La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/12/2006 | SUISSE | N°6P.159/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 22 décembre 2006, 6P.159/2006


{T 0/2}6P.159/2006 6S.368/2006/rod Arrêt du 22 décembre 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Kolly et Karlen.Greffier: M. Oulevey. A. ________,recourant, représenté par Me Philippe Bauer, avocat, contre Ministère public du canton de Neuchâtel, rue du Pommier 3, case postale 2672,2001 Neuchâtel 1. 6P.159/2006Art. 29 al. 2 Cst. (procédure pénale; droit d'être entendu) 6S.368/2006Abus d'autorité (art. 312 CP) recours de droit public (6P.159/2006) et pourvoi en nullité (6S.368/2006)contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du c

antonde Neuchâtel du 17 juillet 2006. Faits : A.Le 14 mai 2004,...

{T 0/2}6P.159/2006 6S.368/2006/rod Arrêt du 22 décembre 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Kolly et Karlen.Greffier: M. Oulevey. A. ________,recourant, représenté par Me Philippe Bauer, avocat, contre Ministère public du canton de Neuchâtel, rue du Pommier 3, case postale 2672,2001 Neuchâtel 1. 6P.159/2006Art. 29 al. 2 Cst. (procédure pénale; droit d'être entendu) 6S.368/2006Abus d'autorité (art. 312 CP) recours de droit public (6P.159/2006) et pourvoi en nullité (6S.368/2006)contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du cantonde Neuchâtel du 17 juillet 2006. Faits : A.Le 14 mai 2004, X.________ s'est rendu dans les locaux du Ministère public ducanton de Neuchâtel pour se faire remettre copie d'une pièce. Il a ensuiteréclamé le remboursement de ses frais de transport. Comme il refusait dequitter les lieux avant d'avoir obtenu satisfaction sur ce dernier point, lesecrétaire du Ministère public a appelé la police locale, qui a dépêché surplace une patrouille composée des fonctionnaires D.________, C.________ etB.________, commandés par le caporal A.________. Après trente minutes dediscussion, le caporal A.________ a pris la décision de faire sortirX.________ de force des locaux du Ministère public. Craignant que l'intéresséne s'y réintroduise dès que la patrouille aurait le dos tourné, le caporalA.________ a en outre décidé d'emmener X.________ au poste. La manière dontcette décision a été exécutée a attiré l'attention d'un témoin, qui l'a jugéetrop brutale, et donné lieu à une plainte pénale de X.________. B.Par ordonnance du 2 juin 2004, le Procureur général du canton de Neuchâtel aclassé la plainte aux motifs que la police locale, intervenue à cause durefus du plaignant de quitter les lieux, n'avait pas fait un usagedisproportionné de la force. Sur recours du plaignant, la Chambred'accusation du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a annulé ceclassement. Le 28 janvier 2005, le Procureur général a dès lors renvoyé C.________ etB.________ devant le Tribunal de police du district de Neuchâtel, sous lesaccusations de lésions corporelles simples (art.123 CP), subsidiairementvoies de fait (art.126 CP), et d'abus d'autorité (art. 312 CP), en requéranttoutefois leur acquittement. Statuant le 31 mars 2005, le tribunal saisi aacquitté les deux prévenus. Sur pourvoi du plaignant, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal ducanton de Neuchâtel a, par arrêt du 28 septembre 2005, annulé ce jugement etrenvoyé la cause au Tribunal de police du district du Val-de-Ruz. Elle anotamment considéré que la décision d'emmener X.________ au poste et, à ceteffet, de le menotter était disproportionnée. Elle en a déduit que les actesd'exécution de cette décision constituaient un abus d'autorité au sens del'art. 312 CP. Elle a chargé le tribunal de renvoi d'examiner si, en raisondu rapport hiérarchique de subordination existant entre les membres de lapatrouille et le caporal A.________, les actes des deux prévenus étaientjustifiés par leurs devoirs de fonction au sens de l'art.32 CP. Elle a aussiinvité le Ministère public à examiner la question du renvoi en justice ducaporal A.________, responsable des agissements de sa patrouille. C.Par ordonnance du 7 novembre 2005, le Procureur général du canton deNeuchâtel a renvoyé A.________ devant le Tribunal de police du district duVal-de-Ruz, sous l'accusation d'abus d'autorité (art. 312 CP), en requérantégalement son acquittement. Cette nouvelle cause a été jointe sans décisionformelle à celles de C.________ et de B.________. Passant au jugement le 23 janvier 2006, le Tribunal de police du district duVal-de-Ruz a acquitté C.________, reconnu A.________ et B.________ coupablesd'abus d'autorité, les condamnant tous deux à trois jours d'emprisonnementavec sursis pendant deux ans, et déclaré irrecevables les conclusions civilesprises par X.________. S'estimant lié par les motifs de l'arrêt de la courcantonale de cassation du 28 septembre 2005, le Tribunal de police a refuséde revoir les faits et les qualifications juridiques retenus par la coursuprême cantonale. Il a dès lors considéré, sans autre discussion, queA.________ avait dépassé les limites des pouvoirs de sa charge en décidantd'emmener le plaignant au poste et, à cet effet, de le faire menotter.A.________ devait dès lors être condamné pour abus d'autorité (art. 312 CP).En leur qualité de subordonnés du caporal A.________, C.________ etB.________ n'avaient pas commis d'infraction en prêtant leur concours àl'opération litigieuse. Mais, en s'asseyant sur le plaignant au moment oùcelui-ci avait été couché de force sur la banquette arrière du véhicule deservice, B.________ avait dépassé les limites de ce qui était nécessaire pourexécuter les ordres du caporal A.________. Ce faisant, il s'était doncégalement rendu coupable d'abus d'autorité (art.312 CP). S'agissant desconclusions civiles du plaignant, le Tribunal de police a considéré qu'ellesentraient en contradiction avec le régime de responsabilité défini par la loineuchâteloise du 26 juin 1989 sur la responsabilité des collectivitéspubliques et de leurs agents (RS/NE 150.10), qui prive le lésé de touteaction contre l'agent. Par arrêt du 17 juillet 2006, la Cour de cassation pénale du Tribunalcantonal du canton de Neuchâtel a rejeté les pourvois exercés contre cejugement par B.________ et A.________. Elle a rejeté le pourvoi de X.________sur le plan pénal et l'a déclaré irrecevable en tant qu'il critiquait lerefus du Tribunal de police d'entrer en matière sur les conclusions civiles. D.Contre ce dernier arrêt, dont il demande l'annulation, A.________ interjetteun recours de droit public et un pourvoi en nullité au Tribunal fédéral. Ilinvoque une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al.2 Cst.) àl'appui du premier et une violation de l'art. 312 CP à l'appui du second. Invité à se déterminer sur le recours de droit public, le Procureur généraldu canton de Neuchâtel a renoncé à déposer une réponse. E.Par arrêt de ce jour, la cour de céans a rejeté, dans la mesure où il étaitrecevable, le pourvoi de X.________ tendant à faire annuler, entre autresdécisions, les dispositions du jugement de première instance et de l'arrêtattaqué qui déclarent respectivement irrecevables les conclusions civiles,prises notamment contre A.________, et le pourvoi cantonal exercé contrecette décision d'irrecevabilité. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Conformément à l'art. 275 al. 5 PPF, lorsque la décision attaquée fait à lafois l'objet d'un recours de droit public et d'un pourvoi en nullité, ilconvient en principe d'examiner d'abord le recours de droit public. I. Recours de droit public 2.2.1 Les décisions pénales de dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 OJ)peuvent faire l'objet d'un recours de droit public au Tribunal fédéral pourviolation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let.a OJ),dès lors qu'un tel motif ne peut être soulevé à l'appui d'un pourvoi ennullité (cf. art. 84 al. 2 OJ et 269 al. 2 PPF). Interjeté en temps utile, par le condamné, pour violation du droit d'êtreentendu (art. 29 al. 2 Cst.) contre un arrêt final rendu par la Cour decassation pénale du Tribunal cantonal neuchâtelois, le présent recours estdès lors recevable au regard des art. 84 al. 1 et 2, 86 al. 1, 87, 88 et 89al.1 OJ. 2.2 Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que lesgriefs de nature constitutionnelle soulevés et suffisamment motivés dansl'acte de recours (ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31; 125 I 71 consid.1c p. 76,492 consid. 1b p. 495 et les arrêts cités). 3.Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu (art.29al. 1 Cst.). Il rappelle qu'il n'était pas partie à la procédure lorsqu'a étérendu l'arrêt de cassation du 28 septembre 2005. Il en déduit qu'en refusant,pour le motif qu'elles étaient liées par cet arrêt, d'entrer en matière surles divers moyens de défense qu'il a invoqués en vue d'établir qu'il n'avaitpas abusé de ses pouvoirs, les juridictions cantonales ont violé son droitd'être entendu. 3.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entenduconfère à tout intéressé le droit de s'exprimer sur les éléments pertinentsavant que soit prise une décision touchant sa situation juridique, deproduire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à sesoffres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuvesessentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat lorsque celaest de nature à influer sur la décision à intervenir (ATF 129 II 497 consid.2.1 p. 504/505 et les arrêts cités). Ce droit constitutionnel est violé sil'autorité tranche la cause, ou une question de fait ou de droit qu'elle doitrésoudre pour trancher la cause, sans avoir donné à l'intéressé lapossibilité de présenter utilement ses moyens. 3.2 En l'espèce, le recourant a été condamné sans avoir pu utilements'exprimer et requérir des mesures d'instruction sur les questions de fait etde droit que le juge appelé à statuer dans sa cause doit résoudre. Laprocédure suivie par les autorités cantonales l'a donc manifestement privé dela faculté d'exercer son droit constitutionnel d'être entendu. Le recoursdoit dès lors être admis et l'arrêt entrepris être annulé dans la mesure oùil confirme la condamnation du recourant, au pénal et sur les frais. 4.Lorsque le Ministère public succombe, il n'y a pas lieu de percevoir desfrais de justice (art. 156 al. 2 OJ). Obtenant gain de cause, le recourant a droit à des dépens, qui serontsupportés par le canton de Neuchâtel (art. 159 al. 1 OJ). II. Pourvoi en nullité 5.Vu l'annulation de l'arrêt attaqué sur recours de droit public, le pourvoi ennullité n'a plus d'objet. La cause doit être rayée du rôle, sans frais. Comme le recourant a pris le risque, en exerçant deux recours, que l'un d'euxperde son objet ensuite de l'admission de l'autre, il n'a pas droit à uneindemnité au titre de l'art. 278 al. 3 PPF. Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: Sur le recours de droit public: 1.Le recours est admis et l'arrêt entrepris annulé en tant qu'il concerne lerecourant. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le canton de Neuchâtel versera une indemnité de 2'000 fr. au recourant àtitre de dépens. Sur le pourvoi en nullité: 4.Le pourvoi n'a plus d'objet. 5.Il n'est pas perçu de frais de justice ni alloué d'indemnité. Communications: 6.Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, auMinistère public du canton de Neuchâtel et à la Cour de cassation pénale duTribunal cantonal du canton de Neuchâtel. Lausanne, le 22 décembre 2006 Au nom de la Cour de cassation pénaledu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6P.159/2006
Date de la décision : 22/12/2006
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-12-22;6p.159.2006 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award