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29/01/2007 | FRANCE | N°06/00162

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0038, 29 janvier 2007, 06/00162


29/01/2007

ARRÊT No

NoRG: 06/00162

OC/EKM

Décision déférée du 13 Décembre 2005 - Tribunal de Grande Instance de SAINT GAUDENS - 03/680

Mme BERGOUNIOU

SARL AGRO CEREALES

représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT

C/

Jeanine Y... veuve Z...

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

Vanessa Z... épouse A...

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

Jessica Z... épouse B...

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

Aurélie Z...

représentée par la SCP SOREL-DESS

ART-SOREL

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ère Chambre Section 1

***

...

29/01/2007

ARRÊT No

NoRG: 06/00162

OC/EKM

Décision déférée du 13 Décembre 2005 - Tribunal de Grande Instance de SAINT GAUDENS - 03/680

Mme BERGOUNIOU

SARL AGRO CEREALES

représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT

C/

Jeanine Y... veuve Z...

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

Vanessa Z... épouse A...

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

Jessica Z... épouse B...

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

Aurélie Z...

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ère Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT NEUF JANVIER DEUX MILLE SEPT

***

APPELANTE

SARL AGRO CEREALES

Chemin de Mailhol

31220 CAZERES SUR GARONNE

représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT, avoués à la Cour

assistée de la SCP JACQUES ISSANDOU-YVES TRAMINI-MARC AUTHAMAYOU, avocats au barreau de TOULOUSE

INTIMEES

Madame Jeanine Y... veuve Z... héritière de Mr Jean Marc Z...

Chemin de Mailhol de Saint Jean

31220 CAZERES SUR GARONNE

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour

assistée de la SCP MALESYS-ABADIE-BILLAUD, avocats au barreau de SAINT GAUDENS

Madame Vanessa Z... épouse A... héritière de Mr Jean Marc Z...

Chemin de Mailhol de Saint Jean

31220 CAZERES SUR GARONNE

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour

assistée de la SCP MALESYS-ABADIE-BILLAUD, avocats au barreau de SAINT GAUDENS

Madame Jessica Z... épouse B... héritière de Mr Jean Marc Z...

...

31260 MAZERES SUR SALAT

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour

assistée de la SCP MALESYS-ABADIE-BILLAUD, avocats au barreau de SAINT GAUDENS

Mademoiselle Aurélie Z... héritière de Mr Jean Marc Z...

Chemin de Mailhol de Saint Jean

31220 CAZERES SUR GARONNE

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour

assistée de la SCP MALESYS-ABADIE-BILLAUD, avocats au barreau de SAINT GAUDENS

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 20 Novembre 2006 en audience publique, devant la Cour composée de :

H. MAS, président

O. COLENO, conseiller

C. FOURNIEL, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : E. KAIM-MARTIN

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par O. COLENO, conseiller pour le président empêché, et par E. KAIM-MARTIN, greffier de chambre.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

Par acte d'huissier du 5 novembre 2003, les époux Z..., propriétaires d'une maison d'habitation qu'ils ont construite à Cazères en 1982, ont assigné la société AGRO CÉRÉALES S.A.R.L. devant le tribunal de grande instance de Saint-Gaudens en responsabilité et réparation à raison des troubles anormaux de voisinage que génère l'activité de stockage, séchage et transformation de céréales qu'elle est venue exploiter à proximité en 1995.

Jean-Marc Z... étant décédé au mois de janvier 1995, ses héritiers ont repris l'instance.

Par le jugement déféré du 13 décembre 2005 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal a fait droit aux demandes, ordonné sous astreinte la cessation de l'activité de la société entre 19 heures et 7 heures et alloué aux consorts Z... la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts. Pour ce faire, le tribunal a rejeté la demande de sursis à statuer présentée par la société AGRO CÉRÉALES, considérant qu'était inéluctable la nullité de la vente du terrain sur lequel elle est installée, objet d'une instance pendante devant la cour d'appel de Toulouse, que les nuisances sonores et émissions de poussières résultant de l'exploitation caractérisaient par leur intensité un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage, prenant enfin en considération l'importance et la durée de celui-ci et le mauvais état de santé de Jean-Marc Z... pour évaluer le préjudice subi.

La société AGRO CÉRÉALES, régulièrement appelante, conclut à la réformation de cette décision et au rejet des demandes, sollicitant la condamnation des consorts Z... au paiement d'une indemnité de 10.000 €.

Elle fait valoir que les consorts Z... ne peuvent se plaindre des nuisances d'une activité régulièrement engagée dès lors que leur maison, exclusivement dédiée à l'habitation, a été construite au mépris des dispositions du règlement d'urbanisme dans une zone depuis toujours affectée à l'usage industriel et artisanal, que l'anormalité du trouble n'est pas démontrée ni son imputabilité, que le préjudice invoqué n'est pas fondé, et que les consorts Z... ont agi avec mauvaise foi.

Les consorts Z... concluent à la confirmation du jugement dont appel, sauf à ordonner la cessation de toute activité sous astreinte de 1.500 € par mois tant qu'elle n'aura pas été mise en conformité, soutenant que ce n'est pas l'exploitation dans son principe qu'ils entendent contester, mais dans ses modalités, non conformes à la réglementation.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Attendu que c'est sans fondement que l'appelant prétend non seulement contester aux consorts Z... la possibilité de se prévaloir des nuisances d'une activité industrielle mais par surcroît qualifier escroquerie au jugement l'exercice même de leur action en justice au motif qu'ils auraient construit leur maison d'habitation en violation des prescriptions du plan d'occupation des sols qui classait leur parcelle en zone UF, devenue UX du plan local d'urbanisme sans modification des prescriptions, destinée aux implantations industrielles, commerciales, artisanales et autres activités à vocation économique dans laquelle sont interdites les constructions à usage d'habitation;

Attendu en effet que l'interdiction des constructions à usage d'habitation en zone UF excepte expressément celles "destinées au logement des personnes dont la présence est nécessaire pour assurer la direction, la surveillance ou la sécurité des établissements autorisés";

que les consorts Z... démontrent que c'est en conformité de ces prescriptions qu'ils ont acquis le terrain de la commune en 1981 en vertu d'une délibération du conseil municipal prenant en considération le projet d'installation de son entreprise de maçonnerie, puis construit depuis dans ce cadre, en vertu d'un permis de construire délivré le 27 janvier 1982 pour l'édification d'une maison individuelle à usage d'habitation et un hangar servant d'abri à matériel, travaux pour lesquels ils ont obtenu un certificat de conformité le 16 juin 1988;

Attendu que la circonstance que depuis, et après cessation de l'activité artisanale, le hangar aurait été converti en annexe à la maison d'habitation, circonstance qui présente des apparences récentes selon le constat d'huissier du 28 juin 2006 versé aux débats, n'est ni de nature à remettre en cause la régularité originaire de la maison d'habitation des époux Z..., ni donc la légitimité de leur action;

Attendu que c'est par des motifs précis, complets et pertinents qui ne sont pas remis en cause par l'appel que le premier juge a admis aux nuisances constatées les caractères d'un trouble excédant pour les consorts Z... les inconvénients normaux du voisinage;

Attendu qu'il faut ajouter pour répondre aux moyens soutenus en appel, et en ce qui concerne les émissions de poussières, que le respect des normes réglementaires constatées au terme du rapport de la SOCOTEC INDUSTRIE sur la base de mesures effectuées le 15 novembre 2005 n'est pas de nature à exonérer la société AGRO CÉRÉALES de la responsabilité qui résulte des inconvénients qui peuvent néanmoins résulter de l'activité, si ceux-ci excèdent ce qu'impose normalement la situation de voisinage;

que cette responsabilité, qui n'est pas fondée sur la faute, peut être engagée sans faute et par l'exercice normal d'une activité;

que tel est bien le cas en l'espèce, comme l'a exactement retenu le premier juge, où les poussières d'origine végétale s'insinuent partout dans l'environnement considéré avec ses caractéristiques d'occupation, d'où ne sont réglementairement pas absents les immeubles à usage d'habitation;

Attendu qu'il n'a jusqu'à présent jamais été soutenu que ce que les constats d'huissier ont clairement identifié comme des débris de follicules de maïs, de couleur rosâtre, auraient pu être en réalité des poussières en provenance d'une scierie voisine;

que cette allégation qui tend à mettre en cause l'imputabilité même du trouble n'est assortie d'aucune justification précise qui permette de l'envisager;

Attendu, sur les nuisances sonores, que pour les mêmes motifs l'appelante n'est pas fondée à se prévaloir des conclusions du rapport DELHOM du 8 novembre 2005 selon lequel le jour de l'intervention, les valeurs d'émergence ont respecté les valeurs réglementaires admissibles;

que l'examen de ce rapport fait en outre apparaître que l'appelante n'est pas même matériellement fondée à se prévaloir de cette conclusion alors que celle-ci a été formulée sur une base qui ne correspond pas à la réalité qui fait l'objet du litige;

que ce technicien précise en effet que son avis a été sollicité dans le cadre d'un fonctionnement décrit comme s'exerçant "uniquement en période diurne", alors précisément que l'un des principaux aspects du trouble invoqué concerne un fonctionnement nocturne continu en saison, lequel correspond à un fait constant de la cause;

que la comparaison des valeurs mesurées fait ressortir que, sauf le mode de fonctionnement séchoir seul, les modes de fonctionnement de l'installation génèrent des émergences respectivement de 3,8 et 4,9 qui excèdent notablement la valeur limite de 3 dB fixée pour la période nocturne et les dimanche et jours fériés lorsque le niveau de bruit ambiant est supérieur à 45 dB comme le technicien l'a retenu en l'espèce;

qu'il en résulte donc au contraire que l'anormalité du trouble déploré n'en est que plus caractérisée, et d'autant plus encore que le technicien a par ailleurs analysé que les conditions météorologiques existantes le jour de ses mesures étaient de nature à atténuer fortement le niveau sonore, même si à proximité cette incidence restait faible;

Attendu, sur le préjudice, que l'observation qui précède met en évidence l'importance du préjudice subi par les voisins pendant de nombreuses années, ce qui n'est pas de nature à atténuer la circonstance que l'activité génératrice de nuisances n'est que saisonnière, son amplitude et sa répétition constante au fil des ans caractérisant un trouble important dans le temps compte tenu de sa nature;

Attendu, sur sa réparation, que contrairement à ce qui est soutenu, le premier juge ne s'est pas déterminé en fonction d'une dépréciation de l'immeuble, laquelle n'est au demeurant pas acquise en l'état de la menace qui pèse sur la pérennité de l'exploitation, circonstance que la décision déférée a explicitement prise en considération;

que l'indemnité allouée par le premier juge assure une réparation exacte et complète du préjudice subi dans le cadre de l'occupation normale de la maison d'habitation;

Attendu, sur la mesure de la prévention de la réitération du trouble, que c'est par une appréciation qui est justement mesurée aux données de la cause et à leurs perspectives, qui n'est pas utilement critiquée en appel et que la Cour adopte, que le premier juge a interdit l'activité nocturne sous astreinte;

que le caractère inutilement excessif d'un aspect de la formulation de l'un des moyens d'appel n'est pas de nature à modifier cette appréciation au fond;

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions et déboute la société AGRO CÉRÉALES de sa demande de dommages et intérêts;

Y ajoutant,

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Rejette la demande formée par la société AGRO CÉRÉALES;

Condamne la société AGRO CÉRÉALES à payer aux consorts Z... la somme supplémentaire de 2.000 €;

Condamne la société AGRO CÉRÉALES aux entiers dépens de l'instance en appel, et reconnaît à la SCP SOREL DESSART SOREL, avoué qui en a fait la demande, le droit de recouvrement direct prévu à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par O. COLENO, conseiller et E. KAIM-MARTIN, greffier.

LE GREFFIER : LE PRESIDENT :

E. KAIM-MARTIN O. COLENO


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0038
Numéro d'arrêt : 06/00162
Date de la décision : 29/01/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Saint-Gaudens, 13 décembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2007-01-29;06.00162 ?
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