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19/12/2006 | SUISSE | N°4P.214/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 décembre 2006, 4P.214/2006


{T 0/2}4P.214/2006 /ech Arrêt du 19 décembre 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, président, Favre et Kiss.Greffière: Mme Aubry Girardin. X. ________ S.A.,recourante, représentée par Me Dominique Lévy, contre Y.________,intimé, représenté par Me Daniel Meyer,Cour d'appel de la juridiction genevoise des prud'hommes, case postale 3688,1211 Genève 3. arbitraire (recours de droit public contre l'arrêt de la Cour d'appel de la juridictiongenevoise des prud'hommes du 10 août 2006). Faits : A.La société X.________ S.A. (ci-après: X.________) a pour but de rendre touttype d

e services dans le domaine de la délivrance du courrier. Elle e...

{T 0/2}4P.214/2006 /ech Arrêt du 19 décembre 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, président, Favre et Kiss.Greffière: Mme Aubry Girardin. X. ________ S.A.,recourante, représentée par Me Dominique Lévy, contre Y.________,intimé, représenté par Me Daniel Meyer,Cour d'appel de la juridiction genevoise des prud'hommes, case postale 3688,1211 Genève 3. arbitraire (recours de droit public contre l'arrêt de la Cour d'appel de la juridictiongenevoise des prud'hommes du 10 août 2006). Faits : A.La société X.________ S.A. (ci-après: X.________) a pour but de rendre touttype de services dans le domaine de la délivrance du courrier. Elle estdirigée par deux directrices, A.________ et B.________. Y. ________ a travaillé pour Z.________ S.A. (ci-après: Z.________) du 1eroctobre 1983 au 31 mai 2003. Il a gravi peu à peu les échelons del'entreprise et a occupé, en dernier lieu, la fonction de "CustomerOperations Manager West", pour une rémunération annuelle s'élevant à 132'379fr., plus le paiement de divers frais. Il était apprécié de chacun et aquitté cette société en excellents termes, de sa propre volonté, après avoirété approché par les deux directrices de X.________, qui lui ont proposé unemploi. Le 7 mars 2003, A.________ a délivré à Y.________ une attestationd'engagement comme "Country manager" auprès de X.________ dès le 1er juillet2003. Il a été établi que A.________ avait engagé Y.________ alors qu'elleenvisageait de réduire son activité professionnelle et qu'elle cherchait unremplaçant, afin de se consacrer à sa vie de famille. Les projets de ladirectrice ont été perturbés, car, à la fin du mois de juin 2003, elle a vécuune rupture sentimentale assez brutale. Elle a alors décidé de poursuivre sonactivité professionnelle, sans réduire son temps de travail. Le 1er juillet 2003, lors de l'entrée en fonction de Y.________, A.________l'a informé qu'il changeait de position dans l'entreprise, et qu'il allaitoccuper le poste de "Station manager" à la place du poste de "Countrymanager". Il lui a été demandé de faire part de ses suggestions, afind'améliorer l'organisation de la société, de développer son activité et deprésenter un "business" plan. A. ________ négligeait régulièrement les obligations découlant de sa fonctionde directrice, déconsidérait ses employés ou procédait par règlements decomptes. Pendant ses premiers mois d'activité, Y.________ n'a reçu ni contrat detravail ni décomptes de salaire.En août 2003, un client potentiel de X.________ que connaissait Y.________ aparticipé à un déjeuner d'affaires en compagnie de ce dernier et deA.________. A cette occasion, il a été extrêmement surpris de la teneur depropos qu'il a qualifiés de "chauds", à connotation sexuelle, échangés avecla directrice, précisant que Y.________ était plutôt effacé. Après ce repas,il avait déclaré à Y.________ qu'il trouvait son employeur "un peu torride".Il n'a constaté aucune agression sexuelle de la part de A.________ enversY.________ lors de ce repas. A la fin du mois de septembre 2003, A.________ a soumis à son avocate unprojet de contrat de travail annoté par Y.________, mais celui-ci n'a jamaisété signé. Il a finalement été retenu que Y.________ avait droit à un salairede 9'750 fr. payable en 13mensualités, auquel s'ajoutait la somme de 900 fr.à titre de frais de représentation, ainsi qu'un montant forfaitaire de1'735,20 à titre de frais de déplacement. Dès septembre 2003, les employés de X.________ ont constaté que desdivergences de caractère professionnel opposaient Y.________ à la directionde l'entreprise, mais ils n'ont pas remarqué que ce dernier aurait étévictime de harcèlement sexuel. En septembre ou octobre 2003, Y.________ a pris contact avec une spécialisteen ressources humaines pour lui raconter les problèmes qu'il rencontrait avecsa directrice. Il paraissait gêné et hésitait à donner des détails. Il lui arévélé qu'il se sentait agressé, voire harcelé sexuellement; sa directricetentait de l'embrasser et l'avait une fois plaqué contre le mur à cette fin.Il a également fait état de griffures sur le torse, sans les montrer; il afait lire à la spécialiste consultée un SMS de sa directrice "à caractèrecoquin, sexuel". En novembre 2003, lors d'un repas avec des camarades d'études, dontD.________, consultante en ressources humaines, Y.________ leur a expliquéavec difficulté qu'il faisait l'objet de harcèlement de la part de sadirectrice, qui lui faisait des avances à caractère sexuel, doublées d'unerelation de pouvoir. Il craignait que son refus ne conduise à sonlicenciement. Entre novembre et décembre 2003, Y.________ a demandé conseil à D.________pour gérer la situation. D. ________, une ancienne collègue de Y.________ chez Z.________, avaitaccepté de travailler pour X.________ en septembre 2003, mais a quittésur-le-champ cet employeur, n'ayant pas reçu de contrat écrit, ni d'assuranceconcernant sa formation lors de son entrée en fonction. Y.________ lui aexpliqué, avant d'être licencié, qu'il était victime de harcèlement sexuel etpsychologique de la part de sa directrice. Le 28 novembre 2003, X.________ a résilié le contrat de travail de Y.________avec effet au 31 décembre 2003, le libérant de son obligation de travailler.Il lui était reproché un manque récurrent de communication, un manqued'intérêt pour son travail et le développement de la société, ainsi qu'uneattitude négative pour le personnel. Enfin, il n'avait pas mis en pratiqueles projets annoncés, ne cessant de contredire la direction et créant unclimat de collaboration impossible. Y. ________ a été incapable de travailler à 100 % du 1er décembre 2003 au 31décembre 2004, puis à 50 % du 1er janvier 2005 au 31mars 2005. Le médecin de Y.________ a indiqué que son patient s'était plaint deproblèmes de harcèlement sexuel et psychologique de la part de la directrice,qui lui avait d'abord fait des avances qu'il avait refusées, ce qui l'avaitamenée à passer à des agressions physiques. Son patient lui avait expliquéqu'elle l'avait plaqué contre le mur ou s'était assise sur lui en mimant unecopulation. Le médecin a constaté que Y.________ était dans un étatd'agitation peu ordinaire, dépressif et insomniaque. Le 9 décembre 2003, Y.________ s'est opposé à son congé, soutenant qu'ilétait abusif. Les parties ont ensuite cherché en vain à résoudre leur litige. B.Le 11 mars 2004, Y.________ a déposé une demande auprès de la juridictiongenevoise des prud'hommes en concluant au paiement, par X.________, de113'261 fr. plus intérêt correspondant à une indemnité pour licenciementabusif (66'450 fr.) et pour tort moral (20'000 fr.), aux salaires des mois dejanvier et février 2004 (22'150 fr.), au solde de salaire pour décembre 2003(3'000 fr.) et à un solde de vacances. En cours de procédure, Y.________ arenoncé à ses prétentions relatives aux vacances et aux salaires des mois dejanvier et février 2004; il a également réduit à 2'635,20 fr. sa réclamationpour décembre 2003. Une expertise psychiatrique a été ordonnée par le Tribunal des prud'hommes.Il ressort notamment du rapport d'expertise du 5 septembre 2005 queY.________ a été victime d'un épisode dépressif majeur qui s'est manifestéassez brutalement en décembre 2003. En dehors de la symptomatologiespécifiquement dépressive, il a présenté des symptômes caractéristiques desétats de stress post-traumatiques, permettant de tirer un lien avec lesévénements professionnels vécus durant les mois précédents (harcèlement,licenciement); l'expert a précisé que ce lien était renforcé par le fait quel'expertisé présentait une personnalité équilibrée. Selon l'expert, un étatanxieux et dépressif fait partie des symptômes habituellement observés chezles victimes de diverses formes de harcèlement. Par jugement du 10 janvier 2006, le Tribunal des prud'hommes a condamnéX.________ à verser à Y.________ 84'311,20 fr. net et 2'635,20 fr. brut avecintérêt à 5 % l'an dès le 31 décembre 2003, mettant à la charge del'employeur les frais d'expertise arrêtés à 2'386,70fr.; il a invité lapartie qui en avait la charge à opérer les déductions usuelles. Les juges ontadmis le caractère abusif du licenciement de Y.________ et lui ont alloué uneindemnité équivalant à six mois de salaires, ainsi qu'une indemnité enréparation du tort moral fixée à 10'000 fr., plus son salaire intégral pourdécembre 2003. Statuant sur appel de X.________, la Cour d'appel de la juridiction desprud'hommes, par arrêt du 10 août 2006, a confirmé l'indemnité pourlicenciement abusif accordée par les premiers juges, ainsi que l'indemnitépour tort moral. Elle a toutefois annulé le jugement entrepris, afin dedistinguer clairement entre ces deux indemnités, dont l'une est brute etl'autre nette. Statuant à nouveau, elle a ainsi condamné X.________ à payer àY.________ 74'311,20 fr. brut à titre d'indemnité pour licenciement abusif, àcharge pour cette société d'opérer les déductions sociales usuelles, 10'000fr. net pour tort moral et 2'635,20 fr. net à titre de solde de salaire pourle mois de décembre 2003, ces trois montants portant intérêt à 5 % l'an dèsle 31 décembre 2003. Elle a par ailleurs condamné X.________ à rembourser auxServices financiers du Pouvoir judiciaire les frais d'expertise psychiatriques'élevant à 2'386,70 fr. C.Contre l'arrêt du 10 août 2006, X.________ interjette un recours de droitpublic au Tribunal fédéral. Invoquant l'arbitraire, elle conclut àl'annulation de l'arrêt entrepris et au renvoi de la cause à l'autoritécantonale. Y. ________ propose de rejeter le recours dans la mesure de sa recevabilitéet de confirmer l'arrêt attaqué. La cour cantonale n'a pas déposé d'observations, précisant seulement quel'arrêt daté du 10 août 2006 avait été notifié le lendemain au conseil deX.________. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.1.1 Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre unedécision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens(art. 84 al. 1 let. a OJ). L'arrêt attaqué, qui est final, n'est susceptible d'aucun autre moyen dedroit sur le plan fédéral ou cantonal dans la mesure où la recourante invoquela violation directe d'un droit constitutionnel, de sorte que la règle de lasubsidiarité du recours de droit public est respectée (art. 84 al. 2 et 86al. 1 OJ; ATF 128 II 259 consid. 1.1). En revanche, si la recourante soulèveune question relevant de l'application du droit fédéral, le grief n'est pasrecevable, parce qu'il pouvait faire l'objet d'un recours en réforme (art. 43al. 1 et 84 al. 2 OJ; cf. ATF 129 I 173 consid. 1.1). La recourante est personnellement touchée par l'arrêt entrepris, qui lacondamne à paiement et la déboute de ses conclusions libératoires. Elle adonc un intérêt personnel, actuel et juridiquement protégé à ce que cettedécision n'ait pas été adoptée en violation de ses droits constitutionnels,de sorte que la qualité pour recourir (art. 88 OJ) doit lui être reconnue.Le recours a en outre été interjeté en temps utile (art. 32 et 89 al.1OJ). 1.2 S'agissant des conclusions (art. 90 al. 1 let. a OJ), il faut rappelerque, hormis certaines exceptions non réalisées en l'espèce, le recours dedroit public n'a qu'un caractère cassatoire (ATF 129 I 173 consid. 1.5; 128III 50 consid. 1b p. 53). Par conséquent, dans la mesure où la recourantedemande autre chose que l'annulation de la sentence attaquée, ses conclusionssont irrecevables. Sous cette réserve, il convient d'entrer en matière. 2.La recourante se plaint exclusivement d'arbitraire dans l'appréciation despreuves et dans l'établissement des faits. 2.1 Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire au sens de l'art. 9Cst. lorsqu'elle est manifestement insoutenable, qu'elle méconnaît gravementune norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle heurtede manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 132 III209 consid. 2.1; 131 I 57 consid. 2 p. 61); il ne suffit pas qu'une autresolution paraisse également concevable, voire préférable; pour que ladécision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire, nonseulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 132 III 209consid. 2.1; 131 I 217 consid. 2.1 p. 219). S'agissant de l'appréciation des preuves et des constatations de fait,l'autorité tombe dans l'arbitraire lorsqu'elle ne prend pas en compte, sansaucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision,lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encorelorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire desconstatations insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1). Il appartient aurecourant d'établir la réalisation de ces conditions en tentant de démontrer,par une argumentation précise, que la décision incriminée est insoutenable(art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 129 I 185 consid. 1.6). Lors de son examen, leTribunal fédéral base son arrêt sur les faits constatés dans la décisionattaquée, à moins que le recourant ne démontre que la cour cantonale a retenuou omis certaines circonstances déterminantes de manière arbitraire (ATF 118Ia 20 consid. 5a). 2.2 La recourante reproche en premier lieu à la cour cantonale d'être tombéedans l'arbitraire en retenant que sa directrice avait harcelé notammentsexuellement l'intimé, alors qu'aucun des employés entendus comme témoins nel'avait remarqué. Seuls des témoignages indirects avaient été pris en compte,ainsi qu'une expertise effectuée deux ans après les faits. En outre, lesjuges avaient omis de tenir compte d'éléments déterminants ressortant del'expertise. La cour cantonale a considéré que, comme les abus sexuels requièrent enprincipe une certaine intimité, l'argument de la recourante, selon lequel sesemployés n'avaient rien remarqué était sans pertinence. Pour admettre quel'intimé avait été harcelé par la directrice, les juges se sont fondés sur lefait que cet employé s'était plaint de tels actes auprès de différentespersonnes et avait cherché conseil, afin de faire face à cette situation,bien avant d'être licencié, ce qui excluait qu'il ait agi pour les besoins dela cause. Ils ont également souligné que l'intimé avait révélé ces faits avecdifficulté et retenue, principalement à des personnes professionnellement àmême de l'aider et qui ont été toutes convaincues de leur réalité. Enfin,tant l'expert judiciaire que le médecin avaient fait des déclarationsconcordantes, confirmant sans doute possible que des actes de harcèlementtant psychologique que sexuel étaient à l'origine de l'importante dépressiondont avait souffert cet employé. Sur la base de ces éléments, l'appréciation de la cour cantonale, qui s'estdéclarée convaincue que l'intimé avait été harcelé psychologiquement etsexuellement par la directrice, échappe à l'arbitraire. En ce domaine, lestémoins directs font souvent défaut, de sorte qu'il n'est nullementinsoutenable de tenir compte d'autres indices et notamment des déclarationsde personnes auxquelles la victime s'est confiée. En l'espèce, tous lestémoins, qui sont par ailleurs dignes de foi, ont fait état des mêmes acteset
se sont eux-mêmes déclarés convaincus de la réalité des faits qui leurétaient révélés. L'expert judiciaire a certes examiné l'intimé deux ans aprèsle licenciement. Il n'en demeure pas moins qu'il a tiré des conclusionscomparables à celles faites en décembre 2003 par le médecin traitant del'intimé. Enfin, le fait que l'expert ait relevé que l'intimé avait étémaltraité par son père dans son enfance et qu'il avait rencontré desdifficultés conjugales n'a pas empêché ce même expert de conclure que l'étatde l'intimé était en lien direct avec les événements vécus sur son lieu detravail. L'arrêt attaqué n'a donc pas passé sous silence, de manièreinsoutenable, des éléments pertinents ressortant de l'expertise. Le grief de la recourante est donc infondé. 2.3 La recourante soutient également que la cour cantonale a arbitrairementomis de tenir compte de circonstances déterminantes, lorsqu'elle a affirméque les motifs de congé avancés par l'employeur étaient fallacieux, alors queles enquêtes les avaient confirmés. Les juges ont considéré que les motifs de licenciement n'étaient que desprétextes en se fondant sur plusieurs éléments, à savoir l'inexistence depièces démontrant un quelconque manquement de l'intimé; l'absenced'avertissement de la recourante avant le licenciement; les initiativesprises par l'intimé qui ont été écartées par la direction sans commentaire;les tentatives de l'intimé en vue d'améliorer la communication interne et lamotivation du groupe, tels des apéritifs. La cour cantonale a égalementretenu que les reproches avancés par la recourante n'avaient pu être prouvés. Dans son argumentation, la recourante confond à l'évidence le recours dedroit public avec un appel. En effet, elle oppose à l'appréciation des jugessa propre interprétation des témoignages recueillis. Par exemple, un témoin aindiqué que l'intimé avait dit que la société était mal gérée et devaitmodifier sa gestion. La recourante y voit la démonstration de l'attitudenégative de l'intimé, alors que, pour les juges, la raison de la venue de cetemployé dans l'entreprise était justement de faire part de suggestions afind'améliorer l'organisation de la société, ce qui supposait une remise enquestion de l'état de chose existant. Les critiques soulevées par larecourante n'ont donc pas leur place dans un recours de droit public et nepermettent au demeurant en aucun cas de démontrer que l'appréciation par lacour cantonale des motifs du congé avancés par la recourante seraitarbitraire. 2.4 La recourante soutient également que l'arrêt attaqué est choquant etarbitraire dans son résultat, car elle se voit condamnée à payer uneindemnité équivalant à six mois de salaire, plus 10'000 fr. de tort moral àl'intimé, ce qui est complètement disproportionné avec la durée de leursrelations de travail, qui n'a pas dépassé cinq mois. L'art. 336a al. 2 CO prévoit que l'indemnité versée en cas de résiliationabusive est fixée par le juge, compte tenu de toutes les circonstances. En cedomaine, le juge jouit d'un pouvoir d'appréciation (art. 4 CC) qui porte surla conséquence juridique du congé abusif (cf. ATF 131 III 243 consid. 5.2).Le point de savoir si le juge a ou non excédé son pouvoir d'appréciation enfixant cette indemnité est une question relevant du droit fédéral (cf. ATF131 III 535 consid. 4.3 p. 541 in fine; 122 III 391), qui doit donc êtreexaminée dans le cadre d'un recours en réforme, lorsque, comme en l'espèce(cf. supra consid. 1.1), cette voie de droit est ouverte. Il en va de même dela fixation de l'indemnité pour tort moral (ATF 129 IV 22 consid. 7.2 p. 37;125 III 269 consid.2a). Le grief, présenté sous l'angle de l'arbitraire dans un recours de droitpublic, est ainsi irrecevable. 2.5 Pour cette même raison, la dernière critique formulée par la recourante,qui reproche à la cour cantonale d'avoir déplacé le fardeau de la preuve defaçon inadmissible, n'est pas non plus recevable, dès lors que la répartitiondu fardeau de la preuve relève de l'art. 8 CC, soit du droit fédéral (cf. ATF129 III 18 consid. 2.6). Dans ces circonstances, le recours ne peut qu'être rejeté, dans la mesure desa recevabilité. 3.Comme la valeur litigieuse, selon les prétentions de l'intimé à l'ouverturede l'action (ATF 115 II 30 consid. 5b p. 41; 100 II 358 consid. a), dépasse30'000 fr., la procédure n'est pas gratuite (art. 343 al. 2 et 3CO). Compte tenu de l'issue du litige, les frais et dépens seront mis à la chargede la recourante (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2.Un émolument judiciaire de 4'500 fr. est mis à la charge de la recourante. 3.La recourante versera à l'intimé une indemnité de 5'500 fr. à titre dedépens. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laCour d'appel de la juridiction genevoise des prud'hommes. Lausanne, le 19 décembre 2006 Au nom de la Ire Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.214/2006
Date de la décision : 19/12/2006
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-12-19;4p.214.2006 ?
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