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12/02/2015 | FRANCE | N°10/00430

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 12 février 2015, 10/00430


RG N° 10/00430

JLB

N° Minute :

















































































Copie exécutoire

délivrée le :







la SARL LEXAVOUE

GRENOBLE





la SARL DAUPHIN

& MIHAJLOVIC



Me RAMILLON



la SCP POUGNAND>






AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE COMMERCIALE



ARRÊT DU JEUDI 12 FÉVRIER 2015





Appel d'une décision (N° RG 2008J97)

rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE

en date du 28 décembre 2009

suivant déclaration d'appel du 19 Janvier 2010





APPELANTE :



S.A. GSE poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cett...

RG N° 10/00430

JLB

N° Minute :

Copie exécutoire

délivrée le :

la SARL LEXAVOUE

GRENOBLE

la SARL DAUPHIN

& MIHAJLOVIC

Me RAMILLON

la SCP POUGNAND

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 12 FÉVRIER 2015

Appel d'une décision (N° RG 2008J97)

rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE

en date du 28 décembre 2009

suivant déclaration d'appel du 19 Janvier 2010

APPELANTE :

S.A. GSE poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 4]

Représentée par la SARL LEXAVOUE GRENOBLE, en qualité d'avoués à la Cour jusqu'au 31 décembre 2011 puis en qualité d'avocats au barreau de GRENOBLE, postulant, et plaidant par Me Jean-François SALPHATI, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

Maître [U] [H] ès-qualités d'administrateur judiciaire de la société MAZZA BTP

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, en qualité d'avoués à la Cour jusqu'au 31 décembre 2011 puis en qualité d'avocats au barreau de GRENOBLE, postulant, constitué aux lieu et place de la SCP CALAS Jean et Charles, en qualité d'avoués à la Cour jusqu'au 31 décembre 2011, et plaidant par Me Marc BUFFARD, avocat au barreau de LYON

S.A.S. GINGER ENVIRONNEMENT poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Marie-France RAMILLON, en qualité d'avoué à la Cour jusqu'au 31 décembre 2011 puis en qualité d'avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et plaidant par Me Christophe LACHAT, avocat au barreau de GRENOBLE

S.A.S. ERM FRANCE poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par la SCP POUGNAND, en qualité d'avoué à la Cour jusqu'au 31 décembre 2011 puis en qualité d'avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et plaidant par Me Nicolas DHUIN, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Dominique ROLIN, Président de Chambre,

Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller,

Mme Fabienne PAGES, Conseiller,

Assistés lors des débats de Magalie COSNARD, Greffier.

DÉBATS :

A l'audience publique du 14 Janvier 2015

Monsieur BERNAUD, Conseiller, a été entendu en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour,

------0------

La société G.S.E a été chargée en qualité de promoteur immobilier de la construction de deux bâtiments industriels à [Localité 7] et [Localité 5].

Selon contrat d'entreprise du 15 février 2002 elle a confié à la société MAZZA BTP l'exécution des lots de travaux voies et réseaux divers pour chacun des bâtiments moyennant les prix forfaitaires de 954'800 € hors taxes et de 792'189 € hors-taxes.

Un litige s'est élevé entre les parties du fait d'un déblaiement important effectué par la société MAZZA BTP sur la parcelle destinée à recevoir le bâtiment N° 8 (53'000 m³).

La société G.S.E a demandé à l'entreprise de procéder aux travaux de remblaiement, ce que celle-ci a refusé de faire à ses frais.

Ses dernières situations de travaux n'étant pas payées, la société MAZZA BTP a saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Grenoble à l'effet d'obtenir le paiement par provision des sommes de 150'721,27 euros au titre du bâtiment N°8 et de 297'244,77 euros au titre du bâtiment N°9.

Une expertise a été ordonnée le 21 janvier 2003 relativement au bâtiments N°8.

Les parties se sont toutefois rapprochées et ont conclu le 20 février 2003 un protocole d'accord aux termes duquel il a été décidé en substance :

que la société MAZZA BTP effectuerait le remblaiement à partir de matériaux inertes prélevés sur les terrassements des travaux de la cité internationale de [Localité 6] après un contrôle de non pollution réalisé par les bureaux d'études SOLEN, devenu GINGER ENVIRONNEMENT, et ERM FRANCE, désignés respectivement par l'entreprise et par le promoteur,

que le solde des marchés de travaux, arrêté à la somme de 301'792,56 euros TTC, serait payé par la société G.S.E à la réception sans réserve des travaux comprenant l'opération de remblaiement.

Les travaux de remblaiement ont été réalisés au cours du premier semestre de l'année 2003 par la société MAZZA BTP sous le contrôle des bureaux d'études, mais le promoteur immobilier a invoqué l'existence de pollutions et d'anomalies dans la procédure de contrôle des terres par le bureau d'études SOLEN.

Un nouveau litige s'est donc élevé entre les parties, qui a conduit le président du tribunal de commerce de Grenoble, par ordonnance du 16 septembre 2003, à ordonner une expertise technique confiée à Monsieur [B] [Q] et à prévoir la consignation de la somme restant due de 301'792,56 euros.

Par jugement du 2 juillet 2004, cette expertise a été étendue aux deux bureaux d'études.

La société MAZZA BTP a été admise au bénéfice du redressement judiciaire par jugement du tribunal de Commerce de Lyon en date du 4 novembre 2004, qui a désigné en qualité d'administrateur judiciaire Me [H] chargé de l'administration complète de la société.

Le plan de cession de la société MAZZA BTP a été arrêté par jugement du 22 mars 2005 qui a désigné Me [H] en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

L'expert judiciaire a déposé son rapport définitif le 28 septembre 2007 dont il résulte en substance :

que les remblais comportent des produits polluants (cendres, bitumes, débris de démolition, etc...) peu actifs qui ne risquent pas de constituer une source de pollution pour la nappe phréatique et pour le voisinage, ce qui ne nécessite pas leur enlèvement et remplacement,

que le coût éventuel de reprise des travaux de remblaiement s'élèverait à la somme de 1'087'164 €.

Sur la base de ce rapport d'expertise, Me [H], ès qualités d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société MAZZA BTP, a fait assigner le 9 janvier 2008 la société G.S.E ainsi que les deux bureaux de contrôle à l'effet d'obtenir la condamnation de la société G.S.E au paiement de la somme de

301'792,56 euros et subsidiairement la garantie des sociétés ERM FRANCE et GINGER ENVIRONNEMENT .

Par jugement du 28 décembre 2009, le tribunal de commerce de Grenoble a débouté la société G.S.E de sa demande de remplacement des matériaux de remblai et l'a condamnée au paiement du solde des marchés de travaux s'élevant à la somme de 301'792,56 euros, outre indemnité pour frais irrépétibles au profit de chacune des autres parties.

La SA G.S.E a relevé appel de cette décision selon déclaration reçue le 19 janvier 2010.

Par arrêt du 3 octobre 2013, la présente cour a ordonné avant dire droit sur l'ensemble des demandes la réouverture des débats afin de permettre aux parties de présenter leurs observations et de produire toutes pièces utiles relativement à la qualité à agir de Me [H] après le jugement du 22 mars 2005 l'ayant désigné en qualité de commissaire à l'exécution du plan, ainsi qu'à l'issue de la procédure de vérification et d'admission de la créance indemnitaire invoquée par la société GSE .

Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 20 mars 2014 par la SAS GSE qui demande à la cour, par voie de réformation du jugement, de déclarer nulle et de nul effet l'assignation introductive d'instance, subsidiairement de débouter la société MAZZA BTP de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 536'961,64 euros à titre de dommages et intérêts, plus subsidiairement d'ordonner la compensation entre les créances réciproques sans intérêts et d'ordonner dans ce cas la levée à son profit de la mesure de séquestre et en tout état de cause de condamner les succombants à lui payer une indemnité de 20'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile aux motifs :

que la société MAZZA BTP n'était pas régulièrement représentée lors de l'introduction de l'instance, alors que comme il est désormais reconnu la mission d'administrateur judiciaire de Me [H] avait pris fin le 18 mai 2005 avec le paiement du prix de cession de l'entreprise, que la mission de commissaire à l'exécution du plan de cession était également achevée en l'absence d'instance en cours et que depuis le 1er janvier 2006 seule la SELARL BAULAND & GLADEL, au sein de laquelle Me [H] exerce désormais ses fonctions, serait recevable à représenter la société,

que la norme de pollution a été clairement stipulée au protocole d'accord, qui a prévu que les matériaux de remblaiement ne devaient pas dépasser les valeurs de la VDSS englobant l'existence de matériaux pouvant être source de pollution ou étant eux-mêmes pollués,

que la société MAZZA BTP a manqué à son obligation de résultat de délivrer un ouvrage conforme à la norme VDSS, alors qu'il résulte clairement des conclusions d'expertise que les matériaux de remblai sont pollués, peu important que les sociétés chargées du contrôle aient elles-mêmes failli à leurs obligations,

que le moyen tiré de la réception sans réserve des travaux est inopérant alors que ce n'est qu'à l'issue des opérations d'expertise judiciaire que la présence d'une pollution est devenue certaine,

qu'il appartient à la société MAZZA BTP d'exercer, le cas échéant, tout recours à l'encontre des sociétés chargées du contrôle des matériaux de remblaiement,

que son préjudice est constitué du coût des travaux de dépollution partielle du site (103'098,91 euros), des frais exposés ( 73'225,70 euros) et des intérêts dus par la société PROLOGIS occupant le bâtiment, qui a bloqué le règlement des sommes dues jusqu'à la réalisation des travaux de purge des terres (285'637,03 euros).

Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 2 septembre 2014 par Me [H]', ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société MAZZA BTP, qui demande à la cour de le déclarer recevable en son action, de confirmer le jugement, de condamner la société GSE à lui payer la somme de 301'792,56 euros TTC avec intérêts capitalisés au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 juin 2003, de débouter la société GSE de sa demande reconventionnelle, de dire n'y avoir lieu à compensation, de condamner la société GSE à lui payer une indemnité de 15'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et subsidiairement de condamner les sociétés GINGER ENVIRONNEMENT et ERM FRANCE à la relever et garantir intégralement de l'ensemble des condamnations éventuelles prononcées à son encontre aux motifs :

que c'est à la suite d'une erreur ne faisant pas grief que l'assignation le qualifie d'administrateur judiciaire, alors qu'après complet paiement du prix de cession le 18 mai 2005 il avait la qualité de commissaire à l'exécution du plan,

que cette nullité de forme a été couverte par les conclusions au fond des défendeurs qui n'ont pas soulevé cette nullité (article 112 du code de procédure civile) et que quelle que soit sa dénomination exacte il avait bien pour mission de représenter légalement la société MAZZA BTP en vertu du jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 22 mars 2005,

que si la société GSE a régulièrement déclaré sa créance le 17 décembre 2004, le juge-commissaire a considéré qu'une instance était en cours puisqu'une assignation au fond avait été délivrée par la société MAZZA BTP dès le 7 mai 2004 alors qu'elle était encore in bonis,

que le protocole d'accord du février 2003 n'a pas précisé que les valeurs des normes VDSS ou VCI représentaient le niveau de pollution considéré comme inadmissible,

qu'il résulte du rapport d'expertise judiciaire que les échantillons pollués restent pour leur plus grande part inférieurs aux normes susvisées et sont insusceptibles de nuire de quelque façon à l'environnement,

que la société ERM, mandataire du promoteur, n'a pas arrêté les opérations de remblaiement lorsque des échantillons pollués ont été mis à jour,

que la société GSE a prononcé la réception contradictoire sans réserve des travaux en toute connaissance de cause, ce qui confère aux légères pollutions constatées le caractère de vice apparent,

qu'en toute hypothèse, s'il devait être jugé que la qualité du remblai n'était pas conforme aux engagements pris, la responsabilité contractuelle de la société GINGER ENVIRONNEMENT et quasi délictuelle de la société ERM serait engagée pour défaut de contrôle des échantillons au départ et à l'arrivée.

Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 30 juillet 2014 par la SA GRONTMIJ, anciennement dénommée GINGER ENVIRONNEMENT, qui demande à la cour d'annuler l'acte introductif d'instance pour les moyens développés par la société GSE qu'elle fait siens, qui subsidiairement sollicite la confirmation du jugement et qui en toute hypothèse demande la condamnation de la société GSE et de Me [H], ès qualités, ou de toute autre partie à lui payer une indemnité de 10'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile aux motifs :

que selon les normes définies par le ministère de l'écologie et du développement durable, les terres rapportées sur le terrain occupé par la société PROLOGIS n'ont aucun impact en termes de pollution sur les individus ou l'environnement, s'agissant d'un d'espace vert placé en usage non sensible,

que ni le protocole d'accord du 20 février 2003, auquel elle est étrangère, ni le bon de commande régularisé entre elle-même et la société MAZZA BTP, ne définissent la norme de pollution applicable,

qu'elle a été chargée d'une simple mission de contrôle des terres prélevés par voie de sondages, et non pas d'une prestation d'ingénierie ou de conseil,

que son rapport, comme celui de la société ERM, ne relève aucun dépassement de la valeur de constat d'impact (VCI) en usage non sensible,

qu'elle n'a pas contracté l'obligation de résultat d'alerter les parties en cas de simple dépassement de la valeur définitive de sources sol (VDSS),

que compte tenu de la nature du site sur lequel les remblais ont été prélevés avec l'accord de la société GSE il était impossible d'obtenir une absence totale de polluants,

que pour estimer que la conformité au protocole d'accord n'était pas acquise l'expert judiciaire s'est livré à une interprétation juridique du protocole d'accord qui excédait sa mission,

que le protocole, qui se borne à renvoyer aux réglementations et normes en vigueur, a été respecté alors qu'il ne résulte d'aucune étude technique que la pollution dépasse la valeur de constat d'impact (VCI) en usage non sensible.

Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 19 novembre 2014 par la SAS ERM FRANCE qui demande à la cour d'annuler l'acte introductif d'instance pour les moyens développés par la société GSE qu'elle fait siens, qui subsidiairement sollicite la confirmation du jugement et qui prétend obtenir de la société MAZZA BTP ou de la société GSE une indemnité de 30'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile aux motifs :

que sa responsabilité quasi délictuelle à l'égard de la société MAZZA BTP ne saurait être recherchée, alors qu'elle n'a pas été chargée de s'assurer de la conformité des opérations de remblaiement au protocole d'accord du 20 février 2003 qui lui est totalement inopposable, et qu'elle a parfaitement exécuté la mission que lui avait confiée le promoteur, qui consistait à contrôler visuellement les matériaux et à s'assurer que le tri des déchets était effectué,

qu'elle a parfaitement exécuté sa mission de validation du site d'emprunt et de la procédure de remblaiement, alors que c'est en toute connaissance de cause que la société GSE

a réduit les termes de la proposition initiale de la société GINGER ENVIRONNEMENT, qu'elle a immédiatement attiré l'attention du maître d'ouvrage sur le non-respect des cadences contractuelles, que ses recommandations n'ont pas été suivies d'effet et que ses analyses n'avaient pas pour objet de déterminer un niveau de pollution, mais de vérifier la qualité des analyses faites par la société GINGER ENVIRONNEMENT,

qu'en toute hypothèse le protocole d'accord du 20 février 2003 a été respecté, puisqu'il ne fait aucune référence à la norme applicable et que la notion de pollution doit être déterminée en fonction de l'usage du site, qui ne présentait aucun caractère sensible,

que les travaux entrepris étaient inutiles alors qu'il n'y a jamais eu d'obstacle à la construction du bâtiment commercial, étant observé que le préjudice allégué n'est pas justifié.

MOTIFS DE L'ARRÊT

La société MAZZA BTP a été admise au bénéfice du redressement judiciaire par jugement du tribunal de Commerce de Lyon en date du 4 novembre 2004, qui a désigné en qualité d'administrateur judiciaire Me [H] chargé d'assurer seul et entièrement l'administration de la société.

Par jugement du 22 mars 2005, le tribunal a arrêté le plan de cession totale de l'entreprise au profit de la société CARI en fixant la durée du plan au délai nécessaire à la poursuite des éventuelles instances en cours, sans que cette durée puisse excéder le délai prévu à l'article L.621-66 du code de commerce, en nommant Me [H] pour la durée du plan en qualité de commissaire à l'exécution du plan avec mission notamment de recouvrer et réaliser les actifs résiduels, de représenter l'entreprise devant toute juridiction, de répartir entre les créanciers les sommes disponibles et de saisir le tribunal à défaut de réalisation de tout ou partie des conditions prévues par le plan, en maintenant enfin Me [H] en qualité d'administrateur chargé de passer tous les actes permettant la réalisation de la cession jusqu'au paiement intégral du prix et de procéder au licenciement des 133 salariées non repris.

Il est constant qu'au jour de l'introduction de l'action, par assignation du 9 janvier 2008, la mission d'administrateur judiciaire de Me [H] avait pris fin avec le paiement du prix de cession.

C'est donc à tort que ce dernier, qui le reconnaît, a engagé l'action en qualité d'administrateur judiciaire de la société MAZZA BTP.

C'est toutefois à la suite d'une erreur manifeste au regard de l'objet du litige qu'il a été désigné dans l'assignation comme agissant en qualité d'administrateur judiciaire, alors que le jugement du 22 mars 2005 ne maintenait son mandat d'administrateur que pour le temps limité de la réalisation des actes nécessaires à la finalisation de la cession et lui confiait la mission de recouvrer et réaliser les actifs résiduels en sa seule qualité de commissaire à l'exécution du plan.

Cette erreur, qui provient incontestablement de l'exercice simultané pendant un temps des deux missions et qui n'a pas été relevée par les défendeurs, y compris en appel jusqu'à la réouverture des débats à l'initiative de la cour, était susceptible de rectification et ne saurait par conséquent vicier l'acte introductif d'instance.

Aux termes de l'article L.621-66 ancien du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 10 juin 1994 applicable en la cause, la durée du plan de redressement est fixée par le tribunal.

L'article L.621-68 ancien du même code prévoit que le tribunal nomme un commissaire chargé de veiller à l'exécution du plan pour la durée fixée à l'article L.621-66. Ce même article décide que les actions introduites avant le jugement qui arrête le plan soit par l'administrateur, soit par le représentant des créanciers, sont poursuivies par le commissaire à l'exécution du plan.

Selon l'article L.621-90 ancien, propre au plan de cession de l'entreprise, la mission du commissaire à l'exécution du plan dure jusqu'au paiement intégral du prix de cession, par exception à l'article L.621-68.

Enfin, l'article L.621-95 ancien décide qu'en cas de cession totale de l'entreprise la clôture de la procédure est prononcée par le tribunal après régularisation des actes nécessaires à la cession, paiement du prix et réalisation des actifs non compris dans le plan.

Il résulte de la combinaison de l'ensemble de ces dispositions légales que la durée du mandat du commissaire à l'exécution du plan de cession de l'entreprise, dans la limite de laquelle celui-ci dispose du pouvoir d'agir en justice dans l'intérêt collectif des créanciers, coïncide avec la durée du plan fixée initialement par le tribunal, sauf prolongation éventuelle jusqu'au paiement intégral du prix de cession.

Dans l'hypothèse où cette durée a été fixée par le jugement arrêtant le plan, la mission du commissaire à l'exécution du plan et les pouvoirs qui y sont attachés prennent donc fin à la date retenue par le tribunal, et au plus tard au jour du paiement intégral du prix de cession. Dans ce cas, en effet, les tâches spécifiques et ponctuelles demeurant de la compétence du commissaire à l'exécution du plan (réalisation des actifs résiduels et répartition du prix de cession), qui ne découlent pas de l'essence même de la mission confiée à cet organe, chargé principalement de veiller à la bonne exécution du plan, ne peuvent lui donner compétence pour exercer une action en justice.

En l'espèce, le jugement du 22 mars 2005 ayant arrêté le plan de cession totale de l'entreprise a fixé la durée du plan au délai nécessaire à la poursuite des éventuelles instances en cours, sans que cette durée puisse excéder le délai prévu à l'article L.621-66 du code de commerce.

Au jour de l'homologation du plan de cession une instance était toujours pendante devant le tribunal de commerce de Grenoble, alors que par acte d'huissier du 7 mai 2004 la société MAZZA BTP, alors in bonis, avait fait assigner la société GSE en paiement du solde du prix des marchés de travaux et que, sur cette assignation, par un jugement du 2 juillet 2004, le tribunal avait étendu les opérations d'expertise aux deux bureaux d'études et avait sursis à statuer sur toutes les demandes.

Cette procédure, dont on ignore l'issue définitive, ne constituait pas toutefois une instance en cours au sens de l'article L.621-68 ancien du code de commerce, qui ne vise que les actions introduites avant le jugement arrêtant le plan «'soit par l'administrateur, soit par le représentant des créanciers'», en sorte qu'à défaut d'avoir été reprise au cours de la période d'observation par ces organes elle ne pouvait être poursuivie par Me [H], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession.

C'est d'ailleurs une nouvelle instance que Me [H] a introduite par assignation du 9 janvier 2008, ce qui démontre qu'il n'a pas entendu poursuivre une instance en cours, mais qu'il a souhaité agir de sa propre initiative dans l'intérêt collectif des créanciers.

Or, en application des dispositions légales susvisées, sa mission de commissaire à l'exécution du plan avait pris fin dès le 18 mai 2005 avec le paiement complet du prix de cession.

Dès lors, au jour de l'introduction de cette action en paiement il était sans pouvoir pour agir en justice contre les tiers dans l'intérêt collectif des créanciers.

Bien que l'acte introductif d'instance ne soit pas atteint d'une nullité de fond, puisque Me [H] n'a pas agi comme représentant de la société MAZZA BTP, mais comme organe de la procédure collective, ce dernier, qui était dépourvu du droit d'agir après achèvement de sa mission, sera par conséquent déclaré irrecevable en son action, ce qui conduit à l'infirmation du jugement.

Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande indemnitaire de la société GSE qui n'a été formée qu'à titre très subsidiaire au cas où l'action serait déclarée régulière et recevable.

La levée de la mesure de séquestre judiciaire sera toutefois ordonnée à son profit.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant contradictoirement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau :

Déclare Me [H], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société MAZZA BTP, irrecevable en son action,

Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts formée à titre subsidiaire par la SAS GSE, ni sur les recours en garantie formés également à titre subsidiaire contre les sociétés ERM FRANCE SAS et GRONTMIJ SA, cette dernière anciennement dénommée GINGER ENVIRONNEMENT,

Ordonne la levée de la mesure de séquestre judiciaire au profit de la société GSE,

Dit n'y avoir lieu en cause d'appel à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties,

Condamne Me [H], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société MAZZA BTP, aux entiers dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'expertise judiciaire, dont distraction pour ceux d'appel au profit des avocats de la cause qui en ont fait la demande .

SIGNE par Madame ROLIN, Président et par Madame COSNARD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe PrésidenT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10/00430
Date de la décision : 12/02/2015

Références :

Cour d'appel de Grenoble 07, arrêt n°10/00430 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-02-12;10.00430 ?
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