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18/12/2020 | FRANCE | N°19/00788

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 2, 18 décembre 2020, 19/00788


18/12/2020





ARRÊT N°20/372





N° RG 19/00788 - N° Portalis DBVI-V-B7D-MZEM

CAPA/VM



Décision déférée du 17 Janvier 2019 - Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de TOULOUSE - 16/01453

Jean-Claude BARDOUT























SA SOCIETE AIR FRANCE





C/



[D] [X]

Syndicat UNION LOCALE CGT DE [Localité 7]






















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INFIRMATION PARTIELLE







REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU DIX HUIT DECEMBRE DEUX MILLE VINGT

***



APPELANTE



SA SOCIETE AIR FRANCE

[Adresse 5...

18/12/2020

ARRÊT N°20/372

N° RG 19/00788 - N° Portalis DBVI-V-B7D-MZEM

CAPA/VM

Décision déférée du 17 Janvier 2019 - Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de TOULOUSE - 16/01453

Jean-Claude BARDOUT

SA SOCIETE AIR FRANCE

C/

[D] [X]

Syndicat UNION LOCALE CGT DE [Localité 7]

INFIRMATION PARTIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU DIX HUIT DECEMBRE DEUX MILLE VINGT

***

APPELANTE

SA SOCIETE AIR FRANCE

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Damien DE LAFORCADE, avocat postulant de la SELARL CLF, avocat au barreau de TOULOUSE,

Assistée de Me Jérôme DANIEL, avocat plaidant, de la SCP EUNOMIE AVOCATS - AARPI, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

Monsieur [D] [X]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par M. [U] [J], Délégué syndical

Syndicat UNION LOCALE CGT DE [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par M. [U] [J], Délégué syndical ouvrier

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 19 Novembre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de:

C. PARANT, présidente

A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère

F. CROISILLE-CABROL, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : E. LAUNAY

ARRÊT :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile

- signé par C. PARANT, présidente, et par E. LAUNAY, greffière de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

M. [D] [X] a été embauché à compter du 1er décembre 1983 par la société Air France en qualité de mécanicien aéronautique, suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps plein.

Il occupait en dernier lieu de la relation contractuelle le poste de technicien et percevait en moyenne une rémunération mensuelle de 3 735 €.

Suivant accord du 15 décembre 1981, la société Air France a instauré un système de majoration de la contrepartie octroyée sous forme de repos compensateur en cas de réalisation d'heures de nuit. Ce système bénéficiait exclusivement aux salariés de plus de 50 ans.

31 ans plus tard, la société Air France a signé le 24 janvier 2013 avec les partenaires sociaux un nouvel accord d'aménagement du temps de travail portant révision du statut conventionnel antérieur et entraînant notamment la modification des grilles horaires.

Un mécanisme transitoire était instauré par cet accord pour accompagner les salariés de plus de 50 ans concernés par cette modification de grille horaire qui avaient opté pour la contrepartie salariale aux heures de nuit.

L'accord ne prévoyait pas de disposition spécifique au bénéfice des salariés de plus de 50 ans qui avaient opté pour le repos compensateur en cas de réalisation d'heures de nuit.

M. [X] a saisi le 30 mai 2016 le conseil de prud'hommes de Toulouse des demandes principales suivantes :

- dire et juger qu'il a été victime d'une discrimination par la prise en compte de son âge,

- dire et juger que le salarié doit être rétabli dans ses droits à compter du 1er juin 2013,

- ordonner à la société Air France d'effectuer une reconstitution des sommes versées à titre de salaires et d'en justifier et de lui remettre les bulletins de paie rectifiés,

- condamner la société Air France au paiement sous astreinte des sommes suivantes :

* 16 211,70 € au titre de salaire non perçus sur la période du 1er juin 2013 au 31 janvier 2017,

* 1 621,17 € au titre de congés payés non perçus sur la période précitée,

* 5 000 € à titre de dommages et intérêts,

* 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'Union locale CGT de [Localité 7] est intervenue volontairement à l'instance sollicitant des dommages et intérêts et le remboursement de ses frais irrépétibles.

Par jugement de départition du 17 janvier 2019, le conseil de prud'hommes de Toulouse a :

- constaté l'existence d'une discrimination indirecte fondée sur l'âge à l'encontre de M. [X],

- dit l'action non prescrite,

- condamné la société Air France à verser à M. [X] les sommes suivantes :

* 16 211,70 € au titre de salaire non perçus sur la période du 1er juin 2013 au 31 janvier 2017,

* 1 621,17 € au titre de congés payés non perçus sur la période précitée,

* 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

et à éditer les bulletins de salaires rectifiés correspondants,

- débouté M. [X] de sa demande de dommages et intérêts,

- dit n'y avoir lieu à astreinte ni à condamnation à intérêts autres que de droit,

- débouté M. [X] du surplus de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire autre que de droit et fixé le salaire de référence à 3 735 € brut,

- condamné la société Air France aux entiers dépens,

- dit recevable l'intervention de l'Union Locale CGT de [Localité 7],

- a débouté cette dernière de ses demandes.

La société Air France a régulièrement relevé appel de ce jugement le 11 février 2019.

Par ordonnance du 16 octobre 2019, le magistrat chargé de la mise en état a :

- dit qu'en l'absence de notification par lettre recommandée AR ou de signification par huissier par les intimés dans le délai de trois mois de leurs conclusions et pièces, ces dernières sont irrecevables,

- dit que M. [X] et l'Union syndicale locale CGT de [Localité 7] sont irrecevables à conclure,

- réservé les dépens de l'incident en fin d'instance.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 18 septembre 2019, auxquelles il est expressément fait référence, la société Air France demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* constaté l'existence d'une discrimination indirecte fondée sur l'âge à l'encontre de M. [X],

* dit l'action non prescrite,

* condamné la société Air France au paiement de sommes à M. [X] et à éditer les bulletins de salaires rectifiés correspondants,

* fixé le salaire de référence à 3 735 € brut,

* condamné la société Air France aux entiers dépens,

* dit recevable l'intervention de l'Union Locale CGT de [Localité 7],

* débouté la société Air France de ses demandes reconventionnelles,

- débouter M. [X] et l'Union Locale CGT de [Localité 7] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

Y ajoutant,

- les condamner solidairement à lui payer la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

MOTIFS

L'appel ne porte pas sur les chefs de jugement qui déboutent M. [X] de sa demande de dommages et intérêts et l'Union locale CGT de [Localité 7] de ses demandes de sorte qu'il ne sera pas statué de ces chefs.

Sur la recevabilité à agir de l'Union locale CGT de [Localité 7]

Devant le conseil de prud'hommes, l'Union locale CGT de [Localité 7] était représentée par M. [E] muni d'un pouvoir et c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a déclaré que l'Union locale CGT de [Localité 7] avait capacité et intérêt à agir au soutien des intérêts collectifs de la profession, le conseil de prud'hommes ayant indiqué que la signature du syndicat CGT sur l'accord collectif était mal positionnée de sorte qu'il n'était pas établi qu'il ait signé l'accord collectif litigieux.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes de la société Air France à l'encontre de M. [X]

Il est rappelé que, par application de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

Et l'article 1er de la loi du 27 mai 2008 définit comme suit la discrimination indirecte invoquée par M. [X] devant le conseil de prud'hommes :

- constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique, neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs précités, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires ou appropriés.

L'article L 1134 - 1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi du 27 mai 2008.

Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Devant le conseil de prud'hommes de Toulouse, M. [X] avait présenté comme élément de fait laissant supposer une discrimination indirecte du fait de l'âge le fait que

seuls les salariés âgés de plus de 50 ans, catégorie dont faisait partie M. [X], avaient été privés des mesures de compensation prévues par l'accord collectif du 24 janvier 2013 en raison du réaménagement des horaires de nuit décidé par l'accord.

La société Air France conteste toute discrimination en expliquant qu'elle s'est contentée de mettre en oeuvre un accord collectif destiné à sauvegarder sa compétitivité qui a supprimé le traitement favorable accordé aux salariés de plus de 50 ans bénéficiant du repos compensateur de sorte que ces salariés de plus de 50 ans ont du fait de cet accord été traités comme les autres salariés ; elle ajoute que le mécanisme transitoire permettait aux salariés de plus de 50 ans ayant opté pour la contrepartie salariale aux heures de nuit de bénéficier de ce mécanisme transitoire.

La cour estime qu'il est démontré que les salariés de plus de 50 ans ont bien bénéficié d'une disposition plus favorable que leurs collègues de moins de 50 ans en pouvant choisir de compenser l'exécution d'horaires de nuit par le bénéfice d'un repos compensateur. La suppression de cet avantage lié à l'âge ne saurait constituer une discrimination indirecte dans la mesure où M. [X] se trouve placé du fait de la suppression de cet avantage non pas dans une situation désavantageuse mais dans la même situation que ses collègues de moins de 50 ans, étant précisé que rien ne permet de contredire, à la lecture des dispositions de l'accord versées aux débats, le fait avancé par la société Air France que les salariés de plus de 50 ans qui avaient opté pour la contrepartie salariale aux heures de nuit bénéficiaient du mécanisme transitoire prévu par l'annexe à l'accord sous la forme d'une garantie de rémunération.

La mise en oeuvre de la suppression de cet avantage ne constitue pas une discrimination indirecte au sens de l'article 1er de la loi du 27 mai 2008 dont il a été rappelé qu'il définit la discrimination indirecte comme une disposition, un critère ou une pratique, neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs précités, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes ; tel n'est nullement le cas de la suppression de ce repos compensateur qui n'a entraîné aucun désavantage pour les salariés de plus de 50 ans par rapport aux autres salariés mais les a placés dans la même situation que ces derniers.

Il en résulte que le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions à l'exception de sa disposition sur la prescription qui n'est pas critiquée par la société Air France dans les motifs de ses conclusions, l'appelante ne demandant pas à la cour de déclarer prescrite l'action de M. [X].

Sur le surplus des demandes

M. [X] et l'Union locale CGT de [Localité 7] qui perdent le procès seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel, sans qu'il soit justifié de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la société Air France en cause d'appel, le jugement déféré étant infirmé en ce qu'il a condamné la société Air France au paiement des dépens et de la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris, à l'exception de ses dispositions sur la recevabilité de l'intervention de l'Union locale CGT de [Localité 7], sur la non prescription de l'action de M. [X] et le confirme sur ces dispositions,

statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que M. [X] n'a pas été victime d'une discrimination indirecte fondée sur l'âge,

Déboute M. [X] de toutes ses demandes fondées sur la discrimination,

Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [X] aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Caroline PARANT, présidente, et par Eve LAUNAY, greffière.

La greffièreLa présidente

Eve LAUNAYCaroline PARANT .


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4eme chambre section 2
Numéro d'arrêt : 19/00788
Date de la décision : 18/12/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-12-18;19.00788 ?
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