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13/12/2006 | SUISSE | N°4C.274/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 13 décembre 2006, 4C.274/2006


{T 0/2}4C.274/2006/ech Arrêt du 13 décembre 2006Ire Cour civile MM. les Juges Corboz, président, Favre et Mathys.Greffier: M. Carruzzo. X. ________ SA,demanderesse et recourante, représentée parMe Claude Aberlé, contre Y.________ SA,défenderesse et intimée, représentée par Me Howard Jan Kooger. contrat de bail à loyer; prolongation du bail, recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière de baux etloyers du canton de Genève du 12juin 2006. Faits : A.A.a Par contrat conclu le 7 janvier 1957, V.________ SA a remis à bailaux.________ SA (ci-après: Y.________ ou

la défenderesse) un certain nombrede parcelles, à l'usage de lo...

{T 0/2}4C.274/2006/ech Arrêt du 13 décembre 2006Ire Cour civile MM. les Juges Corboz, président, Favre et Mathys.Greffier: M. Carruzzo. X. ________ SA,demanderesse et recourante, représentée parMe Claude Aberlé, contre Y.________ SA,défenderesse et intimée, représentée par Me Howard Jan Kooger. contrat de bail à loyer; prolongation du bail, recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière de baux etloyers du canton de Genève du 12juin 2006. Faits : A.A.a Par contrat conclu le 7 janvier 1957, V.________ SA a remis à bailaux.________ SA (ci-après: Y.________ ou la défenderesse) un certain nombrede parcelles, à l'usage de locaux industriels, de bureaux et de bâtiments,dont elle était propriétaire dans la zone industrielle de U.________. Ladurée du contrat a été fixée à 20 ans, soit jusqu'au 31 décembre 1976. Lebail se renouvelait tacitement de cinq ans en cinq ans s'il n'était pasdénoncé deux ans avant son échéance. Y.________ ont intégralementreconstruit, modifié et entretenu les bâtiments édifiés sur les parcelleslouées. Selon eux, le loyer annuel, qui était passé de 7'000 fr. au départ à22'000 fr., était réglé par compensation avec leurs créances du chef destravaux de transformation, de rénovation et de réparation de ces bâtimentsdont ils avaient payé l'ensemble des frais. A.b La faillite de V.________ SA a été prononcée le 25 janvier 2001 et lesimmeubles appartenant à cette société ont été placés sous le régime de lagérance légale. Y. ________ n'ont pas fait valoir qu'ils étaient les locataires de V.________SA et l'administration de la masse en faillite de celle-ci ne leur a pasdemandé de lui régler des loyers. Le 11 mai 2005, ils se sont vu délivrer unacte de défaut de biens d'un montant de 419'306 fr. 90 après avoir produitdiverses créances dans cette faillite. Les immeubles appartenant à V.________ SA, y compris ceux occupés parY.________, ont été réalisés par l'Office des faillites de Genève. Lesconditions de vente précisaient que les bâtiments de la faillie faisaientl'objet de deux baux à loyer - l'un en faveur de la société W.________ SA,l'autre en faveur de A.________ - et que le créancier hypothécaire avaitrequis une double mise à prix. La mention suivante y figurait: "pas de bailen faveur de Y.________ SA". L'Office y indiquait ne pas avoir connaissanced'"autres contrats de bail à loyer conclus", tout en ajoutant que, s'ildevait en exister, l'acquéreur devrait procéder conformément aux règles del'art. 261 al.2 CO. La vente aux enchères s'est déroulée le 17 octobre 2003. La Fondation devalorisation des actifs de la Banque Z.________ (ci-après: la Fondation ou lademanderesse) a acquis les immeubles occupés par Y.________. Le prix de ventea été payé par compensation avec la créance de l'acquéresse envers lafaillie. A.c Dans le but de sauvegarder ses droits, la Fondation a adressé àY.________, le 23 octobre 2003, un avis de résiliation de bail pour le 30avril 2004 ou toute autre échéance utile. Dans sa lettre accompagnant cetavis, elle précisait que, en raison de la double mise à prix, l'adjudications'était faite "sans reprise du contrat de bail liant le précédentpropriétaire à votre société". A.d Par requête déposée le 21 novembre 2003 auprès de la Commission deconciliation en matière de baux et loyers, Y.________ ont contesté lavalidité du congé, alléguant que le bail ne pouvait prendre fin que le 30juin 2004 au plus tôt, et ils ont requis une prolongation de bail de six ans.La tentative de conciliation a échoué. Le 30 avril 2004, la Commission a rendu une décision par laquelle elle adéclaré le congé valable avec effet au 30 juin 2004 et accordé à Y.________une première prolongation de bail jusqu'au 30 juin 2007. B.Le 2 juin 2004, la Fondation a saisi le Tribunal des baux et loyers du cantonde Genève en vue de contester la décision de la Commission. A titreprincipal, la demanderesse a conclu à ce qu'il soit constaté qu'aucun bail nela lie à la défenderesse, comme indiqué d'ailleurs dans les conditions de lavente aux enchères, l'intéressée n'ayant jamais payé de loyer en contrepartiede l'usage de ses locaux et le bail initial portant sur d'autres locaux.Aussi le Tribunal était-il invité à décliner sa compétence. A titresubsidiaire, il était requis de constater la validité du congé donné pour le30 juin 2004 et de refuser toute prolongation de bail. Dans sa réponse du 25 octobre 2004, la défenderesse a conclu derechef àl'octroi d'une prolongation de son bail pour une durée de six ans à compterdu 1er juillet 2004. Elle a maintenu avoir payé les loyers par voie decompensation de créances, a contesté que la vente forcée ait eu pour effet demettre un terme au contrat de bail et a exposé les motifs pour lesquels laprolongation requise lui paraissait justifiée. Par jugement du 18 novembre 2005, le Tribunal des baux et loyers a constatéque les parties étaient liées par un contrat de bail, déclaré valable, aveceffet au 30 juin 2004, la résiliation de bail intervenue le 23 octobre 2003et accordé à la défenderesse une première prolongation de bail d'une durée detrois ans prenant fin le 30 juin 2007. Statuant par arrêt du 12 juin 2006, la Chambre d'appel en matière de baux etloyers a confirmé ce jugement. Elle a constaté, sur le vu des piècescomptables produites devant elle par l'appelante, que la créance deY.________ envers V.________ SA avait été régulièrement réduite, d'année enannée, dans une proportion qui tenait manifestement compte du loyer convenude 22'000 fr. par an et des frais d'entretien assumés par la défenderesse.Cette manière de procéder, sans doute insolite au regard des usages envigueur, pouvait s'expliquer en l'occurrence, selon la cour cantonale, par laproximité, au demeurant admissible, existant entre les actionnariats des deuxpersonnes morales concernées. Aussi les juges d'appel ont-ils admis quecelles-ci étaient bien liées par un contrat de bail et que le loyer avait étépayé par compensation jusqu'à la mise en faillite de la bailleresse. Parailleurs, ils n'ont pas attaché d'importance au fait que la locataire n'avaitplus réglé son loyer depuis le prononcé de cette faillite, pour le motifqu'elle n'avait pas été sollicitée de le faire par qui de droit. La courcantonale a en outre écarté la thèse voulant que V.________ SA et Y.________n'aient formé qu'une seule et même entité, dès lors que la première sociétéavait été mise en faillite tandis que la seconde poursuivait ses activités.Elle a donc retenu que le bail avait été repris par la Fondation, lorsquecelle-ci avait acquis aux enchères publiques les bâtiments occupés par lalocataire, et qu'il avait été valablement résilié pour la plus prochaineéchéance légale, à savoir le 30 juin 2004. Contrairement à l'avis de lademanderesse, les juges cantonaux ont estimé que l'acquisition des immeublesdans le cadre d'enchères forcées, à la suite d'une double mise à prix, neprivait pas la locataire de son droit de solliciter une prolongation de bail.Considérant que la demanderesse n'avait pas démontré l'existence d'un besoinurgent relativement aux locaux loués, qu'elle ne pouvait s'en prendre qu'àelle-même si elle n'avait plus touché le moindre loyer depuis le prononcé dela faillite de V.________ SA et que les circonstances rendaient manifestementpénibles les conséquences du congé pour la défenderesse, la Chambre d'appel ajugé fondée la prolongation de bail accordée à celle-ci par les premiersjuges pour une durée de trois ans. C.Parallèlement à un recours de droit public qui a été rejeté, dans la mesureoù il était recevable, par arrêt séparé de ce jour, la société X.________ SAa déposé un recours en réforme. La recourante y invite le Tribunal fédéral àrectifier préalablement la qualité des parties en constatant qu'elle asuccédé à la Fondation. A l'appui de cette conclusion préalable, elle exposeavoir acquis les immeubles litigieux en date du 13 avril 2006, l'autoritéintimée, informée le 5 mai 2006 de ce changement de propriétaire, n'en ayantpas tenu compte, bien qu'elle ait été requise de rectifier la désignation dela partie demanderesse. Sur le fond, la recourante conclut, à titreprincipal, à la constatation de l'inexistence d'un contrat de bail entreelle-même et la défenderesse et, partant, au déboutement intégral de cettedernière. Subsidiairement, elle requiert le renvoi de la cause à l'autoritécantonale pour complément d'instruction et nouvelle décision. La défenderesse propose le rejet du recours. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Les immeubles donnés à bail ont été acquis par un tiers - la sociétéX.________ SA - avant que la Chambre d'appel n'ait rendu l'arrêt attaqué. Lacour cantonale n'a pas tenu compte de pareille circonstance, bien quecelle-ci ait été portée à sa connaissance en temps utile par le conseil del'acquéresse. Lorsque le transfert de propriété intervient en cours deprocédure judiciaire, l'acquéreur entre dans le procès à la place du vendeur,en vertu de l'art. 261 al. 1 CO, pour autant que le procès pendant ait traità un état de fait qui continue à influer sur le rapport de bail même après lechangement de partie, ce qui est le cas d'une procédure, telle la présente,ayant pour objet l'existence du bail et, subsidiairement, la prolongation decelui-ci (Peter Higi, Commentaire zurichois, n. 23 ad art. 261-261a CO; DavidLachat, Commentaire romand, Code des obligations I, n. 3 ad art. 261 CO). Ilressort d'ailleurs d'un jugement du Tribunal des baux et loyers produit parla recourante, lequel se réfère lui-même à un arrêt de la Cour de justice,que, sur le plan procédural, les juridictions genevoises considèrent la ventede la chose louée comme un cas de substitution d'office d'une partie aulitige, imposée par le droit fédéral. Dans ces conditions, le présent arrêtsera rendu à l'égard de X.________ SA. L'intimée ne s'oppose pas, audemeurant, à ce qu'il en aille ainsi, qui désigne elle-même cette sociétécomme recourante dans sa réponse. 2.2.1Interjeté par le successeur ex lege de la partie ayant succombé dans sesconclusions tendant à faire constater l'inexistence d'un contrat de bail laliant à la défenderesse, le recours est recevable, puisqu'il a été déposé entemps utile (art. 54 al. 1 OJ en liaison avec l'art. 34 al. 1 let. b OJ) etdans les formes requises (art. 55 OJ). 2.2 Selon la jurisprudence, la valeur litigieuse de la contestation portantsur la prolongation du bail correspond au loyer et aux frais accessoires duspour la durée de la prolongation demandée; lorsque le preneur a déjàbénéficié d'une prolongation de fait, cette valeur se détermine d'après lesolde de la prolongation réclamée, c'est-à-dire en fonction de la duréerésiduelle de la prolongation requise à compter du prononcé de l'autoritécantonale de dernière instance (ATF 113 II 406 consid. 1 et l'arrêt cité). Devant la Chambre d'appel, autorité genevoise de dernière instance, ladéfenderesse a conclu à la confirmation du jugement du Tribunal des baux etloyers, lequel lui avait accordé une première prolongation de bail jusqu'au30 juin 2007. La Chambre d'appel a statué le 12 juin 2006. Le reliquat de laprolongation de bail sollicitée est ainsi légèrement supérieur à une année enl'espèce. A considérer le montant du loyer annuel (22'000 fr.), la valeurlitigieuse minimale de 8'000 fr., requise par l'art. 46 OJ, est doncatteinte. 2.3 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 43al. 1 OJ). Il ne permet en revanche pas de dénoncer la violation directe d'undroit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ) ou la violation dudroit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités). Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire sonraisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décisionattaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aientété violées, qu'il y ait lieu de rectifier des constatations reposant sur uneinadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter lesconstatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu comptede faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64OJ; ATF 130 III 102 consid. 2.2, 136 consid. 1.4). Dans la mesure où unepartie recourante présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dansla décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une desexceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenircompte (ATF 130 III 102 consid. 2.2, 136 consid. 1.4). Il ne peut êtreprésenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyensde preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). L'appréciation des preuveséchappe également à l'examen de la juridiction fédérale de réforme (ATF 130III 102 consid. 2.2 in fine, 136 consid. 1.4; 129 III 618 consid. 3). Le Tribunal fédéral ne saurait aller au-delà des conclusions des parties, quine peuvent en prendre de nouvelles (art. 55 al. 1 let.bOJ), mais il n'estpas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni parl'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ;ATF 130 III 136 consid. 1.4; 128 III 22 consid. 2e/cc in fine). 3.3.1L'art. 8 CC répartit le fardeau de la preuve pour toutes les prétentionsfondées sur le droit fédéral et détermine, sur cette base, laquelle desparties doit assumer les conséquences de l'échec de la preuve (ATF 130 III321 consid. 3.1 p. 323; 129 III 18 consid. 2.6 p.24). On déduit également del'art. 8 CC un droit à la preuve et à la contre-preuve (ATF 129 III 18consid. 2.6 p. 24; 126 III 315 consid. 4a). En particulier, le juge enfreintcette disposition s'il tient pour exactes les allégations non prouvées d'unepartie, nonobstant leur contestation par la partie adverse, ou s'il refusetoute administration de preuve sur des faits pertinents en droit (ATF 130 III591 consid. 5.4 p.601 s.; 114 II 289 consid. 2a p. 291). En revanche, l'art. 8 CC ne prescrit pas quelles sont les mesures probatoiresqui doivent être ordonnées (ATF 127 III 519 consid. 2a p.522), ni ne dicteau juge comment forger sa conviction (ATF 128 III 22 consid.2d p. 25; 127III 248 consid. 3a, 519 consid. 2a p. 522). Il n'exclut ni l'appréciationanticipée des preuves (ATF 129 III 18 consid.2.6 p. 25; 127 III 520 consid.2a p. 522), ni la preuve par indices (ATF 114 II 289 consid. 2a p. 291). Audemeurant, lorsque l'appréciation des preuves convainc le juge qu'un fait estétabli à satisfaction de droit ou réfuté, la question de la répartition dufardeau de la preuve ne se pose plus et le grief tiré de la violation del'art. 8CC devient sans objet. Il s'agit alors d'une question d'appréciationdes preuves, qui ne peut être soumise au Tribunal fédéral que par la voie durecours de droit public pour arbitraire (cf. ATF 127 III 519 consid. 2ap.522; 122 III 219 consid. 3c p. 223). 3.2 En l'espèce, sous le couvert de l'art. 8 CC, la recourante cherche àremettre en cause l'appréciation des preuves à laquelle la cour cantonales'est livrée pour conclure à l'existence du contrat de bail litigieux. Il en va ainsi de
toutes les longues explications fournies par l'intéresséeen vue de démontrer le caractère non probant des pièces comptables surlesquelles la Chambre d'appel a fait fond pour arriver indirectement à cetteconclusion en constatant l'existence d'une importante créance de la locataireà l'égard de la bailleresse et le paiement des loyers par compensation de ladette relative à ceux-ci avec ladite créance. Quoi qu'en dise la recourante,les juges d'appel n'ont pas tiré pareille conclusion des simples allégationsde la défenderesse, mais ils ont procédé à l'appréciation des preuvesfigurant dans leur dossier pour y aboutir. Une telle démarche, qui échappe àl'examen de la juridiction fédérale de réforme, rend sans objet le moyen prisde la violation de l'art. 8 CC. Relève de la pure conjecture l'argument, avancé dans ce contexte par larecourante, selon lequel "tout porte à croire que le montage réalisé parV.________ SA et l'intimée visait à favoriser ses actionnaires, lesquelsétaient identiques, en cas de faillite de la société immobilière et ce audétriment des créanciers de celle-ci". En tout état de cause, on ne voit pascomment rattacher cet argument à la disposition citée. 4.La recourante prétend, en second lieu, que la Chambre d'appel a transgressél'art. 274d al. 3 CO pour n'avoir pas demandé des explications à ladéfenderesse, lorsque celle-ci avait produit ses comptes révisés avec saréponse à l'appel. 4.1 L'art. 274d al. 3 CO prescrit au juge d'établir d'office les faits et auxparties de lui présenter toutes les pièces nécessaires à l'appréciation dulitige. Il pose le principe d'une maxime inquisitoriale sociale, laquelle neconstitue cependant pas une maxime d'office absolue et ne libère pas les deuxparties de leur devoir de collaborer activement à l'établissement des faits(arrêt 4C.285/2005 du 18 janvier 2006 consid. 3.2).4.2 La Fondation, bien qu'elle ait reçu les pièces comptables annexées à laréponse à l'appel, n'a formulé aucune réquisition en rapport avec ces piècesavant ou lors de la séance de plaidoiries du 6mars 2006. La cour cantonalen'était pas tenue de suppléer d'office à l'inaction de l'appelante. Elleavait d'autant moins de raison de le faire qu'elle était d'avis que lesditespièces suffisaient à établir l'existence du contrat de bail litigieux, cequ'elle pouvait faire sans tomber dans l'arbitraire, comme on l'a démontrépar ailleurs. De plus, la Cour de céans a indiqué, dans son arrêt sur lerecours de droit public (consid. 3.2.1, dern. §), que la conclusion àlaquelle la cour cantonale a abouti pouvait déjà être tirée d'autres élémentsde preuve que ceux à propos desquels la recourante se plaint, à tort, de laviolation de l'art. 274d al. 3 CO. 5.L'adjudicataire qui acquiert un immeuble à la suite d'une double mise à prixdans une procédure d'exécution forcée peut résilier, à titre extraordinaire,un bail de longue durée pour le plus prochain terme légal. Toutefois, mêmedans ce cas, le bail peut être prolongé aux conditions de l'art. 272 ss CO.(ATF 128 III 82). A juste titre, la recourante ne conteste pas ce principe.Elle fait valoir, cependant, que les conditions d'une prolongation de bailn'étaient pas réunies en l'espèce. 5.1 Selon l'art. 272 al. 1 CO, le locataire peut demander la prolongationd'un bail lorsque la fin du contrat aurait pour lui des conséquences péniblessans que les intérêts du bailleur le justifient. L'alinéa 2 de cettedisposition prescrit à l'autorité compétente de procéder à la pesée desintérêts du bailleur et du locataire en fonction d'un certain nombre decirconstances qu'il énumère de manière non exhaustive. Le juge gardera àl'esprit que la prolongation a pour but de donner du temps au locataire pourtrouver une solution de remplacement (ATF 125 III 226 consid. 4b; plusrécemment arrêt 4C.269/2004 du 4 octobre 2004, consid. 4.1) ou, à tout lemoins, tend à adoucir les conséquences pénibles que la résiliation peutentraîner pour celui-ci (ATF 116 II 446 consid. 3b; plus récemment arrêt4C.269/2004 du 4octobre 2004, consid. 4.1).5.25.2.1Appliquant ces principes, la Chambre d'appel a retenu, s'agissant de laFondation, d'une part, qu'elle n'avait pas démontré le besoin qu'elle auraiteu de récupérer rapidement la chose louée et, d'autre part, qu'elle nepouvait s'en prendre qu'à elle-même si elle n'avait pas reçu de loyer de ladéfenderesse.En ce qui concerne la situation de cette dernière, les juges cantonaux onttenu compte de la durée exceptionnellement longue du bail (près de 50 ans),du fait que la locataire avait intégralement transformé, sinon construit, lesbâtiments loués pour les adapter à ses besoins et, enfin, de l'impossibilitéde trouver, à U.________, des locaux susceptibles d'accueillir ses activitésqui nécessitent une machinerie lourde dont le déplacement s'avérera coûteuxpour une société qui n'est pas dans une situation financière florissante. Dans ces circonstances, la cour cantonale a jugé fondée la décision duTribunal des baux et loyers d'accorder à la défenderesse une premièreprolongation de bail de 3 ans. 5.2.2 Le résultat de cette pesée des intérêts antagonistes reste sans aucundoute dans les limites du large pouvoir d'appréciation dont le juge du faitjouit en ce domaine (cf. ATF 125 III 226 consid. 4b et les références). Pour en contester le bien-fondé, la recourante s'en prend, tout d'abord, demanière irrecevable, à une constatation de fait lorsqu'elle soutient que laFondation devait pouvoir récupérer rapidement les locaux francs de tout bailpour les revendre aux meilleures conditions du marché. Force est d'ailleursde constater que la présence dans ces locaux de la défenderesse n'a pasempêché la Fondation de vendre les immeubles en cause à un tiers, à savoir larecourante, et que cette dernière n'explique pas en quoi consisterait lebesoin urgent qu'elle pourrait avoir d'utiliser elle-même les locauxlitigieux. La recourante admet que le congé n'a pas été donné en raison de la demeure dela locataire. Aussi la prolongation du bail n'était-elle pas exclue du seulfait que celle-ci ne payait pas le loyer (cf. art. 272a al. 1 let. a CO). Lanouvelle bailleresse ne l'avait d'ailleurs pas invitée à le faire et la courcantonale relève la présence, au dossier, de pièces établissant que lalocataire aurait offert de payer des montants conséquents en contrepartie deson occupation des lieux. Il reste, de toute façon, à la bailleresse lapossibilité de procéder selon l'art. 257d CO au cas où la défenderesse nepayerait pas son loyer actuel ou futur, voire d'éventuels arriérés de loyer. C'est enfin à l'appréciation des preuves que s'en prend derechef larecourante, sous couvert d'une prétendue violation de l'art. 8 CC,lorsqu'elle reproche aux juges précédents d'avoir forgé leur conviction,quant à la situation actuelle de la défenderesse, sur la simple affirmationde celle-ci. En effet, la cour cantonale s'est fondée, à cet égard, sur lesdéclarations faites par le dénommé B.________, administrateur de ladéfenderesse, devant le Tribunal des baux et loyers. Elle a donc procédé àl'appréciation d'un moyen de preuve. Ce n'est pas le lieu d'examiner lesconclusions qu'elle a tirées de cette appréciation (art. 55 al. 1 let. c OJ). 6.Cela étant, le recours soumis à l'examen de la Cour de céans ne peut qu'êtrerejeté dans la mesure où il est recevable. Son auteur, à savoir X.________SA, devra dès lors payer l'émolument judiciaire et verser des dépens àl'intimée (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2.Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 3.La recourante versera à l'intimée une indemnité de 2'500 fr. à titre dedépens. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laChambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève. Lausanne, le 13 décembre 2006 Au nom de la Ire Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.274/2006
Date de la décision : 13/12/2006
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-12-13;4c.274.2006 ?
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