CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE FOURMIES 1, place Georges Coppeaux 59610 FOURMIES RG N F 05/ 00102 SECTION Industrie AFFAIRE Claude X... contre SOCIETE VALLOUREC MANNESMANN FRANCE OIL et amp ; GAS MINUTE N JUGEMENT DU 04 Avril 2006 Qualification : Contradictoire dernier ressort Notification le : Date de la réception par le demandeur : par le défendeur : Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée le : à :
JUGEMENT du 04 Avril 2006 (quatre Avril deux mil six) Monsieur Claude X... ...Partie demanderesse Représentée par Me Hervé DESSE-CARMIGNAC, Avocat au barreau d'AVESNES/ HELPE SOCIETE VALLOUREC MANNESMANN FRANCE OIL et amp ; GAS 64 Rue de Leval 59620 AULNOYE AYMERIES Partie défenderesse Représentée par Me Jean-Pierre LEMAIRE, Avocat au barreau de VALENCIENNES Composition du bureau de jugement lors des débats et du délibéré Monsieur Georges GRUNENBERGER, Président Conseiller Employeur Madame Maud A..., Conseiller Employeur Madame Maryline B..., Conseiller Salarié Monsieur Fabrice C..., Conseiller Salarié Assesseurs Assistés lors des débats de Madame Séverine Y..., Greffier Chef de Greffe PROCEDURE-Date de la réception de la demande : 08 Avril 2005- Bureau de Conciliation du 28 Juin 2005- Convocations envoyées le 1er juin 2005 (AR signé le 2 juin 2005)- Renvoi BJ avec délai de communication de pièces successivement aux audiences des 8 Novembre 2005 et 7 février 2006.- Débats à l'audience de Jugement du 07 Février 2006, date à laquelle les conseils des parties ont déposé des conclusions.- Prononcé de la décision fixé à la date du 04 Avril 2006- Décision prononcée par mise à disposition au Greffe dont la minute a été signée par Monsieur Georges GRUNENBERGER, Président, et par Madame Séverine Y..., Greffier Chef de Greffe Dernier état de la demande :- Dire et juger que la Société VALLOUREC MANNESMANN France Tuberie Auloye devra rembourser la somme de 291, 18 ç-Condamner VALLOUREC au paiement de ladite somme majorée des intérêts au taux légal à compter du prélèvement et jusque parfait paiement avec clause d'anatocisme (1154 CC)- Dommages et intérêts 100, 00 ç-Article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile 100, 00 ç PRETENTIONS DES PARTIES : Pour la partie demanderesse : Le 31 décembre 1987 Monsieur Claude X... a été réglé de son salaire du mois travaillé. Le 30 janvier 1988 Monsieur Claude X... n'a pas été réglé de son salaire mais a reçu une somme de 2. 000, 00 F en attendant de recevoir son salaire dudit mois de janvier 1988 le 10 février 1988. Sur la fiche de paie du mois de janvier 1988 figure la somme intégrale du mois de travail. Le 10 mars, le 08 avril et le 10 mai 1988, Monsieur Claude X... reçoit sa paie du mois avec la mention REMB. AVANCE : 240, 00 F. Puis à compter du 10 juin 1988 figurait toujours la mention REMB. AVANCE sans y faire de déduction comme les mois précédents. Lorsque la Société VALLOUREC verse 2. 000, 00 F à Monsieur Claude X... le 30 janvier 1988, le salarié a déjà effectué son mois de travail. Cette somme doit être assimilée à un acompte à valoir sur le mois complet de salaire dû par l'employeur et non à une avance qui est accordée à un salarié alors que le travail n'est pas effectué. En l'espèce, au 30 janvier 1988 le travail effectué représente un mois complet ; la prescription quinquennale sur les salaires s'applique donc. C'est Monsieur Claude X... qui a fait une avance à l'employeur puisqu'au lieu de percevoir sa paie complète, par exemple, 6. 000, 00 F., il n'a reçu que 2. 000, 00 F., faisant ainsi à l'employeur une avance de 400, 00 F pendant 10 jours. Il convient également de préciser que le versement de la paie après 40 jours de travail est prohibée par la loi du 24 juin1971, sous l'article L. 143-2 du Code du Travail. C'est pour ces raisons que la Société VALLOUREC était contrainte de procéder à un versement d'acompte si elle voulait échapper aux sanctions prévues en cas de non-paiement des salaires à bonne date. La Société VALLOUREC, qui a proposé le remboursement en dix mensualités, a été critiquée par les délégués et à l'issue de diverses réunions, les trois prélèvements faits à Monsieur Claude X... ont été remboursés par la Société VALLOUREC sur la fiche de paie de Juin 1988, portant la mention REMB. AVANCE 720 soit 3 X 240, 00 F. Dans le compte-rendu de la réunion extraordinaire du Comité d'Entreprise du 7 juin 1988 l'ordre du jour était le suivant : révision des modalités de remboursement de l'acompte relatif au décalage de paie De même dans le compte-rendu de la réunion du Comité d'Entreprise du 19 juillet 1988 Monsieur Z... s'exprime en ces termes : compte tenu de ce qui a pu être dit durant les diverses négociations, je rappelle ce qui sera appliqué : 3o) report en fin de carrière de la totalité de l'acompte versé pour modifications de date de paie. 4o) remboursement des 3 prélèvements déjà effectués sur le dit acompte De même, lors de la réunion des Délégués du Personnel du 26 juillet 1988, sous la présidence de Monsieur Z... il est indiqué : ACOMPTE : Report en fin de carrière du remboursement de la dette issue du changement de date de paie et restitution des prélèvements déjà effectués en février, mars, avril. Il est ainsi établi que la somme litigieuse constitue un acompte et comme tel se trouve soumis à la prescription quinquennale. Sur le régime de la prescription quinquennale, la Société VALLOUREC, prétend que les parties auraient repoussé d'un commun accord la date d'exigibilité du paiement de l'avance au départ du salarié de l'entreprise. Mais, en droit, l'article 1165 du Code Civil dispose : les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point aux tiers, et elles ne lui profitent que dans les cas prévus par l'article 1121 L'article 1121 du Code Civil prévoit que : on peut partiellement stipuler au profit d'un tiers, lorsque telle est la condition d'une stipulation que l'on fait pour soi-même ou d'une donation que l'on fait pour soi-même ou d'une donation que l'on fait à un autre. Celui qui a fait cette stipulation ne peut plus la révoquer, si le tiers a déclaré vouloir en profiter. Le prétendu accord supposerait que ce soit un accord de volonté entre les parties, or il ne s'agit que d'une décision unilatérale de l'employeur qu'il a prise après diverses réunions avec le CE. L'employeur avait d'abord proposé un prélèvement en dix mensualités de l'acompte versé au salarié, puis un prélèvement bi-annuel en juin et décembre 1988 et 1989 pour enfin arriver à un prélèvement en fin de carrière. Les délégués de leur côté demandaient : compte tenu du retard des salaires d'AULNOYE sur les autres établissements, notamment VITRY ET DEVILLE nous demandons que vous fassiez purement et simplement une croix sur l'avance sur salaire effectuée en début d'année. Pour la partie défenderesse : Le 01 janvier 1988 la Sté VALLOUREC a changé son système de paie ; afin que chaque salarié ne soit pas perturbé par ce changement de la date de paie, une somme de 2. 000, 00 Francs lui a été versée le 31 janvier 1988, ceci en accord avec le Comité d'Entreprise lors de la réunion du 14 décembre 1987. Lors de cette réunion il a également été prévu que le remboursement serait échelonné en dix mensualités. La somme versée au demandeur n'a pas la nature d'une rémunération due en contre partie du travail, il s'agit d'un geste d'entraide et de solidarité afin d'éviter une gêne passagère de trésorerie personnelle. Le 10 février, l'employeur a versé l'intégralité du salaire ainsi que les charges sociales. Lors de la réunion du Comité d'Entreprise du 07 juin 1988, il a été dit : Bien que ce mode de remboursement ait été approuvé par le CE en son temps, il me paraît souhaitable aujourd'hui de revoir son principe avec un étalement plus large. Dans un premier temps j'ai demandé au service paye à ce qu'il ne soit pas effectué de retenue sur le salaire en Mai c'est à dire sur la paie qui sera versée le 10 juin Le 26 juillet 1988 une réunion des délégués du personnel eut lieu au cours de laquelle la décision suivante fut arrêtée : report en fin de carrière de la dette issue du changement de la date de paie et restitution des prélèvements déjà effectués en février, mars et avril Ce qui fut mis en. uvre, les prélèvements effectués en février, mars et avril conformément à la décision du 14 décembre 1987, furent remboursés et la dette reportée en fin de carrière, c'est à dire lors du départ définitif du salarié de l'entreprise VALLOUREC. Aujourd'hui, suite au départ de plusieurs salariés, l'entreprise VALLOUREC a récupéré les 2. 000, 00 F. Il s'agit d'une répétition de l'indû. Il ne s'agit en aucun cas d'un salaire, la prescription sur créances salariales n'est pas applicable. Il s'agissait de compenser un préjudice lié au décalage de paie. Aucune fiche de paie sur cette avance n'a été établie. Si cette somme avait été un acompte, elle aurait été déduite du salaire. La partie défenderesse soutient que si le Conseil estimait qu'il s'agissait d'un salaire la prescription quinquennale ne serait pas applicable. Qu'en effet, le fait d'avoir remboursé les 3/ 10ème a rendu le terme incertain. Ce capital n'avait plus vocation à être payé en terme périodique. Que les actions en paiement de salaire ne concernent que ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts. Le partie défenderesse rappelle également que conformément aux dispositions de l'article 2220 du Code Civil, on ne peut d'avance renoncer à la prescription acquise par une volonté expresse ou tacite. Les salariés ont amorcé le remboursement pendant trois mois, ce qui a fait courir la prescription, elle est acquise. Puis ils ont renoncé au remboursement en contre partie du report des remboursements en fin de carrière. Chacun doit exécuter la partie de l'accord. L'entreprise a rendu les trois mensualités versées par les salariés. Les salariés ont renoncé à la prescription puisque laChacun doit exécuter la partie de l'accord. L'entreprise a rendu les trois mensualités versées par les salariés. Les salariés ont renoncé à la prescription puisque la fin de carrière était prévue bien au-delà de cinq ans. Il s'agissait d'accords atypiques plus avantageux pour le salarié. MOTIVATIONS DU CONSEIL : Sur le versement effectué en date du 30 janvier 1988 : Attendu que la Société VALLOUREC, en reportant la date de la paie du 30 au 10 du mois suivant, a été dans l'obligation, à la demande des salariés, de payer une partie du salaire dû à la date habituelle ; Attendu que la somme payée le 30 janvier à chaque salarié par l'employeur faisait partie intégrante du salaire de janvier 1988 ; Attendu que ladite somme s'inscrit bien dans le cadre d'un acompte versé au salarié pour un travail déjà réalisé ; Attendu que la direction de VALLOUREC avait prévu, en accord avec le Comité d'Entreprise, le remboursement de cette somme en dix prélèvements ; Attendu que dans le cadre conflictuel de l'époque, la direction de VALLOUREC, en juillet 1988, décidait de reporter le remboursement de cette somme en fin de carrière ou au départ des salariés ; Attendu que l'employeur, en cédant à la pression, méconnaissait la réglementation de l'acompte sur salaire prévue par l'article L. 143-1 du Code du Travail qui dispose : " L'acompte ne supporte pas de charges sociales. Il doit être intégralement déduit du salaire lors de l'échéance normale de la paie. Les charges sociales sont précomptées en totalité sur le solde de la paie " ; Attendu que l'acompte est partie intégrante du salaire et se prescrit au bout de cinq années comme rappelé par les dispositions de l'article 2277 du Nouveau Code de Procédure Civile ; Attendu qu'en méconnaissant cette règle de droit civil, l'employeur s'exposait au refus des salariés de rembourser l'acompte en fin de carrière ; Attendu que l'argument de l'employeur est de dire qu'il s'agit d'une avance, et qu'il n'y a pas prescription ; Attendu que l'avance, suivant l'article L. 144-2 du Code du Travail, se résume comme suit : " L'avance est une somme versée au salarié avant l'exécution du travail, elle s'apparente à un prêt et ne supporte pas les charges sociales " ; Attendu que le Conseil de Prud'hommes juge qu'il n'y a aucune ambigu'té sur le fait que la somme payée le 30 janvier 1988 est bien un acompte ; Qu'en conséquence, il convient de condamner la Société VALLOUREC à rembourser la somme indûment prélevée à chaque salarié ; Sur les dommages et intérêts pour préjudice : Attendu que le demandeur ne verse au dossier aucun document démontrant qu'il a subi un préjudice ; Attendu que le Conseil n'est donc pas en mesure d'évaluer un éventuel préjudice ; En conséquence, il convient de débouter la partie demanderesse de sa demande faite à ce titre ; Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile : Attendu que Monsieur Claude X... et la Société VALLOUREC ont tous deux pris les conseils d'un avocat s'estimant dans leur bon droit ; Attendu qu'il apparaît équitable au Conseil que la partie succombante supporte une partie des frais engagés par la partie adverse pour faire valoir ses droits.
PAR CES MOTIFS :
Le Conseil de Prud'hommes de FOURMIES, section Industrie, statuant publiquement, par jugement Contradictoire et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi : CONDAMNE la Société VALLOUREC à verser à Monsieur Claude X... la somme de : 291, 18 ç
(deux cent quatre vingt onze euros et dix huit cents) à titre de remboursement de la somme indûment prélevée, avec intérêts de droit à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le Bureau de conciliation et jusqu'au jour du paiement. LA CONDAMNE également à lui verser la somme de : 100, 00 ç (cent euros) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. DEBOUTE Monsieur Claude X... du surplus de ses demandes. DEBOUTE la Société VALLOUREC de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles. CONDAMNE la Société VALLOUREC au paiement des entiers dépens. Ainsi jugé et prononcé en audience publique le 04 Avril 2006. Le Greffier Chef de Greffe,
Le Président, Séverine Y...
Georges GRUNENBERGER