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21/12/2006 | SUISSE | N°2A.603/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 décembre 2006, 2A.603/2006


{T 0/2}2A.603/2006 /svc Arrêt du 21 décembre 2006IIe Cour de droit public MM. les Juges Merkli, Président,Betschart et Wurzburger.Greffier: M. Addy. X. ________,recourant, représenté par Me Marc Bonnant, avocat, contre Chambre d'entraide internationale de la Commission fédérale des banques,Schwanengasse 12, case postale, 3001 Berne. Entraide administrative internationale demandée par l'Autorité des marchésfinanciers (AMF) dans l'affaire Y.________, recours de droit administratif contre la décision de la Chambre d'entraideinternationale de la Commission fédérale des banques du 26 s

eptembre 2006. Faits : A.Y. ________ est une société active ...

{T 0/2}2A.603/2006 /svc Arrêt du 21 décembre 2006IIe Cour de droit public MM. les Juges Merkli, Président,Betschart et Wurzburger.Greffier: M. Addy. X. ________,recourant, représenté par Me Marc Bonnant, avocat, contre Chambre d'entraide internationale de la Commission fédérale des banques,Schwanengasse 12, case postale, 3001 Berne. Entraide administrative internationale demandée par l'Autorité des marchésfinanciers (AMF) dans l'affaire Y.________, recours de droit administratif contre la décision de la Chambre d'entraideinternationale de la Commission fédérale des banques du 26 septembre 2006. Faits : A.Y. ________ est une société active dans l'immobilier, cotée sur le marchéEuronext Paris. Y.________ est détenue par la holding de droit luxembourgeoisZ.________, dont X.________ possède la totalité des parts.L'attention de l'Autorité des marchés financiers française (ci-après: AMF) aété attirée par un volume particulièrement élevé de titres Y.________échangés entre le 5 et le 30 avril 2004, qui correspondait, en trois semainesseulement, à la moitié de l'activité du semestre tout entier. En parallèle,l'AMF a constaté que le cours du titre dont la moyenne pondérée sur six moiss'était établie à 5,6 Euros, était monté jusqu'à 6 Euros le 27 avril 2004,alors que ce cours n'avait jamais été atteint ni auparavant (depuis le 1eroctobre 2002) ni par la suite (au 30 novembre 2005). Parmi les intervenantssur le titre Y.________ au cours de cette période, l'AMF a relevé que laBanque A.________ à Genève avait procédé durant les trois semaines d'avrilprécitées à des ventes massives et inhabituelles représentant 89,9% du volumetotal de titres Y.________ échangés. A titre de comparaison, la BanqueA.________ n'était intervenue à l'achat et à la vente, entre le 1er janvieret le 26 mars 2004, qu'à concurrence de 22,2% des titres échangés surl'ensemble du premier trimestre. Lors des trois plus importantes séances des22, 26 et 27 avril 2004, les ventes de la Banque A.________ ont par ailleursété réalisées hors marché. L'AMF a ouvert une enquête afin de s'assurer queles transactions réalisées n'ont pas été effectuées dans des conditionscontraires aux dispositions légales et réglementaires applicables, notammentcelles relatives à la manipulation de cours. Par courrier du 23 décembre2005, l'AMF a sollicité l'assistance administrative de la Commission fédéraledes banques afin d'obtenir des informations sur les transactions effectuéespar la Banque A.________ sur le titre Y.________ au cours du mois d'avril2004. A la demande de la Commission fédérale des banques, la BanqueA.________ a remis une liste récapitulative des transactions effectuées parelle sur le titre Y.________ en avril 2004, qui fait apparaître ce qui suit: VentesDateNombre de titresPrix en Euros 01.04.20041'0005.32 02.04.20042'6005.30 05.04.200419'4455.50 07.04.20047'7315.79 20.04.20047'6995.80 21.04.20041'7405.86 22.04.200450'0005.90 22.04.2004100'0005.80 22.04.2004100'0005.80 23.04.20041'8125.80 23.04.200450'0005.75 26.04.2004150'0005.90 27.04.20048'7706.00 27.04.2004300'0005.80 la Banque A.________ a précisé que toutes ces transactions avaient étéeffectuées pour le compte de X.________ et qu'elles avaient été initiées parl'intéressé lui-même. B.Invité par la Commission fédérale des banques à se déterminer, X.________s'est opposé à la transmission de ces informations à l'autorité françaiserequérante. Dans ses déterminations, il a précisé qu'il dirigeait un groupede sociétés actives dans l'immobilier parisien à la tête duquel se trouve lasociété Y.________, détenue majoritairement par une holding dont il possèdela totalité des parts. Il détenait par ailleurs à titre personnel uneparticipation directe dans la société Y.________, dont une partie était endépôt auprès de la Banque A.________ à Genève au printemps 2004. En raisond'un besoin de liquidités, il avait vendu en avril 2004 800'797 titresY.________ en dépôt auprès de la Banque A.________, dont l'essentiel (700'000titres) avait été vendu hors marché les 22, 26 et 27 avril 2004. A son avis,l'AMF ne disposait pas d'éléments suffisants lui permettant de soupçonner unquelconque dérèglement du marché. La demande de l'AMF était une "fishingexpedition". X.________ relevait en outre qu'au début 2004, une procédureavait été ouverte par l'Administration fiscale française à l'encontre dedifférentes sociétés du groupe Y.________. Enfin, la requête de l'AMF dedécembre 2005 faisait suite à une première requête similaire de mai 2005suite à la vente entre octobre et décembre 2004 de titres de la sociétéB.________ appartenant au même groupe; à cette occasion, X.________, quicontestait toute manipulation de cours, avait accepté de coopérer avec l'AMFet lui avait transmis les informations requises sous réserve d'uneretransmission aux autorités pénales. C.Par courrier du 18 juillet 2006, l'AMF a complété sa requête de décembre 2005en précisant que la société C.________ était l'intermédiaire ayant passé lesordres pour le compte de la Banque A.________ au cours de la période faisantl'objet de l'enquête. L'AMF relevait un certain nombre de détails dans lapassation des ordres, représentant selon elle des anomalies, en soulignantque la société C.________ avait à l'occasion passé le même jour aussi biendes ordres d'achat que des ordres de vente. D.Après déterminations de X.________ sur ces informations complémentaires, laChambre d'entraide internationale de la Commission fédérale des banques adécidé le 26 septembre 2006 d'accorder l'entraide administrative à l'AMF, enlui transmettant la liste des ventes effectuées par X.________ sur son compteauprès de la Banque A.________ représentant 800'797 titres pour une valeur deplus de 4,6 millions d'Euros. La transmission des informations en causedevait être accompagnée des explications données par X.________. Parailleurs, la Commission fédérale des banques rappelait expressément à l'AMFque les informations transmises ne devaient être utilisées que pour la miseen oeuvre de la réglementation sur les bourses et le commerce des valeursmobilières et ne pouvaient être retransmises à d'autres autorités, notammentpénales, qu'à cet effet; une retransmission à d'autres fins nécessitait leconsentement de la Commission fédérale des banques.Agissant par la voie du recours de droit administratif en date du 9 octobre2006, X.________ conclut à l'annulation de la décision du 26 septembre 2006et au rejet de la requête d'entraide. Dans sa réponse, la Commission fédéraledes banques conclut au rejet du recours. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.L'entraide administrative a été en l'espèce octroyée selon l'art. 38 de laloi fédérale du 24 mars 1995 sur les bourses et le commerce des valeursmobilières, dans sa teneur du 7 octobre 2005, en vigueur depuis le 1erfévrier 2006 (LBVM; RS 954.1). Pour l'essentiel, le recourant conteste que leprincipe de la proportionnalité, expressément rappelé à l'art. 38 al. 4 LBVM,ait été respecté. Il soutient en substance qu'il n'existe pas de soupçoninitial suffisant de manipulation de cours de sa part, de sorte que lademande de l'autorité française relèverait de la "fishing expedition", celaen relation avec les contrôles fiscaux dont font l'objet diverses sociétés dugroupe Y.________. Le recourant ne conteste pas que les autres conditions del'entraide administrative sont réunies; comme on peut admettre que tel estbien le cas, il n'y a pas lieu de s'y attarder davantage ci-après. 2.Dans le domaine de l'entraide administrative internationale, le principe dela proportionnalité autorise uniquement la transmission d'informations et dedocuments liés à l'affaire. Selon ce principe, l'entraide administrative nepeut être accordée que dans la mesure nécessaire à la découverte de la véritérecherchée par l'Etat requérant. La question de savoir si les renseignementsdemandés sont nécessaires ou simplement utiles à la procédure étrangère esten principe laissée à l'appréciation de ce dernier. L'Etat requis ne disposegénéralement pas des moyens lui permettant de se prononcer sur l'opportunitéde l'administration de preuves déterminées au cours de la procédure menée àl'étranger, de sorte que, sur ce point, il ne saurait substituer sa propreappréciation à celle de l'autorité étrangère chargée de l'enquête. Il doituniquement examiner s'il existe suffisamment d'indices de possiblesdistorsions du marché justifiant la demande d'entraide. La coopérationinternationale ne peut être refusée que si les actes requis sont sans rapportavec d'éventuels dérèglements du marché et manifestement impropres à faireprogresser l'enquête, de sorte que ladite demande apparaît comme le prétexteà une recherche indéterminée de moyens de preuve, soit une "fishingexpedition" (ATF 129 II 484 consid. 4.1 et les références citées). 3.Au vu de cette jurisprudence, il existe en l'occurrence des soupçonssuffisants justifiant l'octroi de l'entraide administrative internationale.Sur un laps de temps relativement court, le propriétaire de la holdingdétenant Y.________ a, pour son propre compte, vendu un nombre important detitres, soit 800'797 titres pour une valeur de plus de 4,6 millions d'Euros.Les titres vendus représentent 89,9% du volume total des titres échangésentre le 5 et le 30 avril 2004. En trois semaines a été réalisé un volume detransactions de la moitié du semestre entier. De plus, on note en avril 2004une hausse du titre, la vente la plus basse effectuée par le recourants'établissant à 5,30 Euros et la plus haute à 6 Euros. A cela s'ajoute quel'intermédiaire financier parisien ayant réalisé les ventes pour le compte dela Banque A.________ auprès de laquelle le recourant avait déposé une partiede ses titres a procédé d'une manière qui n'est pas toujours limpide, ayantnotamment effectué certains jours aussi bien des ventes que des achats.Il existe donc au stade actuel suffisamment d'éléments permettant desoupçonner un éventuel dérèglement du marché, soit une manipulation de cours.Certes, divers points ne sont pas élucidés. On ne sait en particulier pasquelles sont les autres personnes qui sont intervenues par l'intermédiaire dela société C.________ et dans quel contexte. Cependant, la Commissionfédérale des banques n'a pas à enquêter sur tous les aspects de l'affairefaisant l'objet de la demande d'entraide et encore moins à dire si, dans lecas concret, une infraction boursière a été commise. Il suffit en l'espèce deconstater que les informations demandées ne sont pas sans rapport avecd'éventuelles irrégularités sur les marchés boursiers.Le recourant fait valoir que les ventes intervenues entre le 1er et le7avril 2004 portent sur des volumes de titres peu importants. Il faudraitdonc prendre en compte uniquement la période allant du 20au 27 avril 2004pendant laquelle a été vendue l'immense majorité des 800'797 titres, laps detemps durant lequel le cours du titre n'a que peu varié. Cette argumentationne permet pas d'exclure toute implication de sa part, notamment sur lesvariations de cours. Le recourant a affirmé qu'il avait vendu les titres encause pour se procurer des liquidités. Mais il n'a donné aucune précision surla nature de l'opération pour laquelle ces liquidités étaient nécessaires. Deplus, il n'a donné aucune explication sur les raisons l'ayant amené à vendreun certain nombre de titres au début avril (du 1er au 7 avril 2004), raisonsqui seraient différentes du motif pour lequel il a procédé aux ventessubséquentes un peu plus de dix jours après (du 20 au 27 avril 2004). Austade actuel, il n'y a donc pas de motifs suffisants pour considérer qu'ils'agit de deux opérations absolument distinctes.Dès lors, l'octroi de l'entraide à une requête qui ne saurait être considéréecomme une "fishing expedition" respecte le principe de la proportionnalité.Il n'y a enfin pas de raison de penser que l'autorité requérante nerespectera pas le principe de la spécialité vis-à-vis des autorités fiscales.En ce qui concerne les contrôles fiscaux dont font l'objet les sociétés dugroupe appartenant au recourant, il suffit de constater que ces procéduresont débuté en juin 2004, soit un an avant la première requête d'informationsprésentée par l'AMF le 30mai 2005 (la première transmission d'informationspar la Commission fédérale des banques à l'AMF remontant au 19 septembre2005). 4.Manifestement infondé, le recours doit être rejeté dans la procéduresimplifiée de l'art. 36a OJ. Pour le surplus, il peut être renvoyé à ladécision attaquée, ainsi qu'à la réponse de la Commission fédérale desbanques (art. 36a al. 3 OJ). Un émolument judiciaire sera mis à la charge durecourant (art. 156 al. 1, en relation avec les art. 153 et 153a OJ). Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 5'000 fr. est mis à la charge du recourant. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant et à laChambre d'entraide internationale de la Commission fédérale des banques. Lausanne, le 21 décembre 2006 Au nom de la IIe Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.603/2006
Date de la décision : 21/12/2006
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-12-21;2a.603.2006 ?
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