêts cités). Est
réservé le
respect des droits fondamentaux (ATF 123 II 595 consid. 7c p. 617).

1.2 La décision de l'Office fédéral accordant l'extradition peut faire
l'objet d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral en
vertu de
l'art. 55 al. 3 EIMP mis en relation avec l'art. 25 de la même loi
(ATF 122
II 373 consid. 1b p. 375). Le recourant qui peut manifestement se
prévaloir
d'un intérêt digne de protection à obtenir l'annulation ou la
modification de
la décision attaquée a qualité pour agir au sens de l'art. 21 al. 3
EIMP (ATF
122 II 373 consid. 1b p. 375; 118 Ib 269 consid. 2d p. 275 et les
arrêts
cités).

1.3 Les conclusions qui vont au-delà de l'annulation de la décision
sont
recevables (art. 25 al. 6 EIMP; art. 114 OJ; ATF 122 II 373 consid.
1c p.
375; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275; 117 Ib 51 consid. 1b p. 56, et les
arrêts
cités). Le recourant peut ainsi demander, à l'appui du recours de
droit
administratif, son élargissement immédiat (ATF 117 IV 209 consid. 1e
p. 213,
359 consid. 1a p. 360/361). Le Tribunal fédéral examine librement si
les
conditions pour accorder l'extradition sont remplies et dans quelle
mesure la
coopération internationale doit être prêtée (ATF 123 II 134 consid.
1d p.
136/137; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275). Il statue avec une cognition
libre
sur les griefs soulevés sans être toutefois tenu, comme le serait une
autorité de surveillance, de vérifier d'office la conformité de la
décision
attaquée à l'ensemble des dispositions applicables en la matière (ATF
123 II
134 consid. 1d p. 136/137; 119 Ib 56 consid. 1d p. 59).

2.
Le recourant se plaint d'une violation des règles de la bonne foi
entre
Etats, en faisant valoir qu'il aurait été attiré sur le territoire
suisse
uniquement parce que la France (dont il est le ressortissant et où il
réside
ordinairement) ne pourrait l'extrader au Luxembourg à raison de sa
nationalité, selon la réserve française à l'art. 6 CEExtr.

2.1 Selon les conceptions en vigueur en Suisse, les principes
généraux du
droit des gens sont directement applicables comme droit interne;
lorsqu'ils
sont d'ordre public, ils l'emportent sur le droit positif
conventionnel dont
l'application serait, in concreto, en contradiction avec eux (cf.
art. 53 de
la Convention de Vienne sur le droit des traités, RS 0.111; ATF 117
Ib 337
consid. 2a p. 340; 112 Ib 215 consid. 7 p. 222/223; 108 Ib 408
consid. 8
p.410-413). La personne qui fait l'objet d'une demande d'extradition
peut se
prévaloir de ces principes généraux dans la mesure où ils ont aussi
pour but
de protéger les individus (cf. ATF 106 Ib 403 consid. 5c). Il est
ainsi
loisible au recourant de s'opposer à l'extradition en faisant valoir
une
violation de la règle de la bonne foi (ATF 117 Ib 337 consid. 2a p.
340).

Celle-ci interdit à un Etat d'user de contrainte ou d'astuce pour
s'emparer
d'une personne qu'il recherche et qui séjourne sur le territoire d'un
autre
Etat où elle bénéficierait de l'immunité extraditionnelle. Est
prohibée toute
machination abusive visant à soustraire un individu à cette immunité
pour
l'amener à se rendre sur le territoire de l'Etat poursuivant ou sur le
territoire d'un autre Etat qui serait en principe obligé de
l'extrader.
L'Etat requis sur le territoire duquel un individu a été attiré par
de tels
procédés a le devoir de ne pas les cautionner en accueillant une
demande
d'extradition qui lui serait adressée par l'Etat fautif (ATF 117 Ib
337
consid. 2a p. 340 et les références citées; arrêts P.1201/1981, du 15
juillet
1982, reproduit in: EuGRZ 1983 p. 435 et traduit partiellement in:
ASDI 1983
p. 228-231, et 1A.264/1993, du 7 janvier 1994, consid. 5a). La bonne
foi de
l'Etat requérant est présumée; c'est à celui qui entend se prévaloir
de cette
règle pour faire échec à une demande d'extradition qu'il appartient de
démontrer clairement sa violation (ATF 117 Ib 337 consid. 2b p.
340/341).

2.2 Le 30 octobre 2001, les autorités de l'Etat requérant savaient que
A.________ était titulaire du compte n° xxx ouvert auprès de l'UBS à
Martigny, indications mentionnées expressément dans les demandes
formées ce
jour-là. Pour les besoins de l'exécution de la demande d'entraide
concernant
ce compte, la police valaisanne a, le 14 novembre 2001, entendu comme
témoin
Jacques P.________, employé de l'UBS à Martigny, en présence de deux
agents
de la police luxembourgeoise. P.________ a déclaré que A.________ lui
avait
demandé d'ouvrir un compte en vue de l'encaissement d'une commission
d'un
montant de 1'000'000 euros. Il avait accepté d'ouvrir ce compte sur
la simple
présentation d'une pièce d'identité télécopiée. Il avait toutefois
averti
A.________ que pour le cas où la commission attendue
serait
effectivement
versée, le montant ne pourrait être encaissé qu'après que A.________
se soit
présenté personnellement à la banque pour signer les documents
d'ouverture du
compte; à défaut, le montant en question serait ristourné à son
expéditeur.
Entendu à nouveau le 22 novembre 2001, P.________ a précisé que
A.________
s'était recommandé à lui de C.________, client français connu de
P.________.
Le 15 novembre 2001, X.________ avait annoncé à la banque le virement
d'un
montant de 700'000 euros sur le compte de A.________. Ce versement
était
intervenu le jour même, sous la forme d'un montant équivalent de
618'000 USD.
Le 16 novembre 2001, P.________ a averti le recourant de ce versement
en
l'invitant à se présenter à la banque dans le meilleur délai. Un
rendez-vous
a été fixé au mardi 20 novembre 2001 à 10h. Or, le 16 novembre 2001
(soit le
même jour que celui où P.________ et A.________ sont convenus du
rendez-vous
du 20 novembre suivant), le Procureur luxembourgeois a requis du Juge
d'instruction du Bas-Valais l'arrestation du recourant en vue de son
extradition, en précisant qu'à défaut d'une telle arrestation
surgirait le
risque de voir le recourant regagner la France d'où il ne pourrait
être
extradé au Luxembourg.

Sur le vu de ces faits, le recourant soutient avoir été victime d'un
complot
ourdi par les autorités luxembourgeoises et suisses, qui l'auraient,
par le
truchement de P.________, fait venir à Martigny le 20 novembre 2001
dans le
seul but de l'attirer sur territoire suisse, en vue de son
extradition au
Luxembourg. Selon cette thèse, le Procureur Dolar aurait été informé
(sans
doute par l'entremise des policiers luxembourgeois ayant assisté à
l'audition
de P.________ du 14 novembre 2001) de la possibilité de faire venir le
recourant à Martigny pour les formalité d'ouverture du compte n° xxx.
Les
autorités suisses et luxembourgeoises auraient, par l'intermédiaire de
X.________ et de P.________, organisé le rendez-vous du 20 novembre
2001,
faisant ainsi tomber le recourant dans une souricière.
A supposer que les choses se soient effectivement passées ainsi (sans
s'attarder sur les raisons de la présence des policiers
luxembourgeois lors
des auditions de P.________, ni sur l'éventualité que le Procureur
Dolar ait
pu tenir ces renseignements d'autres sources), cela ne suffirait pas
pour
confirmer la version du recourant. Celui-ci s'est rendu à Martigny de
son
plein gré, dans le but d'accomplir les formalités d'ouverture du
compte n°
xxx. Ces démarches étaient indispensables pour régulariser une
situation que
P.________ lui-même a reconnu, à demi-mot, comme contraire aux règles
de
l'art bancaire. En effet, si le recourant ne se présentait pas
personnellement à l'UBS de Martigny, il ne pouvait encaisser le
montant viré
par X.________. Qu'à l'appui de sa demande d'arrestation, le
Procureur Dolar
ait évoqué le fait - indubitable - que la France n'extraderait pas le
recourant au Luxembourg, ne constitue pas davantage l'indice d'un
comportement abusif de sa part. La règle de la bonne foi n'a pas pour
effet
d'obliger les Etats à demander l'extradition des personnes qu'ils
poursuivent
uniquement auprès des Etats dont ces personnes sont les
ressortissantes ou
sur le territoire desquels elles résident. On ne saurait en tout cas
reprocher à un Etat de faire arrêter un prévenu dans un Etat qui
pourrait
accorder l'extradition, plutôt que dans un autre Etat où le fugitif
bénéficierait d'une immunité extraditionnelle, attachée par exemple à
sa
nationalité. La seule limite, selon la jurisprudence qui vient d'être
rappelée, est celle du cas où la personne poursuivie est attirée sur
le
territoire d'un Etat déterminé par des moyens déloyaux, notamment par
la
collusion des autorités de l'Etat requérant et de l'Etat requis.

La situation de fait est en l'espèce différente de celles qui ont
donné lieu
au prononcé des arrêts P. et C. précités, dont se prévaut le
recourant. Dans
la première de ces causes, le recourant prétendait que l'Etat
requérant
s'était engagé à ne plus demander son extradition, et cela de tout
Etat où il
pourrait se trouver en l'avenir. Dans l'affaire C., le Tribunal
fédéral avait
pu établir qu'un fonctionnaire de l'Etat requérant s'était adressé
téléphoniquement à la personne poursuivie, en cachant son identité,
afin de
la faire venir, sous un prétexte fallacieux, en Suisse où elle avait
été
arrêtée. En l'occurrence, loin de mettre sur pied un stratagème monté
de
toutes pièces, les autorités de l'Etat requérant ont tout au plus
exploité
leur connaissance du rendez-vous du 20 novembre 2001 à Martigny pour
faire
procéder à l'arrestation du recourant. Il n'y a rien là qui puisse
apparaître
comme un comportement contraire aux règles de la bonne foi.

3.
Si les conditions de l'extradition sont remplies, doivent être remis
à l'Etat
requérant les objets ou valeurs trouvés en possession de la personne à
extrader, qui peuvent servir de moyens de preuve ou sont le produit de
l'infraction (art. 20 CEExtr. et 59 al. 1 EIMP.). Une requête
expresse n'est
pas nécessaire (art. 22 OEIMP, moins exigeant sur ce point que l'art.
20 al.
1 CEExtr.).
3.1 Dans un premier moyen, le recourant allègue que les documents
séquestrés
lors de son arrestation auraient été remis prématurément aux
autorités de
l'Etat requérant.

Lors de l'arrestation du recourant le 20 novembre 2001, la police
valaisanne
a séquestré les objets et documents trouvés en possession de
celui-ci, selon
un inventaire dressé le jour même. Le rapport établi le 28 novembre
2001 par
la police au Juge d'instruction du Bas-Valais indique que
conformément aux
demandes d'entraide du 30 octobre 2001 et aux instructions reçues,
une copie
des documents séquestrés lors de l'arrestation du recourant et des
déclarations des témoins avait été remise aux agents luxembourgeois
ayant
assisté aux auditions.

Ces faits suscitent la perplexité. Depuis le 16 novembre 2001, le Juge
d'instruction du Bas-Valais n'était plus en charge de l'exécution des
demandes d'entraide du 30 octobre 2001, cette tâche ayant été confiée
aux
autorités du canton de Genève désigné comme canton directeur au sens
de
l'art. 79 al. 1 EIMP, selon une décision portée à la connaissance du
Tribunal
cantonal du canton du Valais. Il semble toutefois que le Juge
d'instruction
du Bas-Valais n'ait pas été informé de ce dessaisissement. En outre,
l'admission de fonctionnaires étrangers à la procédure selon ce que
permet
l'art. 65a EIMP et la transmission d'objets ou de documents
nécessitaient le
prononcé de décisions formelles. A supposer que tel n'ait pas été le
cas (ce
que le dossier de la procédure extraditionnelle ne permet pas de
déterminer),
il faudrait admettre que la remise des documents et procès-verbaux
visés dans
le rapport du 28 novembre 2001 s'est faite de manière irrégulière.

Quoi qu'il en soit, on peut se dispenser d'éclaircir ce point, car le
dommage
lié à une transmission intempestive aurait de toute manière été guéri
dans le
cadre de la remise extraditionnelle.

3.2 Dans un deuxième moyen, le recourant reproche à l'Office fédéral
d'avoir
ordonné la transmission de deux documents sur lesquels n'aurait pas
porté le
séquestre du 20 novembre 2001. Il se réfère à ce propos à une lettre
dactylographiée constituant une demande de rançon adressée à
X.________,
ainsi que les documents d'ouverture d'un compte par C.________. Or,
contrairement à ce qu'allègue le recourant, ces documents se
trouvaient parmi
ceux séquestrés le 20 novembre 2001, comme le montre l'examen des
pièces
transmises le 25 janvier 2002 par le Juge d'instruction pénale du
Bas-Valais
à l'Office fédéral. Le grief doit être écarté. Pour le surplus, le
recourant
ne conteste pas l'utilité des pièces litigieuses pour la procédure
ouverte
dans l'Etat requérant.

4. Le recours doit ainsi être rejeté. Les frais en sont mis à la
charge du
recourant (art. 156 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art.
159
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant
et à
l'Office fédéral de la justice (B 129712).

Lausanne, le 9 avril 2002

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.63/2002
Date de la décision : 09/04/2002
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-04-09;1a.63.2002 ?
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