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28/12/2006 | SUISSE | N°I.472/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 28 décembre 2006, I.472/05


Cause {T 7}I 472/05 Arrêt du 28 décembre 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Lustenberger. Greffier : M.Beauverd M.________, recourante, contre Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenueGénéral-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 16 décembre 2004) Faits: A.M.________, née en 1948, travaille à temps partiel au service d'uneinstitution prodiguant des soins à domicile. Le 28 novembre 2000, elle aprésenté une demande tendant à l'octroi d'une rente del'assurance-invalidité, en indiq

uant souffrir d'une fibromyalgie. L'Office de l'assurance-inva...

Cause {T 7}I 472/05 Arrêt du 28 décembre 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Lustenberger. Greffier : M.Beauverd M.________, recourante, contre Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenueGénéral-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 16 décembre 2004) Faits: A.M.________, née en 1948, travaille à temps partiel au service d'uneinstitution prodiguant des soins à domicile. Le 28 novembre 2000, elle aprésenté une demande tendant à l'octroi d'une rente del'assurance-invalidité, en indiquant souffrir d'une fibromyalgie. L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud a requis l'avis dudocteur G.________, spécialiste en médecine générale et médecin traitant del'assurée (rapport du 12 janvier 2001), et recueilli des rapports du docteurF.________, médecin-chef à l'Association médicale du Centre thermalX.________ (des 10 février et 13 mars 2000). Par décision du 12 novembre 2001, l'office AI a nié le droit de l'intéresséeà des prestations, motif pris que son atteinte à la santé n'entraînait pasd'incapacité de gain. B.Saisi d'un recours de l'assurée qui concluait implicitement à l'octroi d'unerente d'invalidité, le Tribunal des assurances du canton de Vaud a confié uneexpertise au docteur H.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie(rapport du 27 juillet 2004). Statuant le 16 décembre 2004, la juridiction cantonale a rejeté le recoursdont elle était saisie. C.M.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, enconcluant à l'octroi d'une rente d'invalidité. L'office AI et l'Office fédéral des assurances sociales ont renoncé àprésenter des déterminations sur le recours. Considérant en droit: 1.Le jugement entrepris porte sur des prestations de l'assurance-invalidité.Selon l'art. 132 al. 1 OJ dans sa version selon le ch. III de la loi fédéraledu 16 décembre 2005 portant modification de la LAI (en vigueur depuis le 1erjuillet 2006), dans une procédure concernant l'octroi ou le refus deprestations d'assurance, le Tribunal fédéral des assurances peut aussiexaminer l'inopportunité de la décision attaquée et n'est pas lié par laconstatation de l'état de fait de l'autorité cantonale de recours. En vertude l'art. 132 al. 2 OJ, ces dérogations ne sont cependant pas applicableslorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne les prestations del'assurance-invalidité. Selon le ch. II let. c de la loi fédérale du 16décembre 2005, l'ancien droit s'applique aux recours pendants devant leTribunal fédéral des assurances au moment de l'entrée en vigueur de lamodification. Dès lors que le recours qui est soumis au Tribunal fédéral desassurances était pendant devant lui au 1er juillet 2006, son pouvoir d'examenrésulte de l'ancien art. 132 OJ, dont la teneur correspond à celle du nouvelalinéa 1. 2.La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant lamodification de nombreuses dispositions légales dans le domaine del'assurance-invalidité. Cependant, le cas d'espèce reste régi par lesdispositions de la LAI en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, eu égard auprincipe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au momentoù les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 127 V 467consid. 1). En outre, le Tribunal fédéral des assurances apprécie la légalitédes décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait existantau moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 121 V 366 consid. 1b). Pour les mêmes motifs, les dispositions de la novelle du 21 mars 2003modifiant la LAI (4ème révision), entrée en vigueur le 1er janvier 2004 (RO2003 3852) ne sont pas non plus applicables. 3.Le litige porte sur le droit éventuel de la recourante à une rente del'assurance-invalidité. A cet égard, le jugement entrepris exposecorrectement les dispositions légales (dans leur teneur en vigueur à la datedéterminante de la décision litigieuse du 12 novembre 2001) et les principesjurisprudentiels applicables en matière d'assurance-invalidité. Il suffitdonc d'y renvoyer. 4.4.1Sur le plan somatique, la juridiction cantonale a considéré - du moinsimplicitement - que la recourante est pleinement capable d'exercer sonactivité, motif pris que les affections somatiques diagnostiquées par ledocteur G.________ (status après gastroplastie par anneau pour obésitégynoïde sévère, incontinence urinaire secondaire, lymphoedèmes des membresinférieurs, status après opération des varices bilatérales, allergie à lapoussière de maison, ancien tabagisme, cardiopathie hypertensive avecinsuffisance cardiaque traitée compensée et suspicion de fièvre périodique)sont relativement banales et peuvent être traitées avec succès. La recourante conteste ce point de vue en alléguant que l'expert H.________ apréconisé la mise en oeuvre d'une expertise rhumatologique afin d'examinerles nombreuses limitations de cette nature présentées par l'assurée. 4.2 Dans son rapport du 12 janvier 2001, le docteur G.________ a fait état dedouleurs diffuses touchant le rachis, ainsi que les petites articulationschez une personne présentant une hyperlordose et une hypersiphose, unestatique antérieure avec affaissement des voûtes plantaires et un syndrometrophostatique décompensé ensuite de l'intervention chirurgicale qui avaitfait passer le poids de l'assurée de 103kilos à 75kilos. De son côté, ledocteur F.________ a diagnostiqué des lombalgies sur troubles statiques etsuspecté l'existence d'une spondylolyse (rapport du 10 février 2000).Toutefois, dans un rapport postérieur (du 13 mars 2000), ce médecin a attestéque le traitement de physiothérapie mis en oeuvre au Centre thermalX.________ avait entraîné une évolution favorable sous la forme d'unesensible diminution de la symptomatologie algique. Le docteur F.________était dès lors d'avis qu'une reprise du travail était exigible. Cela étant, il n'apparaît pas que l'avis du docteur G.________ divergefondamentalement de l'appréciation du docteur F.________ quant aux effets destroubles rhumatologiques sur la capacité de travail de la recourante. Eneffet, le docteur G.________ est d'avis non seulement que ces troublesn'entraînent que des douleurs diffuses (rapport du 12janvier 2001) maisencore il indique, dans la réplique adressée à la juridiction cantonale aunom de l'assurée, que l'ensemble de la problématique algique doit êtreconsidéré comme la conséquence de la fibromyalgie. Aussi, n'y a-t-il pas lieu de s'écarter du point de vue de la juridictioncantonale, selon lequel la recourante ne subit pas de diminution de sacapacité de travail en raison d'une atteinte à la santé de nature physique. 5.Cela étant, il n'en demeure pas moins que l'ensemble des médecins consultésont fait état d'une fibromyalgie. 5.1 Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral des assurances a jugé que lafibromyalgie et le trouble somatoforme douloureux présentaient des pointscommuns, en ce que leurs manifestations cliniques étaient pour l'essentielsimilaires et qu'il n'existait pas de pathogenèse claire et fiable pouvantexpliquer l'origine des douleurs exprimées. Cela rendait la limitation de lacapacité de travail difficilement mesurable car l'on ne pouvait pas déduirel'existence d'une incapacité de travail du simple diagnostic posé. Enparticulier, un diagnostic de fibromyalgie ou de trouble somatoformedouloureux ne renseignait pas encore sur l'intensité des douleurs ressentiespar la personne concernée, ni sur leur évolution, ou le pronostic qu'onpouvait poser dans un cas concret. La Cour de céans a déduit de cescaractéristiques communes qu'en l'état actuel des connaissances, il sejustifiait, sous l'angle juridique, d'appliquer par analogie les principesdéveloppés par la jurisprudence en matière de troubles somatoformesdouloureux lorsqu'il s'agissait d'apprécier le caractère invalidant d'unefibromyalgie (ATF 132 V 70 consid. 4.1).5.25.2.1Aussi, convenait-il également en présence d'une fibromyalgie, de poserla présomption que cette affection ou ses effets pouvaient être surmontés parun effort de volonté raisonnablement exigible (cf.ATF 131 V 50). De mêmequ'en cas de troubles somatoformes douloureux, il y avait toutefois lieu dereconnaître l'existence de facteurs déterminés qui, par leur intensité etleur constance, rendaient la personne incapable de fournir cet effort devolonté. Ces critères permettant de fonder exceptionnellement un pronosticdéfavorable dans les cas de fibromyalgie étaient les suivants: la présenced'une comorbidité psychiatrique importante par sa gravité, son acuité et sadurée, un processus maladif s'étendant sur plusieurs années sans rémissiondurable (symptomatologie inchangée ou progressive), des affectionscorporelles chroniques, une perte d'intégration sociale dans toutes lesmanifestations de la vie et l'échec de traitements ambulatoires oustationnaires conformément aux règles de l'art (même avec différents types detraitement), cela en dépit de l'attitude coopérative de la personne assurée.En présence d'une comorbidité psychiatrique, il y avait également lieu detenir compte de l'existence d'un état psychique cristallisé résultant d'unprocessus défectueux de résolution du conflit, mais apportant un soulagementdu point de vue psychique (profit primaire tiré de la maladie, fuite dans lamaladie). Enfin, comme dans les cas de troubles somatoformes douloureux, ilconvenait de conclure à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droitaux prestations d'assurance, si les limitations liées à l'exercice d'uneactivité résultaient d'une exagération des symptômes ou d'une constellationsemblable (par exemple une discordance entre les douleurs décrites et lecomportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont lescaractéristiques demeuraient vagues, l'absence de demande de soins, degrandes divergences entre les informations fournies par le patient et cellesressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstrativeslaissaient insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicapsmalgré un environnement psychosocial intact) (ATF 132 V 70 ss consid. 4.2.1et 4.2.2).5.2.2 Par ailleurs, quand bien même le diagnostic de fibromyalgie étaitd'abord le fait d'un médecin rhumatologue, il convenait aussi d'exiger, commeen cas de troubles somatoformes douloureux, le concours d'un médecinspécialiste en psychiatrie, ce d'autant plus que les facteurspsychosomatiques avaient, selon l'opinion médicale dominante (cf. ATF 132 V68s. consid. 3.3), une influence décisive sur le développement de cetteatteinte à la santé. Une expertise interdisciplinaire tenant à la fois comptedes aspects rhumatologiques et psychiques apparaissait donc en principe lamesure d'instruction adéquate pour établir de manière objective si l'assuréprésentait un état douloureux d'une gravité telle - eu égard également auxcritères déterminants cités - que la mise en valeur de sa capacité de travailsur le marché du travail ne pouvait plus du tout ou seulement partiellementêtre exigible de sa part. On peut réserver les cas où le médecin rhumatologueest d'emblée en mesure de constater, par des observations médicalesconcluantes, que les critères déterminants ne sont pas remplis, ou du moinspas d'une manière suffisamment intense, pour conclure à une incapacité detravail (ATF 132 V 72 consid. 4.3 et la référence). 5.3 La juridiction cantonale a considéré que la fibromyalgie n'entraînait pasde diminution de la capacité de travail de l'assurée, motif pris que ledocteur H.________ n'avait fait état d'aucune affection de nature psychiquedans son rapport d'expertise judiciaire du 27 juillet 2004. De son côté, la recourante critique ce point de vue en contestant la valeurprobante du rapport en question. En particulier, elle fait valoir quecelui-ci ne permet pas d'établir les effets de la fibromyalgie sur sacapacité de travail, du moment que les questions posées au docteur H.________étaient d'ordre tout à fait général et qu'ainsi, l'expert ne s'est pasexprimé quant aux critères permettant de fonder exceptionnellement unpronostic défavorable en ce qui concerne la fibromyalgie. 5.4 Le docteur H.________ n'a pas posé de diagnostic psychiatrique,considérant que l'assurée ne présentait pas de pathologie de cette nature.Certes, la personnalité de l'intéressée a un fonctionnement de typeétat-limite supérieur, mais sans caractère de maladie. Selon l'expert,l'assurée ne subit donc pas une diminution de sa capacité de travail du pointde vue psychiatrique. Même si, comme le relève la recourante, les questions posées à l'expert,d'ordre tout à fait général, ne faisaient aucune référence à la fibromyalgie,il apparaît que le docteur H.________ avait cependant connaissance de cetrouble, puisqu'il mentionne le diagnostic de cette affection posé par ledocteur F.________ (rapport du 10 février 2000) et relève les nombreusesdouleurs invoquées par l'intéressée. Toutefois, ignorant les facteurspsychosomatiques qui peuvent avoir une influence décisive sur ledéveloppement de la fibromyalgie, l'expert est enclin à attribuer cesdouleurs à une affection de nature somatique et préconise la mise en oeuvred'une expertise rhumatologique afin de connaître la capacité de travail de larecourante. Cela étant, le rapport d'expertise du docteur H.________ permet, certes,d'exclure en l'occurrence la présence d'une comorbidité psychiatriqueimportante par sa gravité, son acuité et sa durée. En revanche, il ne permetpas de savoir s'il existe d'autres facteurs déterminés qui, par leurintensité et leur constance, rendent la personne incapable de fournirl'effort de volonté nécessaire pour surmonter la fibromyalgie ou ses effets.En particulier, on ignore s'il existe un processus maladif s'étendant surplusieurs années sans rémission durable (symptomatologie inchangée ouprogressive), une perte d'intégration sociale dans toutes les manifestationsde la vie et l'échec de traitements ambulatoires ou stationnairesconformément aux règles de l'art (même avec différents types de traitement),cela en dépit de l'attitude coopérative de la personne assurée. On ne saitpas non plus si, au contraire, les limitations liées à l'exercice d'uneactivité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellationsemblable, ce qui permettrait de conclure à l'absence d'une atteinte à lasanté ouvrant le droit à prestations d'assurance.Aussi, convient-il de renvoyer la cause à la juridiction cantonale pourinstruction complémentaire sous la forme d'une expertise pluridisciplinaire -dans le cadre de laquelle il incombera aux experts de répondre aux questionssoulevées ci-dessus - et nouveau jugement. Partant, le recours se révèle bien fondé. Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est admis et le jugement du Tribunal des assurances du canton deVaud du 16 décembre 2004 est annulé, la cause étant renvoyée à laditejuridiction pour qu'elle procède conformément aux considérants. 2.Il n'est pas
perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances ducanton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales. Lucerne, le 28 décembre 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IIIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.472/05
Date de la décision : 28/12/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-12-28;i.472.05 ?
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