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13/04/2023 | SUISSE | N°4F_17/2022

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral, Ire Cour de droit civil  , Arrêt du 13 avril 2023  , 4F 17/2022


 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4F_17/2022  
 
 
Arrêt du 13 avril 2023  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Jametti, Présidente, Hohl et Kiss. 
Greffier : M. Douzals. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Karin Grobet Thorens, avocate, 
requérante, 
 
contre  
 
B.________, 
représenté par Me Philippe Juvet, avocat, 
intimé, 
 
C._

_______, 
représentée par Me Charles Poncet, avocat, 
partie intéressée. 
 
Objet 
demande de révision ( art. 123 al. 2 let. a LTF ); délai ( art. 124 al. 1 let . d LTF), 
 
demande de ...

 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4F_17/2022  
 
 
Arrêt du 13 avril 2023  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Jametti, Présidente, Hohl et Kiss. 
Greffier : M. Douzals. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Karin Grobet Thorens, avocate, 
requérante, 
 
contre  
 
B.________, 
représenté par Me Philippe Juvet, avocat, 
intimé, 
 
C.________, 
représentée par Me Charles Poncet, avocat, 
partie intéressée. 
 
Objet 
demande de révision ( art. 123 al. 2 let. a LTF ); délai ( art. 124 al. 1 let . d LTF), 
 
demande de révision de l'arrêt du Tribunal fédéral suisse rendu le 28 août 2017 dans la cause 4A_689/2016. 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ SA (ci-après: la société, la bailleresse ou la requérante) est propriétaire de l'immeuble sis rue..., à xxx, au rez-de-chaussée duquel se trouve une arcade dans laquelle est exploité le Café U.________. D.________ et son épouse, E.________, étaient actionnaires, par moitié chacun, de la société.  
Il est admis que la société, en tant que bailleresse, a conclu un contrat de bail tacite portant sur cette arcade avec D.________ en tant que locataire. 
 
A.b. Depuis 1981, leur fils, B.________ (ci-après: le demandeur ou l'intimé), exploite le Café U.________ dans ladite arcade.  
Par contrat du 31 octobre 1994, D.________, dont l'épouse était décédée en 1992 et qui était alors propriétaire de la moitié des actions de la société et usufruitier de l'autre moitié, a, sous la désignation de bailleur, conclu avec son fils, B.________, désigné comme locataire, un contrat de bail portant sur la location (en réalité: sous-location) de cette arcade. Le contrat a été conclu pour une durée de cinq ( recte : six) ans, du 1 er janvier 1995 au 31 décembre 2000, renouvelable tacitement de cinq ans en cinq ans, sauf résiliation signifiée six mois avant l'échéance, pour un loyer de 18'000 fr. par an, auquel s'ajoutaient 3'000 fr. de provisions pour diverses charges.  
Il ne résulte pas des constatations de fait à qui appartient le fonds de commerce du Café U.________, ni sur quelle base le fils exploite ce café. 
 
A.c. D.________ est décédé le 26 septembre 2012. Ses héritiers sont sa fille, C.________, et son fils, B.________. F.________, notaire, est exécutrice testamentaire de la succession de feu D.________.  
Les deux héritiers sont opposés, directement ou indirectement, dans plusieurs procédures judiciaires: des actions successorales ont été intentées par le fils en relation avec les successions de chacun des parents; des actions en annulation des décisions des assemblées générales des sociétés propriétaires des immeubles faisant partie des successions ont aussi été ouvertes par le fils; des procédures de mesures superprovisionnelles et provisionnelles ont également été intentées. 
 
A.d. Le 1 er mai 2014, le conseil d'administration de la société a décidé par deux voix contre une, soit les voix de C.________ et de G.________ contre celle de B.________, de résilier le bail de celui-ci portant sur l'arcade du Café U.________ pour le prochain terme utile en vue de sa relocation au prix du marché.  
La (première) résiliation du bail adressée à B.________ le même jour pour le 31 décembre 2014 a été annulée: celui-ci a en effet plaidé qu'il n'était pas lié à la société mais à son père et que la résiliation, qui n'émanait pas du bailleur, était nulle; la société ayant admis que la résiliation était entachée d'un vice formel, dans la mesure où la société, bailleresse principale, et B.________, sous-locataire, n' étaient pas liés par une relation juridique de bail, elle a retiré la résiliation et la cause a été rayée du rôle. 
 
A.e. Par une (seconde) résiliation du 25 juin 2014, la société bailleresse a résilié le bail (tacite) de l'arcade du Café U.________, avec effet au 31 décembre 2014, par deux avis de résiliation adressés, le premier, aux hoirs C.________ et B.________ et, le second, à l'exécutrice testamentaire de la succession de feu D.________, F.________. Elle a invoqué le même motif que lors de la première résiliation.  
 
B.  
Après que la tentative de conciliation a échoué, B.________ a déposé sa demande en contestation de la résiliation du bail devant le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève le 11 novembre 2014. 
Après avoir limité la procédure à la question de la qualité pour agir du demandeur, le tribunal a notamment déclaré " irrecevable " la demande. 
Par arrêt du 31 octobre 2016, la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté l'appel formé par le demandeur. 
Par arrêt 4A_689/2016 du 28 août 2017, le Tribunal fédéral a constaté que le demandeur avait la qualité pour ouvrir action seul en annulation de la résiliation et a renvoyé la cause à la cour cantonale pour suite de la procédure. 
Par arrêt du 16 octobre 2017, celle-ci a renvoyé la cause au Tribunal des baux et loyers pour instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Par jugement du 10 janvier 2020, le tribunal a annulé le congé notifié le 25 juin 2014. 
Par arrêt du 14 décembre 2020, la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève a confirmé le jugement attaqué par les appels de la bailleresse et de la soeur cohéritière. 
Par arrêt 4A_69/2021 du 21 septembre 2021, le Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours formé par la bailleresse. 
 
C.  
Contre l'arrêt 4A_689/2016 précité, qui lui avait été notifié le 6 septembre 2017, la société a formé une demande de révision le 8 août 2022. Elle conclut, en substance, à ce que l'arrêt attaqué soit annulé et réformé, en ce sens que le demandeur ne dispose pas de la qualité pour agir en contestation de la seconde résiliation du bail. 
L'intimé sollicite des mesures d'instruction et conclut à l'irrecevabilité de la demande de révision. 
Les parties ont chacune déposé des observations complémentaires. 
C.________ appuie la demande de révision. 
La cour cantonale a indiqué ne pas avoir d'observation à formuler. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Les arrêts du Tribunal fédéral acquièrent force de chose jugée le jour où ils sont prononcés ( art. 61 LTF ). Ils ne peuvent pas être attaqués par une voie de droit ordinaire et un nouvel examen du litige par le Tribunal fédéral est, en principe, exclu. Le Tribunal fédéral peut seulement revenir sur un arrêt lorsque l'un des motifs de révision exhaustivement prévus aux art. 121 à 123 LTF est réalisé (ATF 147 III 238 consid. 1.1).  
 
1.2. La procédure de révision auprès du Tribunal fédéral se déroule en plusieurs phases.  
 
1.2.1. Tout d'abord, le Tribunal fédéral examine les conditions de recevabilité de la demande, comme le respect du délai pour la déposer. Pour les questions qui ne sont pas traitées dans le chapitre 7 de la LTF relatif à la procédure de révision, les dispositions générales de la LTF s'appliquent. Sont notamment applicables les exigences de motivation de l' art. 42 al. 1 et 2 LTF . Si les conditions de recevabilité ne sont pas remplies, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière (ATF 147 III 238 consid. 1.2.1 et les arrêts cités; 144 I 214 consid. 1.2).  
 
1.2.2. Si le Tribunal fédéral estime la demande de révision recevable, il entre alors en matière et examine si le motif de révision allégué est réalisé. La question de savoir s'il existe un motif de révision n'est dès lors pas une condition de recevabilité mais une question matérielle (ATF 147 III 238 consid. 1.2.2 et les arrêts cités).  
 
1.2.3. Si le Tribunal fédéral arrive à la conclusion que le motif de révision invoqué n'est pas rempli, il rejette la demande de révision. S'il considère qu'il est rempli, il rend successivement deux décisions distinctes, même s'il le fait, en règle générale, dans un seul arrêt.  
Par la première décision, dénommée le rescindant, il annule l'arrêt qui est l'objet de la demande de révision. Cette décision d'annulation met un terme à la procédure de révision proprement dite et entraîne la réouverture de la procédure antérieure. 
Par la seconde décision, appelée le rescisoire, il statue sur le recours dont il avait été précédemment saisi (cf. art. 128 al. 1 LTF ). Elle sortit un effet ex tunc , si bien que le Tribunal fédéral et les parties sont replacés dans la situation dans laquelle ils se trouvaient au moment auquel l'arrêt annulé a été rendu, la cause devant être tranchée comme si cet arrêt n'avait jamais existé (ATF 147 III 238 consid. 1.2.3 et les arrêts cités; 144 I 214 consid. 1.2).  
 
2.  
En substance, la requérante allègue qu'elle aurait reçu du conseil de C.________ la comptabilité du Café U.________ par courrier du 10 mai 2022, que l'examen de cette comptabilité aurait révélé que, contrairement à ce que l'intimé aurait toujours soutenu, ce serait la société " H.________ " et non l'intimé qui exploiterait le Café U.________ depuis 2003 et que l'intimé aurait donc dissimulé des faits essentiels relatifs à sa qualité pour agir. Elle indique qu'elle aurait résilié le bail litigieux le 25 mai 2022 pour le 30 juin 2022. Elle considère que l'arrêt du Tribunal fédéral querellé devrait être annulé et invoque à cet effet l' art. 123 al. 2 let. a LTF . 
 
2.1. Aux termes de l' art. 123 al. 2 let. a LTF , la révision peut être demandée dans les affaires civiles si le requérant découvre après coup des faits pertinents ou des moyens de preuve concluants qu'il n'avait pas pu invoquer dans la procédure précédente, à l'exclusion des faits ou moyens de preuve postérieurs à l'arrêt.  
Pour le motif énoncé à l' art. 123 al. 2 let. a LTF , la demande de révision doit être déposée devant le Tribunal fédéral, sous peine de déchéance, dans les 90 jours qui suivent la découverte du motif de révision, mais au plus tôt dès la notification de l'expédition complète de l'arrêt ( art. 124 al. 1 let . d LTF). Il s'agit là d'une question qui relève de la recevabilité, et non du fond, au contraire de celle de savoir si le requérant a tardé à découvrir le motif de révision invoqué. La découverte du motif de révision implique que le requérant a une connaissance suffisamment sûre du fait nouveau pour pouvoir l'invoquer, même s'il n'est pas en mesure d'en apporter une preuve certaine; une simple supposition ne suffit pas. S'agissant plus particulièrement d'une preuve nouvelle, le requérant doit pouvoir disposer d'un titre l'établissant ou en avoir une connaissance suffisante pour en requérir l'administration. Il appartient au requérant d'établir les circonstances déterminantes pour la vérification du respect du délai (arrêts 4F_10/2020 du 16 mars 2021 consid. 2.1; 4A_247/2014 du 23 septembre 2014 consid. 2.3; 4A_570/2011 du 23 juillet 2012 consid. 4.1; 4A_222/2011 du 22 août 2011 consid. 2.1 et les arrêts cités). 
 
2.2. L'intimé affirme qu'il exploiterait et occuperait les locaux abritant le Café U.________, qu'il serait l'unique actionnaire de H.________ et qu'il poursuivrait uniquement en son nom propre l'exploitation du Café U.________ depuis le mois de mai 2022. Il indique notamment qu'il aurait produit le 24 avril 2015, dans la présente procédure, un important lot de factures adressées à H.________ et que la requérante aurait elle-même produit, dans la présente cause devant le Tribunal de première instance, deux pièces faisant état de H.________ le 29 novembre 2019. Partant, il n'aurait pas occulté son existence et la requérante en aurait eu connaissance.  
 
2.3. Dans sa réplique, la requérante invoque l'interdiction de l'abus de droit et prétend qu'il ne serait pas admissible que l'intimé se justifie d'avoir trompé le Tribunal fédéral en invoquant la production de pièces qui contrediraient ses propres déclarations. Elle considère par ailleurs que les factures produites par l'intimé ne lui auraient pas permis de déduire que H.________ exploiterait le Café U.________ et que seule la comptabilité de cet établissement l'aurait amenée à cette conclusion.  
 
2.4. La requérante ne conteste ni que l'intimé a produit, dans la présente procédure, de nombreuses factures adressées à H.________ ni qu'elle a elle-même produit deux pièces faisant état de cette société le 29 novembre 2019, soit postérieurement à l'arrêt dont elle sollicite la révision. La requérante ne saurait donc se prévaloir de l'ignorance de l'existence de la société H.________ au-delà de cette date.  
De plus, il ressort du dossier cantonal que les deux pièces produites par la requérante le 29 novembre 2019 sont contenues dans un chargé de pièces complémentaire ne contenant que quatre autres pièces. Ces deux pièces sont des formulaires dans lesquels H.________ est indiquée en grands caractères manuscrits comme société dans la rubrique " Coordonnées du requérant ", sous laquelle est indiqué en petits caractères " Titulaire du bail à loyer pour les permanents et le propriétaire des objets pour les temporaires ", respectivement " Titulaire du bail à loyer et propriétaire pour les temporaires " (complètement selon l' art. 105 al. 2 LTF ). La requérante a donc découvert le prétendu motif de révision, ou avait à tout le moins une connaissance suffisamment sûre du fait fondant ledit motif, et a disposé d'un titre l'établissant le 29 novembre 2019 au plus tard. 
Partant, comme l'indique à juste titre l'intimé, le délai pour déposer une demande de révision a commencé à courir au plus tard le 29 novembre 2019, de sorte que la présente demande de révision, introduite le 8 août 2022, est tardive et doit donc être déclarée irrecevable. 
 
3.  
Au vu de ce qui précède, la demande de révision doit être déclarée irrecevable. 
Les frais judiciaires et les dépens seront mis à la charge de la requérante, qui succombe (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 et 2 LTF ). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
La demande de révision est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la requérante. 
 
3.  
La requérante versera à l'intimé une indemnité de 3'500 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et de la partie intéressée et à la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 13 avril 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : Douzals 



Références :

Origine de la décision
Formation : Ire cour de droit civil  
Date de la décision : 13/04/2023
Date de l'import : 30/05/2023

Fonds documentaire ?: www.bger.ch


Numérotation
Numéro d'arrêt : 4F_17/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2023-04-13;4f.17.2022 ?

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