2C_139/2009 {T 1/2} Arrêt du 13 août 2009 IIe Cour de droit public Composition MM. et Mme les Juges Müller, Président, Merkli, Karlen, Aubry Girardin et Donzallaz. Greffier: M. Vianin. Parties ISDS Oulens SA, 1377 Oulens-sous-Echallens, recourante, représentée par Me Nathalie Fluri, avocate, rue du Grand-Chêne 8, case postale 6690, 1002 Lausanne, contre Service des eaux, sols et assainissement du canton de Vaud, rue du Valentin 10, 1014 Lausanne. Objet Taxe sur la mise en décharge de déchets et matériaux d'excavation, recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 26 janvier 2009. Faits: A. La société anonyme ISDS Oulens SA (ci-après la Société ou la recourante), sise à Oulens-sous-Echallens, inscrite au registre du commerce le 4 mars 1997, a pour but la construction, l'exploitation et la gestion d'une installation de mise en dépôt définitif de déchets stabilisés. Son capital-actions de 200'000 fr. est détenu principalement par des collectivités publiques et par des sociétés et organismes actifs dans le domaine du traitement des déchets. La plupart des actionnaires de la Société en sont également clients. La Société gère un site d'assainissement pour déchets stabilisés qui est le seul en Suisse romande à appliquer la technique du lavage neutre. Elle a été créée dans le cadre d'un programme mis sur pied par la Confédération dans les années 1980, tendant à la construction de cinq décharges, dont une en Romandie, permettant de traiter et de stocker les cendres volantes issues de l'incinération des déchets ménagers. Le choix du site d'Oulens résulte d'une collaboration intercantonale engagée sous le patronage de la Confédération, dans le but de trouver l'emplacement géologiquement le plus adéquat en Suisse romande. Les déchets traités par la Société proviennent à raison de 8% du canton de Vaud et pour le reste des cantons de Genève, Neuchâtel, Fribourg et Valais. Par décision du 10 avril 2007, l'Administration cantonale des impôts du canton de Vaud a exonéré la Société de l'impôt sur le bénéfice et le capital, au motif que celle-ci poursuivait un but de service public au sens de l'art. 90 al. 1 lettre g de la loi vaudoise du 4 juillet 2000 sur les impôts directs cantonaux (LI; RS/VD 642.11). B. Par décision du 15 mai 2007, le Service des eaux, sols et assainissement du canton de Vaud (ci-après: le Service cantonal) a facturé à la Société un montant de ***** fr. à titre de taxe sur la mise en décharge des déchets et matériaux d'excavation, destinée au financement de l'assainissement des sites contaminés, pour les matériaux mis en décharge du 1er juillet au 31 décembre 2006. Ladite taxe était fondée sur la loi vaudoise du 17 janvier 2006 sur l'assainissement des sites pollués (LASP; RS/VD 814.68). La Société a interjeté un recours à l'encontre de cette décision. Par décision du 26 mai 2008, le Service cantonal a facturé à la Société un montant de ***** fr. au titre de la taxe précitée, pour les matériaux mis en décharge durant l'année 2007. La Société a également recouru à l'encontre de ce prononcé. C. Après avoir joint les causes, le Tribunal cantonal vaudois a rejeté les recours par arrêt du 26 janvier 2009. Il a estimé que la taxe litigieuse constituait un impôt d'attribution des coûts et non une taxe d'orientation. Il a considéré que, contrairement à ce que prétendait la recourante, le prélèvement de cette taxe était justifié par un intérêt public et n'était pas disproportionné. Les juges ont également rejeté le grief de violation du principe de la force dérogatoire du droit fédéral: à leur avis, le fait que la loi vaudoise sur l'assainissement des sites pollués soumette à la taxe le stockage de déchets dans le canton mais non leur exportation n'était pas contraire à la loi fédérale du 7 octobre 1983 sur la protection de l'environnement (LPE; RS 814.01). Le Tribunal cantonal a au surplus considéré que la taxe litigieuse reposait sur une base légale valable. Il a en particulier estimé que la loi cantonale avait été dûment approuvée par la Confédération. Le projet de loi avait en effet été soumis à l'Office fédéral de l'environnement et les observations de celui-ci avaient été intégrées dans la loi. Dans ces conditions, il paraissait superflu de soumettre - à nouveau - le texte final aux autorités fédérales pour approbation et il aurait été formaliste à l'excès de considérer que le défaut de cette formalité entraînait l'invalidation de la loi cantonale. Au demeurant, les juges ont estimé que l'assujettissement de la recourante à la taxe litigieuse ne portait pas atteinte à sa liberté économique, ni aux principes de l'égalité de traitement et de l'imposition selon la capacité contributive. D. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, la Société demande en substance au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens pour l'instance fédérale, principalement, d'annuler l'arrêt du 26 janvier 2009 en tant qu'il met à sa charge les taxes litigieuses et de le réformer en ce sens que les frais de l'instance cantonale ainsi que les indemnités accordées aux témoins sont supportés par le canton de Vaud et que des dépens lui sont alloués pour cette procédure; à titre subsidiaire, elle conclut à ce que l'arrêt en cause soit annulé et le dossier renvoyé à l'autorité précédente pour qu'elle complète l'instruction et rende une nouvelle décision dans le sens des considérants. A titre préalable, elle requiert que son recours ait effet suspensif. Le Service cantonal conclut au rejet du recours. L'Office fédéral de l'environnement s'est déterminé sur certains aspects du litige, sans prendre toutefois de conclusions formelles. L'autorité précédente ne s'est pas déterminée. Par ordonnance présidentielle du 25 mars 2009, la requête d'effet suspensif a été admise. Considérant en droit: 1. 1.1 Interjeté par une partie directement touchée par la décision et qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification (cf. art. 89 al. 1 LTF), le recours est dirigé contre un jugement final (cf. art. 90 LTF) rendu dans une cause de droit public (cf. art. 82 lettre a LTF) par un tribunal supérieur statuant en dernière instance cantonale (cf. art. 86 al. 1 lettre d et al. 2 LTF). Il est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai et la forme prévus par la loi (cf. art. 42 et 100 al. 1 LTF) et que l'on ne se trouve pas dans l'un des cas d'exceptions mentionnés par l'art. 83 LTF. 1.2 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). En l'occurrence, la recourante soutient que certains faits auraient été constatés de manière manifestement inexacte par l'autorité précé- dente. Pour certaines, ces critiques relèvent en réalité du droit et non du fait. Tel est le cas notamment lorsque la recourante qualifie de manifestement inexacte l'affirmation de l'autorité précédente selon laquelle le législateur fédéral aurait laissé le choix au Conseil fédéral et aux cantons de prélever une taxe "sur le stockage définitif et/ou l'exportation des déchets". Ces critiques seront examinées ci-après avec les griefs tirés de la violation du droit. Quant aux griefs portant véritablement sur la constatation des faits, ils seront traités dans la mesure où ils sont de nature à influer sur le sort du litige. 1.3 Selon l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. En l'occurrence, la recourante se réfère à plusieurs reprises à la procédure de consultation à laquelle l'ordonnance fédérale du 22 juin 2005 sur les mouvements de déchets (OMoD; RS 814.610) est actuellement soumise. Il s'agit là de faits nouveaux - comme la recourante en convient d'ailleurs elle-même -, qui ne peuvent par conséquent être pris en considération dans la présente décision. 1.4 La recourante ne conteste pas l'application qui a été faite des dispositions de la loi vaudoise sur l'assainissement des sites pollués, mais soutient que celles-ci sont elles-mêmes illégales ou inconstitutionnelles. De tels griefs sont recevables, le Tribunal fédéral étant amené à contrôler la légalité de ces dispositions dans un cas d'application (contrôle concret). Un tel contrôle est possible, même à supposer que la loi en question ait été approuvée par la Confédération (cf. ATF 103 I 130 consid. 3a p. 133; Alain Wurzburger, in Commentaire de la LTF, 2009, no 89 ad art. 82 LTF), comme l'a admis l'autorité précédente. Au demeurant, dans le cadre de son examen, le Tribunal fédéral ne peut annuler l'acte normatif lui-même, mais seulement la décision fondée sur celui-ci (cf. ATF 129 I 265 consid. 2.3 p. 268). 2. 2.1 Faisant partie de la Section 4 "Assainissement de sites pollués par des déchets" et intitulé "Taxe destinée au financement des mesures", l'art. 32e LPE dans sa teneur actuelle dispose ce qui suit: "1 Le Conseil fédéral peut: a. obliger le détenteur d'une décharge contrôlée à verser à la Confédération une taxe sur le stockage définitif de déchets; b. obliger l'exportateur de déchets destinés à faire l'objet d'un stockage définitif à verser à la Confédération une taxe sur l'exportation de ces déchets. 2 Il fixe les taux de taxation, compte tenu notamment des coûts probables et des différents types de décharge. Ces taux ne peuvent dépasser 20% du coût moyen du stockage définitif. 3 La Confédération affecte le produit de ces taxes exclusivement au financement des mesures suivantes: a. l'établissement des cadastres des sites pollués, si les détenteurs ont eu la possibilité de se prononcer jusqu'au 1er novembre 2007 sur l'enregistrement de leur site au cadastre; b. l'investigation, la surveillance et l'assainissement des sites pollués sur lesquels plus aucun déchet n'a été déposé après le 1er février 1996, lorsque: 1. le responsable ne peut être identifié ou est insolvable, 2. le site a servi en grande partie au stockage définitif des déchets urbains; c. l'investigation, la surveillance et l'assainissement de sites pollués aux abords de stands de tir, sur lesquels aucun déchet n'a été déposé dans les deux ans suivant l'entrée en vigueur de la présente modification, à l'exclusion des stands de tir à but essentiellement commercial; d. l'investigation concernant des sites qui se révèlent non pollués (art. 32d, al. 5). 4 Seules les mesures qui respectent l'environnement, sont économiques et tiennent compte de l'évolution technologique bénéficient de ce financement. Celui-ci est versé aux cantons en fonction de leurs dépenses et s'élève à 40% des coûts imputables. Lorsqu'il est versé en vertu de l'al. 3, let. a, son montant est forfaitaire et s'élève à 500 francs par site. 5 Le Conseil fédéral édicte des dispositions sur la procédure de perception de la taxe, ainsi que sur le financement des mesures et les coûts imputables. 6 Le droit cantonal peut également prévoir des taxes destinées au financement de l'investigation, de la surveillance et de l'assainissement des sites pollués." La taxe prévue à l'art. 32e LPE remonte à la modification de la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 21 décembre 1995 (RO 1997 1155 ss). La révision a introduit une obligation d'assainir les décharges contrôlées et les autres sites pollués par des déchets et a chargé les cantons de veiller à son exécution (art. 32c dans sa teneur du 21 décembre 1995). Dans certaines situations, les cantons devaient supporter les coûts d'assainissement. Le Conseil fédéral a été habilité à percevoir auprès des détenteurs de décharges contrôlées une taxe sur le stockage définitif des déchets, dont le produit devait servir à indemniser (partiellement) les cantons (art. 32e dans sa teneur du 21 décembre 1995). La taxe en question figurait déjà à l'art. 32c du projet du Conseil fédéral du 7 juin 1993 relatif à la révision de la loi fédérale sur la protection de l'environnement (FF 1993 II 1453 ss, 1462; cf. aussi Pierre Tschannen, in Kommentar zum Umweltschutzgesetz, 2e éd., no 6 ad art. 32e LPE). Lors des débats parlementaires, le Conseil des Etats a ajouté à la base légale de la taxe, devenue entre-temps l'art. 32e, un alinéa 5 aux termes duquel "le droit cantonal peut prévoir des taxes propres destinées au financement de l'assainissement des décharges et des autres sites". Selon le rapporteur de la commission, cet ajout devait préciser que le législateur cantonal demeurait compétent pour prévoir des contributions cantonales parallèlement à la taxe fédérale; de cette manière, l'on tenait compte des taxes cantonales existant déjà, par exemple dans le canton de Berne (BO 1995 CE 838, intervention Schüle). Le nouvel art. 32e LPE dans sa teneur du 21 décembre 1995 est entré en vigueur le 1er juillet 1997 et avait alors la teneur suivante (RO 1997 1166): "1 Le Conseil fédéral peut obliger le détenteur d'une décharge contrôlée à acquitter à la Confédération une taxe sur le stockage définitif des déchets. La Confédération affecte le produit exclusivement à l'indemnisation des coûts pour l'assainissement de décharges contrôlées et d'autres sites pollués par des déchets. Les indemnités sont versées aux cantons en fonction du coût des assainissements. 2 [...] 3 [...] 4 [...] 5 Le droit cantonal peut également prévoir des taxes destinées au financement de l'assainissement des décharges et des autres sites." Dans sa teneur du 21 décembre 1995, l'art. 32e LPE prévoyait ainsi seulement la possibilité de percevoir une taxe fédérale auprès des détenteurs de décharges contrôlées. Lors de la révision de 1997 de la loi fédérale du 24 janvier 1991 sur la protection des eaux (LEaux; RS 814.20), cette disposition a été modifiée en ce sens que si le Conseil fédéral faisait usage de sa compétence, il devait également assujettir à la taxe celui qui exportait des déchets en vue de leur mise en décharge à l'étranger. Lors de la procédure de consultation, il était en effet apparu que la taxe prévue par l'art. 32e LPE ne frappait pas l'exportation de déchets tels que les cendres d'électro-filtre provenant des usines d'incinération des ordures ménagères - lesquelles constituaient 80% des déchets exportés pour être mis en décharge à l'étranger. Or, s'il n'était pas question d'en interdire l'exportation, celle-ci ne devait "en aucun cas" être encouragée, les déchets en cause pouvant tout aussi bien être traités et mis en décharge en Suisse. Il convenait ainsi de soumettre à la taxe aussi bien l'exportation des déchets que leur stockage définitif en Suisse (Message du 4 septembre 1996 relatif à la modification de la loi fédérale sur la protection des eaux, FF 1996 IV 1213 ss, 1234). L'art. 32e al. 1 1ère phrase a été reformulé comme suit: "Le Conseil fédéral peut obliger le détenteur
d'une décharge contrôlée à acquitter à la Confédération une taxe sur le stockage définitif des déchets. S'il introduit une telle taxe, il oblige également celui qui exporte des déchets en vue de leur mise en décharge à acquitter la taxe à la Confédération." Les autres alinéas de l'art. 32e, notamment l'alinéa 5 relatif aux taxes cantonales, sont demeurés inchangés. Adoptée le 20 juin 1997, la modification est entrée en vigueur le 1er novembre 1997 (RO 1997 2247 s.). Le Conseil fédéral a fait usage de la compétence accordée par l'art. 32e LPE en édictant l'ordonnance du 5 avril 2000 relative à la taxe pour l'assainissement des sites contaminés (OTAS; RO 2000 1398), entrée en vigueur le 1er janvier 2001. Ce texte a été abrogé avec effet au 1er janvier 2009 par l'ordonnance du même nom du 26 septembre 2008 (RS 814.681). L'art. 32e LPE a à nouveau été modifié le 16 décembre 2005. Cette révision de la loi fédérale sur la protection de l'environnement faisait suite à une initiative parlementaire du Conseiller national Baumberger, tendant à ce que les coûts d'investigation soient supportés par le canton - plutôt que par le détenteur -, lorsqu'il s'avérait que le site concerné n'était pas pollué. Les cantons devaient être partiellement indemnisés à l'aide du produit de la taxe fédérale. Le projet de révision étendait par conséquent les dispositions relatives à la répartition des coûts d'assainissement des sites pollués aux coûts d'investigation et de surveillance des sites en question (cf. rapport du 20 août 2002 de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national concernant l'initiative parlementaire Sites contaminés, frais d'investigation, FF 2003 4527 ss; cf. aussi Hans W. Stutz, Das revidierte Altlastenrecht des Bundes, DEP 2006 p. 329 ss, 348 ss). L'art. 32e LPE a donc été modifié en ce sens que le produit de la taxe fédérale peut servir à financer non seulement l'assainissement des sites pollués, mais aussi des mesures d'investigation et de surveillance. L'affectation de la taxe cantonale a été étendue de la même manière, l'ancien alinéa 5 devenant par ailleurs l'alinéa 6 (FF 2003 4561). Le texte de l'alinéa 1 a en outre été restructuré à l'aide des lettres a et b, conformément au projet de la Commission précitée, selon laquelle il ne devait y avoir, sur le fond, "aucun changement par rapport au droit en vigueur" (FF 2003 4554, 4561). Adoptée par les Chambres le 16 décembre 2005, la novelle est entrée en vigueur le 1er novembre 2006 (RO 2006 2680). 2.2 Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de se prononcer sur la nature de la taxe fédérale, qu'il a qualifiée d'impôt, plus précisément d'impôt d'attribution des coûts (Kostenanlastungssteuer; ATF 131 II 271 consid. 5.3 p. 277). Faisant partie des impôts d'affectation, les impôts d'attribution des coûts sont destinés à couvrir certaines dépenses déterminées (ATF 122 I 305 consid. 4b p. 309/310; Höhn/Waldburger, Steuerrecht, vol. I, 9ème éd., 2000, § 1 no 5; Xavier Oberson, Droit fiscal suisse, 3e éd., 2007, § 1 no 25; Ryser/Rolli, Précis de droit fiscal suisse, 4ème éd., 2002, p. 19). Le cercle des contribuables d'un impôt de cette nature comprend les personnes à la charge desquelles la collectivité publique peut, pour des motifs objectifs et raisonnables, mettre en priorité les dépenses en cause plutôt que de les faire supporter par l'ensemble des contribuables. Ces motifs peuvent consister en ceci qu'un groupe de personnes profite plus que d'autres des prestations qu'il s'agit de financer ou qu'il apparaît comme la cause principale de ces dépenses. A la différence de la charge de préférence - qui fait partie des contributions causales -, l'impôt d'attribution des coûts est dû indépendamment de l'avantage effectif obtenu individuellement par le contribuable ou de la dépense que celui-ci a provoquée. Le lien entre les dépenses en cause et les personnes assujetties est ainsi abstrait et plus lâche que dans le cas d'une charge de préférence (ATF 122 I 305 consid. 4b p. 310; 128 I 155 consid. 2.2 p. 160; 129 I 346 consid. 5.1 p. 354). Dans le cas de la taxe prévue par l'art. 32e LPE, il n'existe pas de lien de causalité direct entre le stockage actuel de déchets et la nécessité d'assainir des sites contaminés. En ce qui concerne l'exportation de déchets, il faut même nier l'existence d'une relation de causalité indirecte. La taxe en question est mise à la charge des entreprises qui sont actuellement actives dans le domaine du stockage des déchets, parce que l'assainissement des sites contaminés les concerne plus étroitement qu'un tiers quelconque (ATF 131 II 271 consid. 5.3 p. 277). Cette contribution ne poursuit au demeurant pas un but d'incitation (même arrêt consid. 8.6 p. 289 et les références à la doctrine). 3. Dans son préambule, la loi vaudoise sur l'assainissement des sites pollués se réfère notamment à l'art. 32c LPE ainsi qu'à l'ordonnance fédérale du 26 août 1998 sur l'assainissement des sites pollués (ordonnance sur les sites contaminés; OSites; RS 814.680). Selon son art. 1er, intitulé "Buts", la loi en question règle l'application de l'ordonnance fédérale sur l'assainissement des sites pollués (al. 1). Elle régit le financement des mesures d'investigation et d'assainissement des anciennes décharges communales (al. 2). Elle assure le financement des mesures d'investigation et d'assainissement des autres sites pollués à la suite d'activités artisanales, industrielles ou d'accidents, dans la mesure où les personnes tenues à l'assainis- sement ne peuvent pas être retrouvées ou sont insolvables (sites orphelins; al. 3). Elle assure finalement le financement des mesures d'investigation et d'assainissement des sites pollués du canton ou dont la responsabilité incombe à celui-ci (al. 4). Faisant partie du Chapitre II "Financement" (art. 10 à 17) et intitulé "Crédit-cadre", l'art. 10 LASP dispose qu'un crédit-cadre assure le financement des aides à l'assainissement des anciennes décharges communales, le financement de l'assainissement des sites pollués orphelins et des sites pollués dont la responsabilité incombe à l'Etat, selon les art. 18 à 30 (al. 1). Le crédit-cadre peut être exploité pour financer des opérations ou des études, destinées notamment à prévenir, limiter ou supprimer une pollution (al. 2). Sous le titre "Taxe sur le stockage de déchets et de matériaux de comblement", l'art. 11 LASP a la teneur suivante: "1 L'Etat perçoit des détenteurs de décharges et de sites de comblement situés dans le Canton une taxe sur le stockage de déchets et de matériaux de comblement qui se monte à: a. 8 francs par tonne de déchets déposés en décharge bioactive; b. 8 francs par tonne de déchets déposés en décharge pour résidus stabilisés; c. 2 francs par tonne de déchets déposés en décharge pour matériaux inertes; d. 20 centimes par m3 de matériaux terreux ou pierreux déposés dans tout site de stockage définitif d'une capacité de plus de 200 m3 (dépôts d'excavations, gravières en comblement, aménagements de parcelles, etc). 2 Le Conseil d'Etat peut indexer les montants des taxes à l'indice suisse du prix à la consommation. 3 Le produit de la taxe est destiné à financer les charges liées à l'assainissement des sites pollués conformément à l'article 10". Intitulé "Fin du régime de la taxe", l'art. 17 LASP dispose que le Conseil d'Etat supprime la taxe instituée à l'art. 11, lorsque les charges d'amortissement et d'intérêt des crédits-cadres prévus à l'art. 10 seront contrebalancées en capital et intérêts. Adoptée par le Grand Conseil le 17 janvier 2006, la loi sur l'assainissement des sites pollués est entrée en vigueur le 1er avril 2006. 4. 4.1 La recourante fait grief à l'autorité précédente d'avoir violé, à plusieurs égards, le principe de la légalité en matière fiscale. De son point de vue, la loi vaudoise sur l'assainissement des sites pollués ne repose pas sur l'art. 32e al. 6 LPE, comme l'autorité précédente l'aurait retenu à tort, mais, conformément à son préambule, sur l'art. 32c LPE ainsi que sur l'ordonnance fédérale sur les sites contaminés. Or, ces dispositions fédérales ne sauraient constituer une base légale autorisant le canton de Vaud à percevoir une taxe sur l'assainissement des sites contaminés. Par conséquent, en confirmant la perception de la taxe litigieuse, l'autorité précédente aurait porté atteinte au principe de la légalité en matière fiscale ancré à l'art. 127 Cst. Selon la recourante, la taxe litigieuse ne saurait reposer non plus sur l'art. 32e al. 5 LPE dans son ancienne teneur, en vigueur lors de l'entrée en force de la loi vaudoise sur l'assainissement des sites pollués. En effet, la taxe que les cantons étaient habilités à percevoir selon cette disposition ne pouvait servir qu'à financer l'assainissement des décharges; en affectant le produit de la taxe plus largement à des opérations ou des études destinées notamment à prévenir, limiter ou supprimer une pollution (art. 1 et 10 al. 2 LASP), le législateur cantonal aurait outrepassé les limites de la base légale fédérale. Pour ce motif aussi, l'autorité précédente aurait violé le principe de la légalité en confirmant la perception de la taxe litigieuse. La recourante invoque l'art. 37 LPE, selon lequel les dispositions que les cantons prennent en exécution de la loi fédérale sur la protection de l'environnement et qui se rapportent notamment aux déchets doivent être approuvées par la Confédération. Or, contrairement à ce qui figure dans la décision attaquée, la loi vaudoise sur l'assainissement des sites pollués n'aurait pas été valablement approuvée par l'autorité compétente, à savoir le Conseil fédéral. Par conséquent, en tant qu'elle confirme la perception d'une taxe fondée sur une loi cantonale qui n'aurait pas été dûment approuvée par l'autorité fédérale compétente, la décision entreprise porterait atteinte au principe de la légalité. 4.2 Comme cela ressort de la genèse de l'art. 32e LPE dans sa teneur du 21 décembre 1995, la Confédération ne dispose pas d'une compétence exclusive pour percevoir des contributions destinées à l'assainissement de sites pollués par des déchets. Les cantons conservent donc en ce domaine une compétence (parallèle) fondée sur la clause générale de l'art. 3 Cst. (cf. Tschannen, op. cit., no 43 ad art. 32e LPE). L'art. 32e al. 6 LPE constitue ainsi une réserve au sens impropre en faveur du droit cantonal. Du moment qu'il s'agit d'une compétence cantonale propre et non pas d'une compétence déléguée par la Confédération, la loi vaudoise sur l'assainissement des sites pollués ne doit pas, en tant qu'elle prévoit la taxe litigieuse, se fonder sur la loi fédérale sur la protection de l'environnement. Peu importe dès lors que les dispositions de droit fédéral mentionnées dans son préambule ne puissent servir de fondement à la contribution en question. Les griefs tirés d'un défaut de base légale fédérale sont ainsi mal fondés. Au vu de ce qui précède, les normes de la loi vaudoise sur l'assainissement des sites pollués relatives à la taxe litigieuse ne constituent pas des dispositions d'exécution de la loi fédérale sur la protection de l'environnement, au sens de l'art. 37 LPE. Par conséquent, ces dispositions ne sont pas soumises à l'approbation de la Confédération, comme l'Office fédéral de l'environnement l'admet du reste dans sa détermination. Partant, le grief tiré du défaut d'approbation du droit cantonal doit également être rejeté. 5. Selon la recourante, l'autorité précédente aurait omis de constater que le canton de Vaud est le seul en Suisse romande à prélever une taxe affectée à l'assainissement des sites contaminés. S'agissant de la taxe prélevée par le canton de Berne, elle aurait en outre dû préciser que celle-ci ne frappe que les déchets provenant du territoire dudit canton. De l'avis de la recourante, le fait que le canton de Vaud est le seul canton romand à avoir institué une taxe sur le stockage des déchets et qu'en outre cette taxe ne frappe pas leur exportation, viole à plusieurs égards le droit fédéral. 5.1 La recourante fait valoir que, selon l'art. 32e LPE, si le législateur cantonal instaure une taxe sur le stockage des déchets, il doit également imposer leur exportation. Dans la mesure où la loi vaudoise sur l'assainissement des sites pollués exonère de toute taxe l'exportation des déchets, elle serait donc contraire à cette disposition et violerait ainsi le principe de la force dérogatoire du droit fédéral. S'il indique l'affectation du produit de la taxe cantonale, l'art. 32e al. 6 LPE - comme son alinéa 5 dans sa teneur en vigueur jusqu'au 30 octobre 2006 - ne détermine pas le cercle des contribuables, ni l'objet de la taxe, ni son mode de calcul. Cette retenue du législateur fédéral tient au fait que la faculté de percevoir la taxe en question découle d'une compétence cantonale. Il appartient donc au législateur cantonal de définir les éléments précités, en respectant le principe de la légalité en matière fiscale, tel qu'il est ancré dans la Constitution fédérale (cf. Tschannen, op. cit., no 43 ad art. 32e LPE). Ainsi, d'un point de vue littéral déjà, l'on ne saurait suivre la recourante lorsqu'elle affirme que l'art. 32e LPE impose aux cantons qui choisissent d'instaurer leur propre taxe de faire en sorte que celle-ci frappe aussi bien l'exportation des déchets que leur stockage. En outre, sous l'angle historique, c'est la novelle du 21 décembre 1995 qui a mis sur un pied d'égalité, s'agissant de la taxe fédérale, le stockage et l'exportation de déchets. Or, cette modification de l'art. 32e LPE a laissé l'alinéa relatif à la taxe cantonale inchangé. Le point de vue de la recourante est par conséquent mal fondé. 5.2 En instaurant seul une taxe sur le stockage des déchets, sans se soucier de la législation des cantons voisins, le canton de Vaud aurait porté atteinte au principe de collaboration intercantonale ancré à l'art. 31a LPE. De plus, en instituant une taxe frappant le stockage des déchets mais non leur exportation, il favoriserait l'élimination des déchets produits dans le canton de Vaud dans des installations situées hors de son territoire et empêcherait que les résidus de ce processus d'élimination reviennent dans le canton pour y être stockés dans la décharge exploitée par la recourante. L'introduction de la taxe litigieuse aurait ainsi pour effet d'entraver l'application du droit fédéral sur la planification en matière de déchets. Celui-ci prescrit en effet que les cantons divisent leur territoire en zones d'apport (art. 31b al. 2 et 31c al. 2 LPE) et attribuent chacune d'elles à une installation de traitement des déchets (art. 18 al. 1 de l'ordonnance fédérale du 10 décembre 1990 sur le traitement des déchets [OTD; RS 814.600]); les cantons doivent veiller à ce que les déchets d'une zone d'apport donnée soient traités dans l'installation à laquelle elle a été attribuée (art. 18 al. 2 OTD). A supposer que, comme le prétend
la recourante, le canton de Vaud soit le seul en Suisse romande à percevoir une taxe sur le stockage des déchets, cela n'est pas contraire au principe de collaboration intercantonale prévu à l'art. 31a LPE. Il ressort en effet de la systématique de la loi (voir l'intitulé de la Section 2 dont l'art. 31a LPE fait partie) et du texte de l'art. 31a al. 1 que ce principe s'applique à la planification de la gestion des déchets ainsi qu'à leur élimination. Le principe en question n'implique en revanche pas que les cantons doivent adopter des solutions uniformes s'agissant d'une éventuelle taxe destinée à financer les mesures d'assainissement des sites pollués. En laissant subsister la compétence cantonale de percevoir une telle taxe et en renonçant à harmoniser cette dernière, le législateur fédéral a bien plutôt accepté la création de disparités à cet égard, certains cantons faisant usage de leur compétence alors que d'autres non et les premiers pouvant concevoir la taxe de différentes manières. Lorsqu'elle affirme que le fait que la taxe vaudoise ne frappe pas l'exportation de déchets entraverait l'application des dispositions du droit fédéral prescrivant le découpage du territoire cantonal en zones d'apport, la recourante part du principe que les déchets doivent être autant que possible éliminés sur le territoire du canton où ils sont produits. Or, si ce principe vaut au plan national (cf. art. 30 al. 3 LPE), il ne s'applique pas au plan cantonal, où l'art. 31a prescrit au contraire de collaborer et de planifier la gestion ainsi que l'élimination des déchets au-delà des frontières cantonales (cf. Ursula Brunner, in Kommentar zum Umweltschutzgesetz, op. cit., no 53 ad art. 30 LPE). Par conséquent, il n'y aurait guère de sens qu'un canton perçoive une taxe sur l'"exportation" dans un autre canton des déchets produits sur son territoire. Autre est la question de savoir si un canton qui soumet à une contribution le stockage des déchets devrait traiter de la même manière leur exportation hors de Suisse (cf. ci-après consid. 5.3). Compte tenu de ce qui précède, les griefs de violation de la loi fédérale sur la protection de l'environnement et de ses dispositions d'exécution sont mal fondés. 5.3 Dans la mesure où elle ne frappe pas l'exportation des déchets, la taxe litigieuse serait contraire à l'art. 30 al. 3 LPE, aux termes duquel les déchets doivent être éliminés sur le territoire national. Elle porterait également atteinte aux art. 4 ch. 2 lettre b et ch. 9 lettre a de la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières des déchets dangereux et de leur élimination (conclue à Bâle le 22 mars 1989; entrée en vigueur pour la Suisse le 5 mai 1992; RS 0.814.05). Selon la première de ces dispositions, chaque partie à la Convention doit assurer la mise en place d'installations adéquates d'élimination qui devront, dans la mesure du possible, être situées à l'intérieur du pays, en vue d'une gestion écologiquement rationnelle des déchets dangereux et d'autres déchets en quelque lieu qu'ils soient éliminés. D'après la seconde, les parties à la Convention prennent les mesures requises pour que les mouvements transfrontières de déchets dangereux et d'autres déchets ne soient autorisés que si, entre autres situations, l'Etat d'exportation ne dispose pas des moyens techniques et des installations nécessaires ou des sites d'élimination voulus pour éliminer les déchets en question selon des méthodes écologiquement rationnelles et efficaces. L'art. 30 LPE énonce les principes directeurs du droit des déchets: dans la mesure du possible, leur production doit être limitée (al. 1) et les déchets doivent être valorisés (al. 2); ceux-ci doivent être en outre éliminés d'une manière respectueuse de l'environnement et, "pour autant que cela soit possible et approprié", sur le territoire national. De manière générale, ces principes s'adressent aussi aux législateurs cantonaux (Brunner, op. cit., no 3 ad art. 30 LPE). Relativisé par le principe de l'élimination des déchets d'une manière respectueuse de l'environnement, qui l'emporte sur lui (ATF 131 II 271 consid. 8.6 p. 290), le principe de l'élimination sur le territoire national ou de l'élimination autonome (FF 1993 II 1382) a été introduit par la révision du 21 décembre 1995 de la loi fédérale sur la protection de l'environnement (cf. Brunner, op. cit., nos 7 et 8 ad art. 30 LPE). Il existe donc une connexité non seulement logique, mais encore temporelle entre cette modification et la novelle du 20 juin 1997, qui a modifié l'art. 32e LPE en ce sens que si le Conseil fédéral faisait usage de sa compétence de prélever une taxe sur le stockage définitif de déchets, il devait réserver le même traitement à leur exportation. Or, comme on l'a vu, cette novelle a laissé l'alinéa 5, relatif à la taxe cantonale, inchangé. Cela montre que l'exigence de ne pas traiter, d'un point de vue fiscal, l'exportation des déchets hors de Suisse d'une manière plus favorable que leur élimination en Suisse vaut pour la taxe fédérale, mais non pour la taxe cantonale. La mise en oeuvre du principe de l'élimination sur le territoire national incombe en effet essentiellement au législateur fédéral, notamment parce que ce principe découle de conventions internationales - dont la Convention de Bâle - (cf. Brunner, op. cit., nos 52 et 59 ad art. 30 LPE) auxquelles la Confédération suisse est partie. Au vu de ce qui précède, les griefs de violation de l'art. 30 al. 3 LPE et de la Convention de Bâle sont mal fondés. 5.4 En favorisant l'exportation des déchets et leur stockage hors du canton de Vaud, dans des décharges moins écologiques que celle de la recourante, la taxe litigieuse serait également contraire à l'art. 74 al. 1 et 2 Cst. L'art. 74 al. 1 Cst. attribue à la Confédération une compétence législative globale en matière de protection de l'environnement, en lui donnant un mandat de légiférer (Aubert/Mahon, Petit commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse, 2003, no 5 ad art. 74 Cst.). La recourante ne peut rien tirer à son profit de cette disposition. Quant à l'art. 74 al. 2 Cst., il énonce le principe de prévention et celui de la causalité ou du "pollueur-payeur". Cette disposition ne précise cependant pas la portée des principes en question et n'est ainsi pas directement applicable; il appartient au législateur de la concrétiser (Reto Morell, in Die schweizerische Bundesverfassung, Kommentar, 2e éd., 2008, no 17 ad art. 74 Cst.; Aubert/Mahon, op. cit., no 14 ad art. 74 Cst.; voir aussi, s'agissant du principe de la causalité, l'arrêt 2P.266/2003 du 5 mars 2004 consid. 1.1, in DEP 2004 p. 197, RDAF 2005 I p. 601). Partant, la recourante ne peut pas davantage se prévaloir de cette disposition, sans compter qu'elle se borne à affirmer, sans l'établir, que le stockage dans d'autres décharges que la sienne serait moins écologique. 6. 6.1 La recourante soutient que la taxe litigieuse ne répond pas à un intérêt public. En effet, le fait qu'elle ne frappe pas l'exportation de déchets favoriserait cette dernière et serait à l'origine d'un trafic routier "sur très longue distance", de nature à porter atteinte à l'environnement. En outre, cette exonération - en plus d'être contraire aux principes de droit fédéral et international déjà évoqués ci-dessus - priverait le canton de Vaud d'une source de financement importante, en l'obligeant à mettre à contribution d'autant plus les détenteurs de décharges tels que la recourante. 6.2 Dans la mesure où le produit de la taxe litigieuse permet au canton de Vaud de remplir ses tâches en matière d'assainissement des anciennes décharges communales et des sites pollués, son prélèvement répond à un intérêt public (cf. Oberson, op. cit., § 3 no 73, selon lequel "l'obtention par l'Etat de recettes fiscales, dans les limites de la loi, pour assurer la fourniture de ses tâches est d'intérêt public"). Cet intérêt public ne disparaît pas sous prétexte que le produit de la taxe pourrait être supérieur si elle était conçue différemment. Quant à dire qu'en ne frappant pas l'exportation de déchets, la taxe litigieuse engendrerait un important trafic routier, au préjudice de l'environnement, cela n'est nullement prouvé. Dans son mémoire de recours devant le Tribunal de céans, la recourante n'a en particulier pas réfuté l'argument de l'autorité précédente selon lequel l'exportation des déchets devrait être limitée par les coûts du transport, qui représentent pour les entreprises exportatrices une charge bien plus importante. Mal fondé, le grief doit être rejeté. 7. 7.1 La recourante se plaint d'une violation du principe de l'interdiction de l'arbitraire, grief sur lequel l'autorité précédente ne se serait pas prononcée, alors qu'il avait été dûment développé aussi bien dans les écritures produites en instance cantonale que lors des plaidoiries qui ont suivi l'instruction de la cause. Devant le Tribunal de céans, la recourante soulève à nouveau ce grief, en faisant valoir qu'en exonérant l'exportation de déchets, le législateur cantonal aurait violé "une règle fédérale claire" qui impose de percevoir une taxe aussi bien sur l'exportation que sur le stockage de déchets. En outre, il serait arbitraire de soumettre la recourante à la taxe litigieuse, alors que celle-ci doit déjà supporter des charges supplémentaires (construction des casiers sécurisés, double contrôle des eaux, stabilisation des déchets par l'adjonction de ciment et d'eau avant leur stockage, etc.) par rapport aux décharges traditionnelles et moins écologiques et que par ailleurs la décharge exploitée par la recourante serait "en tout point remarquable et fiable" sur le plan écologique. 7.2 Un arrêté de portée générale viole le principe de l'interdiction de l'arbitraire s'il ne repose pas sur des motifs objectifs sérieux ou s'il est dépourvu de sens et de but (ATF 133 I 259 consid. 4.3 p. 265; 123 I 241 consid. 2b p. 243 et la jurisprudence citée). 7.3 A en juger par la structure du mémoire de recours du 4 juin 2007 déposé devant l'autorité précédente (pt 7 "Principes d'interdiction de l'arbitraire et de la protection de la bonne foi" faisant partie du chapitre V "Impôt d'orientation"), le grief d'arbitraire était lié à la nature de la taxe litigieuse qualifiée de taxe d'orientation. Or, l'autorité précédente a précisément rejeté cette qualification (consid. 10 de l'arrêt du 26 janvier 2009), en retenant celle d'impôt d'attribution des coûts. Dans ces conditions, le grief d'arbitraire n'avait plus à être examiné, de sorte que la recourante ne saurait se plaindre à cet égard d'une violation de son droit d'être entendue. Au demeurant, la recourante motive le grief en question en partant de la notion d'arbitraire appliquée à une décision, alors qu'elle s'en prend en réalité à la loi cantonale fondant la taxe litigieuse, soit à un arrêté de portée générale au sens de la jurisprudence qui vient d'être citée. Sur ce point, la motivation du recours n'est donc pas pertinente et ne satisfait pas aux exigences accrues posées par l'art. 106 al. 2 LTF. Partant, le grief est irrecevable. Pour le surplus, dans la mesure où la recourante soutient que le législateur cantonal aurait violé une norme claire du droit fédéral imposant de percevoir une taxe aussi bien sur l'exportation que sur le stockage de déchets, il peut être renvoyé au considérant 5.1 ci-dessus. 8. 8.1 En invoquant l'art. 127 Cst., la recourante se plaint d'une violation du principe d'égalité. Elle se réfère à l'exposé des motifs de la loi vaudoise sur l'assainissement des sites pollués en faisant valoir que l'objectif du législateur était d'imposer "toute la production de déchets". Dans la mesure où elle est prélevée uniquement auprès des détenteurs de décharges, la taxe litigieuse serait contraire au principe d'égalité. Au surplus, la recourante soutient que "le principe d'égalité entre décharges vaudoises et autres décharges sises sur le territoire de la Suisse romande est manifestement violé", dès lors que le canton de Vaud est le seul à avoir introduit une telle taxe, en faisant fi du principe de la coordination intercantonale. 8.2 Un arrêté de portée générale viole le principe de l'égalité lorsqu'il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu'il omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente; cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 131 I 377 consid. 3 p. 382-383; 130 V 18 consid. 5.2 p. 31; 129 I 1 consid. 3 p. 3). 8.3 S'il n'existe pas de lien de causalité directe entre le stockage actuel de déchets sur un territoire donné et les besoins d'assainir des sites contaminés situés dans le même espace, il faut nier même l'existence d'un lien de causalité indirecte en ce qui concerne l'exportation de déchets hors de ce territoire (cf. consid. 2.2 ci-dessus avec référence à l'ATF 131 II 271 consid. 5.3 p. 277). Les deux activités ne sont donc pas entièrement semblables du point de vue du lien de causalité avec les besoins d'assainissement, relation qui est déterminante pour mettre la taxe en question à la charge des entreprises exerçant de telles activités. En dépit de cette différence, le législateur fédéral a soumis à la taxe aussi bien l'exportation de déchets que leur stockage en Suisse, de façon à mettre en oeuvre le principe de l'élimination sur le territoire national. En revanche, pour les raisons indiquées plus haut (cf. consid. 5), le droit fédéral n'impose pas un traitement égal de l'exportation et du stockage au plan cantonal. Dans ces conditions, le législateur cantonal peut ne soumettre à la taxe que le stockage de déchets, sans porter atteinte au principe d'égalité. Au demeurant, le principe d'égalité n'est pas non plus violé du fait que le canton de Vaud serait le seul en Suisse romande à avoir instauré une taxe sur le stockage de déchets. Ce principe ne vaut en effet qu'à l'intérieur d'un ordre juridique donné. 9. 9.1 La recourante se plaint d'une violation du principe de la proportionnalité ancré à l'art. 5 al. 2 Cst. Elle fait valoir en particulier que la taxe litigieuse est contraire à la règle de l'adéquation: en exonérant l'exportation de déchets, elle mettrait les coûts des travaux d'assainissement à la charge des seuls exploitants de décharges - lesquels seraient d'autant plus lourdement grevés -, alors que le but du législateur fédéral aurait été de les répartir sur l'ensemble des agents économiques actifs dans le domaine des déchets. En outre, la taxe litigieuse serait de nature confiscatoire; du fait de cette contribution, la recourante songerait à "une fermeture à brève échéance de son site". 9.2 Comme indiqué plus haut (consid. 5.1), s'agissant
d'une compétence cantonale, le législateur fédéral n'a pas fixé, entre autres éléments essentiels, le cercle des contribuables soumis à la contribution litigieuse. Il n'est donc pas exact que le législateur fédéral ait voulu que celle-ci soit répartie sur l'ensemble des entreprises actives dans le domaine des déchets. Quant à la nature prétendument confiscatoire de la taxe litigieuse, la recourante n'étaye en aucune manière ses allégations. Le grief doit donc être rejeté dans la mesure où il est recevable. 10. 10.1 La recourante soutient que la taxe litigieuse porte atteinte à sa liberté économique, qu'elle soit qualifiée d'impôt d'affectation ou d'impôt d'orientation. Pour le cas où la première qualification serait retenue, elle fait valoir que la contribution en cause porte atteinte à sa liberté économique, sans être justifiée par un intérêt public - l'exonération de l'exportation de déchets allant à l'encontre du but de protection de l'environnement - et sans respecter le principe de proportionnalité - cette exonération étant contraire au but de la taxe, qui serait de frapper l'ensemble des agents économiques actifs dans le domaine des déchets. Par ailleurs, la recourante soutient, en substance, que la taxe litigieuse serait prohibitive: la perception de celle-ci l'empêcherait d'équilibrer ses comptes, ce que l'autorité précédente aurait omis de constater. La recourante n'aurait d'autre choix que d'intégrer le coût de la taxe dans ses prix, ce qui aurait pour effet de compromettre le développement futur de ses installations ainsi que la conclusion d'accords avec des cantons partenaires. En outre, la perception de la contribution litigieuse serait contraire au principe de la neutralité fiscale, dans la mesure où elle aurait pour effet de discriminer les détenteurs de décharges situées dans le canton de Vaud par rapport à leurs concurrents directs qui exploitent des décharges dans d'autres cantons romands. Enfin, pour le cas où la qualification d'impôt d'orientation serait retenue, la recourante fait valoir que la contribution en cause ne saurait constituer une mesure de politique sociale - laquelle inclut la protection de l'environnement - de nature à justifier une ingérence dans le jeu de la libre concurrence, du moment que l'exonération de l'exportation de déchets va à l'encontre de l'objectif de protection de l'environnement. 10.2 Selon l'art. 27 al. 1 Cst., la liberté économique est garantie. Elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (art. 27 al. 2 Cst.). Elle protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu. Cette dernière condition ne suppose pas la poursuite d'un but économique; elle est remplie également lorsqu'une entité poursuivant un but idéal recherche des ressources commerciales pour couvrir ses frais de gestion (ATF 128 I 19 consid. 4c/aa p. 29). La liberté économique peut être invoquée tant par les personnes physiques que par les personnes morales (ATF 131 I 223 consid. 4.1 p. 230 s.). Si la doctrine admet que les collectivités publiques ne peuvent en principe pas s'en prévaloir, la question - laissée ouverte dans l'ATF 131 II 13 consid. 6.4.1 p. 27 s. - est plus controversée s'agissant des entreprises publiques ou d'économie mixte (cf. Klaus A. Vallender, in Die schweizerische Bundesverfassung, Kommentar, op. cit., no 46 ad art. 27 Cst.). Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de se prononcer sur le point de savoir si des mesures fiscales constituent une restriction de la liberté économique. A la différence de l'interdiction d'exercer une activité économique ou du fait de la soumettre à autorisation, le prélèvement de contributions ne constitue pas une restriction juridique, mais il peut de fait influer sur l'exercice de la liberté économique. Toute mesure ayant une incidence sur la liberté en question ne constitue toutefois pas une limitation de celle-ci et il y a lieu de se montrer restrictif pour admettre l'existence d'une telle limitation (ATF 125 I 182 consid. 5b p. 198). Il faut au demeurant distinguer selon le type de contribution en cause. Les impôts spéciaux sur l'activité économique (Sondergewerbesteuern) ne sont admissibles au regard de la liberté économique que pour autant qu'ils ne soient pas prohibitifs. Une telle contribution est prohibitive si son montant "empêche la réalisation d'un bénéfice convenable dans le commerce ou la branche en question, en rendant impossible ou excessivement difficile l'exercice de la profession" (ATF 87 I 29 consid. 3 p. 32; 128 I 102 consid. 6b p. 110). Tel n'est pas le cas si "elle peut être transférée à l'acheteur, c'est-à-dire si, ajoutée au prix de vente, elle n'empêche pas l'entreprise de soutenir la concurrence" (ATF 87 I 29 consid. 4 p. 36). A la différence des impôts spéciaux, les impôts généraux n'interfèrent pas avec la liberté économique. Il en va de même des contributions causales telles que les émoluments d'utilisation ou d'administration, pour autant qu'elles respectent le principe de la couverture des coûts (cf. ATF 135 I 130 consid. 4.2 ainsi que les références à la jurisprudence et à la doctrine). 10.3 Selon le principe de l'égalité de traitement entre personnes appartenant à la même branche économique découlant des art. 27 et 94 Cst., sont interdites les mesures qui causent une distorsion de la compétition entre concurrents directs, c'est-à-dire celles qui ne sont pas neutres sur le plan de la concurrence. Des mesures fiscales peuvent avoir un tel effet (ATF 131 II 271 consid. 9.2.2 p. 291 et la jurisprudence citée). 10.4 En l'espèce, la recourante constitue une entreprise d'économie mixte dont plusieurs collectivités publiques sont actionnaires. Elle a de plus été exonérée de l'impôt cantonal sur le bénéfice et le capital, au motif qu'elle poursuit un but de service public. On peut dès lors se demander, avec l'autorité précédente, si la recourante peut se prévaloir de la liberté économique. La question peut toutefois demeurer indécise, du moment qu'une atteinte à la liberté économique ne serait de toute manière pas avérée. S'agissant de la nature de la taxe litigieuse, il n'y a pas de raison de la qualifier autrement que la taxe fédérale prévue à l'art. 32e al. 1 LPE, laquelle constitue un impôt d'attribution des coûts et non un impôt d'orientation (cf. consid. 2.2 ci-dessus). Or, il n'est nullement établi que la taxe en question serait prohibitive. Selon la jurisprudence précitée, le simple fait que, de l'aveu même de la recourante, il soit possible de l'intégrer dans ses prix, exclut de lui reconnaître un tel caractère. Au demeurant, s'agissant d'une taxe cantonale vaudoise, il convient, pour s'assurer du respect du principe de la neutralité fiscale entre concurrents directs, de prendre en considération le seul canton de Vaud. Or, la recourante ne prétend pas que la contribution litigieuse engendrerait une inégalité de traitement entre des entreprises se trouvant en situation de concurrence directe à l'intérieur de ce canton. Le grief de violation de la liberté économique doit ainsi être rejeté. 11. Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. Succombant, la recourante supporte les frais judiciaires (cf. art. 66 al. 1 LTF) et n'a pas droit à des dépens (cf. art. 68 al. 1 LTF). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2. Des frais judiciaires de 6'000 fr. sont mis à la charge de la recourante. 3. Le présent arrêt est communiqué à la mandataire de la recourante, au Service des eaux, sols et assainissement et à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral de l'environnement, Division Droit. Lausanne, le 13 août 2009 Au nom de la IIe Cour de droit public du Tribunal fédéral suisse Le Président: Le Greffier: Müller Vianin