{T 0/2} 5A_12/2008/frs Arrêt du 2 avril 2008 IIe Cour de droit civil Composition MM. les Juges Raselli, Président, Meyer et Zappelli, Juge suppléant. Greffier: M. Fellay. Parties C.________, (époux), recourant, représenté par Me Franck Ammann, avocat, contre dame C.________, (épouse), intimée, représentée par Me Alix de Courten, avocate, Objet divorce, recours contre l'arrêt de la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 5 décembre 2007. Faits: A. C.________, né le 2 avril 1961, et dame C.________, née le 17 décembre 1958, se sont mariés le 20 juillet 1987. Ils ont eu trois enfants: A.________, née le 11 avril 1988, B.________ et D.________, tous deux nés le 23 mai 1990. B. Le mari a ouvert action en divorce le 14 novembre 2002 et les époux se sont séparés le 1er février 2003. Par jugement du 12 décembre 2006, le Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne a prononcé le divorce des époux, attribué l'autorité parentale et la garde sur l'enfant D.________ au père et sur l'enfant B.________ à la mère, et condamné le demandeur à verser une contribution de 500 fr. par mois pour l'entretien de l'enfant B.________, ainsi qu'une contribution mensuelle de 1'500 fr. durant 12 mois, puis de 1'200 fr. durant les 12 mois suivants pour l'entretien de la défenderesse. Par arrêt du 22 octobre 2007, notifié le 5 décembre suivant, la Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois, admettant partiellement l'appel de la défenderesse, a condamné le demandeur à contribuer à l'entretien de son fils B.________, jusqu'à sa majorité ou son indépendance financière, par le versement mensuel de 950 fr., et à celui de la défenderesse par le versement d'une pension mensuelle de 2'000 fr. durant 12 mois et de 1'000 fr. durant les 48 mois suivants. C. Le 4 janvier 2008, le demandeur a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral, concluant à la réforme de l'arrêt cantonal en ce sens que la contribution mensuelle due pour l'entretien de son épouse est fixée à 1'500 fr. durant 12 mois et à 1'200 fr. durant les 12 mois suivants. A titre subsidiaire, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouveau jugement dans le sens des considérants. L'intimée n'a pas été invitée à se déterminer. Considérant en droit: 1. 1.1 Le recours est dirigé contre un jugement final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75 LTF) et émane d'une partie qui a succombé dans ses conclusions tendant à la libérer partiellement d'une contribution d'entretien due à l'autre partie (art. 76 al. 1 LTF). La différence entre les montants obtenus par l'intimée devant l'autorité précédente, soit 72'000 fr. (12x2'000 + 48x1'000 fr.) et ceux proposés par le recourant, soit 32'400 fr. (12x1'500 + 12x1'200 fr.) représente 39'600 fr. (cf. art. 51 al. 1 let. a et al. 4 LTF). Le recours satisfait donc à l'exigence posée à l'art. 74 al. 1 let. b LTF. Il a en outre été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. 1.2 Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être lié ni par les motifs de l'autorité précédente, ni par les moyens des parties. Compte tenu des exigences de motivation posées, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), à l'art. 42 al. 2 LTF, le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs soulevés; il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une juridiction de première instance, toutes les questions juridiques pouvant se poser lorsqu'elles ne sont plus discutées devant lui (ATF 133 IV 150 consid. 1.2 p. 152). 1.3 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF); il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui entend s'écarter des constatations de la juridiction cantonale doit exposer de manière circonstanciée en quoi les exceptions prévues par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui figurant dans la décision attaquée (ATF 133 IV 150 consid. 1.3 p. 152). Les faits nouveaux et les preuves nouvelles sont prohibés à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF). 2. 2.1 Le recourant remet en cause le montant et la durée de la contribution d'entretien due à l'intimée, se plaignant à cet égard d'une violation de l'art. 125 al. 2 ch. 4, 6 et 7 CC. Il reproche à l'autorité cantonale de n'avoir pas retenu que l'intimée, bien que sachant dès que son couple était en péril, n'ait rien entrepris avant 2006 pour se réinsérer professionnellement. Selon lui, la charge des enfants n'aurait pas été un empêchement à cet égard; l'intimée aurait pu au moins entreprendre des cours de mise à niveau de sa formation à l'époque de la séparation déjà; maniant l'informatique avec une certaine aisance, elle aurait été en mesure, alors qu'elle n'était âgée que de 45 ans avec de meilleures chances sur le marché du travail qu'en 2006, de compléter en quelques mois ou au plus en une année sa formation professionnelle et de reprendre une activité lucrative comme employée de commerce, ce qui lui assurerait aujourd'hui, à un taux d'activité de 80%, un revenu net de l'ordre de 4'000 fr.; le retard pris par l'intimée dans l'acquisition de son indépendance économique lui serait donc entièrement imputable et il n'y aurait pas lieu d'astreindre le recourant à en supporter les conséquences en lui imposant le paiement d'une contribution d'entretien sur plus de deux ans. 2.2 Selon l'art. 125 al. 1 CC, si l'on ne peut raisonnablement attendre d'un époux qu'il pourvoie lui-même à son entretien convenable, y compris à la constitution d'une prévoyance vieillesse appropriée, son conjoint lui doit une contribution équitable. Cette disposition concrétise deux principes: d'une part, celui de l'indépendance économique des époux après le divorce, qui postule que, dans toute la mesure du possible, chaque conjoint doit désormais subvenir lui-même à ses propres besoins et, d'autre part, celui de la solidarité, qui implique que les époux doivent supporter en commun non seulement les conséquences de la répartition des tâches convenue durant le mariage (art. 163 al. 2 CC), mais également les désavantages qui ont été occasionnés à l'un d'eux par le mariage et qui l'empêchent de pourvoir à son entretien. Dans son principe, comme dans son montant et sa durée, l'obligation d'entretien doit être fixée en tenant compte des éléments énumérés de façon non exhaustive à l'art. 125 al. 2 CC (ATF 132 III 598 consid. 9.1 p. 600; arrêt 5A_132/2007 du 21 août 2007 consid. 4.1 et les arrêts cités). La fixation de la contribution d'entretien relève du pouvoir d'appréciation du juge du fait, qui applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC). Il n'y a violation du droit fédéral que si le juge a abusé de son pouvoir d'appréciation, en se référant à des critères dénués de pertinence ou en ne tenant pas compte d'éléments essentiels, ou bien encore si, d'après l'expérience de la vie, le montant arrêté paraît manifestement inéquitable au regard des circonstances (ATF 127 III 136 consid. 3a p. 141 et les références citées; cf. également l'ATF 107 II 406 consid. 2c p. 410). Selon la jurisprudence, la rente doit être assurée à tout le moins aussi longtemps que les enfants attribués à la mère ont besoin d'une éducation et de soins étendus, à savoir en général jusqu'à la seizième année du plus jeune des enfants, et pour la durée présumable de la réinsertion professionnelle de l'épouse (arrêt 5C.100/2005 du 22 décembre 2005 consid. 2.1 et les références). Il a été jugé, dans des arrêts dont se prévaut le recourant (ATF 127 III 136 consid. 2c p. 140; arrêt 5C.235/2001 du 25 novembre 2002 consid. 3.1.1 et 3.1.2), que l'épouse qui sait que son mariage ne peut plus être sauvé ne saurait, lorsque la charge des enfants ne requiert plus sa présence constante, demeurer passive et invoquer la répartition des rôles convenue jusqu'alors durant le mariage. 2.3 Le cas jugé dans l'ATF 127 III 136 précité concernait une épouse âgée de 39 ans en 1995 au moment de la séparation de corps et de 43 ans et 9 mois en 2000 lors du prononcé du divorce. Elle était au bénéfice d'un bon état de santé et d'une expérience professionnelle d'employée de commerce qu'elle avait exercée durant plus de 10 ans, maîtrisait l'allemand et disposait de bonnes connaissances en anglais. Elle avait cessé d'exercer une activité professionnelle depuis 1986, mais en 1998, elle avait acquis un ordinateur performant, suffisant pour l'utilisation de logiciels de bureautique et l'accès à Internet et on pouvait attendre d'elle qu'elle se perfectionne dans le maniement de ces outils afin de pouvoir s'en servir professionnellement. Lors de l'introduction de l'action en divorce, le fils unique de l'intéressée, âgé de 13 ans, ne requérait plus une présence constante. Le principe du divorce de ce couple, séparé de corps depuis 5 ans et dont le mari avait déjà refait sa vie et allait avoir un enfant de sa compagne, était acquis. Le Tribunal fédéral a donc admis que, dans ces circonstances, l'épouse ne pouvait rester passive et qu'elle aurait dû se préparer à la perspective de devoir reprendre un travail. Il a par conséquent jugé conforme au droit fédéral l'arrêt cantonal qui exigeait de la défenderesse qu'elle se réinsère complètement dans la vie économique dans un délai de 4 ans et qui lui imputait immédiatement une capacité de gain hypothétique assez élevée. Les circonstances de fait retenues dans l'arrêt cantonal présentement attaqué sont sensiblement différentes de celles qui ont motivé l'arrêt précité. Pour refuser d'imputer immédiatement à l'intimée une capacité de gain hypothétique de 3'000 à 3'500 fr., la cour cantonale a retenu que l'intimée avait eu la charge de deux enfants de moins de 16 ans jusqu'en 2006, qu'il avait été convenu entre les époux qu'elle ne retravaillerait pas avant que les enfants n'aient atteint l'âge de 16 ans et qu'elle était âgée de 49 ans au moment du jugement. Ces éléments sont pertinents. A cela s'ajoute qu'au moment de la séparation et des premiers actes de procédure l'intimée avait la garde, non pas d'un enfant unique comme dans l'affaire précitée (ATF 127 III 136), mais de trois enfants âgés respectivement de 14 et 12 ans, ce qui représentait une charge certaine et astreignante. En outre, il n'est pas établi, contrairement à ce qui est soutenu dans le recours, que l'intimée ait su ou dû savoir que l'union conjugale était condamnée parce que son mari entretenait une relation adultère. La situation ne devait d'ailleurs pas apparaître irrémédiable, puisque les époux ont suspendu la procédure en septembre 2003, que celle-ci a été reprise en janvier 2005 sur requête du demandeur, mais que ce n'est qu'en novembre 2005, lors d'une nouvelle audience, que la défenderesse, constatant l'échec du couple, a consenti au divorce. Elle a de plus conservé la charge des deux cadets jusqu'en avril 2006, date à laquelle l'enfant D.________ est parti vivre chez son père. Dès lors qu'elle s'est mise à la recherche d'un emploi au début de 2006, on ne peut, compte tenu de toutes ces circonstances, reprocher à l'intimée d'avoir excessivement tardé à le faire. Il n'y a pas d'indice qu'elle ait fait traîner les choses en vue de se prévaloir ensuite, indûment, de son âge (cf. ATF 5C.235/2001 précité). Par ailleurs, le recourant n'expose pas suffisamment et ne démontre en tout cas pas en quoi la cour cantonale aurait, comme il le prétend, violé le droit fédéral en retenant que la formation de l'intimée étant ancienne et devant être remise à niveau, la durée de cinq ans pour se réinsérer complètement sur le marché du travail apparaissait raisonnable. L'ancienneté de la formation de l'intimée, laquelle date de près de 20 ans, est un fait, dont la portée n'est pas négligeable au vu de l'omniprésence actuelle de l'informatique. Au demeurant, la circonstance que l'intimée possède un ordinateur, ce qui est chose courante aujourd'hui, ne signifie pas qu'elle en maîtrise l'emploi à des fins professionnelles, le recourant admettant d'ailleurs lui-même qu'elle n'est pas particulièrement férue d'informatique. Ainsi, tout bien considéré, l'arrêt attaqué qui tient compte d'une capacité de gain maximum de l'intimée de 1'000 fr. à 1'400 fr. dans un premier temps, puis d'une capacité de gain augmentant graduellement pendant les quatre années suivantes de telle sorte que l'intimée parvienne finalement à assurer seule son entretien, apparaît conforme au droit fédéral. Les griefs du recourant ne suffisent pas à modifier cette appréciation. 3. En conclusion, le présent recours doit donc être rejeté dans la mesure de sa recevabilité, aux frais de son auteur (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à l'intimée qui n'a pas été appelée à répondre. Le Tribunal fédéral prononce: 1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge du recourant. 3. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud. Lausanne, le 2 avril 2008 Au nom de la IIe Cour de droit civil du Tribunal fédéral suisse Le Président: Le Greffier: Raselli Fellay