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27/04/2023 | SUISSE | N°5A_565/2022

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral, IIe Cour de droit civil  , Arrêt du 27 avril 2023  , 5A 565/2022


 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_565/2022  
 
 
Arrêt du 27 avril 2023  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
Schöbi et Bovey. 
Greffière : Mme Bouchat. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Robert Assaël, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Daniel Meyer, avocat, 
intimée. 
 
Objet >mesures protectrices de l'union conjugale (contribution 
d'entretien), 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de 
justice du canton de Genève du 14 juin 2022 
(C/8853/2020, AC...

 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_565/2022  
 
 
Arrêt du 27 avril 2023  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
Schöbi et Bovey. 
Greffière : Mme Bouchat. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Robert Assaël, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Daniel Meyer, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
mesures protectrices de l'union conjugale (contribution 
d'entretien), 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de 
justice du canton de Genève du 14 juin 2022 
(C/8853/2020, ACJC/819/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
B.________ (1974), et A.________ (1972) se sont mariés en 2011. Les époux vivent séparés depuis le mois de janvier 2020. 
Les enfants C.________ et D.________, nées respectivement en 2011 et en 2012, sont issues de cette union. B.________ est également la mère de deux autres enfants, issus d'une précédente union et aujourd'hui majeurs. 
 
B.  
Par jugement du 26 juillet 2021, le Tribunal de première instance de Genève, statuant par voie de mesures protectrices de l'union conjugale, a notamment instauré une garde alternée sur les deux enfants, à exercer par le père du lundi 16h00 au mercredi 12h00 et, par la mère, du mercredi 12h00 au vendredi à la sortie de l'école et, en alternance pour chacun, à raison d'un week-end sur deux, du vendredi à la sortie de l'école, au lundi retour à l'école, ainsi que pendant la moitié des vacances scolaires (3), a condamné le père à verser en mains de la mère, par mois et d'avance, allocations familiales en sus, une contribution d'entretien de 445 fr. en faveur de C.________, et de 345 fr. en faveur de D.________, dues avec effet au 1er mai 2020, sous imputation des avances d'entretien totalisant 19'200 fr. au 31 juillet 2021 (4) et a condamné le père à verser en mains de la mère, par mois et d'avance, une contribution d'entretien de 5'000 fr., due avec effet au 1er mai 2020, sous imputation des avances d'entretien totalisant, au 31 juillet 2021, un montant de 42'090 fr. (7). 
 
Par acte du 6 août 2021, le père a interjeté appel notamment contre les chiffres 4 et 7 du dispositif du jugement précité. 
 
Par arrêt du 14 juin 2022, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a notamment annulé les chiffres 4 et 7 du dispositif du jugement précité et, statuant à nouveau, a condamné le père à verser en mains de la mère, par mois et d'avance, les contributions d'entretien suivantes pour les enfants, à savoir 2'695 fr. pour C.________ et 2'595 fr. pour D.________ du 1er mai 2020 au 31 mars 2021, 1'700 fr. pour C.________ et 1'600 fr. pour D.________ du 1er avril 2021 au 15 mars 2022, 1'690 fr. par enfant du 16 mars 2022 au 31 octobre 2022, et 915 fr. par enfant dès le 1er novembre 2022, et a condamné le père à verser à la mère, par mois et d'avance, une contribution à son entretien de 860 fr. du 1er mai 2020 au 31 mars 2021, 1'640 fr. du 1er avril 2021 au 15 mars 2022, 1'580 fr. du 16 mars 2022 au 31 octobre 2022 et 2'200 fr. dès le 1er novembre 2022. 
 
 
C.  
Par acte du 21 juillet 2022, A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt précité en concluant en substance à son annulation (3) et à sa réforme en ce sens que les coûts d'entretien courants des deux enfants sont assumés par moitié par chacune des parties lorsqu'elles en ont la garde (4), que les charges mensuelles fixes des enfants, à savoir les primes d'assurance-maladie, les frais de cantine scolaire et les cours d'anglais sont pris en charge par la mère, à charge pour le père de lui laisser conserver la totalité des allocations familiales (5), et qu'aucune contribution d'entretien n'est due par le père en faveur de la mère ou des enfants (6). Le recourant a également requis l'effet suspensif. 
 
Les deux parties ont sollicité l'octroi de l'assistance judiciaire. 
 
Par ordonnance présidentielle du 15 août 2022, l'effet suspensif a été accordé pour les arriérés de contributions d'entretien dus jusqu'à la fin du mois précédant le dépôt de la requête d'effet suspensif, en l'occurrence jusqu'à la fin du mois de juin 2022, et a été rejeté pour le surplus. 
 
Le 16 mars 2023, l'intimée a produit une pièce datant du 17 octobre 2022. 
 
Il n'a pas été demandé d'observations sur le fond. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Déposé en temps utile (art. 46 al. 2 let. a et 100 al. 1 LTF) et dans les formes légales ( art. 42 al. 1 LTF ), le recours est dirigé contre une décision finale ( art. 90 LTF ; ATF 133 III 393 consid. 4) rendue sur recours par une autorité supérieure statuant en dernière instance cantonale ( art. 75 al. 1 et 2 LTF ), dans une affaire matrimoniale ( art. 72 al. 1 LTF ) de nature pécuniaire, dont la valeur litigieuse atteint 30'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a et al. 4 et 74 al. 1 let. b LTF). Le recourant a participé à la procédure devant l'autorité précédente et a un intérêt digne de protection à la modification ou l'annulation de la décision entreprise ( art. 76 al. 1 LTF ). Le recours en matière civile est donc en principe recevable. 
 
2.  
 
2.1. Comme la décision attaquée porte sur des mesures provisionnelles au sens de l' art. 98 LTF (ATF 134 III 667 consid. 1.1; 133 III 393 consid. 5; 585 consid. 3.3), le recourant ne peut dénoncer que la violation de ses droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés par le recourant (" principe d'allégation "; art. 106 al. 2 LTF ), c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1). Le recourant ne peut pas se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en procédure d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre cognition, notamment en se contentant d'opposer sa thèse à celle de l'autorité précédente; les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 142 III 364 consid. 2.4; 140 III 264 consid. 2.3 et les références).  
 
En particulier, une décision ne peut être qualifiée d'arbitraire ( art. 9 Cst. ) que si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 145 II 32 consid. 5.1; 144 I 170 consid. 7.3; 141 III 564 consid. 4.1); il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable; pour que cette décision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 147 I 241 consid. 6.2.1; 144 I 113 consid. 7.1; 144 I 170 consid. 7.3). 
 
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente ( art. 105 al. 1 LTF ). Dans l'hypothèse d'un recours soumis à l' art. 98 LTF , le recourant qui entend invoquer que les faits ont été établis de manière manifestement inexacte ne peut obtenir la rectification ou le complètement des constatations de fait de l'arrêt cantonal que s'il démontre la violation de droits constitutionnels, conformément au principe d'allégation susmentionné (cf. supra consid. 2.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 et la référence). Le recourant ne peut pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires au sens de l' art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable ( art. 106 al. 2 LTF ; ATF 141 IV 249 consid. 1.3.1; 140 III 264 consid. 2.3 et les références).  
 
 
2.3. La pièce produite par l'intimée en annexe à son courrier du 16 mars 2023, qui est largement postérieure à l'arrêt attaquée, est d'emblée irrecevable ( art. 99 al. 1 LTF ; ATF 139 III 120 consid. 3.1.2).  
 
 
3.  
Le recour ant se plaint de l'application arbitraire de l' art. 176 al. 1 ch. 1 CC . 
 
 
3.1. Il reproche à la cour cantonale de lui avoir arbitrairement imputé un revenu hypothétique.  
 
 
3.1.1.  
 
3.1.1.1. Le principe et le montant de la contribution d'entretien due selon l' art. 176 al. 1 ch. 1 CC se déterminent en fonction des facultés économiques et des besoins respectifs des époux. Le juge doit partir de la convention, expresse ou tacite, que les conjoints ont conclue au sujet de la répartition des tâches et des ressources entre eux, l' art. 163 CC demeurant la cause de leur obligation d'entretien réciproque (ATF 140 III 337 consid. 4.2.1; 138 III 97 consid. 2.2). Il doit ensuite prendre en considération qu'en cas de suspension de la vie commune, le but de l' art. 163 al. 1 CC impose à chacun des époux le devoir de participer, selon ses facultés, aux frais supplémentaires qu'engendre la vie séparée (ATF 137 III 385 consid. 3.1, précisant l'arrêt paru aux ATF 128 III 65).  
 
Le revenu d'un indépendant est constitué par son bénéfice net, à savoir la différence entre les produits et les charges. En cas de revenus fluctuants, pour obtenir un résultat fiable, il convient de tenir compte, en général, du bénéfice net moyen réalisé durant plusieurs années (dans la règle, les trois dernières). Plus les fluctuations de revenus sont importantes et les données fournies par l'intéressé incertaines, plus la période de comparaison doit être longue (ATF 143 III 617 consid. 5.1; arrêts 5A_20/2020 du 28 août 2020 consid. 3.3 et les références; 5A_676/2019 du 12 mars 2020 consid. 3.2 et les références). 
 
Lorsque les allégations sur le montant des revenus ne sont pas vraisemblables ou que les pièces produites ne sont pas convaincantes - par exemple lorsque les comptes de résultat manquent -, les prélèvements privés peuvent être pris en considération, car ils constituent un indice permettant de déterminer le train de vie de l'intéressé; cet élément peut alors servir de référence pour fixer la contribution due (arrêts 5A_20/2020 précité consid. 3.3 et les références; 5A_676/2019 précité consid. 3.2; 5A_455/2017 du 10 août 2017 consid. 3.1). Pour subvenir à ses besoins courants, un indépendant opère en effet généralement des prélèvements privés réguliers en cours d'exercice, anticipant ainsi le bénéfice net de l'exercice qui résulte des comptes établis à la fin de celui-ci (arrêts 5A_20/2020 précité consid. 3.3 et les références; 5A_24/2018 du 21 septembre 2018 consid. 4.1; 5A_455/2017 précité consid. 3.1). La détermination du revenu d'un indépendant peut en conséquence se faire en référence soit au bénéfice net, soit aux prélèvements privés, ces deux critères étant toutefois exclusifs l'un de l'autre (arrêts 5A_1048/2021 du 11 octobre 2022 consid. 4.2 et les références; 5A_20/2020 précité consid. 3.3 et les références; 5A_676/2019 précité consid. 3.2). 
 
 
3.1.1.2. Pour fixer la contribution d'entretien, le juge doit en principe tenir compte du revenu effectif des parties. Toutefois, tant le débiteur d'entretien que le créancier peuvent se voir imputer un revenu hypothétique supérieur. Il s'agit ainsi d'inciter la personne à réaliser le revenu qu'elle est en mesure de se procurer et qu'on peut raisonnablement exiger d'elle afin de remplir ses obligations (ATF 143 III 233 consid. 3.2; 137 III 102 consid. 4.2.2.2; arrêt 5A_407/2021 du 6 mai 2022 consid. 3.2 et les références). Le juge doit ainsi examiner successivement deux conditions. Il doit d'abord déterminer si l'on peut raisonnablement exiger d'une personne qu'elle exerce une activité lucrative ou augmente celle-ci, eu égard, notamment, à sa formation, à son âge et à son état de santé; il s'agit d'une question de droit. Le juge doit ensuite établir si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir, compte tenu des circonstances subjectives susmentionnées, ainsi que du marché du travail; il s'agit là d'une question de fait (ATF 143 III 233 précité consid. 3.2; 137 III 102 précité consid. 4.2.2.2). Afin de déterminer si un revenu hypothétique doit être imputé, les circonstances concrètes de chaque cas sont déterminantes. Les critères dont il faut tenir compte sont notamment l'âge, l'état de santé, les connaissances linguistiques, la formation (passée et continue), l'expérience professionnelle, la flexibilité sur les plans personnel et géographique, la situation sur le marché du travail, etc. (ATF 147 III 308 consid. 5.6; arrêt 5A_407/2021 précité consid. 3.2).  
 
S'agissant de l'obligation d'entretien d'un enfant mineur, les exigences à l'égard des père et mère sont plus élevées, en sorte que ceux-ci doivent réellement épuiser leur capacité maximale de travail et ne peuvent pas librement choisir de modifier leurs conditions de vie si cela a une influence sur leur capacité de subvenir aux besoins de l'enfant mineur (ATF 137 III 118 consid. 3.1; arrêt 5A_192/2021 du 18 novembre 2021 consid. 7.1.1). 
 
 
3.1.2. L'autorité cantonale a retenu que le père était designer de montres et avait exploité du 16 août 2019 au 5 novembre 2021 l'entreprise en raison individuelle E.________. La comptabilité de celle-ci n'étant pas fiable - l'intéressé admettant y avoir introduit à certaines occasions des charges personnelles telles que le loyer de son logement -, il était impossible de déterminer son revenu mensuel net généré par son activité indépendante sur la seule base des bénéfices figurant dans les comptes 2019 et 2020 de son entreprise, étant encore précisé qu'il admettait percevoir un revenu mensuel (4'000 fr. à 5'000 fr.) supérieur aux bénéfices réalisés (2019 : 44'962 fr. 15/12 = 3'746 fr. 85; 2020 : 13'876 fr. 75/12 = 1'156 fr. 40). L'autorité précédente a ajouté que, durant la période du 13 septembre 2019 au 5 juillet 2021, le père avait encaissé 74'723 fr. 55 de E.________, 8'000 fr. de F.________ et G.________, et 67'094 fr. 85 d'indemnités de la Caisse cantonale genevoise de compensation, ce qui représentait un montant mensuel moyen de 6'968 fr. 30, arrondi à 6'970 francs. Or, dans la mesure où il était titulaire d'un compte (CH xxx) au sujet duquel il n'avait donné aucune explication et que ses dépenses courantes d'entretien n'étaient pas débitées de son compte postal (CH yyy), son revenu mensuel net devait être vraisemblablement supérieur au montant précité de 6'970 francs. L'autorité cantonale a ainsi considéré que, faute d'éléments probants, il convenait d'imputer un revenu hypothétique au père.  
 
Sur la base du calculateur de salaires en ligne Salarium, Calculateur statistique de salaires 2018, il a été retenu qu'un homme de la région lémanique, dans le domaine de l'horlogerie, exerçant une profession des sciences et techniques d'un niveau de cadre supérieur et moyen (au vu de son statut d'indépendant) à raison de 40 heures par semaine, après un apprentissage complet et âgé de 50 ans, percevait un salaire mensuel de 9'230 fr. (25 % des salaires), de 10'331 fr. (50 % des salaires) et de 11'557 fr. (25 % des salaires). Compte tenu de l'âge de l'intéressé et de son expérience professionnelle d'au moins dix ans, au vu de sa première demande de brevet effectuée en novembre 2011, la cour cantonale a retenu que la prise en considération de la valeur médiane de 10'331 fr. s'imposait, dont à déduire 15 % de cotisations sociales, à savoir un revenu mensuel net estimé à 9'823 fr. 45, arrondi à 9'800 francs. 
 
 
3.1.3. Le recourant soutient que l'autorité cantonale aurait versé dans l'arbitraire en refusant de se fonder sur les comptes de son entreprise pour déterminer son revenu effectif. Il ajoute que dans la mesure où une augmentation de celui-ci ne saurait être exigée, les conditions pour lui imputer un revenu hypothétique feraient défaut.  
 
 
3.1.4. En l'espèce, le refus de la cour cantonale de se fonder sur les comptes de E.________ s'explique par le manque de fiabilité de la comptabilité de l'entreprise. L'autorité précédente a en effet été empêchée d'appréhender le revenu du recourant sur la seule base des bénéfices mentionnés dans les comptes 2019 et 2020 de E.________, l'intéressé ayant lui-même admis avoir introduit à certaines occasions des charges personnelles. Ainsi, elle n'a pas versé dans l'arbitraire, en renonçant à se baser sur les comptes précités.  
 
A cette comptabilité défaillante s'est ajoutée l'impossibilité de déterminer le revenu du recourant sur la base de ses prélèvements privés, en raison notamment de l'absence d'explication quant au compte CH xxx. Partant, on ne voit pas en quoi la cour cantonale aurait fait preuve d'arbitraire en considérant, au stade des mesures protectrices de l'union conjugale et en présence de deux enfants mineurs, que l'imputation d'un revenu hypothétique se justifiait, faute de pouvoir d'une manière ou d'une autre déterminer si la mise à profit de la capacité de gain du père était totale. Son grief doit donc être rejeté. 
 
 
3.2. Le recourant reproche à l'autorité précédente d'avoir arbitrairement imputé un revenu hypothétique à la mère correspondant à un emploi à 50 %, estimant ce taux d'activité insuffisant.  
 
 
3.2.1. Selon la jurisprudence, on est en droit d'attendre du parent se consacrant à la prise en charge des enfants qu'il recommence à travailler, en principe, à 50 % dès l'entrée du plus jeune enfant à l'école obligatoire, à 80 % à partir du moment où celui-ci débute le degré secondaire, et à 100 % dès la fin de sa seizième année (ATF 144 III 481 consid. 4.7.6). Les lignes directrices établies par la jurisprudence ne sont toutefois pas des règles strictes et leur application dépend du cas concret; le juge du fait en tient compte dans l'exercice de son large pouvoir d'appréciation ( art. 4 CC ; ATF 144 III 481 précité consid. 4.7.9).  
 
Lorsque la prise en charge d'un enfant est assumée par les deux parents, la capacité de gain de chacun d'eux n'est en principe réduite que dans la mesure de la prise en charge effective (arrêt 5A_472/2019 du 3 novembre 2020 consid. 3.2.2 et les références). 
 
 
3.2.2. L'autorité cantonale a retenu que la mère n'avait pas été assidue dans ses recherches d'emploi au vu de la vingtaine de postulations effectuée en 15.5 mois, à savoir du 14 juillet 2020 au 8 novembre 2021, date à laquelle la cause avait été gardée à juger. Elle a ajouté que s'il lui avait été difficile de trouver un poste durant la période précitée, en raison de la crise économique liée à la pandémie du coronavirus, tel n'était plus le cas aujourd'hui, raison pour laquelle il convenait de lui imputer un revenu hypothétique et de l'estimer selon le calculateur Salarium. La cour cantonale a ainsi considéré qu'une femme de la région lémanique dans le domaine des activités administratives et autres activités de soutien aux entreprises, en qualité d'employée de type administratif, sans fonction de cadre, effectuant 20 heures par semaine, sans formation complète qui serait âgée de 48 ans lorsqu'elle devrait prendre un emploi, au bénéfice de deux années de service dans une entreprise de 50 employés et plus, percevait un salaire mensuel de 1'893 fr. (25 % des salaires), de 2'192 fr. (50 % des salaires) et de 2'547 fr. (25 % des salaires). Un salaire brut de 2'192 fr., respectivement net arrondi de 1'860 fr., a été retenu et un délai au 1er novembre 2022 lui a été imparti pour intégrer un poste lui permettant d'obtenir de ce revenu.  
 
 
3.2.3. Le recourant fait valoir que dès lors que l'autorité de première instance a institué une garde alternée à parts strictement égales, la cour cantonale aurait versé dans l'arbitraire en imputant à l'intimée un revenu hypothétique correspondant à un emploi à 50 % et non à 100 %, un mi-temps ne pouvant trouver application selon lui que lorsque le parent gardien - dont l'enfant cadet est encore à l'école obligatoire - se consacre seul à la prise en charge des enfants. Il ajoute par ailleurs qu'il serait arbitraire d'imputer un revenu hypothétique à 50 % pour elle et à 100 % pour lui.  
 
 
3.2.4. En l'espèce, en tant qu'il soutient qu'en présence d'une garde alternée, exercée à parts strictement égales, il serait arbitraire d'imputer à l'intimée un revenu hypothétique inférieur à plein temps, le recourant n'explique pas en quoi l'autorité cantonale aurait manifestement abusé de son pouvoir d'appréciation ( art. 4 CC ) en appliquant les paliers prévu par la jurisprudence précitée pour évaluer la capacité de gain de l'intimée, ni la raison pour laquelle elle aurait dû en faire totalement abstraction en présence d'une garde alternée. Son argumentation ne satisfaisant pas aux conditions de motivation accrue déduites de l' art. 106 al. 2 LTF , le grief est irrecevable.  
 
Quant à la distinction opérée entre le taux d'activité de l'intimée et celui du recourant, il ressort des faits retenus par l'autorité cantonale qu'après être partis vivre en U.________ en 2012, les époux se sont réinstallés à V.________ en mars 2019. A l'audience du 14 juillet 2020, ils ont admis avoir adopté à la suite de la naissance de leurs filles un modèle traditionnel avec un père pourvoyant aux besoins de la famille et une mère au foyer, ce que le recourant ne conteste pas. Si selon l'arrêt déféré, les deux parties sont sans emploi, le recourant a exploité, comme indiqué précédemment, une entreprise individuelle active dans le design horloger et de produits du 16 août 2019 au 5 novembre 2021. La situation est différente pour l'intimée, dont le dernier contrat de travail date d'avril 2009, soit avant la naissance des deux enfants du couple, et qui, âgée de 47 ans révolus à l'époque, s'est mise à la recherche d'un emploi dans le cadre de sa prise en charge par l'Office cantonal de l'emploi et l'assurance-chômage, dès janvier 2021, soit après la séparation du couple en janvier 2020. Au vu de ce qui précède et plus particulièrement de la répartition des tâches convenue pendant la vie commune, il n'est pas arbitraire, à ce stade, de considérer que le recourant doit maintenir un taux d'activité à plein temps, afin de subvenir aux frais supplémentaires engendrés par la vie séparée (cf. supra consid. 3.1.1.1), alors que seule la reprise d'une activité à mi-temps est exigée de la part de la mère. Partant, le grief doit être rejeté.  
 
 
4.  
Le recourant se prévaut ensuite d'une application arbitraire des art. 176 al. 1 ch. 1, 276 et 285 CC. 
 
 
4.1. Il soutient qu'il serait arbitraire de le condamner au paiement d'une quelconque contribution d'entretien " à titre des coûts directs des enfants ".  
 
 
4.1.1. Lorsque les parents se partagent la prise en charge de l'enfant par moitié et contribuent ainsi dans la même mesure aux soins et à l'éducation de celui-ci, leurs capacités financières respectives sont en principe seules déterminantes pour savoir dans quelle mesure chacun d'eux doit subvenir aux besoins en argent de l'enfant (parmi plusieurs : arrêts 5A_855/2021 du 27 avril 2022 consid. 3.2.3; 5A_952/2019 du 2 décembre 2020 consid. 6.3.1; 5A_926/2019 du 30 juin 2020 consid. 6.3; 5A_1032/2019 du 9 juin 2020 consid. 5.4.1). Si un seul parent bénéficie d'un montant disponible, il doit assumer seul les coûts directs de l'enfant (arrêts 5A_727/2018 du 22 août 2019 consid. 4.3.2.3 et les références; 5A_743/2017 du 22 mai 2019 consid. 5.3.2).  
 
 
4.1.2. S'agissant de l'entretien des enfants, la cour cantonale a considéré qu'en dépit de la garde partagée, il se justifiait que le père contribue financièrement à leur entretien, compte tenu de son important disponible, de l'absence de revenu de la mère et du fait que cette dernière réglait certaines factures des enfants (assurances-maladie, cours d'anglais et " cuisines " scolaires).  
 
 
4.1.3. Le recourant prétend que les situations financières des parties ne différant pas sensiblement l'une de l'autre et que les parties assumant la prise en charge en nature des enfants à parts égales, leurs coûts directs devraient être partagés par moitié. Il ajoute que dans la mesure où il aurait consenti à ce que l'intimée conserve la totalité des allocations familiales (300 fr. par enfant), moyennant l'engagement de celle-ci de s'acquitter des factures précitées, il serait arbitraire de le condamner au paiement d'une quelconque contribution d'entretien.  
 
 
4.1.4. Contrairement à ce que soutient le recourant, les situations financières des parties diffèrent sensiblement l'une de l'autre, dès lors que le recourant présente, toutes périodes confondues, un disponible de 7'930 fr. (9'800 fr. - 1'870 fr.), alors que l'intimée doit faire face à un déficit de 4'300 fr. (0 fr. - 4'300 fr.) du 1er mai 2020 au 31 mars 2021 (période 1), de 1'930 fr. (0 fr. - 1'930 fr.) du 1er avril 2021 au 15 mars 2022 (période 2) et du 16 mars 2022 au 31 octobre 2022 (période 3), et de 70 fr. (1'860 fr. - 1'930 fr.) dès le 1er novembre 2022 (période 4).  
Partant, il n'est pas insoutenable de lui faire supporter la majeure partie des coûts directs des enfants, étant précisé que pour tenir compte du mode de garde, l'autorité cantonale a, pour chacune des périodes, déduit des contributions d'entretien mensuelles des enfants la moitié de leur base mensuelle ainsi que la moitié de l'excédent initialement inclus. Le grief doit donc être rejeté. 
 
 
4.2. Le recourant reproche enfin à l'autorité précédente d'avoir compensé le déficit de l'intimée par une contribution de prise en charge pour les périodes 1 à 4.  
 
 
4.2.1. L' art. 285 CC dispose notamment que la contribution d'entretien doit correspondre aux besoins de l'enfant ainsi qu'à la situation et aux ressources des père et mère (al. 1). La contribution d'entretien sert aussi à garantir la prise en charge de l'enfant par les parents et les tiers (al. 2); l' art. 276 al. 2 CC précise encore que l'entretien de l'enfant comprend, outre les frais de son éducation, de sa formation et des mesures prises pour le protéger, les " frais de sa prise en charge ". Aux frais directs générés par l'enfant viennent donc s'ajouter les coûts indirects de sa prise en charge, ce qui implique de garantir économiquement parlant que le parent qui assure la prise en charge puisse subvenir à ses propres besoins tout en s'occupant de l'enfant (ATF 144 III 377 consid. 7.1.1 et 7.1.2; arrêts 5A_648/2020 du 12 juillet 2021 consid. 6.2; 5A_514/2020 du 2 décembre 2020 consid. 3.1.1).  
 
 
4.2.2. L'autorité précédente a considéré qu'étant donné que la mère était empêchée de travailler à plein temps en raison du temps qu'elle consacrait aux soins et à l'éducation de ses filles, les charges mensuelles de celles-ci devaient être augmentées d'une contribution de prise en charge. Elle a ainsi ajouté le déficit de la mère aux charges des enfants pour chacune des quatre périodes.  
 
4.2.3. Le recourant taxe d'arbitraire la prise en compte du déficit de l'intimée au titre de contribution de prise en charge, dès lors que durant les périodes 1 à 3, ce déficit ne serait pas lié à la prise en charge des enfants, mais à l'absence d'emploi et donc de revenu. Quant à la période 4, il expose " qu'au vu du mode de garde instauré sur les enfants, toute perte ou réduction de capacité de gain de l'intimée ne serait pas liée au fait qu'elle s'occupe des enfants "; il serait ainsi insoutenable selon lui de retenir une telle contribution pour cette période.  
 
 
4.2.4. En l'occurrence, le recourant ne critique pas, de manière conforme aux exigences strictes découlant du principe d'allégation ( art. 106 al. 2 LTF ), les motifs de l'arrêt attaqué. En particulier, il ne discute pas valablement, par son argumentation appellatoire, l'opinion de la cour cantonale selon laquelle, durant les périodes 1 à 3, à savoir du 1er mai 2020 au 31 octobre 2022, l'intimée était empêchée de travailler à plein temps en raison du temps qu'elle consacrait aux soins et à l'éducation de ses filles et que son déficit devait dès lors être compensé par une contribution de prise en charge.  
 
Pour le surplus, le recourant ne soutient pas que la cour cantonale serait tombée dans l'arbitraire, dans le cadre de l'imputation d'un revenu hypothétique à l'intimée, en impartissant à celle-ci un délai au 1er novembre 2022 pour s'adapter à sa nouvelle situation. 
 
Le même sort doit être réservé à la critique du recourant relative à la contribution de prise en charge durant la période 4, en tant qu'il n'explique pas de manière claire et détaillée en quoi il serait insoutenable dans les circonstances de l'espèce, en présence d'une garde alternée à parts égales, de ne pas exiger un taux d'activité plus élevé que celui qui prévaudrait pour une garde exclusive, en l'occurrence 50 %, étant rappelé que les lignes directrices constituées par ces paliers ne sont pas une règle absolue. Partant, cette critique est également irrecevable. 
 
5.  
En définitive, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recours étant d'emblée voué à l'échec, la requête d'assistance judiciaire du recourant ne saurait être agréée ( art. 64 al. 1 LTF ). Dans ces conditions, les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge du recourant, qui succombe ( art. 66 al. 1 LTF ). Il n'est pas alloué de dépens à l'intimée, qui n'a pas été invitée à se déterminer sur le fond et qui a partiellement succombé s'agissant de l'effet suspensif ( art. 68 al. 1 LTF ; arrêts 5A_698/2022 du 16 mars 2023 consid. 6; 5A_764/2021 du 11 février 2022 consid. 6; 5A_532/2021 du 22 novembre 2021 consid. 5). Cela étant, la requête d'assistance judiciaire de l'intimée est sans objet. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La requête d'assistance judiciaire déposée par le recourant est rejetée. 
 
3.  
La requête d'assistance judiciaire déposée par l'intimée est sans objet. 
 
4.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 27 avril 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Bouchat 


Synthèse
Formation : Iie cour de droit civil  
Numéro d'arrêt : 5A_565/2022
Date de la décision : 27/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2023
Fonds documentaire ?: www.bger.ch
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2023-04-27;5a.565.2022 ?

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