Vu le titre du livre III du code des juridictions financières relatif à la Cour de discipline budgétaire et financière ; la loi n° 48-1484 du 25 septembre 1948 modifiée tendant à sanctionner les fautes de gestion commises à l'égard de l'Etat et de diverses collectivités et portant création d'une Cour de discipline budgétaire et financière ;
Vu la décision notifiée le 13 novembre 1989 et enregistrée au Parquet le même jour par laquelle la Cour des comptes a saisi la Cour de discipline budgétaire et financière d'irrégularités constatées dans la gestion du Carrefour international de la communication (CICOM), établissement public créé par la loi n° 84-409 du 1er juin 1984 et dissous par la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;
Sur la compétence de la Cour :
Considérant que le CICOM, établissement public de l'Etat à caractère industriel et commercial, a été créé par la loi n° 84-409 du 1er juin 1984, complétée par le décret d'application n° 84-838 du 12 septembre 1984, puis supprimé par l'article 109 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 qui abrogeait la loi susvisée du 1er juin 1984 à compter du 1er octobre 1986 et organisait la dévolution des biens ; que cet établissement était, à ce titre, soumis au contrôle de la Cour des comptes en application de l'article 6 bis A de la loi n° 67-483 du 22 juin 1967 modifiée ; que ses comptes et sa gestion ont effectivement été contrôlés par cette juridiction ; qu'en conséquence ses représentants, administrateurs et agents étaient justiciables de la Cour de discipline budgétaire et financière en vertu de l'article 1er de la loi du 25 septembre 1948 susvisée codifié à l'article L. 312-1 du code des juridictions financières ;
Sur le fond :
1 Sur les irrégularités ayant affecté l'exécution des dépenses :
Considérant qu'une facture de 48.998,77 F, en date du 14 mars 1986, a été établie par la société Electricité-sonorisation-vidéo-aménagements pour la fourniture de matériels, revêtue d'un certificat de service fait du chef des services techniques du CICOM, puis visée pour bon à payer par M. X... ; que cette facture a donné lieu à l'émission de deux mandats de paiement le 21 août 1986 ; que le virement fut rejeté à la suite de la clôture du compte bancaire du fournisseur ; qu'il ne résulte pas des correspondances entre le fournisseur et le CICOM en date du 22 septembre et du 21 octobre 1986 que les matériels ne furent pas livrés ou furent aussitôt repris pour non-conformité et que les certificats de service fait et les visas pour bon à payer auraient constitué des faux ; qu'en conséquence il n'y a pas lieu de considérer qu'une irrégularité qui devrait être sanctionnée en application des dispositions des articles 5 et 6 de la loi du 25 septembre 1948 modifiée a été commise ;
Considérant que le marché n° 85-343 relatif à la réalisation de travaux de photocomposition pour cinq brochures a été conclu le 14 novembre 1985 avec la SA Imprimerie Union pour un montant de 156.552 F ; qu'il a donné lieu à l'émission d'une facture de ce montant datée du 9 janvier 1986 qui fut revêtue d'une certification de service fait signée du secrétaire général avec mention de la date du 30 décembre 1985 et d'un visa pour bon à payer signé de M. X... le 22 janvier 1986 ; que cette facture, rejetée par l'agent comptable par deux fois, a fait l'objet d'une demande d'explications à la liquidation de l'établissement ; que dans une lettre datée du 6 novembre 1986, la SA Imprimerie Union a écrit : "les changements intervenus au CICOM depuis l'engagement du contrat ayant modifié vos projets et vos travaux ne nous ayant pas été confiés, nous considérons ce dossier comme clos" ;
Considérant que le marché n° 85-340 relatif à l'impression de cinq brochures a été conclu le 14 novembre 1985 avec la SA Imprimeries Watelet-Arbelot pour un montant de 178.493 F ; qu'il a donné lieu à l'émission d'une facture de ce montant datée du 8 janvier 1986 qui fut revêtue d'une certification de service fait signée du secrétaire général avec mention de la date du 31 décembre 1985 et d'un visa pour bon à payer signé de M. X... le 22 janvier 1986 ; que cette facture rejetée par l'agent comptable par deux fois a fait l'objet d'une demande d'explications lors de la liquidation de l'établissement ; que dans la lettre du 17 novembre 1986, les Imprimeries Watelet-Arbelot demandèrent à l'agent comptable de considérer comme nul le contrat dont elles étaient titulaires mais pour lequel "elles n'avaient engagé aucun travail", ajoutant : "devant les retards et changements effectués par vos services dans l'objet même de ce contrat, il avait été décidé que ces travaux dans leur nouvelle définition seraient confiés à vos fournisseurs habituels" ;
Considérant qu'il est ainsi démontré que pour deux des contrats signés le 14 novembre 1985, des assertions et certifications fallacieuses ont été apposées sur des pièces de dépenses ; qu'elles constituent des infractions aux règles d'exécution des dépenses de l'établissement public tombant sous le coup des dispositions de l'article 5 de la loi du 25 septembre 1948 modifiée, même si en définitive les paiements n'ont pas été effectués grâce à la vigilance de l'agent comptable ;
Considérant toutefois qu'ils ne résulte pas de l'instruction que le directeur général ait, ce faisant, tenté en méconnaissance de ses obligations de procurer aux entreprises concernées des avantages injustifiés de nature pécuniaire entraînant un préjudice pour le CICOM et commis ainsi une infraction aux dispositions de l'article 6 de la loi du 25 septembre 1948 modifiée ;
2 Sur les infractions aux règles de passation des marchés :
Considérant que le CICOM n'était pas soumis aux règles du code des marchés publics ; que cependant, par deux délibérations du 19 décembre 1984 et du 12 décembre 1985, il avait décidé d'adopter une procédure identique à celle des marchés publics pour la passation des contrats de l'établissement et de soumettre à une commission les marchés d'un montant supérieur à un seuil fixé par la première délibération à 450.000 F et par la seconde à 540.000 F ;
Considérant qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que certains marchés aient été systématiquement fractionnés pour rester en dessous des seuils fixés par les règles que le CICOM avait décidé de se rendre applicables ou passés sans appel à la concurrence en contravention avec ces mêmes règles ; que ces griefs ne peuvent donc être retenus comme révélant une infraction tombant sous le coup des dispositions de l'article 5 de la loi du 25 septembre 1948 modifiée ;
3 Sur les infractions aux règles de tenue des inventaires :
Considérant que le CICOM ne disposait pas d'un inventaire exhaustif et fiable de ses immobilisations corporelles contrairement aux prescriptions de l'article 217 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, auquel l'établissement était soumis en application du décret n° 84-838 du 12 septembre 1984 ;
Considérant toutefois que des efforts réels ont été faits par les différents responsables pour remédier à ces difficultés ; que ce grief ne peut dès lors être regardé comme constitutif d'une infraction tombant sous le coup des dispositions de l'article 5 de la loi du 25 septembre 1948 modifiée ;
4 Sur les responsabilités encourues :
Considérant que la responsabilité de M. X... dans l'établissement de bons à payer pour des prestations n'ayant pas été exécutées sur les factures de SA Imprimerie Union et de la SA Imprimeries Watelet-Arbelot résulte de l'apposition par lui de sa signature sur les documents dont il s'agit ;
Considérant toutefois, d'une part, que les visas pour bon à payer ont été apposés par M. X... au vu de la certification du service fait par l'autorité compétente, d'autre part, que l'instruction a fait apparaître les conditions difficiles dans lesquelles M. X... a exercé sa mission durant la brève existence du CICOM du fait notamment de l'incertitude sur les missions de l'établissement public et des désaccords persistants entre les dirigeants de l'établissement ; que ces éléments constituent des circonstances de nature à exonérer M. X... de sa responsabilité ; ... (relaxe de M. X...).