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29/11/2006 | SUISSE | N°E.2/06

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 29 novembre 2006, E.2/06


Cause {T 7}
E 2/06

Arrêt du 29 novembre 2006
Ire Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Ferrari, Lustenberger, Borella et
Frésard. Greffière : Mme Moser-Szeless

C.________, recourante, représentée par Me Thierry Thonney, avocat, place
Pépinet 4, 1002 Lausanne,

contre

Caisse cantonale neuchâteloise de compensation, Faubourg de l'Hôpital 28,
2001 Neuchâtel 1, intimée

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

(Jugement du 4 juillet 2006)

Faits:

A.
C. ________, née en

1975, physiothérapeute, a été affiliée en qualité de
personne exerçant une activité indépendante à la Caisse cantonale
neuchâteloise...

Cause {T 7}
E 2/06

Arrêt du 29 novembre 2006
Ire Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Ferrari, Lustenberger, Borella et
Frésard. Greffière : Mme Moser-Szeless

C.________, recourante, représentée par Me Thierry Thonney, avocat, place
Pépinet 4, 1002 Lausanne,

contre

Caisse cantonale neuchâteloise de compensation, Faubourg de l'Hôpital 28,
2001 Neuchâtel 1, intimée

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

(Jugement du 4 juillet 2006)

Faits:

A.
C. ________, née en 1975, physiothérapeute, a été affiliée en qualité de
personne exerçant une activité indépendante à la Caisse cantonale
neuchâteloise de compensation (ci-après: la caisse de compensation). Elle a
accouché d'un fils le 25septembre 2005. Le 9 novembre 2005, elle a présenté
à la caisse de compensation une demande d'allocation de maternité. Elle a
indiqué avoir travaillé comme physiothérapeute indépendante jusqu'au 31
juillet 2005 et que la reprise du travail était prévue pour le 1erfévrier
2006, à raison de 20 %. Elle a répondu par la négative à la question :
«Avez-vous, au moment de l'accouchement ou dans les neuf mois qui ont précédé
l'accouchement, été empêchée de travailler, totalement ou partiellement, pour
cause de maladie ou d'accident?».

Par décision du 10 novembre 2005, la caisse de compensation a refusé
d'allouer l'allocation prétendue, au motif que la requérante n'exerçait pas
une activité indépendante à la date de l'accouchement, attendu qu'elle avait
travaillé comme physiothérapeute indépendante jusqu'au 31 juillet 2005
seulement.

C. ________ a formé opposition le 5 décembre 2005. Elle a exposé qu'à partir
du septième mois de sa grossesse, elle avait souffert d'importantes douleurs
dans la région lombosacrée. Ces problèmes l'avaient d'abord obligée à réduire
l'exercice de sa profession au cours du mois de juillet 2005 puis de la
suspendre à partir du 1er août suivant. La douleur était devenue
«invalidante» au point qu'elle devait utiliser une canne anglaise pour se
déplacer. Son état ne lui avait pas permis de suivre un traitement
médicamenteux avec des anti-inflammatoires pendant toute la période de la
grossesse, en raison d'un risque de malformation cardiaque chez le foetus.
Elle n'était pas en possession d'une attestation d'arrêt de travail de son
médecin traitant, car elle avait estimé que les troubles de ce genre,
accompagnant souvent les derniers mois de grossesse, disparaissaient la
plupart du temps spontanément à l'accouchement. De plus, elle était au
bénéfice d'une assurance perte de gain en cas de maladie ou d'accident avec
un délai d'attente de 90 jours, raison pour laquelle elle n'avait pas demandé
à son médecin d'attester une incapacité de travail à l'intention de
l'assureur. Elle a produit une attestation du 30 novembre 2005 du docteur
O.________, spécialiste FMH en gynécologie et obstétrique, dans laquelle
celui-ci signalait d'importantes lombalgies en cours de grossesse dès le
mois de juillet 2005. Elle a également déposé une déclaration par laquelle un
physiothérapeute certifiait l'avoir traitée pour des douleurs de la région
lombosacrée durant la période du 30juin au 21septembre 2005.

Par décision du 21 décembre 2005, la caisse de compensation a rejeté
l'opposition au motif qu'à la date de l'accouchement l'intéressée n'exerçait
plus une activité lucrative indépendante, qu'elle n'était ni en arrêt de
maladie (les certificats déposés ne faisant pas mention d'un arrêt de
travail) ni au bénéfice d'une indemnité journalière en cas de maladie. La
caisse indiquait par ailleurs qu'elle avait procédé à la radiation de
l'intéressée du rôle de ses affiliés indépendants.

B.
Statuant le 4 juillet 2006, le Tribunal administratif de la République et
canton de Neuchâtel a rejeté le recours formé contre cette décision par
C.________.

C.
C.________ interjette un recours de droit administratif dans lequel elle
conclut à l'annulation du jugement cantonal et de la décision sur opposition,
à la constatation qu'elle était toujours affiliée à la caisse de compensation
en qualité d'indépendante à la date de son accouchement et à la
reconnaissance de son droit à une allocation de maternité. Elle demande que
le dossier soit renvoyé à la caisse de compensation pour qu'elle fixe le
montant de l'allocation et procède à sa réaffiliation à partir du 1er août
2005.

La caisse de compensation renonce à présenter des observations sur le
recours. Quant à l'Office fédéral des assurances sociales, il ne s'est pas
déterminé.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur l'application de la loi fédérale sur les allocations pour
perte de gain en cas de service et de maternité (Loi sur les allocations pour
perte de gain [LAPG]) dans sa version entrée en vigueur le 1er juillet 2005.
Les décisions sur opposition prises en vertu de cette loi peuvent faire
l'objet d'un recours au tribunal cantonal des assurances (art. 56 et 57
LPGA), dont les jugements ouvrent à leur tour la voie du recours de droit
administratif au Tribunal fédéral des assurances (art. 62 LPGA en corrélation
avec l'art. 128 OJ).

2.
L'art. 16b LAPG définit le cercle des ayants droit à l'allocation de
maternité. Cette disposition a la teneur suivante:
1 Ont droit à l'allocation les femmes qui:
a. ont été assurées obligatoirement au sens de la LAVS durant les
neuf mois précédant l'accouchement;
b. ont, au cours de cette période, exercé une activité lucrative
durant cinq mois, et
c. à la date de l'accouchement:
1. sont salariées au sens de l'art. 10 de la loi du 6
octobre 2000 sur la partie générale du droit des
assurances sociales (LPGA),
2. exercent une activité indépendante au sens de l'art. 12 LPGA,
ou
3. travaillent dans l'entreprise de leur mari contre un
salaire en espèces.
2 La durée d'assurance prévue à l'al. 1, let. a, est réduite en conséquence
si l'accouchement intervient avant la fin du 9e mois de grossesse.

3 Le Conseil fédéral règle le droit à l'allocation des femmes qui, pour cause
d'incapacité de travail ou de chômage:
a. ne remplissent pas les conditions prévues à l'al. 1, let. a;
b. ne sont pas considérées comme salariées ou indépendantes au
moment de l'accouchement.
Se fondant sur la délégation de compétence de l'art. 16b al. 3 LAPG, le
Conseil fédéral a adopté des dispositions concernant les mères au chômage et
les mères en incapacité de travail. L'art. 29 du règlement sur les
allocations pour perte de gain (RAPG) prévoit ceci:
La mère qui est au chômage au moment de l'accouchement ou qui, en raison
d'une période de chômage, ne remplit pas la condition de la durée d'activité
lucrative minimale prévue par l'art. 16b, al. 1, let. b, LAPG a droit à
l'allocation:
a. si elle a perçu des indemnités de l'assurance-chômage
jusqu'à l'accouchement, ou
b. si elle remplissait la condition de la période de cotisation
nécessaire prévue par la loi fédérale du 25 juin 1982 sur
l'assurance-chômage pour percevoir des indemnités au
moment de l'accouchement.
Quant à l'art. 30 RAPG, il a la teneur suivante:
1 La mère qui est en incapacité de travail au moment de l'accouchement ou
qui, en raison d'une période d'incapacité de travail, ne remplit pas la
condition de la durée d'activité minimale prévue par l'art. 16b, al. 1, let.
b, LAPG a droit à l'allocation si, jusqu'à l'accouchement, elle a perçu:
a. des indemnités pour perte de gain en cas de maladie ou
d'accident d'une assurance sociale ou privée, ou
b. des indemnités journalières de l'assurance-invalidité.
2 La mère qui ne remplit pas les conditions de l'al. 1 a droit à l'allocation
si elle bénéficiait d'un rapport de travail encore valable au moment de
l'accouchement et qu'elle avait précédemment épuisé son droit au salaire.

3.
L'art. 16b LAPG subordonne ainsi le droit à l'allocation aux trois conditions
cumulatives suivantes (voir à ce propos Christian Bruchez, La nouvelle
assurance-maternité et ses effets sur le droit du contrat de travail, in: SJ
2005 II, p. 252 ss; Olivier Subilia, La nouvelle loi sur les allocations pour
perte de gain et maternité, in: PJA 12/2005, p. 1472):

a) La condition d'assurance, qui doit être remplie pendant les neuf mois
précédant l'accouchement. La qualité d'assurée au sens de la LAVS est définie
à l'art. 1a LAVS (principalement les personnes domiciliées en Suisse et les
personnes qui exercent une activité lucrative en Suisse);

b) Au cours de cette période d'assurance, la femme doit avoir exercé une
activité lucrative durant cinq mois. Pour les salariées, il faut considérer
qu'il y a activité lucrative lorsque des rapports de travail sont en cours;
peu importe qu'il y ait une période de vacances, ou que l'intéressée soit en
arrêt de travail ou en droit d'être dispensée de travailler (art. 35 de la
loi fédérale du 13 mars 1964 sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et
le commerce [loi sur le travail; LTr]);

c) A la date de l'accouchement, la femme doit être salariée, indépendante, ou
travailler dans l'entreprise de son mari contre un salaire en espèces.

En l'espèce, la contestation entre les parties porte sur la réalisation de
cette dernière condition. Les premiers juges se sont ralliés pour l'essentiel
à l'argumentation de la caisse de compensation. Selon eux, la mère en
incapacité de travail ne peut prétendre à l'allocation que si elle perçoit un
revenu de substitution (art. 30 RAPG). Dans le cas particulier, l'intéressée
n'a pas touché un tel revenu à partir du mois d'août 2005. On ne peut pas non
plus retenir qu'elle était en incapacité de travail à partir du mois d'août
2005, car elle a clairement répondu par la négative à une question à ce sujet
dans sa demande d'allocation. Au surplus, les certificats qu'elle a déposés,
s'ils font état de douleurs importantes dans la région lombosacrée, ne
signalent aucune incapacité de travail en relation avec ces douleurs. Par
conséquent, toujours selon les premiers juges, la recourante ne pouvait plus
être considérée comme indépendante au moment de l'accouchement.

4.
4.1Comme cela ressort du texte de l'art. 16b al. 1 let. c ch. 1 et 2 LAPG, la
mère doit pouvoir être considérée, au moment de l'accouchement, comme
exerçant une activité lucrative (dépendante ou indépendante). Le texte légal
n'exige évidemment pas que l'intéressée exerce effectivement son activité
jusqu'à la date de l'accouchement. Il ne requiert pas davantage qu'elle
réalise un revenu immédiatement avant cette date. Par ailleurs, il n'est pas
indispensable qu'elle reprenne une activité après la naissance (Pascal Mahon,
Le régime des allocations pour perte de gain, in: Meyer-Blaser [édit.],
Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, Soziale Sicherheit, 2ème éd., 2006,
ch. 35). Ce qui est décisif, bien plutôt, c'est le statut professionnel de la
femme au moment où elle accouche (Philippe Carruzzo, Allocations et congé de
maternité : Quels changements à compter du 1er juillet 2005, CGSS 2005 n° 34
p. 62). Les femmes salariées doivent être partie à un rapport de travail -
ou
d'apprentissage - de droit privé ou de droit public à la date déterminante.
Pour ce qui est des femmes exerçant une activité indépendante, l'élément
déterminant réside dans la reconnaissance de ce statut par l'AVS (Rapport de
la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil
national [CSSS-N] du 3 octobre 2002 relatif à l'initiative parlementaire sur
la révision de la loi sur les allocations pour perte de gain et l'extension
du champ d'application aux mères exerçant une activité lucrative, du 3
octobre 2002, FF 2002 6998 ss, plus spécialement 7020; Bruchez, loc. cit., p.
254; Jörg Reinmann, Congé de maternité payé : analyse détaillée du projet,
Sécurité sociale [CHSS] 2004, p. 204). Cette reconnaissance résulte donc de
l'affiliation en cette qualité à une caisse de compensation (voir BO 2001 CN
1616, intervention Baumann).

4.2 Il va de soi que l'incapacité de travail passagère due à la maladie - et
plus encore à une complication survenant pendant la grossesse - n'entraîne
pas la perte du statut d'indépendant au regard de l'AVS. En l'absence
d'éléments subjectifs (ainsi la volonté de l'assurée de cesser son activité
indépendante) ou objectifs (par exemple la dénonciation d'un contrat de bail
pour des locaux commerciaux, le licenciement des éventuels salariés de
l'entreprise, l'existence d'un contrat de remise d'un commerce ou d'une
exploitation, la communication aux assurances sociales de la cessation
d'activité), on doit considérer que la maladie est la cause de la suspension
provisoire d'activité et qu'elle n'entraîne pas de facto le passage du statut
d'indépendante à celui de personne sans activité lucrative.

4.3 En déléguant au Conseil fédéral, à l'art. 16b al. 3 let. b LAPG, la
compétence de régler le droit à l'allocation des femmes qui ne sont pas
réputées salariées ou indépendantes au moment de l'accouchement (pour cause
d'incapacité de travail ou de chômage), le législateur a eu en vue la perte
du statut de salariée ou d'indépendante. Le texte légal fait en effet
référence aux femmes qui, pour cause d'incapacité de travail ou de chômage
«ne sont pas considérées comme salariées ou indépendantes au moment de
l'accouchement» («im Zeitpunkt der Niederkunft nicht Arbeitnehmerinnen oder
Selbstständigerwerbende sind»; «al momento del parto non sono salariate o
indipendenti» selon les versions allemande et italienne). Cette délégation
repose sur l'idée qu'il serait choquant, dans certains cas, d'exclure une
femme du cercle des ayants droit du seul fait qu'elle n'exerçait aucune
activité lucrative au moment de l'accouchement. C'est dans cette optique que
le législateur a chargé le Conseil fédéral de prévoir des exceptions, tout en
relevant que celles-ci ne sauraient être admises qu'en faveur de femmes
réputées n'exercer aucune activité à ce moment, parce qu'elles seraient au
chômage ou en arrêt de travail pour des raisons inhérentes à leur état de
santé; les intéressées doivent cependant bénéficier d'un revenu de
substitution (rapport précité de la CSSS-N, FF 2002 7020). Ces exceptions
valent tout spécialement pour les femmes qui perdent leur emploi avant ou
pendant la grossesse, par exemple en cas de démission, en raison de la fin
d'un contrat de durée déterminée, d'un licenciement
pendant le temps d'essai
ou encore d'un licenciement pour juste motif (Bruchez, loc. cit., p. 255).

4.4 La condition d'un revenu de substitution au moment de l'accouchement
n'est pas posée par la loi, pour laquelle l'élément décisif réside dans le
statut professionnel de la mère. Au moyen de la délégation de l'art. 16b al.
3 LAPG, le législateur a voulu étendre le cercle des personnes protégées par
rapport aux conditions posées à l'art.16b al. 1 LAPG et non le limiter. En
dépit des conditions en apparence plus strictes posées par l'art. 30 al. 1 de
l'ordonnance, cette disposition doit s'interpréter conformément à la loi.
Cette interprétation ne permet pas de subordonner le droit à l'allocation à
l'exigence que la femme exerçant une activité indépendante obtienne un gain
de substitution si elle se trouve passagèrement en incapacité de travail au
moment de l'accouchement. L'intention du Conseil fédéral n'était du reste
pas de limiter dans ce sens la portée de la loi. Dans son commentaire sur les
modifications du RAPG (sous
http://www.bsv.admin.ch/aktuell/presse/2004/f/0411240101.pdf; ad art. 30
RAPG, p. 7), le Conseil fédéral a exposé ce qui suit à propos de l'art. 30
RAPG (mères en incapacité de travail):
«La délégation de compétence conférée au Conseil fédéral ne vaut pas
seulement pour les mères au chômage, mais également pour celles qui sont en
incapacité de travail pour des motifs de santé. Par conséquent, il est prévu
que ces dernières puissent prétendre à l'allocation de maternité si, ayant dû
renoncer à l'exercice de leur activité lucrative pour cause de maladie ou
d'accident, elles bénéficient au moment de l'accouchement d'une indemnité
journalière de l'AI ou d'indemnités pour perte de gain en cas de maladie ou
d'accident d'une assurance sociale ou privée, indépendamment de la
continuation d'un rapport de travail.

Peuvent en outre également prétendre à l'allocation les mères en incapacité
de travail pour cause de maladie ou d'accident qui n'ont pas droit à une
indemnité journalière mais bénéficiaient encore d'un rapport de travail
valable lors de l'accouchement tout en ayant épuisé leur droit à la poursuite
du versement du salaire à ce moment».
Sur la base de ces explications, il apparaît que le Conseil fédéral a voulu
régler des situations où la mère a été contrainte de renoncer à son activité
lucrative pour une des causes mentionnées. Il a eu principalement en vue les
salariées qui ont perdu leur emploi à la suite d'une incapacité de travail.
Il a prévu une exception à la condition du revenu de substitution pour les
femmes qui ont épuisé leur droit au salaire mais qui bénéficient d'un rapport
de travail au moment de l'accouchement. Transposée à l'activité lucrative
indépendante, l'éventualité envisagée est donc celle de la femme qui a été
obligée de renoncer durablement à son activité pour raison d'incapacité de
travail et qui, de ce fait, n'est plus réputée indépendante au regard de
l'AVS. Une brève période de maladie ne peut pas s'interpréter comme une
renonciation à exercer une activité indépendante. Dans ce cas, on ne saurait
exiger l'obtention d'un revenu de substitution au moment de l'accouchement.

4.5 Au demeurant, l'activité indépendante s'accompagne par définition d'une
grande liberté d'organisation dans le travail. Une interruption de travail ne
permet pas toujours d'établir ce qui relève de la maladie ou de la simple
convenance personnelle. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le
législateur a opté pour le critère du statut au regard de l'AVS. Par
ailleurs, les indépendants ne sont pas soumis à une obligation d'assurance
pour perte de gain en cas de maladie ou d'accident. Si une telle assurance
est conclue, le versement de l'indemnité souscrite est souvent soumise à un
délai d'attente. En règle ordinaire, une brève période d'incapacité de
travail avant l'accouchement n'est donc pas indemnisée. Exiger dans cette
hypothèse un revenu de substitution aurait pour conséquence d'exclure un
nombre important de femmes du cercle des personnes protégées. Cela irait à
l'encontre du but premier de la loi qui est de permettre à toutes les femmes
exerçant une activité lucrative qui le désirent d'avoir des enfants tout en
restant dans le monde du travail (cf. Bruchez, loc. cit., p. 247).

5.
En l'espèce, il est établi que la recourante souffrait d'importantes
lombalgies dans les semaines qui ont précédé son accouchement. En l'absence
de tout indice d'une renonciation à exercer une activité indépendante à
partir du mois d'août 2005, on doit conclure que cette affection est la seule
cause de la suspension de son activité professionnelle à partir de cette
date. Aussi doit-on admettre que l'incapacité de travail n'a pas en même
temps entraîné la perte de son statut d'indépendante. Le fait que l'assurée
n'était pas au bénéfice d'un revenu de substitution au moment de
l'accouchement n'est ainsi pas déterminant. Il en va de même de la
circonstance qu'elle n'a pas produit un certificat attestant une incapacité
de travail et qu'elle n'a pas déclaré de périodes d'incapacité de travail
pour cause de maladie dans sa demande d'allocation. A ce propos, les
explications fournies par la recourante dans son opposition sont tout à fait
crédibles. De plus, il est compréhensible qu'une femme exerçant une activité
para-médicale qui implique, comme en l'espèce, certains efforts physiques ou
des mouvements inconfortables, considère d'elle même comme contre-indiqué de
travailler jusqu'au terme de sa grossesse, sans pour autant avoir le
sentiment subjectif de subir une incapacité de travail pour cause de maladie.

6.
En conclusion, c'est à tort que l'administration et les premiers juges ont
retenu que la recourante n'était pas réputée exercer une activité
indépendante au moment de l'accouchement. Il convient dès lors d'annuler le
jugement attaqué, ainsi que la décision sur opposition, et de renvoyer la
cause à la caisse de compensation pour qu'elle examine si les conditions du
droit - non examinées ici - à l'allocation sont réalisées et qu'elle rende
une nouvelle décision.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement du Tribunal administratif de la
République et canton de Neuchâtel du 4 juillet 2006, ainsi que la décision de
la Caisse cantonale neuchâteloise de compensation du 21décembre 2005, sont
annulés.

2.
La cause est renvoyée à la Caisse cantonale neuchâteloise de compensation
pour nouvelle décision au sens des motifs.

3.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

4.
La Caisse cantonale neuchâteloise de compensation versera à la recourante une
indemnité de 2'500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de
dépens pour la procédure fédérale.

5.
Le Tribunal administratif de la République et canton de Neuchâtel statuera
sur les dépens de la procédure cantonale au regard de l'issue du litige
devant l'instance fédérale.

6.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal administratif de la
République et canton de Neuchâtel et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 29 novembre 2006

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la Ire Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : E.2/06
Date de la décision : 29/11/2006
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 16b al. 1 let. c et al. 3 let. b LAPG; art. 30 RAPG: Droit àl'allocation de maternité en faveur d'une mère en incapacité de travail. Selon une interprétation conforme à la loi de l'art. 30 al. 1 let. a RAPG,une femme exerçant une activité indépendante qui était passagèrement enincapacité de travail au moment de la naissance a droit à l'allocation dematernité, même si elle ne bénéficie pas d'un revenu de substitution(consid. 4).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-11-29;e.2.06 ?
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