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31/05/2011 | FRANCE | N°09/00157

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 1ere chambre, 31 mai 2011, 09/00157


R.G. N° 09/00157

F.L.

N° Minute :



























































































Copie exécutoire



délivrée le :



à :





SCP CALAS



SCP POUGNAND

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR

D'APPEL DE GRENOBLE



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU MARDI 31 MAI 2011





Appel d'un Jugement (N° R.G. 06/01579)

rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE

en date du 24 novembre 2008

suivant déclaration d'appel du 31 Décembre 2008





APPELANT :



Monsieur [J] [G]

né le [Date naissance 1] 1935 à [Localité 12] (77)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 10]



représenté par la S...

R.G. N° 09/00157

F.L.

N° Minute :

Copie exécutoire

délivrée le :

à :

SCP CALAS

SCP POUGNAND

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU MARDI 31 MAI 2011

Appel d'un Jugement (N° R.G. 06/01579)

rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE

en date du 24 novembre 2008

suivant déclaration d'appel du 31 Décembre 2008

APPELANT :

Monsieur [J] [G]

né le [Date naissance 1] 1935 à [Localité 12] (77)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 10]

représenté par la SCP CALAS Jean et Charles, avoués à la Cour

assisté de Me RICQUART, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMES :

SARL SEGBATI prise en la personne de son gérant en exercice, Monsieur [K] [L]

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée par la SCP POUGNAND Herve-Jean, avoués à la Cour

Monsieur [K] [L]

né le [Date naissance 3] 1958 à [Localité 7] (MAROC)

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 5]

représenté par la SCP POUGNAND Herve-Jean, avoués à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Françoise LANDOZ, Président,

Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller,

Madame Véronique KLAJNBERG, Conseiller,

Assistées lors des débats de Mme Hélène LAGIER, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 12 Avril 2011, Madame LANDOZ a été entendue en son rapport.

Les avoués et l'avocat ont été entendus en leurs conclusions et plaidoirie.

Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.

------ 0 ------

Par acte authentique du 30 décembre 1998, [J] [G] a acquis moyennant le prix de 315.250 Frs, de [H] [I] veuve [L] et de [K] [L] le lot 93 dans un ensemble immobilier en copropriété à usage d'habitation, dénommé le [Adresse 9], sur le territoire de la commune de [Localité 11], Isère ; le jour de la vente, il a souscrit un contrat de rénovation de ce lot avec la S.A.R.L. SEGBATI, dont le gérant était [K] [L] et a réglé la somme de 735.584 Frs.

Le 28 juin 2001, il a reçu un avis de redressement du Directeur des Services Fiscaux qui a considéré que la somme de 735.584 Frs constituait une charge augmentative du prix qui aurait dû être déclarée dans l'assiette du prix de vente ; il a dû régler 12.212 € au titre du supplément de taxe de publicité foncière.

[J] [G] s'est plaint également de ce que lorsqu'il a voulu revendre le bien acquis aux consorts [L], il s'est aperçu que la surface de l'appartement était bien moindre que celle indiquée par ses vendeurs.

Par actes des 4 et 5 avril 2006, [J] [G] a fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE [K] [L] pris tant en son nom personnel qu'en qualité d'héritier de sa mère, [H] [I] veuve [L] ainsi que la S.A.R.L. SEGBATI ; il demandait la condamnation de [K] [L] à lui payer la somme de 69.489,99 € outre intérêts capitalisés à compter du 30 décembre 1998, représentant la part du prix qu'il a payé en trop compte tenu de la superficie du bien, 1.573 € au titre des intérêts de retard qu'il a dû régler sur la somme de 12.212 € et 2.000 € au titre des frais engagés dans le cadre de la procédure de recouvrement ; il sollicitait une indemnité de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 24 novembre 2008 le tribunal a rejeté les prétentions de [J] [G] et l'a condamné à payer à la S.A.R.L. SEGBATI la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

[J] [G] a interjeté appel de cette décision le 31 décembre 2008 en intimant [K] [L] ; le 8 avril 2009 il a fait une déclaration d'appel complémentaire à l'encontre de la S.A.R.L. SEGBATI.

Il reprend sa demande en réduction du prix contre [K] [L] en se fondant sur le dol commis par celui-ci ; il fait valoir que la déclaration de surface faite par le vendeur est mensongère tant en ce qui concerne la surface, 53 m² au lieu de 29,99 m² mesurés selon les prescriptions de la loi CARREZ, qu'en ce qui concerne l'absence totale de mesurage à l'occasion de la vente.

Il indique qu'on ne peut lui opposer le délai de l'article 1304 alinéa 1 du Code Civil, puisque le bien acquis étant destiné à la location, il n'a jamais pu découvrir la surface réelle avant le projet de revente et le relevé de surface qu'il a obtenu le 7 avril 2006.

Il ajoute que le dol lui ouvre une action en réparation du préjudice subi sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du Code Civil, distincte de l'action en nullité elle-même et nonobstant le fait qu'il soit forclos à mettre en 'uvre les dispositions de la loi CARREZ.

Il conteste que les travaux réalisés par la S.A.R.L. SEGBATI dont [K] [L] est le gérant, aient pu modifier la surface du lot vendu et souligne qu'en tout état de cause, la facture SEGBATI lui a été remise le 31 décembre 1998, soit un jour après la vente.

À l'encontre de la S.A.R.L. SEGBATI, il invoque le dol affectant le marché de travaux commis par [K] [L] en sa qualité de représentant légal, lequel a déterminé l'assiette du prix des travaux au m² sur la base d'une contenance volontairement majorée.

Il demande à la Cour de réformer le jugement déféré et de condamner d'une part [K] [L] à lui payer la somme de 27.212,58 € à titre de réduction de prix outre intérêts capitalisés à compter du 30 décembre 1998 ; d'autre part la S.A.R.L. SEGBATI à lui rembourser la somme de 35.503,65 € à titre de réduction de prix outre intérêts capitalisés à compter du 30 décembre 1998.

À titre subsidiaire, il réclame le paiement des mêmes sommes à titre de dommages-intérêts en application de l'article 1382 du Code Civil.

Il demande la condamnation de [K] [L] et de la S.A.R.L. SEGBATI à lui payer une indemnité de 4.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

-o0o-

[K] [L] répond que l'action en diminution du prix du fait de l'inexactitude de la superficie est manifestement prescrite puisqu'elle aurait dû être engagée dans le délai d'un an à compter de l'acte authentique du 30 décembre 1998.

Sur le fondement du dol, il fait valoir que l'action en nullité se prescrit par cinq à partir du jour où le dol a été découvert ; qu'admettre que la mention de la superficie loi CARREZ puise établir la preuve des man'uvres dolosives reviendrait à passer outre la déchéance prévue par l'article 1622 du Code Civil en cas de non-respect du délai d'un an.

En tout état de cause, [K] [L] soutient que [J] [G] 'ne pouvait sérieusement se méprendre sur la consistance d'un bien qu'il a visité préalablement à la signature du compromis et qui à l''il nu faisait très certainement apparaître, fût-ce de manière approximative, les surfaces correspondant à son prix d'acquisition' ; il ajoute que l'appartement a subi d'importantes modifications au niveau des structures boisées qui le composent à l'intérieur, 'modifications qui ont nécessairement influé sur la définition des superficies privatives du lot acquis, au sens des dispositions du décret du 23 mai 1997 et de la loi du 18 décembre 1996 améliorant la protection des acquéreurs des lots en copropriété sur lesquelles se fonde l'attestation délivrée en 2006'.

Enfin il prétend que 'c'est en toute connaissance de cause que [J] [G] a apposé sa signature sur l'acte authentique sans exiger la moindre certification technique sur les superficies privatives du lot au moment de son acquisition'.

Il conclut à la confirmation du jugement déféré.

La S.A.R.L. SEGBATI rappelle qu'elle est intervenue comme entrepreneur de travaux ainsi que cela résulte du libellé de la facture du 31 décembre 1998 régulièrement acquittée, que cette facture n'a jamais fait l'objet de la moindre contestation et n'a pas été établie en fonction d'une surface définie ; elle conteste la communauté d'intérêts entre [K] [L] personne physique et la S.A.R.L. personne morale bien distincte ; elle conteste toute complicité et s'oppose à la demande de réajustement du marché de travaux qui est dénuée de fondement.

[K] [L] et la S.A.R.L. SEGBATI sollicitent la condamnation de [J] [G] à leur payer une indemnité de 4.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la demande dirigée contre [K] [L],

Il n'est pas contestable que [J] [G] est déchu du droit d'intenter l'action en diminution du prix fondée sur les dispositions de l'article 1622 du Code Civil, qui devait être engagée dans l'année à compter de la vente du 30 décembre 1998.

Sur le dol, l'article 1117 du Code Civil dispose que la convention contractée par erreur, violence ou dol n'est point nulle de plein droit ; elle donne seulement lieu à une action en nullité ou en rescision ; contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, le dol peut être invoqué pour conclure seulement à une réduction de prix.

L'article 1304 du Code Civil précise que dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans ; ce temps ne court dans le cas de dol que du jour où il a été découvert ; [J] [G] ayant découvert la surface réelle du lot acquis à l'occasion de la vente qu'il envisageait du lot en cause et du mesurage effectué le 7 avril 2006, son action est recevable.

Il est admis que des agissements malhonnêtes qui ont provoqué une erreur de la victime peuvent être qualifiés de manoeuvres dolosives ; les allégations mensongères doivent s'apprécier selon la qualité de celui de qui elles émanent et de celui à qui elles s'adressent.

En l'espèce, [K] [L], aux côtés de [H] [I] veuve [L], a déclaré que la surface du lot vendu était de 53 m², tandis que le professionnel du mesurage, la S.A.R.L MINOS qui a procédé aux mesures du bien acquis par [J] [G] au moyen d'un télémètre, a certifié que la superficie était de 22,20 m², soit moins de la moitié, les autres surfaces 'hors Carrez' ne dépassant pas 14,02 m².

Il résulte des documents versés par les parties que [J] [G] a signé le compromis de vente à [Localité 10] et qu'il a été représenté lors de la signature de l'acte authentique ; de sorte qu'il ne peut être admis qu'il a pu se convaincre par lui-même avant la vente 'sur la consistance d'un bien qu'il a visité préalablement à la signature du compromis et qui à l''il nu faisait très certainement apparaître, fût-ce de manière approximative, les surfaces correspondant à son prix d'acquisition'.

Compte tenu de leur qualité de vendeur professionnel, puisqu'il est établi que [H] [I] veuve [L] et [K] [L] ont mis en vente vint huit lots dans le même ensemble immobilier, les vendeurs ne pouvaient ignorer que, même de manière approximative le bien vendu à [J] [G] était d'une superficie utile de moins de la moitié de la superficie annoncée.

La manoeuvre destinée à provoquer une erreur de nature à vicier le consentement de [J] [G] réside bien dans le fait de lui avoir annoncé une superficie de 53 m², au lieu de 22,20 m² loi CARREZ et 14,02 m² autres surfaces, alors que ce dernier, dont il n'est pas établi qu'il a visité le bien préalablement à la vente, n'avait pas la possibilité de se rendre compte du déficit de surface.

Cette différence de surface a vicié son consentement dès lors qu'il est certain que s'il avait connu la véritable superficie, [J] [G] soit n'aurait pas acquis le bien, soit en aurait donné un moindre prix.

Par ailleurs, la prétention selon laquelle les travaux effectués à la demande de [J] [G] auraient pu modifier la surface vendue est sans fondement ; en effet, compte tenu de la nature des travaux entrepris, il n'est pas sérieux de soutenir qu'ils ont pu réduire la superficie du lot ; en outre, les travaux étant censés avoir été terminés le 31 décembre 1998 date de la facture émise par la S.A.R.L. SEGBATI, il est certain qu'ils n'ont pu avoir un tel effet sur la consistance du lot, dont le vendeur a affirmé le 30 décembre 1998 qu'elle était de 53 m².

Quant au fait que la mesure produite par [J] [G] ne ferait pas la preuve de la véritable surface du lot, la contestation de [K] [L] n'est pas fondée : il ne peut nier qu'elle concerne bien le lot en cause ; la mesure a été faite par un professionnel dont l'attestation pour un mesurage loi CARREZ engage sa responsabilité ; enfin il ne propose pas d'en faire établir une de manière contradictoire.

Sur la demande dirigée contre la S.A.R.L. SEGBATI,

Selon la réponse faite à [J] [G] par l'inspecteur des impôts, il résulte des constatations effectuées par les services fiscaux, que c'est bien le vendeur qui a réalisé les travaux et vendu un appartement rénové même si la vente est intervenue avant leur achèvement ; le règlement de ces travaux a été fait pour le compte du vendeur le jour de la signature de l'acte, et constitue une charge augmentative du prix ; l'inspecteur a également souligné que les travaux de rénovation dont le prix avait été déterminé à l'avance, avaient été réalisés par une société dont les vendeurs étaient les uniques associés et qu'il existait une communauté d'intérêts évidente entre les vendeurs et la S.A.R.L. SEGBATI.

Il convient de rappeler que la facture de travaux a été réglée le jour de la signature de l'acte authentique et que le coût des travaux représente plus du double de celui de l'appartement.

Dans ces conditions, le montant des travaux étant en réalité un élément du prix de vente, c'est la somme totale de 315.250 Frs plus 735.584 Frs, soit 1.050.834 Frs qui doit servir de base à la diminution du prix payé par [J] [G].

La demande de [J] [G] tendant à obtenir une réduction du prix dans la proportion de ce dont il a été privé est amplement justifiée ; en effet, il a dû régler les charges de copropriété et payer les droits d'enregistrement sur la partie gonflée de la superficie vendue dont il ne demande même pas le remboursement ; compte tenu de leurs agissements et de leur communauté d'intérêts, [K] [L] et la S.A.R.L. SEGBATI seront tenus in solidum à l'égard de [J] [G].

Selon la base de 1.050.834 Frs représentant le prix payé pour 53 m² au lieu de 29,21 m² (22,20 m² +14.02m²/2), la demande de [J] [G] devrait être accueillie pour la somme de 471.685,66 Frs soit 71.908,02 € ; il a limité sa réclamation à la somme de 62.716,23 € qui lui sera allouée outre les intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 1998 et la capitalisation, la demande en ayant été faite dans l'assignation.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de [J] [G] les frais qu'il a dû exposer pour faire valoir ses droits et non compris dans les dépens ; [K] [L] et la S.A.R.L. SEGBATI devront lui payer une indemnité de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau,

Condamne in solidum [K] [L] et la S.A.R.L. SEGBATI à payer à [J] [G] la somme de 62.716,23 € outre les intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 1998 et la capitalisation, la demande en ayant été faite dans l'assignation,

Condamne in solidum [K] [L] et la S.A.R.L. SEGBATI à payer à [J] [G] une indemnité de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamne [K] [L] et la S.A.R.L. SEGBATI à tous les dépens de première instance et d'appel.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau code de procédure civile,

Signé par Madame LANDOZ, Président, et par Madame LAGIER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 09/00157
Date de la décision : 31/05/2011

Références :

Cour d'appel de Grenoble 01, arrêt n°09/00157 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-05-31;09.00157 ?
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