12/05/2006
ARRÊT No
No RG : 05/02452
MT/MR
Décision déférée du 17 Février 2004 - Conseil de Prud'hommes de MONTAUBAN (0300206)
LAMAS
Bernard X...
C/
SOCIETE LOCAPOMPE SUD
Baudouin Y...
Bernard HOREL
CENTRE DE GESTION ET D'ETUDE AGS IDF EST (G.A.R.P)
CONFIRMATION
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
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COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 2 - Chambre sociale
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ARRÊT DU DOUZE MAI DEUX MILLE SIX
***
APPELANT(S)
Monsieur Bernard X...
RN 20
82370 LABASTIDE ST PIERRE
comparant en personne,
assisté de la SCP CONQUET, MASSOL, MASCARAS, avocats au barreau de TARN ET GARONNE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 31/555/2004/016272 du 23/02/2005 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)
INTIME(S)
SOCIETE LOCAPOMPE SUD
Lieudit BALLI
31330 GRENADE SUR GARONNE
représentée par Me Erick LEBAHR, avocat au barreau de TOULOUSE
Maître Baudouin Y...,
administrateur judiciaire de la SOCIETE LOCAPOMPE SUD
Chez Maître Z...
...
91000 EVRY
représenté par Me Erick LEBAHR, avocat au barreau de TOULOUSE
Maître Bernard HOREL
commissaire à l'exécution du plan de la Sté LOCAPOMPE SUD
...
91100 CORBEIL ESSONNES
représenté par Me Erick LEBAHR, avocat au barreau de TOULOUSE
CENTRE DE GESTION ET D'ETUDE AGS IDF EST (G.A.R.P)
...
92309 LEVALLOIS PERRET
représentée par la SCP SAINT GENIEST-GUEROT, avocats au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945.1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mars 2006, en audience publique, devant M. TREILLES conseiller, chargé d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
G. DARDÉ, président
M. TREILLES, conseiller
M.P. PELLARIN, conseiller
Greffier, lors des débats : D. FOLTYN-NIDECKER
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxieme alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile
- signé par G. DARDÉ, président, et par D. FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.
L'EXPOSE DU LITIGE:
Les faits et la procédure:
Suivant un contrat de travail à durée indéterminée du 6 septembre 1999 Bernard X... a été embauché en qualité de chauffeur pompiste par L'EURL LOCAPOMPE LORCA.
Les statuts d'une société LOCAPOMPE SUD enregistrés le 5 novembre 1999 mentionnent sa qualité de gérant de cette entreprise. Un procès verbal du 13 décembre 2000 fait état de la révocation de son mandat de gérant.
Suivant un courrier du 8 janvier 2001 Monsieur X... a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement.
Par une lettre du 22 janvier 2001 il a été licencié au motif invoqué d'une faute grave.
La société LOCAPOMPE SUD a été placée en redressement judiciaire par jugement du 31 mars 2003. Un plan de cession a été homologué le 15 mars 2004.
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Le 19 mai 2003 Monsieur X... a saisi le Conseil des Prud'hommes de Montauban afin d'entendre qualifier son licenciement d'abusif, et obtenir le versement de diverses sommes à caractère indemnitaire.
Par jugement du 17 février 2004 la juridiction saisie a considéré que Monsieur X... avait la qualité de gérant jusqu'au 13 décembre 2000, a constaté son incompétence pour statuer sur les demandes afférentes à cette période, a jugé que le licenciement était justifié et a rejeté les demandes présentées par le salarié.
Par une déclaration du 18 mars 2004 Monsieur X... a interjeté appel de ce jugement.
Les moyens et prétentions des parties.
M. Bernard X... soutient avoir bénéficié d'un contrat de travail dès son embauche au mois de septembre 1999 par la société LOCAPOMPE LORCA puis au service de la société LOCAPOMPE SUD. Il précise que lorsque son mandat fictif de gérant a été révoqué son contrat de travail a repris ses effets jusqu'au jour du licenciement le 22 janvier 2001. Il prétend qu'un lien de subordination existait dans ses relations contractuelles avec les dirigeants de la société et plus particulièrement à l'égard de Simon A....
L'appelant soutient le caractère injustifié de son licenciement. Il conteste la réalité et la gravité des faits énoncés par l'employeur dans la lettre de rupture. Compte tenu de son préjudice il demande le paiement d'une somme de 17.500 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Monsieur X... demande aussi le paiement d'heures supplémentaires et prétend que les horaires figurant sur les disques chronotachygraphes ne correspondent pas aux heures réellement effectuées. Il sollicite le versement d'une somme de 21.100,53 € à ce titre. A titre subsidiaire il demande l'instauration d'une mesure d'expertise.
Monsieur X... demande également le paiement des sommes suivantes:
- 13.262,96 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis;
- 7.448,59 € à titre d'indemnité compensatrice de repos compensateurs;
- 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
Il sollicite aussi le bénéfice du statut de cadre, son affiliation aux caisses sociales correspondantes et la remise des documents sociaux conformes à la décision rendue.
La société LOCAPOMPE SUD, Monsieur Y... en sa qualité d'administrateur judiciaire et M. HOREL, commissaire à l'exécution du plan font valoir que Monsieur X... était gérant de droit ainsi qu'en font foi les statuts enregistrés le 5 novembre 1999 et les activités réelles de celui-ci au sein de la société LOCAPOMPE SUD. Les intimés soutiennent que le contrat de travail du 3 janvier 2000 dont se prévaut l'appelant est un faux grossier et relèvent que ce document ne comporte aucune signature. Ils produisent des courriers signés par l'appelant en sa qualité de gérant. Dès lors ils considèrent que M. X... n'était pas salarié et que le Conseil de Prud'hommes de Montauban était incompétent pour statuer sur le litige concernant la période antérieure au 13 décembre 2000.
En ce qui concerne la période du 13 décembre 2000 jusqu'au 20 janvier 2001, les intimés relèvent que les faits énoncés dans la lettre de licenciement sont constitutifs d'autant de fautes graves en particulier les injures proférées à l'encontre du nouveau gérant M. B... mais aussi à l'égard de M. A..., associé unique. Ils prétendent que les autres griefs d'insubordination et de défaut d'entretien de véhicule sont établis. Dès lors, ils condidèrent que le licenciement pour faute grave est justifié.
Les intimés sollicitent le rejet de la demande de Monsieur X... relatives aux heures supplémentaires, soulignent le caractère démesuré de la demande présentée par l'appelant et relèvent qu'il n'apporte aucun élément de preuve.
Ils considèrent, par ailleurs, que Monsieur X... ne peut prétendre au statut de cadre mais seulement à celui de gérant. En conséquence les intimés sollicitent la confirmation du jugement déféré.
Le Centre de Gestion et d'Etudes A.G.S (C.G.E.A) aux termes de moyens et d'arguments identiques à ceux présentés par la société LOCAPOMPE SUD sollicite la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et précise les conditions et limites de sa garantie.
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LES MOTIFS
Il appartient à celui qui se prévaut d'un contrat de travail d'établir l'existence d'un lien de subordination lequel est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives , d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Ce sont les circonstances de fait qui déterminent l'existence d'une situation de dépendance dans l'exercice du travail.
En l'espèce, Monsieur X... fait valoir l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée du 3 janvier 2000 par lequel la société LOCAPOMPE SUD l'aurait engagé en qualité de Directeur d'exploitation (gérant) pour un salaire de 15.000 € par mois. Cette convention ne comportant aucune signature des parties est dépourvue de toute valeur probante.
Par contre il résulte des statuts de la SARL LOCAPOMPE SUD établis le 15 octobre 1999 et enregistrés à la recette de COLOMIERS le 5 novembre suivant que M. A... associé unique a donné la gérance de la société à M. X... lequel a reçu tous les pouvoirs afin de faire procéder aux formalités en vue de l'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés. C'est ainsi que les nom et qualité de gérant de l'appelant apparaissent sur l'extrait du registre du commerce et des sociétés ainsi que sur le répertoire national des entreprises et de leurs établissements.
A cet effet M. X... le 15 octobre 1999 a rempli une "déclaration sur l'honneur de non condamnation" afin de pouvoir gérer la société assujétie à l'immatriculation du registre du commerce.
Par ailleurs, les fonctions réellement assumées par Monsieur X... attestent sa qualité de gérant de la société. Plusieurs documents figurant au dossier en témoignent:
- une lettre adressée le 7 décembre 2000 par Monsieur X... à la banque " Pinto sotto mayor" en ses termes: "En tant que gérant de la "société LOCAPOMPE SUD je vous demande de retirer la signature de M. "A...... à dater de ce jour et jusqu'à nouvel ordre."
- une lettre adressée le même jour par l'appelant à M. C... - associé unique de la société - par laquelle il le somme de lui fournir des explications et écrit notamment: "En tant que gérant de la société "LOCAPOMPE SUD et après vérification de la comptabilité j'ai noté certaines "anomalies... Je vous mets en demeure de me faire parvenir sous huitaine "tout document nécessaire à la comptabilité..."
- un courrier du 30 novembre 2000 adressé par Monsieur X... à l'actionnaire unique dans lequel l'appelant justifie l'opportunité des décisions par lui prises dans l'intérêt de la société et termine sa lettre en écrivant: "si ces procédés intentionnels devaient persister et mettre en péril "la société LOCAPOMPE SUD je me verrai en tant que gérant dans "l'obligation de réagir."
Il résulte clairement de l'ensemble de ces documents et courriers que Monsieur X... a effectivement exercé des fonctions de gérant de la société LOCAPOMPE SUD du mois de novembre 1999 au 13 décembre 2000 date à laquelle son mandat a été révoqué.
Il n'apporte aucun commencement de preuve d'un lien de subordination pouvant exiter à l'égard des dirigeants de la société.
En conséquence les juridictions sociales ne sont pas compétentes pour connaître des demandes présentées par Monsieur X... relatives à la période recouvrant son mandat de gérant. Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
Sur le licenciement:
La qualité de salarié de Monsieur X... du 13 décembre 2000 jusqu'au 22 janvier 2001, jour de son licenciement n'est pas discutée.
Par une lettre recommandée avec accusé de réception du 22 janvier 2001 l'employeur a notifié son licenciement à Monsieur X... en énonçant les griefs suivants:
- injures et insolence à l'encontre de M. B..., directeur général;
- injures à l'encontre de M. A... gérant;
- insubordination,
- défaut d'entretien des véhicules sous votre responsabilité et absence de passage aux mines.
L'employeur ayant qualifié ces manquements de faute grave il lui appartient de démontrer leur réalité et de dire en quoi ils ne permettaient pas le maintien de la relation contractuelle.
Monsieur X... a été mis à pied à titre conservatoire dès le 8 janvier 2001 il a effectivement travaillé en qualité de salarié pendant 24 jours au sein de la société LOCAMPOMPE SUD.
Il résulte de nombreux courriers échangés entre les parties durant cette période que l'appelant a plusieurs fois gravement injurié l'actionnaire unique de la société ainsi que le nouveau gérant, son successeur: M. B.... Ce dernier a délivré une attestation régulière en la forme dans lequel il décrit l'attitude injurieuse de Monsieur X... non seulement au cours de la période antérieure au 13 décembre 2000 mais également les jours suivants lorsqu'il était salarié. L'appelant ne produisant aucun élément permettant de douter de la sincérité de ce témoin et de l'authenticité des faits rapportés dans les lettres échangées entre les parties il convient de considérer que l'employeur apporte la preuve d'injures proférées par le salarié et de dire que leur caractère outrancier mais aussi leur répétition leur confèrent un degré de gravité incompatible avec le maintien du lien contractuel. L'employeur n'apporte pas la preuve de la réalité des autres griefs visés dans la lettre de rupture.
En conséquence, il convient de confirmer la disposition du jugement déféré déclarant le licenciement fondé sur une faute grave et de rejeter toutes les demandes du salarié reposant sur un licenciement prétendu injustifié.
Sur la demande visant au paiement d'heures supplémentaires:
S'il résulte de l'article L. 212-1-1 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.
Monsieur X... ne peut prétendre au paiement d'heures supplémentaires que pour la période postérieure au 13 décembre 2000. Or il ne produit aucun élément susceptible de constituer un commencement de preuve de l'existence d'heures supplémentaires impayées. En conséquence sa demande présentée de ce chef sera rejetée. Une mesure d'expertise n'ayant pas pour objet de suppléer la carence manifestée par une partie dans l'administration de la preuve qui lui incombe, la demande présentée à titre subsidiaire par Monsieur X... visant à l'instauration d'une telle mesure doit être rejetée.
Sur les autres demandes:
Monsieur X... demande à bénéficier du statut de cadre et a être affilié aux caisses sociales correspondantes. Son affirmation selon laquelle son emploi justifie cette qualification n'est étayée par aucun élément probant. Dès lors cette demande doit être rejetée.
Monsieur X... dont l'appel est rejeté doit payer les dépens; il ne peut de ce fait bénéficier des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Déclare régulier et recevable en la forme l'appel interjeté par Monsieur X... à l'encontre du jugement du Conseil de Prud'hommes de Montauban du 17 février 2004.
Au fond:
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré;
Y ajoutant:
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Dit que Monsieur X... paiera les dépens.
Le présent arrêt a été signé par M.DARDÉ, président et par Mme FOLTYN-NIDECKER, greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Dominique FOLTYN-NIDECKER Gilbert D...