La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/02/2018 | CANADA | N°2018CSC7

Canada | Canada, Cour suprême, 19 février 2018, 2018CSC7


Coram : Le juge en chef Wagner et les juges Abella, Côté, Brown et Martin

L’appel interjeté contre l’arrêt de la Cour d’appel de l’Alberta (Edmonton), numéro 1603-0143-A, 2017 ABCA 274, daté du 25 août 2017, a été entendu le 14 février 2018 et la Cour a prononcé oralement le même jour le jugement suivant :

[traduction]

Le juge Brown — G.T.D. a été déclaré coupable d’agression sexuelle à l’endroit d’une ancienne partenaire intime et il fait appel de plein droit sur la base d’une dissidence en Cour d’appel de l’Alberta. La juge dissiden

te aurait ordonné un nouveau procès au motif que la façon dont le Service de police d’Edmonton a donné s...

Coram : Le juge en chef Wagner et les juges Abella, Côté, Brown et Martin

L’appel interjeté contre l’arrêt de la Cour d’appel de l’Alberta (Edmonton), numéro 1603-0143-A, 2017 ABCA 274, daté du 25 août 2017, a été entendu le 14 février 2018 et la Cour a prononcé oralement le même jour le jugement suivant :

[traduction]

Le juge Brown — G.T.D. a été déclaré coupable d’agression sexuelle à l’endroit d’une ancienne partenaire intime et il fait appel de plein droit sur la base d’une dissidence en Cour d’appel de l’Alberta. La juge dissidente aurait ordonné un nouveau procès au motif que la façon dont le Service de police d’Edmonton a donné sa mise en garde habituelle a violé le droit à l’assistance d’un avocat garanti à G.T.D. par l’al. 10b) de la Charte canadienne des droits et libertés , et que la déclaration inculpatoire qu’il a ensuite faite en réponse à la mise en garde devrait être écartée aux termes du par. 24(2) de la Charte , selon l’analyse énoncée dans l’arrêt R. c. Grant, 2009 CSC 32, [2009] 2 R.C.S. 353. Les juges majoritaires de la Cour d’appel ont reconnu qu’il y avait eu violation du droit de G.T.D. à l’assistance d’un avocat, mais ont rejeté l’appel au motif que la déclaration ne devait pas être exclue.

Le droit à l’assistance d’un avocat garanti par l’al. 10b) de la Charte oblige les policiers à « s’abstenir de soutirer des éléments de preuve incriminants au détenu jusqu’à ce que celui-ci ait eu une possibilité raisonnable de joindre un avocat » (R. c. Prosper, [1994] 3 R.C.S. 236, p. 269). Le premier point litigieux en l’espèce consiste à décider si la question « Souhaitez-vous dire quelque chose? », posée à la fin de la mise en garde habituelle du Service de police d’Edmonton, alors que G.T.D. avait déjà invoqué son droit à l’assistance d’un avocat, a constitué une violation de cette obligation « d’abstention ». Nous sommes tous d’avis que oui, car elle a donné lieu à une déclaration de la part de G.T.D.

L’autre point litigieux consiste à décider si cette violation justifie l’exclusion de la déclaration de G.T.D. en application du par. 24(2) de la Charte . La Cour, à la majorité, répond par l’affirmative, appuyant pour l’essentiel sa décision sur les motifs de la juge Veldhuis de la Cour d’appel. Comme l’indique cette dernière au par. 83 de ses motifs, la Couronne a eu amplement l’occasion de présenter d’autres éléments de preuve sur les politiques ou la formation au sein du Service de police d’Edmonton, mais elle a décidé de ne pas le faire. Par conséquent, les juges majoritaires accueilleraient l’appel et ordonneraient la tenue d’un nouveau procès.

Le juge en chef rejetterait l’appel au motif que la violation ne justifie pas l’exclusion de la déclaration de G.T.D. L’appelant a plaidé que le recours à la question « Souhaitez-vous dire quelque chose? » dans la mise en garde habituelle se traduit par une situation de violations systémiques de la Charte . Bien qu’une telle situation puisse exacerber la gravité de la conduite attentatoire de l’État, le juge en chef est d’avis que, dans la présente affaire, la situation n’a impliqué ni violation de règles bien établies ni négligence dans la détermination de ce que ces règles imposaient. L’obligation « d’abstention » est elle-même bien établie.

Compte tenu des circonstances, la réponse à la question de savoir si cette forme de mise en garde respecte ou non la portée de l’obligation « d’abstention » n’était pas, de l’avis du juge en chef, suffisamment claire pour permettre de conclure que l’erreur des policiers, indépendamment de son caractère systémique, était déraisonnable ou dénuée de bonne foi. Selon lui, nous ne sommes pas non plus en présence d’un cas où les policiers ont irrégulièrement choisi « le moyen le moins compliqué lorsque [la Charte comportait] une zone grise » (R. c. Fearon, 2014 CSC 77, [2014] 3 R.C.S. 621, par. 94).

Le juge en chef conclut que le fait que la question avait été accompagnée de renseignements clairs relativement au choix de G.T.D. de parler ou non aux policiers avait atténué à tel point l’incidence de la conduite de l’État sur le droit garanti par la Charte de l’accusé que, au regard de la gravité de la violation et de l’intérêt de la société à ce que l’affaire soit jugée sur le fond, l’admission de la déclaration ne serait pas susceptible de déconsidérer l’administration de la justice

Renseignements sur les dossiers de la Cour : 37756


Synthèse
Référence neutre : 2018CSC7 ?
Date de la décision : 19/02/2018

Parties
Demandeurs : G.T.D.
Défendeurs : Sa Majesté la Reine
Proposition de citation de la décision: Canada, Cour suprême, 19 février 2018, 2018CSC7


Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;2018-02-19;2018csc7 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award