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21/12/2006 | SUISSE | N°5A.17/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 décembre 2006, 5A.17/2006


{T 0/2}5A.17/2006 /frs Arrêt du 21 décembre 2006IIe Cour civile MM. les Juges Raselli, Président, Meyeret Zappelli, Juge suppléant.Greffier: M. Braconi. X. ________,recourant, représenté par Me Pascal Junod, avocat, contre Commission foncière agricole,intimée,Tribunal administratif de la République et canton de Genève, case postale1956, 1211 Genève 1. autorisation d'acquérir un bien-fonds agricole, recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif de laRépublique et canton de Genèvedu 4 avril 2006. Faits : A.X. ________, né en 1981, est domicilié à A.___

_____. Le 17 mars 2005, lorsd'une vente aux enchères forcées, il ...

{T 0/2}5A.17/2006 /frs Arrêt du 21 décembre 2006IIe Cour civile MM. les Juges Raselli, Président, Meyeret Zappelli, Juge suppléant.Greffier: M. Braconi. X. ________,recourant, représenté par Me Pascal Junod, avocat, contre Commission foncière agricole,intimée,Tribunal administratif de la République et canton de Genève, case postale1956, 1211 Genève 1. autorisation d'acquérir un bien-fonds agricole, recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif de laRépublique et canton de Genèvedu 4 avril 2006. Faits : A.X. ________, né en 1981, est domicilié à A.________. Le 17 mars 2005, lorsd'une vente aux enchères forcées, il s'est vu adjuger pour le prix de 270'000fr. la parcelle n° xxx de la commune de A.________, sise en zone agricole. Ce terrain étant soumis à la loi fédérale, du 4 octobre 1991, sur le droitfoncier rural (LDFR; RS 211.412.11), il a dû solliciter de la Commissionfoncière agricole du canton de Genève (ci-après: CFA) l'autorisationd'acquérir ce bien. Le requérant a exposé qu'il avait obtenu un CFC demécanique en 2002, mais que, à la suite de plusieurs accidents, il étaitdevenu handicapé à 30%. Ne pouvant plus fournir les efforts physiques exigésd'un mécanicien ou d'un agriculteur, il s'était alors dirigé vers larecherche scientifique, tout en cultivant la terre en France. Il disaitvouloir développer son activité à Genève, ses recherches s'étant avéréesfructueuses. Il avait déposé un premier brevet le 7 mars 2005 portant sur undispositif de désherbage des sols agricoles cultivés sous serres maraîchèrespar soustraction mécanisée; un deuxième brevet devait être déposé dans lecourant du mois de mai suivant pour un système d'arrosage des cultures sousserre, puis un troisième en septembre de la même année relatif aurenforcement de la sécurité de l'agriculteur sur le tracteur. En janvier2005, il avait créé, sous la forme d'une société en commandite, le CentreC.________. Il entendait acquérir la parcelle en cause, sur laquelle setrouvaient déjà deux serres en mauvais état, mais récupérables, en vue d'yconcentrer ses recherches. Il se prévalait de sa qualité d'agriculteurexploitant à titre personnel, ainsi que de la possibilité de se porteracquéreur d'un immeuble agricole pour créer et maintenir un centre derecherche au sens de l'art. 64 al. 1 let. a LDFR. B.Par décision du 22 mars 2005, la CFA a rejeté la requête. En bref, elle aconsidéré que l'intéressé ne bénéficiait pas d'une formation en agricultureet qu'il ne pouvait pas être reconnu en tant qu'exploitant à titre personnelselon l'art. 63 LDFR; quant au Centre C.________, inscrit au registre ducommerce le 11 mars 2005 - à savoir cinq jours avant la vente aux enchères -,il ne répondait pas à l'exigence d'un centre de recherche au sens de laditeloi.Le 25 avril 2005, X.________ a déféré cette décision au Tribunaladministratif du canton de Genève. Après avoir entendu le recourant, ainsique son père, Y.________, et pris connaissance du constat des lieux effectuéle 3 novembre 2005 par la CFA, l'autorité cantonale a, par arrêt du 4 avril2006, rejeté le recours. C.C.aAgissant par la voie du recours de droit administratif au Tribunalfédéral, X.________ conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et à l'octroide l'autorisation d'acquérir. Invitée à présenter ses observations éventuelles, la CFA conclut à laconfirmation de l'arrêt entrepris. Elle souligne que le recourant n'a pasétabli avoir obtenu en France le brevet professionnel agricole dont il seprévaut dans son recours et que sa formation complémentaire ne peut pas êtreconsidérée comme équivalant à un CFC. L'autorité cantonale a renoncé àdéposer des observations, et persiste dans les motifs et le dispositif de sadécision. Invité aussi à formuler des déterminations, l'Office fédéral de la justice(OFJ) propose le rejet du recours. Si la formation achevée récemment par lerecourant pourrait justifier à la rigueur l'octroi d'une autorisationd'acquisition exceptionnelle, elle ne saurait être prise en compte dans lecas présent, car elle n'était pas obtenue au moment où l'autorisation devaitêtre accordée; quant au centre de recherche, il ne remplit pas les conditionsposées à l'art. 64 al. 1 let. a LDFR; enfin, l'exception de l'art. 64 al. 1let. f LDFR n'entre pas en considération si l'acquisition a eu lieu, comme enl'espèce, dans le cadre d'une exécution forcée. C.b A la suite des observations de la CFA et de l'OFJ, le recourant a requisun deuxième échange d'écritures. Cette requête a été accueillie parordonnance du 15 novembre 2006, le recourant étant néanmoins rendu attentif àla circonstance que, en principe, des faits nouveaux et de nouveaux moyens depreuve sont inadmissibles. L'intéressé a déposé sa réplique le 1er décembre 2006. Les autorités intiméesn'ont pas été appelées à dupliquer. C.c Par ordonnance du 13 juin 2006, le Président de la Cour de céans aattribué l'effet suspensif au recours. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.1.1 L'arrêt attaqué est une décision au sens de l'art. 5 PA. Rendue endernière instance cantonale, cette décision est susceptible d'un recours dedroit administratif au Tribunal fédéral (art. 97 al.1 et 98 let. g OJ), dèslors qu'une telle voie n'est pas exclue par les art. 99 à 102 OJ. Du reste,l'art. 89 LDFR prévoit expressément ce moyen de droit contre les décisionssur recours prises par les autorités cantonales de dernière instance au sensdes art. 88 al. 1 et 90 let. f LDFR. Le recourant a manifestement qualitépour recourir au regard de l'art.103 let. a OJ. Enfin, déposé en tempsutile, son recours est aussi recevable sous l'angle de l'art. 106 al. 1 OJ. 1.2 A teneur de l'art. 104 let. a OJ, le Tribunal fédéral revoit d'office etavec plein pouvoir d'examen l'application du droit fédéral, qui englobe, enparticulier, les droits constitutionnels des citoyens (ATF 130 III 707consid. 3.1 p. 709; 129 II 183 consid. 3.4 p. 188). Comme il n'est pas liépar les motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ), il peutadmettre le recours indépendamment des moyens avancés par le recourant ou, aucontraire, confirmer la décision attaquée pour d'autres motifs que ceuxretenus par l'autorité précédente (ATF 129 II 183 consid. 3.4 p. 188). Sousréserve des cas limitativement énumérés à l'art. 104 let. c OJ, le Tribunalfédéral ne revoit pas l'opportunité de la décision attaquée. 1.3 Lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre la décisiond'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faitsconstatés dans la décision attaquée, sauf s'ils sont manifestement inexactsou incomplets, ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles dela procédure (art. 105 al. 2 OJ). La possibilité d'alléguer des faitsnouveaux ou de faire valoir des moyens de preuve nouveaux est trèsrestreinte; selon la jurisprudence, seules sont admissibles dans ce cas lespreuves que l'autorité précédente aurait dû retenir d'office et dont ledéfaut d'administration constitue une violation de règles essentielles deprocédure (arrêt 2A.506/2003 du 6 janvier 2004, consid. 1.2, publié in: SJ2004 I 388 et la jurisprudence citée).Dans la mesure où, à plusieurs reprises, le recourant fonde ses griefs surd'autres faits que ceux retenus par le Tribunal administratif, sans prétendreque les constatations de la décision attaquée seraient manifestementinexactes ou incomplètes, ou qu'elles auraient été établies en violation derègles essentielles de la procédure, le Tribunal fédéral ne saurait tenircompte de ces éléments divergents. 2.Le recourant se plaint d'une violation des art. 7 et 9, 64 al. 1 let. a et fLDFR, ainsi que des art. 9, 27, 46 et 95 Cst.; il reproche à la juridictionprécédente de lui avoir dénié la qualité d'exploitant à titre personnel ausens de l'art.9 LDFR; à tout le moins, aurait-elle dû admettre quel'acquisition visait à créer un centre de recherche au sens de l'art. 64 let.a LDFR. 2.1 Les griefs tirés d'une application «arbitraire» de la loi (art. 9 Cst.)n'ont pas de place dans le présent recours de droit administratif, où leTribunal fédéral revoit d'office et avec une pleine cognition l'applicationdu droit fédéral. 2.2 En vertu de l'art. 61 LDFR, celui qui entend acquérir un immeubleagricole entrant dans le champ d'application de la loi (art. 2 et 6 LDFR) ouune entreprise agricole (art. 7 et 8 LDFR) doit obtenir une autorisation (al.1), laquelle est accordée lorsqu'il n'existe aucun motif de refus (al. 2).L'acquisition d'une entreprise ou d'un immeuble agricole est, notamment,refusée lorsque l'acquéreur n'est pas un exploitant à titre personnel (art.63 al. 1 let. a LDFR). L'art. 9 LDFR définit les notions d'exploitant à titrepersonnel et de capacité d'exploiter à titre personnel: selon cettedisposition, est exploitant à titre personnel quiconque cultive lui-même lesterres agricoles et, s'il s'agit d'une entreprise agricole, dirigepersonnellement celle-ci (al. 1er); est capable d'exploiter à titre personnelquiconque a les aptitudes usuellement requises dans l'agriculture de notrepays pour cultiver lui-même les terres agricoles et diriger personnellementune entreprise agricole (al. 2). Pour répondre à la notion d'exploitant àtitre personnel, le requérant doit remplir les conditions posées par ces deuxalinéas (arrêt 5A.20/2004 du 2 novembre 2004, consid. 2.2, publié in: RNRF87/2006 p. 273 ss, 276; Hofer, Commentaire de la loi fédérale sur le droitfoncier rural du 4 octobre 1991, Brugg 1998, n. 8 in fine ad art. 9 LDFR;Richli, Landwirtschaftliches Gewerbe und Selbstbewirtschaftung: zwei zentraleBegriffe des Bundesgesetzes über das bäuerliche Bodenrecht, PJA 1993 p. 1063ss, spéc. 1067 in fine). 2.3 D'après le recourant, l'autorité cantonale aurait violé les art. 7 et 9LDFR en lui reprochant de ne pas posséder les qualités requises pourexploiter une entreprise agricole, car la parcelle qui lui a été adjugéen'était pas une «entreprise», mais bien un immeuble agricole constitué pardes terres en friche.Il n'est pas établi que la parcelle en question ait été en friche et qu'elleeût dû, par conséquent, être qualifiée d'immeuble, et non d'entreprise,agricole. L'état de fait de la décision attaquée, qui lie le Tribunal fédéral(art. 105 al. 2 OJ), mentionne uniquement que «deux serres en mauvais état»s'y seraient trouvées. Cela n'est d'ailleurs pas décisif. En effet, lerecourant déclarait vouloir y créer et diriger personnellement une entrepriseagricole; or, ce que la juridiction cantonale lui reproche, c'est précisémentde ne pas disposer des qualités requises pour cette activité. 2.4 L'autorité cantonale a estimé que le recourant ne remplissait pas lacondition posée à l'art. 9 al. 2 LDFR. L'intéressé, titulaire d'un CFC demécanique, se prévaut de son expérience acquise "sur le tas", essentiellementen France; il n'allègue pas avoir fréquenté une école, ou entrepris uneformation quelconque dans le domaine agricole ou horticole, laquelle lerendrait apte à diriger personnellement une pareille entreprise. Le recourant fait grief à l'autorité précédente d'avoir interprété l'art. 9al.2 LDFR d'une manière erronée en exigeant de celui qui invoque la qualitéd'exploitant à titre personnel qu'il fréquente une école ou suive uneformation en agriculture, la loi ne posant pas cette exigence; seul celui quisollicite des paiements directs en vertu de l'ordonnance fédérale du 7décembre 1998 sur les paiements directs - ce qui n'est pas le cas ici - doitjustifier d'une telle formation, et cette exigence n'était au demeurant pasen vigueur au moment de l'acquisition de la parcelle litigieuse. Enl'occurrence, le recourant prétend avoir démontré qu'il possédait lesconnaissances nécessaires pour l'exploitation en cause à la date du dépôt desa requête; s'il n'était alors pas au bénéfice d'un diplôme, il possédaitnéanmoins des connaissances de base acquises par l'expérience pratique et laformation suivie en 2005/2006 relèverait de la formation continue. Enconstatant en fait qu'il cultive lui-même ses plantes et dirige sonentreprise, la juridiction cantonale admettrait implicitement sa capacitépour diriger ladite entreprise; cette constatation contredirait le refus dela lui reconnaître expressément et serait donc arbitraire. Enfin, lerecourant affirme être aujourd'hui titulaire d'un «Brevet d'ÉtudesProfessionnelles» en horticulture, mention chef d'exploitation horticole,délivré par le ministère français de l'agriculture, titre qui seraitl'équivalent du CFC suisse. 2.4.1 Les notions définies par l'art. 9 LDFR ne sont pas différentes decelles développées sous l'empire de l'ancien droit successoral paysan par lajurisprudence du Tribunal fédéral, qui demeure ainsi pertinente (Message duConseil fédéral à l'appui du projet de loi fédérale sur le droit foncierrural, FF 1988 III 924; arrêt 5A.2/1998 du 23 juin 1998, consid. 3a; Hofer,op. cit., n. 7 ad art. 9 LDFR). La capacité d'exploiter à titre personnelprésuppose une moyenne des qualités tant professionnelles que morales etphysiques, qui, d'après les usages propres à l'agriculture et les conceptionslocales, sont requises pour exploiter convenablement un domaine agricole (ATF110 II 488 consid. 5 p. 490 et les références citées). Cette capacitén'existe, en règle générale, que si l'intéressé a fréquenté une écoled'agriculture (FF 1988 III 924/925; arrêts 5C.247/2002 du 22 avril 2003,consid. 3.2; 5A.9/2001 du 30 juillet 2001, consid. 2b, in: CdA 2001 p. 187ss, 190, avec d'autres citations; cf. pour plus de détails: Donzallaz, Traitéde droit agraire suisse, vol. II, n° 3215 ss). Celui qui sollicitel'autorisation d'acquérir un immeuble agricole doit toujours établir qu'ilest capable de cultiver lui-même les terres en question, même si l'on ne peutévidemment exiger des agriculteurs de loisirs qu'ils aient suivi uneformation agricole complète (cf. Richli, op. cit., p. 1068); aussi, uneexploitation à titre personnel est-elle admise lorsque le requérant prouvequ'il a une formation agricole adéquate pour exploiter l'immeuble agricolequ'il entend acquérir ou qu'il a exploité dans les règles de l'art unimmeuble comparable (arrêt 5A.9/2001 précité, consid. 2c, in: CdA 2001 p.191). Seul celui qui est au bénéfice d'une formation ou de connaissancespratiques suffisantes au plus tard au moment où la décision d'autorisationdoit être prise peut se soustraire au motif de refus prévu par l'art. 63 al.1 let. a LDFR (arrêt 5A.9/2001 précité, consid. 4b, in: CdA 2001 p. 192). 2.4.2 Les exigences précitées ne sont pas remplies en l'espèce. Sur le vu desfaits retenus par l'autorité cantonale, dont le caractère manifestementinexact ou incomplet n'est pas démontré (art. 105 al. 2 OJ), et qui lient dèslors le Tribunal fédéral, le recourant ne bénéficiait, à la datedéterminante, d'aucune formation agricole au sens où l'entendent lajurisprudence et la doctrine susmentionnées. La circonstance qu'il a acquisen France, durant son enfance, une certaine expérience de la culturemaraîchère "sur le tas" dans l'environnement familial ne saurait êtreassimilée à la formation agricole adéquate visée ci-dessus.
L'intéressésemble, par ailleurs, en être conscient, puisqu'il a entrepris une formationdans ce domaine en France. Le fait qu'il a cultivé, dès 2003, une parcelled'un peu moins de 2 hectares dans ce pays ne lui vient pas en aide à cetégard; cela n'établit pas l'existence d'une formation, et les circonstanceset le succès de cette activité, qu'il lui appartenait d'établir (cf. arrêt5A.9/2001 précité, consid. 2c, in: CdA 2001 p. 191), ne sont de surcroît pasdémontrés. Le lien que le recourant veut créer avec les normes légales relatives auxconditions permettant de bénéficier de paiements directs n'est pas pertinent.Les exigences strictes et précises posées par ces dispositions, notammentcelle qui touche au CFC ou à la formation paysanne sanctionnée par un brevet,ne s'appliquent, il est vrai, qu'à ceux qui sollicitent des paiementsdirects, ce qui n'est pas le cas du prénommé. Cela ne signifie, cependant,pas que des exigences élevées concernant la qualité de la formation d'unexploitant à titre personnel au sens de la LDFR ne puissent être requises.D'ailleurs, il n'y a rien de contradictoire à constater, d'une part, que lerecourant cultive lui-même ses plantes et dirige son entreprise, et, d'autrepart, qu'il n'est pas capable d'être un exploitant à titre personnel au sensde ladite loi. Certes, le recourant a entrepris une formation en horticulture, ce qu'ilprouve en produisant divers certificats établissant qu'il a suivi des cours àcet effet. L'existence du «Brevet [français] d'Études Professionnelles» enhorticulture dont fait état le recourant n'est, en revanche, pas démontrée.Il signale également des succès obtenus récemment dans la création d'unenouvelle sorte de sapins, mais il s'agit là de faits nouveaux, irrecevablesdans le présent recours. En tout état de cause, si l'on pouvait admettre, àla rigueur, que la formation déjà acquise à ce jour puisse être tenue poursuffisante dans l'optique d'une autorisation à titre exceptionnel, eu égard àla faible dimension de l'immeuble agricole que le recourant entend exploiter,cet élément ne peut pas être pris en compte ici, cette formation n'étant pasacquise au moment où la décision devait être rendue (cf. supra, consid. 2.4.1in fine). Il s'ensuit que c'est avec raison que la juridiction cantonale a dénié aurecourant la qualité d'exploitant à titre personnel. 3.Le recourant se plaint ensuite de l'appréciation juridique erronée des faitsen ce qui concerne l'activité, l'objet social et les circonstances de lacréation de son entreprise, la société en commandite C.________, et, partant,d'une violation de l'art. 64 al. 1 let. a LDFR. La violation de cettedisposition résulterait, en outre, de ce qu'il s'est vu reprocher un abus dedroit pour avoir créé sa société cinq jours seulement avant la vente auxenchères du 17 mars 2005. 3.1 Aux termes de l'art. 64 al. 1 LDFR, lorsque l'acquéreur n'est paspersonnellement exploitant, l'autorisation lui est accordée s'il prouve qu'ily a un juste motif pour le faire; tel est, notamment, le cas lorsquel'acquisition sert «à créer [...] un centre de recherches» (let. a). D'après Christoph Bandli/Beat Stalder (Commentaire de la LDFR, n. 19 ad art.64 LDFR), ne constituent des centres de recherches, au sens de l'art. 64 al.1 let. a LDFR, que les entreprises affectées à l'expérimentation de produitsauxiliaires sur le sol agricole; on songe d'abord, d'une part, à l'industriechimique dont le besoin légitime en terres agricoles avait déjà été reconnusous l'empire de l'ancien droit (cf. ATF 92 I 317) et qui n'a jamais étéremis en cause au cours de l'élaboration de la loi et, d'autre part, auxcentres de recherches biologiques (culture et élevage); constituent ensuitedes centres de recherches les établissements de recherche agricole, et celaindépendamment du fait que leur organisation relève du droit public ou dudroit privé. Dans ses observations, l'OFJ relève que la LDFR ne contient pas de définitiondu centre de recherches; il ajoute: "Introduite dans la loi au cours destravaux parlementaires, cette notion n'a fait l'objet d'aucune discussionofficielle. Il était cependant clair dans l'esprit de ses auteurs que l'onvisait en premier lieu les centres de recherche agronomiques fédéraux,aujourd'hui énumérés à l'article 4 de l'ordonnance du 9 juin 2006 sur larecherche agronomique (ORAgr; RS 915.7), soit les stations fédérales deChangins-Wädenswil, de Liebefeld-Posieux et de Reckenholz-Tänikon. Celadécoule notamment du fait que cette notion est étroitement liée à celled'établissement scolaire, dont la constitution ou le maintien donne, selonl'article 64, alinéa, 1, lettre a, LDFR également droit à l'octroi d'uneautorisation d'acquisition exceptionnelle. Par «établissement scolaire», onentend avant tout les écoles d'agriculture destinées à la formation et auperfectionnement des personnes actives dans l'agriculture. Les stationsfédérales de recherche n'étant pas des écoles d'agriculture à proprementparler, il avait paru nécessaire de compléter cette disposition par «centresde recherches» (...). Les centres de recherches agronomiques cantonaux,lorsqu'il en existe, ne sont pas exclus, bien qu'ils aient essentiellementune vocation de formation, et entrent donc dans la catégorie desétablissements scolaires". Quant aux centres de recherches appartenant à desentreprises privées, l'OFJ précise: "(...) On peut imaginer que cesrecherches puissent porter sur l'amélioration de la productivité del'agriculture, par exemple par la mécanisation, mais on ne saurait, à notreavis, utiliser cette disposition pour l'acquisition de terres destinées à des«pistes d'essais» pour des machines agricoles. A aucun moment, il n'a étéquestion qu'un producteur faisant des essais de nouvelles cultures ou denouvelles méthodes puisse se prévaloir de cette exception". Enfin, dans sa jurisprudence rappelée dans l'arrêt entrepris, l'autoritécantonale a retenu que la notion de centre de recherches suppose la créationd'emplois, l'acquisition de machines agricoles, la collaboration dechercheurs, ainsi que la réalisation de tests et d'analyses. 3.2 Il résulte des considérations qui précèdent que l'existence d'un centrede recherches, au sens de l'art. 64 al. 1 let. a LDFR, ne doit être admiseque de façon restrictive. Pour être désigné comme tel, ce centre doitrépondre à des critères qualitatifs de niveau élevé dans la conception etl'importance des moyens mis en oeuvre. Selon la définition qu'en donne ledictionnaire (Petit Robert), un chercheur est une personne qui se consacre àla recherche scientifique. Ne peut donc être qualifié de chercheur dans uncentre de recherches qu'une personne possédant à tout le moins une formationapprofondie, en général académique, dans le domaine en discussion. Or, l'autorité cantonale a constaté en fait que le recourant poursuivait seulses expériences, avec l'aide de son père, Y.________, qui ne disposait pasdavantage de formation dans le domaine agricole. Le recourant ne conteste pasque son père, aujourd'hui en préretraite, a été professeur de traductologie,c'est-à-dire la «science qui étudie le processus cognitif inhérent à toutereproduction verbale, manuscrite ou gestuelle, vers un langage, del'expression d'une idée provenant d'un autre langage»; cette science est fortéloignée de l'agriculture. Le recourant prétend que le prénommé serait aussidiplômé en botanique; il s'agit toutefois là d'un fait nouveau, irrecevable(art. 105 al. 2 OJ), qui n'établirait pas, au demeurant, la qualité dechercheur de l'intéressé, dont l'activité principale s'est exercée dans untout autre domaine. Il est exact que Y.________ aurait acquis une certaineexpérience dans l'agriculture, puisqu'il s'est occupé en France, pendant prèsde vingt ans, en compagnie de son fils, du domaine agricole appartenant à safemme; de même, il connaîtrait parfaitement bien le papyrus que sa familleexploite en Egypte depuis plusieurs générations et a publié un articleconsacré aux techniques de culture de cette plante sur le site du CentreC.________. Les connaissances empiriques qu'il possède n'en font pas pourautant un chercheur dans le domaine de l'agriculture. Il ne ressort pas de l'arrêt attaqué que le Centre C.________ aurait crééplusieurs emplois, à plein temps, à temps partiel ou à titre temporaire, ouqu'il se serait attaché la collaboration de trois chercheurs, quiparticiperaient directement à ses recherches. En admettant même que cetteentreprise ait créé quelques emplois, il ne serait pas possible d'affirmerqu'elle comprend du personnel qualifié s'adonnant à la recherche scientifiquedans la matière concernée, aucune de ces personnes ne pouvant être tenue pourun «chercheur» dans le domaine de l'agriculture; pas plus que le recourant ouson père, ils ne sont au bénéfice d'une formation permettant de les qualifiercomme tels. 3.3 Le recourant allègue qu'il remplit une autre des conditions exigées parl'autorité cantonale pour pouvoir être considéré comme exploitant un centrede recherches: l'acquisition de matériel agricole. Aux fins de prouver sesdires, il produit un procès-verbal de constat d'huissier qui établit laprésence, le 8 mai 2006, sur la parcelle en cause de diverses machines etéquipements. Il s'agit là de faits postérieurs à la décision attaquée qui nepeuvent pas être pris en considération par la cour de céans (ATF 125 II 217consid. 3a p. 221); au demeurant, même s'ils pouvaient l'être, cela nesuffirait pas pour admettre le présent recours, les autres exigences n'étantpas remplies. C'est en vain que le recourant soutient encore que le Centre C.________ aréalisé des tests et analyses, qui peuvent être consultés sur le site deladite entreprise, et demande qu'un expert soit désigné pour en constaterl'existence. Ces faits ne sont pas davantage retenus par la juridictionprécédente; de plus, le recourant n'apporte aucune preuve, qui lui incombepourtant aux termes de la loi (art. 64 al. 1 LDFR), de ce qu'il avance. 3.4 Enfin, le reproche adressé à l'autorité cantonale d'avoir qualifié demanière erronée l'objet social du Centre C.________ - à savoir le désherbage,les cultures et plantations, alors qu'elle aurait, en réalité, pour but larecherche scientifique sur la mécanisation des tâches précitées - estinfondé. Le recourant oublie qu'il n'a nullement démontré la réalisation desautres conditions posées par la jurisprudence du Tribunal administratifgenevois (cf. supra, consid. 3.1 in fine). Au reste, que le but social soitla recherche sur la mécanisation de l'agriculture ou simplement la rechercheagronomique, la société précitée doit, dans les deux hypothèses, satisfaireaux critères exigés par cette jurisprudence, ce qui n'est pas le cas enl'occurrence. 3.5 Dans sa décision du 22 mars 2005, la CFA avait considéré que le recourantavait créé son prétendu centre de recherches juste avant la vente auxenchères de la parcelle litigieuse, opération qui constituait un abus dedroit. L'autorité inférieure a confirmé que le fait d'invoquer la créationd'un centre de recherches, inscrit au registre du commerce cinq joursseulement avant la vente aux enchères, pour faire valoir un juste motif selonl'art. 64 al. 1 let. a LDFR, était constitutif d'un abus de droit. Le recourant critique également l'arrêt entrepris sur ce point, relevantnotamment que le début de l'activité de sa société remonte au 3 janvier, etnon au 11 mars 2005. Il n'est pas nécessaire de trancher cette question, dèslors que la décision attaquée doit être confirmée déjà en tant qu'elle admetque le Centre C.________ ne remplit pas les conditions légales pour êtrequalifié de centre de recherches. 4.Le recourant prétend au surplus que le refus de l'autorisation viole les art.9, 27, 46 et 95 Cst. Il aurait en effet obtenu, le 4 avril 2006, uneautorisation d'acquérir un terrain agricole de 21'330 m2 à B.________; enprenant une décision différente sur la base des mêmes faits et en portantatteinte à son droit d'exercer l'activité d'exploitant agricole, lajuridiction précédente aurait enfreint le droit fédéral. À nouveau, le recourant invoque des faits non constatés par l'autoritécantonale, qui plus est, des faits que celle-ci ne pouvait pas connaître,puisqu'ils se sont réalisés le jour même où elle a statué; il n'y a donc paslieu d'entrer en matière sur cette critique. Par ailleurs. il convient derelever que les conditions dans lesquelles l'intéressé aurait obtenul'autorisation d'acquérir la parcelle en question ne sont pas connues, ensorte qu'on ignore les motifs ayant amené les autorités vaudoises àl'accorder. Le recourant mentionne l'art. 27 Cst., mais il n'expose pas en quoi cettedisposition constitutionnelle aurait été violée; il ne dit pas davantage enquoi les art. 46 et 95 Cst. lui viendraient en aide dans la présente cause.Il n'y a dès lors pas lieu d'examiner ce moyen plus avant. 5.Enfin, le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir aussi enfreintl'art. 29 Cst. en omettant de statuer sur l'intégralité de ses moyens; eneffet, les juges cantonaux auraient dû expliquer pourquoi ils n'ont pasappliqué l'art. 64 al. 1 let. f LDFR; l'OFJ aurait commis une erreur de droitdans ses observations en soutenant que cette norme ne trouvait pasapplication dans le cas présent.L'art. 64 al. 1 let. f LDFR prévoit que l'autorisation doit être accordée àun acquéreur qui n'est pas personnellement exploitant lorsque, malgré uneoffre publique à un prix qui ne soit pas surfait (art. 66 LDFR), aucunedemande n'émane d'un exploitant à titre personnel. Le recourant perd de vueque cette exception ne peut pas être invoquée dans une procédure deréalisation forcée (ATF 132 III 212 consid. 3.1.4 p. 217). 6.Vu l'issue du présent recours, l'émolument judiciaire est à la charge durecourant (art. 156 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 5'000 fr. est mis à la charge du recourant. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à laCommission foncière agricole, au Tribunal administratif de la République etcanton de Genève ainsi qu'au Département fédéral de justice et police. Lausanne, le 21 décembre 2006 Au nom de la IIe Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le Président: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5A.17/2006
Date de la décision : 21/12/2006
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-12-21;5a.17.2006 ?
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