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23/11/2006 | SUISSE | N°1P.663/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 23 novembre 2006, 1P.663/2006


{T 0/2}1P.663/2006 /col Arrêt du 23 novembre 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président,Nay et Reeb.Greffière: Mme Truttmann. A. ________, agissant par sa mère B.________,B.________,recourants,tous deux représentés par Me Isabelle Jaques, avocate, contre Président du Tribunal d'arrondissement de Lausanne, Palais de Justice deMontbenon,1014 Lausanne,Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud, route du Signal8, 1014 Lausanne. procédure pénale, LAVI, avocat d'office, recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal d'accusation duTribunal ca

ntonal du canton de Vauddu 28 juillet 2006. Faits: A.Par c...

{T 0/2}1P.663/2006 /col Arrêt du 23 novembre 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président,Nay et Reeb.Greffière: Mme Truttmann. A. ________, agissant par sa mère B.________,B.________,recourants,tous deux représentés par Me Isabelle Jaques, avocate, contre Président du Tribunal d'arrondissement de Lausanne, Palais de Justice deMontbenon,1014 Lausanne,Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud, route du Signal8, 1014 Lausanne. procédure pénale, LAVI, avocat d'office, recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal d'accusation duTribunal cantonal du canton de Vauddu 28 juillet 2006. Faits: A.Par courrier du 17 mai 2006, A.________, âgé de 15 ans, agissant par sa mèreB.________ et par l'entremise de Me Isabelle Jaques, a déposé une plaintepénale auprès du Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne(ci-après: le Juge d'instruction) contre le Dr C.________, dermatologue. Il aallégué avoir été l'objet d'attouchements à connotation sexuelle de la partde ce dernier.Par courrier du même jour, Me Isabelle Jaques a sollicité du Juged'instruction sa nomination en qualité d'avocat de A.________, en annexant unformulaire de "demande de désignation d'un avocat en matière de LAVI". B.Par prononcé du 5 juillet 2006, le Président du Tribunal d'arrondissement deLausanne (ci-après: le Président du Tribunal d'arrondissement), appliquantl'art. 7 de la loi vaudoise d'application de la LAVI (LVLAVI), a refusé dedésigner un conseil d'office à B.________, au motif que les faits étaientétablis.Par arrêt du 28 juillet 2006, le Tribunal d'accusation du Tribunal cantonaldu canton de Vaud (ci-après: le Tribunal d'accusation) a rejeté le recoursinterjeté par B.________ et a confirmé le prononcé du 5 juillet 2006. C.Agissant par la voie du recours de droit public, B.________ demande auTribunal fédéral d'annuler l'arrêt rendu par le Tribunal d'accusation le 28juillet 2006 et de renvoyer la cause à cette autorité pour nouvelle décisiondans le sens des considérants. Subsidiairement, elle demande au Tribunalfédéral de réformer l'arrêt précité en ce sens qu'un avocat d'office lui estdésigné en la personne de Me Isabelle Jaques. Elle requiert en outrel'assistance judiciaire.Le Tribunal d'accusation a renoncé à se déterminer et s'est référé auxconsidérants de son arrêt. Le Président du Tribunal d'arrondissement n'a pasnon plus formé d'observations et s'est référé aux pièces du dossier pénal. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recoursqui lui sont soumis (ATF 131 I 57 consid. 1 p. 59). 2.2.1Indépendamment de la loi fédérale du 4 octobre 1991 sur l'aide auxvictimes d'infractions (LAVI, RS 312.5), lorsque la victime entend intervenircomme partie civile dans la procédure pénale contre l'auteur de l'infraction,elle peut demander l'assistance judiciaire gratuite - en particulier ladésignation d'un avocat d'office - en se prévalant de la réglementation dudroit cantonal de procédure à ce sujet, voire directement des garantiesminimales de l'art. 29 al. 3 Cst. D'après la jurisprudence du Tribunalfédéral, ce n'est qu'à titre subsidiaire qu'on applique l'art. 3 al. 4 LAVIs'agissant de la désignation d'un avocat et de la prise en charge des fraisde la défense (ATF 131 II 121 consid. 2.3 p. 126 s.). Le refus del'assistance judiciaire cantonale ne dispense pas d'examiner si lesconditions posées par la LAVI sont réunies. L'octroi d'un avocat d'office etla prise en charge des frais en résultant sur la base de l'art. 3 al. 4 LAVI,qui requiert une appréciation de la "situation personnelle de la victime",n'est en effet pas nécessairement soumise à des conditions aussi restrictivesque l'octroi de l'assistance judiciaire gratuite, notamment quant aucaractère décisif des ressources de l'intéressé (ATF 131 II 121 consid. 2.3p. 126 s.; 122 II 315 consid. 4c p. 323; Eva Weishaupt, Finanzielle Ansprüchenach Opferhilfegesetz, RSJ 98/2002 322, p. 352 s.).2.2 En l'espèce, la recourante s'était limitée à requérir un avocat d'officedans le cadre de la LAVI. La décision attaquée se fonde dès lors sur l'art. 3al. 4 LAVI pour rejeter cette requête. Il est cependant également préciséque l'art. 104 al. 2 du code de procédure pénale vaudois (CPP/VD), relatif audéfenseur d'office, prévoit les mêmes critères que la LAVI. Un refus del'assistance judiciaire gratuite ressort donc implicitement de l'arrêtlitigieux. 3.3.1Quand bien même la recourante invoque l'art. 29 al. 3 Cst., elle ne seplaint toutefois pas d'une violation du droit à l'assistance judiciairegaranti par cette disposition, mais d'une mauvaise application des art. 3 al.4 LAVI et 7 de la loi vaudoise d'application de la LAVI (LVLAVI), étantprécisé que ce droit cantonal d'exécution est dénué de toute portéeindépendante (arrêt 1P.221/2006 du 20 juin 2006 consid. 1.1; PeterGomm/Dominik Zehntner, Kommentar zum Opferhilfegesetz, Berne 2005, ad art. 3n. 60, p. 73). Le recours doit par conséquent être traité comme recours dedroit administratif, dont il remplit les conditions de recevabilité. 3.2 Selon l'art. 97 OJ, le recours de droit administratif est en effetrecevable contre les décisions au sens de l'art. 5 PA. En tant que l'arrêtattaqué rejette les prétentions de la recourante tendant à la désignationd'un avocat d'office et à la prise en charge de ses frais au sens de l'art. 3LAVI, il entre dans cette catégorie. Il émane d'une autorité cantonale dedernière instance. La cause ne relève pas des exceptions prévues aux art. 99ss OJ (ATF 123 II 548 consid. 1b/bb p.550). L'art. 106 OJ dispose que ledélai de recours est de dix jours contre les décisions incidentes. Le refusd'octroyer l'assistance judiciaire constitue une telle décision, susceptiblede causer un préjudice irréparable (arrêt 1P.644/1993 du 17 mai 1995 consid.1b non publié à l'ATF 121 II 209). L'inobservation du délai en l'espèce nedoit toutefois pas porter préjudice à la recourante, l'indication de la voieet du délai de recours faisant défaut dans la décision attaquée (art. 107 al.3 OJ). La recourante, assimilée à une victime au sens de l'art. 2 al. 2 let.a LAVI, a qualité pour agir selon l'art. 103 let. a OJ. Toutes les autresconditions de recevabilité du recours de droit administratif sont au surplusremplies. 4.4.1En vertu de l'art. 3 al. 4 LAVI, les centres de consultation prennent àleur charge les frais d'avocat notamment, lorsque "la situation personnellede la victime le justifie". Selon la jurisprudence, l'état de besoin de lavictime doit s'analyser comme un tout (ATF 122 II 315 consid. 4c p. 323).L'élément financier n'est dès lors pas à lui seul décisif, et toutes lescirconstances personnelles doivent être examinées (Peter Gomm/DominikZehnter, op. cit, ad art. 3 n. 37, p. 65).Parmi les critères qu'il convient de prendre en considération dans ce cadre,figure en particulier la difficulté des questions de droit ou de fait de lacause (ATF 123 II 548 consid. 2b p. 551 s.; Peter Gomm/Dominik Zehnter, op.cit., ad art. 3 n. 61, p. 73). 4.2 En l'espèce, l'autorité cantonale a jugé que la cause ne présentaitaucune difficulté de fait ou de droit, le prévenu s'étant expliqué sur lesfaits qui lui étaient reprochés. Le Président du Tribunal d'arrondissementavait également considéré que les faits étaient établis.Les autorités cantonales perdent cependant de vue que si le prévenu a certesadmis avoir touché le sexe du fils de la recourante, il a en revancheexpliqué que ce geste était nécessaire pour vérifier que l'antibiotiqueadministré au jeune homme, qui peut provoquer des lésions au niveau desparties génitales, n'avait pas un tel effet secondaire dans le casparticulier. Force est de constater que la cause présente donc bien unecertaine difficulté au niveau des faits, dans la mesure où deux thèsescontradictoires s'affrontent.L'établissement des faits est du reste souvent délicat en matièred'infractions sexuelles, puisqu'il n'existe en principe pas de témoin, commec'est le cas en l'espèce. La phase de l'instruction est donc décisive pour lesort de la cause. Or, le rapport de force risque d'être déséquilibré, lesdéclarations d'un adolescent se heurtant à celles d'un médecin. A celas'ajoute enfin le fait que la charge émotionnelle rend la position de larecourante délicate.Dans ces conditions, il ne saurait être retenu que la cause ne présenteaucune difficulté. Le grief doit dès lors être admis. Il n'en résultecependant pas nécessairement la désignation d'un avocat d'office à larecourante. En effet, il résulte de l'arrêt attaqué que l'autorité cantonalene s'est prononcée que sur le critère de la difficulté de la cause. Or, lasituation de la victime doit être analysée globalement (cf. consid. 4.1).L'autorité cantonale est donc invitée à procéder à un tel examen. 5.Le recours, traité comme recours de droit administratif, doit ainsi êtreadmis, ce qui rend sans objet la demande d'assistance judiciaire formulée parla recourante pour la procédure fédérale. Le canton de Vaud, qui succombe,est dispensé des frais judiciaires (art. 156 al. 2 OJ). Il versera enrevanche une indemnité de dépens à la recourante, qui obtient gain de causeavec l'assistance d'un avocat (art. 159 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours de droit public, traité comme recours de droit administratif, estadmis et l'arrêt attaqué annulé. La cause est renvoyée au Tribunald'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud pour nouvelle décision. 2.Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire. 3.Le canton de Vaud versera à la recourante une indemnité de 1'500 fr. à titrede dépens. 4.La demande d'assistance judiciaire est sans objet. 5.Le présent arrêt est communiqué en copie à la mandataire des recourants, auPrésident du Tribunal d'arrondissement de Lausanne et au Tribunald'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud. Lausanne, le 23 novembre 2006 Au nom de la Ire Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.663/2006
Date de la décision : 23/11/2006
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-11-23;1p.663.2006 ?
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