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15/11/2022 | SUISSE | N°9C_424/2022

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral, IIe Cour de droit social  , Arrêt du 15 novembre 2022  , 9C 424/2022


 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_424/2022  
 
 
Arrêt du 15 novembre 2022  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
M. et Mmes les Juges fédéraux Parrino, Président, Moser-Szeless et Bechaalany, Juge suppléante. 
Greffier : M. Bleicker. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Michael Rudermann, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève, rue d

es Gares 12, 1201 Genève, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (nouvelle demande), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genè...

 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_424/2022  
 
 
Arrêt du 15 novembre 2022  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
M. et Mmes les Juges fédéraux Parrino, Président, Moser-Szeless et Bechaalany, Juge suppléante. 
Greffier : M. Bleicker. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Michael Rudermann, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève, rue des Gares 12, 1201 Genève, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (nouvelle demande), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 5 août 2022 (A/1927/2021 - ATAS/685/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ a travaillé en dernier lieu comme nettoyeur de tapis. Le 5 mars 2014, il a chuté dans les escaliers. Le cas a été pris en charge par la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA).  
Le 5 décembre 2014, l'assuré a déposé une première demande de prestations de l'assurance-invalidité. Par décision du 5 décembre 2017, l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après: l'office AI) a nié le droit de l'intéressé à des prestations. La Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève a rejeté le recours formé par l'assuré contre cette décision (arrêt du 27 mai 2019). 
 
A.b. Le 24 septembre 2019, A.________ a déposé une nouvelle demande de prestations. L'office AI a recueilli l'avis des médecins traitants, puis mis en oeuvre une expertise bidisciplinaire auprès du Bureau d'expertises médicales de Montreux (BEM). Dans un rapport du 11 janvier 2020, les docteurs B.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, et C.________, spécialiste en médecine interne générale et en rhumatologie, ont diagnostiqué - avec répercussion sur la capacité de travail - un syndrome cervical et lombaire sans signes de compression radiculaire des membres supérieurs et inférieurs sur discrète uncodiscarthrose C4-C5, C5-C6 et C6-C7, une discrète discopathie L3-L4 et L4-L5 et une protrusion discale L5-S1; l'assuré ne pouvait plus exercer son activité habituelle de nettoyeur de tapis depuis le 10 novembre 2017. Selon les médecins, il présentait une capacité de travail entière dans une activité adaptée depuis le 31 mars 2015. L'assuré a produit l'avis des docteurs D.________, spécialiste en anesthésiologie (du 16 mars 2021), et E.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie et psychiatre traitant (du 29 mars 2021). Par décision du 7 mai 2021, l'office AI a rejeté la nouvelle demande.  
 
B.  
L'assuré a déféré la décision du 7 mai 2021 à la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève, puis produit l'avis des docteurs F.________, médecin adjointe, G.________, médecin interne auprès du département de psychiatrie de l'hôpital H.________ (du 20 avril 2021), et I.________, médecin chef de clinique à l'hôpital H.________ (du 13 septembre 2021). Statuant le 5 août 2022, la Cour de justice a rejeté le recours. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière de droit public contre cet arrêt dont il demande l'annulation. Il conclut au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour instruction complémentaire et nouvelle décision. Subsidiairement, il demande l'octroi d'une rente entière de l'assurance-invalidité. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours en matière de droit public peut être formé notamment pour violation du droit fédéral ( art. 95 let. a LTF ), que le Tribunal fédéral applique d'office ( art. 106 al. 1 LTF ), n'étant limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral fonde son raisonnement sur les faits retenus par la juridiction de première instance ( art. 105 al. 1 LTF ), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l' art. 95 LTF ( art. 105 al. 2 LTF ). 
 
2.  
 
2.1. Compte tenu des motifs et conclusions du recours, le litige porte sur le droit du recourant à une rente de l'assurance-invalidité, ensuite d'une nouvelle demande de prestations. A cet égard, l'arrêt entrepris expose de manière complète les règles applicables à la résolution du cas. Il rappelle notamment que lorsque l'administration entre en matière sur une nouvelle demande ( art. 87 al. 3 RAI ), elle doit procéder de la même manière que dans les cas de révision au sens de l' art. 17 al. 1 LPGA et comparer les circonstances prévalant lors de la nouvelle décision avec celles existant lors de la dernière décision entrée en force et reposant sur un examen matériel du droit à la rente (ATF 130 V 71) pour déterminer si une modification notable du taux d'invalidité justifiant la révision du droit en question est intervenue. Il suffit d'y renvoyer.  
 
2.2. Dans le cadre du "développement continu de l'AI", la LAI, le RAI et la LPGA - notamment - ont été modifiés avec effet au 1 er janvier 2022 (RO 2021 705; FF 2017 2535). Compte tenu du principe de droit intertemporel prescrivant l'application des dispositions légales qui étaient en vigueur lorsque les faits juridiquement déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1), le droit applicable demeure celui qui était en vigueur au moment de la décision administrative attaquée.  
 
3.  
 
3.1. La juridiction cantonale a retenu que le recourant ne pouvait plus exercer son activité habituelle depuis le 7 juillet 2018, en raison de l'aggravation de son état de santé somatique. Dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles décrites par le docteur C.________, l'assuré disposait en revanche d'une capacité de travail entière en tout cas depuis cette date. Sur le plan psychiatrique, en particulier, les premiers juges ont constaté que l'assuré disposait d'une capacité de travail entière dans toute activité (au moment du prononcé de la décision attaquée). Ils ont considéré que l'audition du psychiatre traitant et la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise médicale étaient par conséquent inutiles, si bien qu'ils y ont renoncé.  
 
3.2. Invoquant une appréciation arbitraire des preuves, en lien avec une violation de la maxime inquisitoire ( art. 61 let . c LPGA), le recourant reproche à la juridiction cantonale d'avoir renoncé à mettre en oeuvre une nouvelle expertise médicale. Il fait valoir que les constatations de l'expert rhumatologue concernant ses ressources mobilisables étaient incompatibles avec une pleine capacité de travail dans une activité adaptée et que "l'absence totale de diagnostic psychiatrique [était] irréconciliable avec la position défendue par le psychiatre traitant". Selon le recourant, les premiers juges avaient de plus commis un déni de justice en omettant de se prononcer sur son grief concernant l'emploi par le docteur C.________ du terme "parasitage" dans l'expertise (sous la rubrique "Autolimitations").  
 
3.3. Sous couvert d'un déni de justice ( art. 29 al. 1 Cst. ), le recourant se plaint en réalité d'un défaut de motivation de l'arrêt attaqué ( art. 29 al. 2 Cst. ). En d'autres termes, il reproche à la juridiction cantonale d'avoir violé son droit d'être entendu en ne se prononçant pas sur un grief qu'il estime pertinent. Tel qu'invoqué, le grief de violation de l' art. 29 al. 2 Cst. n'a cependant pas de portée propre par rapport à celui tiré de l'arbitraire dans l'appréciation des preuves. Comme le rappelle le recourant, les premiers juges n'avaient en effet pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués, mais pouvaient se limiter à ceux qui, sans arbitraire, pouvaient être tenus pour pertinents (cf. ATF 146 II 335 consid. 5.1; 141 V 557 consid. 3.2.1). Or le point de savoir si le grief portant sur l'emploi par l'expert rhumatologue du terme "parasitage" est pertinent relève du fond. Le grief de violation de l' art. 29 al. 2 Cst. sera dès lors examiné conjointement avec les autres motifs.  
 
4.  
 
4.1. Mise à part la référence à la divergence d'opinions entre les médecins qu'il a consultés, d'une part, et les experts du BEM, d'autre part, le recourant ne fait en l'espèce pas état d'éléments cliniques ou diagnostiques concrets et objectifs susceptibles d'établir le caractère arbitraire de l'appréciation des premiers juges. Il ne suffit en particulier pas d'affirmer qu'il apparaît "impensable" que deux psychiatres apprécient la même situation de manière "aussi profondément divergente" ou de substituer sa propre appréciation de ses ressources mobilisables à celle de l'expert rhumatologue pour remettre en cause les conclusions médicales suivies par la juridiction cantonale. En ce qui concerne plus particulièrement l'avis des médecins de l'hôpital H.________, les docteurs F.________ et G.________ se sont fondés sur la manière dont l'assuré lui-même ressentait et assumait ses facultés de travail (selon l'échelle de dépression de Montgomery et Asberg [MADRS]), alors que les organes de l'assurance-invalidité sont tenus d'établir la mesure de ce qui est raisonnablement exigible de lui le plus objectivement possible. Dans ces circonstances, l'avis des médecins précités n'apporte aucun élément concret et objectif susceptible de remettre en cause les conclusions de la doctoresse B.________, qui a pris soin d'énumérer dans le rapport d'expertise les plaintes (subjectives) du recourant puis d'exposer et de discuter ses constatations objectives. La circonstance que l'experte n'a pas produit le détail des réponses apportées par le recourant à son évaluation selon l'échelle de dépression Hamilton et qu'elle a omis dans les informations sur les diagnostics les indications sur les antécédents familiaux ne change rien au fait qu'elle a dûment motivé ses constatations et que celles-ci ne permettent pas de retenir une diminution de la capacité de travail du recourant sur le plan psychique. Enfin, les hypothèses diagnostiques du docteur I.________ reposent également sur les indications subjectives du recourant et ne sauraient, pour ce motif, remettre en cause les constatations de l'experte psychiatre.  
 
4.2. A l'inverse de ce que soutient le recourant, l'ensemble des médecins qui se sont prononcés ont par ailleurs retenu qu'il présentait des autolimitations. Dans l'avis du 29 mars 2021, le docteur E.________ a exposé que son patient était hypocondriaque, qu'il avait vu presque tous les spécialistes pour exclure ses doutes sur différents problèmes (au niveau cardiaque, des surrénales et des poumons), qu'il présentait une affectivité superficielle et labile, une dramatisation, une expression exagérée des émotions, une tendance à être facilement blessé, un désir permanent d'être l'objet d'attention et exprimait un sentiment d'injustice à l'encontre de l'assurance-invalidité, voire une persécution ou un complot (cf. avis du 29 mars 2021, p. 2). Replacée dans son contexte, l'expression selon laquelle le status "s'est avéré laborieux en raison d'un important parasitage" signifie par conséquent que l'examen clinique avait été perturbé par des données subjectives qui ne trouvaient qu'une corrélation partielle avec les examens complémentaires selon le docteur C.________. Elle ne dénote aucune prévention particulière de l'expert rhumatologue à l'égard du recourant, de sorte qu'on ne saurait reprocher à la juridiction cantonale d'avoir omis l'examen d'un grief important. La juridiction cantonale n'a dès lors pas violé l' art. 29 al. 2 Cst.  
 
4.3. Pour le surplus, dans la mesure où le droit à la rente de l'assurance-invalidité présuppose que la personne assurée a présenté une incapacité de travail d'au moins 40 % en moyenne durant une année sans interruption notable ( art. 28 al. 1 let. b LAI ), il n'y a en principe aucune raison, du point de vue de l'assurance-invalidité, d'examiner l'évolution de la capacité de travail de la personne assurée au-delà d'une période de six mois précédant le dépôt de la demande (arrêt 9C_758/2017 du 5 mars 2018 consid. 5.2). Dans la mesure où le recourant a déposé sa nouvelle demande de prestations le 24 septembre 2019, il n'y a par conséquent pas lieu d'examiner si le début de l'aggravation de l'état de santé du recourant a débuté le 10 novembre 2017, comme il le soutient, ou le 7 juillet 2018, comme l'a retenu la juridiction cantonale. Cette question n'a en tout état de cause aucune incidence sur le droit du recourant à une rente de l'assurance-invalidité (cf. art. 88 bis al. 1 let. a RAI ).  
 
5.  
Finalement, le recourant ne s'en prend pas concrètement et précisément aux motifs qui ont conduit la juridiction précédente à retenir le caractère exploitable de sa capacité de travail sur un marché équilibré de l'emploi. Les premiers juges ont en outre rappelé à bon droit qu'un marché équilibré du travail (à ce sujet, voir arrêt 9C_659/2014 du 13 mars 2015 consid. 5.3 et les références) offre un éventail suffisamment large d'activités légères, dont on doit admettre qu'un nombre significatif d'entre elles sont accessibles au recourant sans aucune formation préalable particulière. Au reste, il n'y a pas matière à examiner la suite de l'argumentation du recourant portant sur le taux d'abattement. Les premiers juges ont en effet constaté que même en appliquant un abattement de 25 %, soit le maximum admis par la jurisprudence (ATF 126 V 75), le taux d'invalidité du recourant serait toujours inférieur au taux d'invalidité donnant droit à une rente de l'assurance-invalidité. 
 
6.  
Mal fondé, le recours doit être rejeté. 
Vu l'issue du litige, les frais de la procédure seront supportés par le recourant ( art. 66 al. 1 LTF ). Il n'a pas droit à une indemnité de dépens ( art. 68 al. 1 LTF ). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 15 novembre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
Le Greffier : Bleicker 


Synthèse
Formation : Iie cour de droit social  
Numéro d'arrêt : 9C_424/2022
Date de la décision : 15/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2023
Fonds documentaire ?: www.bger.ch
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2022-11-15;9c.424.2022 ?

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