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20/12/2006 | SUISSE | N°4C.283/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 20 décembre 2006, 4C.283/2006


{T 0/2}4C.283/2006 /ech Arrêt du 20 décembre 2006Ire Cour civile MM. et Mme les juges Corboz, président, Klett et Favre.Greffier: M. Thélin. A. ________,demandeur et recourant, représenté par Me Antoine Kohler, contre Banque X.________,défenderesse et intimée, représentée par Me Serge Fasel. prêt de consommation; remboursement recours en réforme contre l'arrêt rendu le 23 juin 2006 par la Chambre civilede la Cour de justice du canton de Genève. Faits : A.Par lettre du 26 avril 1990 adressée à B.________, A.________ et C.________,la Banque Y.________ a confirmé l'octroi d'un pr

êt à terme fixe au montant de200'000 fr., «destiné à un investis...

{T 0/2}4C.283/2006 /ech Arrêt du 20 décembre 2006Ire Cour civile MM. et Mme les juges Corboz, président, Klett et Favre.Greffier: M. Thélin. A. ________,demandeur et recourant, représenté par Me Antoine Kohler, contre Banque X.________,défenderesse et intimée, représentée par Me Serge Fasel. prêt de consommation; remboursement recours en réforme contre l'arrêt rendu le 23 juin 2006 par la Chambre civilede la Cour de justice du canton de Genève. Faits : A.Par lettre du 26 avril 1990 adressée à B.________, A.________ et C.________,la Banque Y.________ a confirmé l'octroi d'un prêt à terme fixe au montant de200'000 fr., «destiné à un investissement dans Z.________ restaurants SA».Cet écrit spécifiait les conditions du prêt; une rubrique «garantie»mentionnait un «engagement de codébiteurs, pour 1/3 chacun, de vous-mêmes».Il était accompagné d'un document intitulé «engagement de codébiteurs»libellé comme suit:...La banque ouvre aux soussignésM. B.________M. A.________M. C.________un prêt à terme fixe de 200'000 fr. (deux cent mille) en capital. Les soussignés se constituent codébiteurs dans les proportions suivantes:M. B.________ un tiersM. A.________ un tiersM. C.________ un tiers...Par des corrections manuscrites dans ces deux documents, les destinatairesont modifié leurs quotes-parts en ce sens que B.________ s'engageait pour100'000 fr., A.________ pour 50'000 fr. et C.________ pour 50'000 fr.également. Pour exprimer leur accord, tous trois ont contresigné unexemplaire de chaque document et, en outre, des conditions générales de labanque. Ces exemplaires furent restitués à la banque.Celle-ci a versé la somme convenue le 11 mai 1990. Elle a par la suitefusionné avec un autre établissement pour devenir la Banque X.________. B.Le 20 mars 2002, la banque a résilié le prêt avec effet immédiat et elle aexigé de ses clients le remboursement de 276'266 fr.55 en capital, intérêtset frais.Le 19 novembre 2004, elle a fait notifier à A.________ un commandement depayer au montant de 76'396 fr.40, avec intérêts au taux de 6,25% par an dèsle 1er septembre 2004, dans la poursuite n°.... Le débiteur poursuivi aformé opposition. Par jugement du 3 février 2005, le Tribunal de premièreinstance du canton de Genève a prononcé la mainlevée provisoire del'opposition à concurrence de 50'000 fr., sans intérêts. C.Le 24 février 2005, A.________ a ouvert action en libération de dette contrela Banque X.________; sa demande tendait à faire constater qu'il ne devaitpas le montant de 50'000 fr. Il soutenait qu'il s'était lié à la défenderessepar un contrat de cautionnement, afin de garantir l'obligation de Z.________restaurants SA, et que ce contrat était nul faute d'avoir été conclu en laforme authentique.La défenderesse a pris des conclusions tendant à la condamnation du demandeurau paiement de 76'396 fr.40, avec suite d'intérêts selon le commandement depayer.Statuant le 13 décembre 2005, le Tribunal de première instance lui a donnéentièrement gain de cause. Il a retenu que les parties s'étaient liées par uncontrat de prêt, libre de forme, et que la défenderesse était créancière detoutes les prestations qui étaient l'objet du commandement de payer.Le demandeur ayant appelé du jugement, la Cour de justice s'est prononcée le23 juin 2006. Elle a confirmé le rejet de l'action en libération de dette etcondamné le demandeur à payer 50'000 fr. sans intérêts. Pour le surplus, ladéfenderesse n'avait pas formé de demande reconventionnelle et elle nepouvait donc pas obtenir de prestations plus amples que celles reconnues parle juge de la mainlevée. D.Agissant par la voie du recours en réforme, le demandeur requiert le Tribunalfédéral de modifier l'arrêt de la Cour de justice en prononçant que lemontant de 50'000 fr. n'est pas dû et que la poursuite n°... ne sera pascontinuée.La défenderesse conclut au rejet du recours.Par arrêt de ce jour, le Tribunal fédéral a rejeté un recours de droit publicque le demandeur a introduit contre le même prononcé. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le recours est formé par une partie qui a succombé dans des conclusionsconcernant sa propre situation juridique. Il est dirigé contre un jugementfinal rendu en dernière instance cantonale par un tribunal suprême (art. 48al. 1 OJ), dans une contestation civile dont la valeur litigieuse dépasse leseuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ). Déposé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) etdans les formes requises (art. 55 OJ), il est en principe recevable, sousréserve de l'examen des griefs soumis au Tribunal fédéral.Le recours en réforme peut être exercé pour violation du droit fédéral, àl'exclusion des droits constitutionnels et du droit cantonal (art. 43 al.1OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités). Sous réserved'exceptions qui ne sont pas réalisées dans la présente affaire, le Tribunalfédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des faitsconstatés dans la décision attaquée (art. 63 al. 2 et 64 OJ; ATF 130 III 102consid. 2.2 p. 106, 136 consid. 1.4 p. 140); la partie recourante n'est pasautorisée à critiquer les constatations de fait ni à alléguer des faits quin'ont pas été constatés (art. 55 al. 1 let. c OJ).Le Tribunal fédéral n'est pas lié par l'argumentation des parties (art. 63al. 1 OJ) et il apprécie librement la portée juridique des faits (art. 43 al.4, 63 al. 3 OJ); néanmoins, d'ordinaire, il se prononce seulement sur lesquestions juridiques que la partie recourante soulève conformément auxexigences de l'art. 55 al. 1 let. c OJ concernant la motivation du recours(ATF 117 II 199 consid. 1 p. 200; 116 II 92 consid. 2 p.94). 2.Le demandeur reproche à la Cour de justice d'avoir violé l'art. 18 CO relatifà l'interprétation des contrats. Selon son argumentation, les parties aucontrat conclu au printemps de 1990 ont stipulé un engagement principal deZ.________ restaurants SA et une simple garantie, subsidiaire, des troispersonnes physiques qui ont contresigné les documents. 2.1 Confronté à un litige sur l'interprétation d'une convention, le juge doittout d'abord s'efforcer de déterminer la commune et réelle intention desparties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont ellesont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable dela convention (art. 18 al. 1 CO). S'il y parvient, le juge procède à uneconstatation de fait qui ne peut pas être contestée par la voie du recours enréforme (ATF 131 III 606 consid. 4.1 p. 611; 129 III 618 consid. 3 p. 620,129 III 664 consid. 3.1 p. 667). Déterminer ce que les parties savent ouveulent au moment de conclure relève en effet de la constatation des faits(ATF 131 III 606, ibidem; 128 III 419 consid. 2.2 p. 422).Si le juge ne parvient pas à établir la commune et réelle intention desparties, il lui incombe d'interpréter leurs déclarations et comportementsselon la théorie de la confiance. Il doit rechercher comment une déclarationou une attitude pouvait être comprise de bonne foi en fonction de l'ensembledes circonstances (ATF 132 III 24 consid. 4 p.27/28). Le principe de laconfiance permet d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration oude son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime(ATF 131 III 606 consid. 4.1 p. 611; 130 III 417 consid. 3.2 p. 424; 129 III118 consid. 2.5 p.123, 664 consid. 3.1 p. 667). L'application du principe dela confiance est une question de droit que le Tribunal fédéral, saisi d'unrecours en réforme, examine librement. Pour résoudre cette question de droit,il doit cependant se fonder sur le contenu de la manifestation de volontéconcernée et sur les circonstances dans lesquelles elle est intervenue,points qui relèvent du fait (ATF 132 III 24 consid. 4 p. 28; 131 III 606consid. 4.1 p. 611; 130 III 417 consid. 3.2 p. 425).Même s'il est apparemment clair, le sens d'un texte souscrit par les partiesn'est pas forcément déterminant, de sorte que l'interprétation purementlittérale est prohibée (art. 18 al. 1 CO). Lorsque la teneur d'une clausecontractuelle paraît limpide à première vue, il peut résulter d'autresconditions du contrat, du but poursuivi par les parties ou d'autrescirconstances que le texte de cette clause ne restitue pas exactement le sensde l'accord conclu. Il n'y a cependant pas lieu de s'écarter du sens littéraldu texte adopté par les intéressés lorsqu'il n'y a aucune raison sérieuse depenser que celui-ci ne corresponde pas à leur volonté (ATF 131 III 606consid. 4.2 p. 611; 130 III 417 consid. 3.2; 129 III 118 consid. 2.5).2.2 La Cour de justice constate que lors de la conclusion du contrat, ilétait clair pour toutes les parties que la somme à fournir par ladéfenderesse était destinée à la société Z.________ restaurants SA. Celaconcorde avec l'opinion du recourant. La Cour constate aussi que selonl'accord de ces mêmes parties, il n'était pas prévu que cette société seraitdébitrice du remboursement à la défenderesse; au contraire, l'engagementcorrespondant était assumé exclusivement par le recourant, avec B.________ etC.________, selon leurs quotes-parts respectives. La Cour retient enfin qu'enl'absence d'un engagement principal de la société, engagement qui aurait étégaranti par celui du recourant, les parties n'ont pas pu envisager un contratde cautionnement.Dans cette discussion du cas, on peine à discerner si la Cour de justiceconstate la volonté commune des parties ou si elle constate et interprèteleurs manifestations de volonté.Dans la mesure où la Cour retient que la volonté réelle et concordante detoutes les parties se rapportait à un prêt consenti à B.________, A.________et C.________, prêt qu'il leur incomberait de rembourser, et qu'il n'étaitpas question d'un cautionnement, elle se livre à une constatation de fait quicoupe court à un débat ayant pour objet d'interpréter le contrat selon leprincipe de la confiance.Dans la mesure où la Cour constate seulement que les trois personnesphysiques ont manifesté la volonté d'accepter le prêt et que Z.________restaurants SA n'a fait, elle, aucune déclaration, il s'impose de retenir, auregard du principe de la confiance, que cette acceptation devait êtrecomprise comme la promesse d'assumer toutes les obligations que la loi ou lecontrat imputent à l'emprunteur, selon les quotes-parts spécifiées. Ils'impose aussi de retenir que la société n'a contracté aucune obligation.En tant que le demandeur critique les constatations de la Cour de justice ouallègue des faits autres que ceux constatés, son exposé est irrecevable auregard de l'art. 55 al. 1 let. c OJ. Pour le surplus, il échoue à mettre enévidence une violation de l'art. 18 al. 1 CO. 3.Invoquant l'art. 8 CC, le demandeur fait grief à la Cour de justice den'avoir ordonné ni l'interrogatoire des parties ni l'audition de témoins, etde l'avoir ainsi empêché de prouver que lors de la conclusion du contrat, lesparties voulaient un engagement principal de Z.________ restaurants SA et unesimple garantie, subsidiaire, des trois personnes physiques.L'art. 8 CC répartit le fardeau de la preuve dans les contestations soumisesau droit civil fédéral. A la partie chargée dudit fardeau, il confère ledroit de prouver les faits concernés (ATF 115 II 300 consid. 3 p.303), pourautant qu'ils soient juridiquement pertinents au regard du droit fédéralapplicable à la cause, que la partie les ait régulièrement allégués selon ledroit cantonal de procédure et que l'offre de preuve correspondantesatisfasse, quant à la forme et au délai, aux exigences de ce droit (ATF 126III 315 consid. 4a p. 317; 122 III 219 consid. 3c p.223/224). Pour lesurplus, cette disposition ne régit pas l'appréciation des preuves et ellen'exclut pas non plus que le juge puisse, sur la base d'une appréciationanticipée des preuves déjà disponibles, refuser l'administration d'une preuvesupplémentaire au motif qu'il la tient pour impropre à modifier sa conviction(ATF 131 III 222 consid. 4.3 p. 226; 129 III 18 consid. 2.6 p. 24/25).La Cour de justice s'est livrée à des constatations de fait qui luipermettent de retenir avec raison, au regard du droit fédéral, l'obligationexclusive des personnes physiques avec, parmi elles, le demandeur. Son refusd'ordonner un interrogatoire des parties ou l'audition de témoins repose surl'appréciation anticipée du résultat à attendre de ces mesures probatoires,de sorte que la critique du demandeur est inapte à révéler une violation del'art. 8 CC. 4.Le demandeur se plaint de violation de l'art. 493 al. 2 CO relatif à la formedu cautionnement accordé par une personne physique. Compte tenu que lecontrat des parties n'avait pas pour objet de garantir la dette d'un tiers,il ne s'inscrit pas dans la définition du cautionnement selon l'art. 492 al.1 CO. Par conséquent, faute d'être applicable, cette disposition ne peut pasfonder l'action en libération de dette. 5.Le recours en réforme doit être rejeté, dans la mesure où les griefsprésentés sont recevables. A titre de partie qui succombe, son auteur doitacquitter l'émolument judiciaire et les dépens auxquels l'autre partie peutprétendre. Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 2.Le demandeur acquittera un émolument judiciaire de 2'500 fr. 3.Le demandeur acquittera une indemnité de 3'000 fr. due à la défenderesse àtitre de dépens. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laCour de justice du canton de Genève. Lausanne, le 20 décembre 2006 Au nom de la Ire Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.283/2006
Date de la décision : 20/12/2006
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-12-20;4c.283.2006 ?
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