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03/05/2023 | SUISSE | N°2C_228/2023

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral, IIe Cour de droit public  , Arrêt du 3 mai 2023  , 2C 228/2023


 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_228/2023  
 
 
Arrêt du 3 mai 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hänni. 
Greffière : Mme Colella. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________, 
tous les deux représentés par Me Lassana Dioum, avocat, 
recourantes, 
 
contre  
 
Administration fédérale des contribution

s, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, 
Eigerstrasse 65, 3003 Berne, 
intimée. 
 
Objet 
Assistance administrative (CDI CH-GB), 
 
recours contre l'arrêt du...

 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_228/2023  
 
 
Arrêt du 3 mai 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hänni. 
Greffière : Mme Colella. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________, 
tous les deux représentés par Me Lassana Dioum, avocat, 
recourantes, 
 
contre  
 
Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, 
Eigerstrasse 65, 3003 Berne, 
intimée. 
 
Objet 
Assistance administrative (CDI CH-GB), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif 
fédéral, Cour I, du 4 avril 2023 (A-3512/2022). 
 
 
Considérant en fait et en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le 12 janvier 2022, l'autorité fiscale du Royaume-Uni (ci-après: l'autorité requérante) a adressé une demande d'assistance administrative à l'Administration fédérale des contributions (ci-après: l'Administration fédérale) fondée sur l'art. 25 de la Convention du 8 décembre 1977 entre la Confédération suisse et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu (RS 0.672.936.712) et sur la Convention du Conseil de l'Europe et de l'OCDE du 25 janvier 1988 concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale, telle qu'amendée par le Protocole du 27 mai 2010 (RS 0.652.1).  
L'autorité requérante exposait que sa demande visait à procéder à la taxation correcte de A.________ en matière d'impôt sur les sociétés pour la période comprise entre le 1er janvier 2015 et le 31 décembre 2019. Cette société était soupçonnée d'avoir dissimulé des bénéfices auprès de sociétés tierces, notamment la société B.________ sise à U.________, avec laquelle elle serait liée par des accords de coentreprises ("joint venture") dont la réalité économique était douteuse. L'autorité requérante précisait que sa demande faisait suite à une première demande concernant A.________, datée du 9 avril 2020, déjà exécutée. Dans le cadre de cette première demande, des informations relatives à l'identité des signataires autorisés d'un compte bancaire ouvert en Suisse par B.________ auprès de la banque C.________ lui avaient notamment été transmises, de même que les relevés bancaires afférents audit compte pour la période allant du 6 avril 2011 au 31 décembre 2017. L'autorité requérante précisait que, depuis l'exécution de cette première demande, un autre compte bancaire en Suisse avait été identifié au nom de B.________ auprès de la banque D.________, d'une part, et que la période d'enquête, allant initialement jusqu'au 31 décembre 2017, avait été prolongée jusqu'au 31 décembre 2019, d'autre part. Dans le cadre de sa nouvelle demande, l'autorité requérante sollicitait ainsi des informations sur les signataires autorisés du compte bancaire auprès de la banque D.________ et les relevés bancaires y afférents pour la période du 6 avril 2011 au 31 décembre 2019, de même que les relevés bancaires relatifs au compte bancaire détenu par B.________ auprès de la banque C.________ pour la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019. Elle précisait en outre que l'obtention d'informations antérieures à la période sous enquête visait à s'assurer de la réalité des accords de coentreprises entre les entités impliquées. 
Déférant à une ordonnance de production, la banque D.________ a transmis les informations à l'Administration fédérale le 3 février 2022. Le 8 mars 2022, l'Administration fédérale a communiqué au mandataire commun de A.________ et B.________ les informations qu'elle prévoyait de transmettre à l'autorité requérante. Le 11 avril 2022, ledit mandataire s'est opposé à tout envoi d'informations à l'autorité requérante. 
 
1.2. Par décision finale du 12 juillet 2022, l'Administration fédérale a accordé l'assistance administrative et décidé de transmettre à l'autorité requérante tous les renseignements qu'elle avait requis. Elle a également informé l'autorité requérante que les renseignements transmis ne pouvaient être utilisées que dans le cadre de procédure relative à A.________.  
Le 15 août 2022, A.________ et B.________ ont chacune interjeté un recours devant le Tribunal administratif fédéral contre la décision du 12 juillet 2022. 
Par arrêt du 4 avril 2023 et après avoir joint les causes, le Tribunal administratif fédéral a rejeté les recours. Contrairement à ce que soutenaient les recourantes, les noms des personnes figurant dans les relevés bancaires étaient des renseignements qui remplissaient la condition de la pertinence vraisemblable, car ils étaient susceptibles d'apporter à l'autorité requérante des informations utiles pour éclaircir la situation fiscale de A.________ et n'apparaissaient pas par hasard dans la documentation. 
 
1.3. Contre cet arrêt, les sociétés A.________ et B.________ forment un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Elles concluent, sous suite de frais et dépens, principalement, à l'annulation de la décision finale du 12 juillet 2022 de l'Administration fédérale et au rejet de l'assistance administrative; subsidiairement, à l'annulation de la décision finale du 12 juillet 2022 de l'Administration fédérale et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Elles sollicitent également l'octroi de l'effet suspensif.  
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
2.  
Selon l' art. 83 let . h LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière d'entraide administrative internationale, à l'exception de l'assistance administrative en matière fiscale. Il découle de l' art. 84a LTF que, dans ce dernier domaine, le recours n'est recevable que lorsqu'une question juridique de principe se pose ou lorsqu'il s'agit, pour d'autres motifs, d'un cas particulièrement important au sens de l' art. 84 al. 2 LTF . Il appartient au recourant de démontrer de manière suffisante en quoi les conditions de recevabilité de l' art. 84a LTF sont remplies ( art. 42 al. 2 LTF ; ATF 145 IV 99 consid. 1.5; 139 II 340 consid. 4), à moins que tel ne soit manifestement le cas (cf. ATF 146 II 150 consid. 1.2.1; 139 II 340 consid. 4 et 5). 
Selon la jurisprudence, la présence d'une question juridique de principe suppose que la décision en cause soit importante pour la pratique; cette condition est en particulier réalisée lorsque les instances inférieures doivent traiter de nombreuses causes analogues ou lorsqu'il est nécessaire de trancher une question juridique qui se pose pour la première fois et qui donne lieu à une incertitude caractérisée, laquelle appelle de manière pressante un éclaircissement de la part du Tribunal fédéral (ATF 139 II 404 consid. 1.3). Comme le Tribunal fédéral n'a pas pour fonction de trancher des questions abstraites (ATF 142 II 161 consid. 3), il faut que la question soulevée par la partie recourante se pose concrètement dans le cas d'espèce et qu'elle soit déterminante pour l'issue du litige (cf. arrêts 2C_505/2022 du 30 juin 2022 consid. 2.3; 2C_267/2022 du 12 avril 2022 consid. 2.2). 
 
3.  
Les recourantes soulèvent trois questions juridiques de principe qui, comme elles le laissent entendre elles-mêmes, se recoupent. 
 
3.1. La première question juridique de principe est liée au principe de proportionnalité prévu à l'art. 4 al. 3 de la loi fédérale du 28 septembre 2012 sur l'assistance administrative internationale en matière fiscale (LAAF; RS 651.1) et à l'interdiction de la pêche aux renseignements. Dans la mesure où l'on peut saisir leur argumentation, les recourantes semblent considérer que, comme la demande litigieuse fait suite à une première demande qui avait permis la communication à l'Etat requis de relevés bancaires comprenant des noms de tiers, la seconde demande devrait se limiter à ces noms.  
 
3.1.1. La notion de pêche aux renseignements a déjà été circonscrite dans la jurisprudence. Le Tribunal fédéral a ainsi précisé qu'elle présentait à la fois un caractère procédural (une demande ne doit pas être formée à des fins exploratoires, mais être liée à l'existence d'une enquête dans l'Etat requérant) et qu'elle constituait par ailleurs une limite matérielle à l'échange de renseignements, en ce sens que l'assistance administrative ne doit pas permettre à l'Etat requérant d'obtenir des renseignements qui n'auraient pas de lien suffisamment concret avec l'état de fait présenté dans la demande (cf. arrêt 2C_1162/2016 du 4 octobre 2017 consid. 9.1.1 et 9.1.2; 2C_141/2018 du 24 juillet 2020 consid. 7.5). Le Tribunal fédéral a aussi souligné que ce serait méconnaître le sens et le but de l'assistance administrative que d'exiger de l'Etat requérant qu'il présente une demande dépourvue de lacune et de contradiction, la demande d'assistance impliquant par nature certains aspects obscurs que les informations demandées à l'Etat requis doivent précisément éclaircir (cf. ATF 142 II 161 consid. 2.1.1 in fine; 139 II 404 consid. 7.2.2).  
Quant à la transmissibilité de renseignements comprenant des noms de tiers en regard de l' art. 4 al. 3 LAAF , le Tribunal fédéral a aussi fixé les règles applicables, tendant à assurer un équilibre entre la protection des intérêts légitimes des personnes qui ne sont pas des personnes concernées et l'intérêt de l'Etat requérant à élucider la situation fiscale d'un contribuable. La transmission de noms de tiers n'est admissible que si elle est vraisemblablement pertinente par rapport à l'objectif fiscal visé par l'Etat requérant et que leur remise est conforme au principe de la proportionnalité, de sorte que leur caviardage rendrait vide de sens la demande d'assistance administrative (ATF 144 II 29 consid. 4.2.3; 143 II 506 consid. 5.2.1). Le nom d'un tiers peut donc figurer dans la documentation à transmettre s'il est de nature à contribuer à élucider la situation fiscale du contribuable visé (ATF 144 II 29 consid. 4.2.3). 
 
3.1.2. Les principes invoqués par les recourantes ont donc déjà été définis dans la jurisprudence. En outre, en matière d'assistance administrative, la règle est que l'Etat requérant peut renouveler ses demandes. On ne voit donc pas en quoi la transmission, lors de la première demande, de renseignements qui comportaient des noms de tiers, pourrait empêcher ou limiter la transmission, lors de la seconde demande, d'informations comprenant également des noms de tiers. Le fait qu'une seconde demande ait été déposée à la suite d'une première demande n'implique pas, en lui-même, une analyse juridique spécifique qui relèverait de la question juridique de principe. Savoir si ces noms peuvent ou non être transmis relève uniquement de l'application des principes jurisprudentiels exposés ci-avant (cf. supra consid. 3.1.1) au cas d'espèce. La première question soulevée ne relève donc pas de l' art. 84a LTF .  
 
3.2. La seconde question juridique de principe posée par les recourantes consiste à savoir si l'identité des tiers non concernés peut constituer une information vraisemblablement pertinente, dès lors que l'Etat requérant a déjà obtenu la communication de relevés bancaires mentionnant ces mêmes personnes.  
Cette question se recoupe avec la première et il peut être renvoyé à ce qui y a déjà été exposé (cf. supra consid. 3.1). Il convient de rappeler que savoir si une information est ou non vraisemblablement pertinente en fonction des circonstances d'espèce, en particulier en présence d'une seconde demande, n'est pas une question juridique de principe, car chaque demande doit s'apprécier pour elle-même et respecter les exigences de l'assistance administrative. 
 
3.3. La troisième et dernière question juridique de principe formulée par les recourantes est en lien avec le caviardage des noms de tiers. Elle porte sur le point de savoir si un tel caviardage est de nature à rendre vide de sens la demande lorsque l'Etat requérant " obtiendrait l'intégralité des renseignements demandés concernant la personne concernée et les personnes habilitées à recourir, et notamment dans le cas où, l'Etat requérant ayant déjà obtenu communication de relevés bancaires des personnes en question à l'occasion d'une procédure d'entraide administrative, avait déjà connaissance de l'identité des tiers potentiellement liés aux personnes concernées ".  
Comme déjà indiqué, le Tribunal fédéral a posé les règles consistant à déterminer dans quels cas les noms de tiers doivent être caviardés (cf. ATF 142 II 161 consid. 4.6.1; cf. aussi supra consid. 3.1.1). Ensuite, comme cela a du reste déjà été souligné en lien avec une question presque similaire posée dans le cadre de la première procédure initiée par l'Etat requérant le 9 avril 2020 et qui concernait les mêmes parties (cf. arrêt 2C_554/2021 du 26 juillet 2021 consid. 3.4; cf. supra consid. 1.1), le sens de cette question est peu clair, de sorte que l'on peut douter que le recours soit suffisamment motivé sur ce point ( art. 42 al. 2 LTF ; cf. supra consid. 2). Cette question peut toutefois rester ouverte. En effet, les noms des tiers figurant dans les relevés bancaires ne sont pas destinés à être caviardés, puisque les recourantes ont requis en vain leur caviardage devant l'instance précédente (arrêt attaqué consid. 5.2.1 à 5.2.9). La problématique soulevée est ainsi purement théorique. Enfin, savoir si les informations devaient ou non être caviardées en l'espèce relèvent de l'appréciation des circonstances, et pas de la question juridique de principe au sens de l' art. 84a LTF . 
 
4.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable en vertu des art. 107 al. 3 et 109 al. 1 LTF, étant précisé que, comme l'arrêt attaqué émane du Tribunal administratif fédéral, la voie du recours constitutionnel subsidiaire ne saurait entrer en considération (art. 113 a contrario LTF). 
Cette conséquence fait perdre tout objet à la demande d'effet suspensif contenue dans le recours, à supposer que les recourantes aient eu un intérêt à demander son octroi, l'effet suspensif étant déjà prévu à l' art. 103 al. 2 let . d LTF (arrêts 2C_232/2022 du 5 avril 2022 consid. 3; 2C_53/2021 du 22 janvier 2021 consid. 5). 
 
5.  
Succombant, les recourantes doivent supporter les frais de justice devant le Tribunal fédéral, solidairement entre elles ( art. 66 al. 1 et 5 LTF ). Il ne sera pas alloué de dépens ( art. 68 al. 1 et 3 LTF ). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourantes, solidairement entre elles. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourantes, à l'Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, et au Tribunal administratif fédéral, Cour I. 
 
 
Lausanne, le 3 mai 2023 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : S. Colella 



Références :

Origine de la décision
Formation : Iie cour de droit public  
Date de la décision : 03/05/2023
Date de l'import : 30/05/2023

Fonds documentaire ?: www.bger.ch


Numérotation
Numéro d'arrêt : 2C_228/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2023-05-03;2c.228.2023 ?

Source

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