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23/05/2023 | SUISSE | N°2C_262/2023

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral, IIe Cour de droit public  , Arrêt du 23 mai 2023  , 2C 262/2023


 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_262/2023  
 
 
Arrêt du 23 mai 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hartmann. 
Greffière : Mme Colella. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________ SA, 
tous les deux représentés par Me Delphine Jobin 
et Me Matteo Pedrazzini, 
recourants, 
 
contre  
 
Administration

fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, 
Eigerstrasse 65, 3003 Berne, 
intimée. 
 
Objet 
Assistance administrative (CDI CH-FR), 
 
r...

 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_262/2023  
 
 
Arrêt du 23 mai 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hartmann. 
Greffière : Mme Colella. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________ SA, 
tous les deux représentés par Me Delphine Jobin 
et Me Matteo Pedrazzini, 
recourants, 
 
contre  
 
Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, 
Eigerstrasse 65, 3003 Berne, 
intimée. 
 
Objet 
Assistance administrative (CDI CH-FR), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour I, du 14 avril 2023 (A-1351/2022). 
 
 
Considérant en fait et en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le 10 décembre 2020, la Direction générale des finances publiques françaises (ci-après: l'autorité requérante) a adressé une demande d'assistance administrative à l'Administration fédérale des contributions (ci-après: l'Administration fédérale). Cette demande était fondée sur l'art. 28 de la Convention du 9 septembre 1966 entre la Suisse et la France en vue d'éliminer les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales (ci-après: CDI CH-FR; RS 0.672.934.91).  
Dans sa requête, l'autorité requérante indiquait que, suite à l'ouverture d'une procédure judiciaire consécutivement à une plainte pour fraude fiscale, les époux C.C.________ et D.C.________ faisaient l'objet d'une enquête en matière d'impôt sur le revenu pour les années fiscales 2012 à 2019, d'impôt de solidarité sur la fortune pour les années fiscales 2012 à 2017 et d'impôt sur la fortune immobilière pour les années fiscales 2018 et 2019. Les éléments en possession de l'autorité requérante révéleraient que les époux C.________ avaient déclaré être domiciliés en Belgique alors qu'ils résidaient en réalité de manière permanente en France. Du reste, ils y auraient tous deux exercé une activité professionnelle et ils y auraient effectué la majeure partie de leurs investissements durant les périodes concernées, dont ils auraient retirés une grande part de leur revenus. Ils détiendraient de nombreux comptes bancaires à l'étranger, notamment en Suisse auprès de la Banque E.________ SA (ci-après: la Banque), n'ayant pas été déclarés aux autorités fiscales françaises. La demande d'assistance visait à obtenir les renseignements nécessaires en vue d'établir les montants des impôts sur le revenu et sur la fortune éludés par les intéressés. 
 
1.2. Donnant suite à plusieurs demandes de production intervenues entre décembre 2020 et avril 2021, la Banque a transmis à l'Administration fédérale les informations demandées entre janvier et avril 2021. Parmi celles-ci figurent des documents relatifs à deux comptes bancaires dont B.________ SA et A.________ sont les titulaires respectifs, ce dernier étant par ailleurs l'administrateur de B.________ SA, société active dans le domaine de la biotechnologie.  
Le 21 mai 2021, l'Administration fédérale a transmis aux mandataires de A.________ et B.________ SA l'intégralité du dossier et leur a indiqué les informations qu'elle prévoyait de transmettre à l'autorité requérante. Les 17 et 28 juin 2021, ceux-ci se sont opposés à tout envoi d'informations les concernant. Le 27 août et le 9 septembre 2021, l'Administration fédérale a sollicité des informations complémentaires de la part de l'autorité requérante, qui lui ont été apportées le 9 septembre 2021. Le 20 décembre 2021, les intéressés ont déposé des observations complémentaires et maintenu leurs conclusions. 
 
1.3. Par décision finale du 16 février 2022, notifiée à A.________ et B.________ SA en tant que personnes habilitées à recourir, l'Administration fédérale a accordé l'assistance administrative à l'autorité française.  
Par décision finale du même jour, l'Administration fédérale a accordé l'assistance administrative dans la procédure concernant les époux C.________. 
A.________ et B.________ SA ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral. A titre préalable, ils ont demandé la suspension de la procédure jusqu'à droit connu dans la procédure concernant les époux C.________. Sur le fond, ils ont conclu, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de la décision finale de l'Administration fédérale du 16 février 2022 et au refus d'entrée en matière sur la demande d'assistance administrative du 10 décembre 2020. Subsidiairement, ils ont demandé le renvoi de la cause à l'Administration fédérale pour nouvelle décision. Par arrêt du 14 avril 2023, le Tribunal administratif fédéral a rejeté la demande de suspension, pour autant qu'elle ne soit pas devenue sans objet, et a rejeté le recours. 
 
1.4. Contre l'arrêt du 14 avril 2023 du Tribunal administratif fédéral, A.________ et B.________ SA forment un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Ils concluent, sous suite de frais et dépens, principalement, à l'annulation de l'arrêt du Tribunal administratif fédéral du 14 avril 2013 et au rejet de la demande d'assistance du 10 décembre 2020. Subsidiairement, ils demandent l'annulation dudit arrêt et le renvoi de la cause au Tribunal administratif fédéral pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Plus subsidiairement, ils concluent à l'annulation de l'arrêt entrepris et au renvoi de la cause au Tribunal administratif fédéral en lui ordonnant de renvoyer à son tour la cause à l'Administration fédérale pour qu'elle procède au caviardage des informations couvertes par un secret protégé par la Code pénal suisse. Ils demandent que l'effet suspensif soit restitué au recours.  
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
2.  
Selon l' art. 83 let . h LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière d'entraide administrative internationale, à l'exception de l'assistance administrative en matière fiscale. Il découle de l' art. 84a LTF que, dans ce dernier domaine, le recours n'est recevable que lorsqu'une question juridique de principe se pose ou lorsqu'il s'agit, pour d'autres motifs, d'un cas particulièrement important au sens de l' art. 84 al. 2 LTF . Il appartient au recourant de démontrer de manière suffisante en quoi les conditions de recevabilité de l' art. 84a LTF sont remplies ( art. 42 al. 2 LTF ; ATF 145 IV 99 consid. 1.5; 139 II 340 consid. 4), à moins que tel ne soit manifestement le cas (cf. ATF 146 II 150 consid. 1.2.1; 139 II 340 consid. 4 et 5). 
Selon la jurisprudence, la présence d'une question juridique de principe suppose que la décision en cause soit importante pour la pratique; cette condition est en particulier réalisée lorsque les instances inférieures doivent traiter de nombreuses causes analogues ou lorsqu'il est nécessaire de trancher une question juridique qui se pose pour la première fois et qui donne lieu à une incertitude caractérisée, laquelle appelle de manière pressante un éclaircissement de la part du Tribunal fédéral (ATF 139 II 404 consid. 1.3). Comme le Tribunal fédéral n'a pas pour fonction de trancher des questions abstraites (ATF 142 II 161 consid. 3), il faut que la question soulevée par la partie recourante se pose concrètement dans le cas d'espèce et qu'elle soit déterminante pour l'issue du litige (cf. arrêts 2C_505/2022 du 30 juin 2022 consid. 2.3; 2C_267/2022 du 12 avril 2022 consid. 2.2). 
 
3.  
Les recourants font valoir que la présente cause soulève la question juridique de principe de savoir si, dans le cadre d'une demande d'assistance administrative en matière fiscale, transmettre des informations protégées par le secret commercial, au sens de l' art. 162 CP , est compatible avec la réserve d'ordre public prévue à l' art. 28 par. 3 let . c CDI CH-FR. Ils expliquent qu'en sa qualité d'administrateur de B.________ SA, société active dans le domaine très sensible et concurrentiel de la biotechnologie, A.________ est astreint au secret commercial protégé par l' art. 162 CP . Or, transmettre à l'autorité requérante des données concernant la société, ses activités, ses partenaires, ses fournisseurs ou ses clients, serait contraire à l' art. 28 par. 3 let . c CDI CH-FR et inciterait l'Administration fédérale à commettre une violation de l' art. 273 CP . 
 
3.1. Selon l' art. 28 par. 3 let . c CDI CH-FR, les dispositions des par. 1 et 2 ne peuvent en aucun cas être interprétées comme imposant à un Etat contractant l'obligation de fournir des renseignements qui révéleraient un secret commercial, industriel, professionnel ou un procédé commercial ou des renseignements dont la communication serait contraire à l'ordre public. Le Tribunal fédéral a récemment eu l'occasion de se pencher sur la portée de dispositions conventionnelles calquées, comme l' art. 28 par. 3 let . c CDI CH-FR, sur l' art. 26 par. 3 let . c du Modèle de Convention fiscale de l'OCDE sur le revenu et la fortune (ci-après: MC OCDE), et plus particulièrement sur ce qu'il fallait entendre par "secret commercial", au sens de telles dispositions. Il a ainsi précisé que la notion de "secret commercial" était une notion conventionnelle autonome par rapport au droit interne (ATF 148 II 336 consid. 9.3 et 9.5.1), de sorte qu'il importait peu de savoir si des renseignements qui tombent dans le champ d'application de l' art. 26 par. 3 let . c MC OCDE révèlent ou non des secrets protégés par l'art. 162 du Code pénal suisse (cf. ATF 148 II 336 consid. 9.5.1). Quant à la notion d'ordre public, elle a aussi été récemment précisée en lien avec l'assistance administrative (cf. arrêt 2C_750/2020 du 25 mars 2021 consid. 6.7).  
Le Tribunal fédéral a également circonscrit la notion conventionnelle de "secret commercial" au sens de l' art. 26 par. 3 let . c MC OCDE, respectivement de l' art. 28 par. 3 let . c CDI CH-FR. Il a aussi souligné qu'une clause d'échange de renseignements calquée sur l' art. 26 par. 3 let . c MC OCDE signifie seulement qu'un Etat contractant n'est pas obligé d'échanger des renseignements vraisemblablement pertinents comme le prévoit le par. 1, si ceux-ci devaient aboutir à révéler un secret commercial, industriel, professionnel, ou un procédé commercial, et ce même si l'État requérant s'est engagé à maintenir le secret (par. 2). Une telle disposition permet donc à l'État requis de refuser d'échanger un renseignement vraisemblablement pertinent, mais ne lui interdit pas de le faire (ATF 148 II 336 consid. 9.4.1). 
 
3.2. La question soulevée par les recourants, et en particulier leur argument selon lequel la protection des secrets définis dans le Code pénal suisse devrait prévaloir sur l' art. 28 par. 3 let . c CDI CH-FR, trouve donc déjà une réponse dans la jurisprudence récente du Tribunal fédéral (ATF 148 II 366). Le point de savoir si c'est à bon droit que l'Administration fédérale a accordé l'assistance administrative à l'autorité requérante et accepté de transmettre les renseignements requis relève ainsi uniquement de l'application des principes exposés ci-avant (cf. supra consid. 3.1) au cas d'espèce, ce qui ne constitue pas une question juridique de principe. Il convient d'ajouter, en lien avec une éventuelle atteinte à l'ordre public, que celle-ci peut justifier d'entrer en matière en raison d'un cas particulièrement important, au sens de l' art. 84 al. 2 LTF , indépendamment de l'existence d'une question juridique de principe. Il faut cependant que le recourant qui entend s'en prévaloir démontre de manière suffisante ("mit genügender Wahrscheinlichbarkeit") en quoi il risquerait une sanction relevant de l'ordre public, en l'espèce au sens de l' art. 28 par. 3 let . c CDI CH-FR, ou serait exposé à une autre atteinte à l'ordre public en cas de transmission de ses données (cf. arrêt 2C_89/2023 du 16 février 2023 consid. 4.3; 2C_664/2022 du 13 septembre 2022 consid. 4). Tel n'est pas le cas en l'espèce. Il en découle que rien ne justifie d'entrer en matière en application de l' art. 84a LTF .  
 
4.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable en vertu des art. 107 al. 3 et 109 al. 1 LTF, étant précisé que, comme l'arrêt attaqué émane du Tribunal administratif fédéral, la voie du recours constitutionnel subsidiaire ne saurait entrer en considération (art. 113 a contrario LTF). 
Cette conséquence fait perdre tout objet à la demande de restitution de l'effet suspensif contenue dans le recours, à supposer que les recourants aient eu un intérêt à demander son octroi, l'effet suspensif étant déjà prévu à l' art. 103 al. 2 let . d LTF (arrêts 2C_228/2023 du 3 mai 2023 consid. 4; 2C_232/2022 du 5 avril 2022 consid. 3). 
 
5.  
Succombant, les recourants doivent supporter les frais de justice devant le Tribunal fédéral, solidairement entre eux ( art. 66 al. 1 et 5 LTF ). Il ne sera pas alloué de dépens ( art. 68 al. 1 et 3 LTF ). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants, à l'Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, et au Tribunal administratif fédéral, Cour I. 
 
 
Lausanne, le 23 mai 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : S. Colella 



Références :

Origine de la décision
Formation : Iie cour de droit public  
Date de la décision : 23/05/2023
Date de l'import : 09/06/2023

Fonds documentaire ?: www.bger.ch


Numérotation
Numéro d'arrêt : 2C_262/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2023-05-23;2c.262.2023 ?

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