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17/11/2006 | SUISSE | N°4C.281/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 novembre 2006, 4C.281/2006


{T 0/2}4C.281/2006 /ech Arrêt du 17 novembre 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, président, Klett et Favre.Greffière: Mme Cornaz. A. ________,défendeur et recourant, représenté par Me Jean-François Marti, contre B.________,C.________,demandeurs et intimés,tous deux représentés par Me François Zutter. contrat de bail; contestation du loyer initial; fixation dudit loyer recours en réforme contre l'arrêt de la Chambred'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève du 12 juin 2006. Faits: A.A. ________ a loué à B.________ et C.________ un appartement de cinq

piècespour une durée de cinq ans dès le 1er avril 2003, pour un ...

{T 0/2}4C.281/2006 /ech Arrêt du 17 novembre 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, président, Klett et Favre.Greffière: Mme Cornaz. A. ________,défendeur et recourant, représenté par Me Jean-François Marti, contre B.________,C.________,demandeurs et intimés,tous deux représentés par Me François Zutter. contrat de bail; contestation du loyer initial; fixation dudit loyer recours en réforme contre l'arrêt de la Chambred'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève du 12 juin 2006. Faits: A.A. ________ a loué à B.________ et C.________ un appartement de cinq piècespour une durée de cinq ans dès le 1er avril 2003, pour un loyer annuel de21'480 fr., indexable, et avec une clause de renouvellement tacite de cinqans en cinq ans. L'avis de fixation du loyer initial indiquait que leprécédent loyer s'élevait à 20'640 fr. depuis le 1erseptembre 2000.L'adaptation, à 21'480 fr., était déterminée en fonction des loyers usuelsd'objets comparables dans le quartier.Le 16 avril 2003, les locataires ont signalé au propriétaire quelques défautsnon mentionnés sur l'état des lieux, qu'ils avaient reçu le 31mars 2003. B.Le 17 avril 2003, B.________ et C.________ ont saisi la Commission deconciliation en matière de baux et loyers du canton de Genève d'une requêteen contestation du loyer initial tendant notamment à ce que celui-ci soitfixé à 15'456 fr. par an, charges non comprises. Ils exposaient quel'immeuble était en général mal entretenu et que les locaux loués n'avaientpas été rafraîchis à leur entrée en jouissance. Non conciliée, la cause a été portée devant le Tribunal des baux et loyersqui, par jugement du 6 septembre 2005, a fixé le loyer à 17'460fr. par an,charges non comprises, en ordonnant le remboursement du loyer trop perçu etla réduction proportionnelle de la garantie bancaire. En particulier, leTribunal a considéré qu'il ne fallait pas s'en tenir aux loyers payés par leprécédent locataire.Saisie par le bailleur et statuant par arrêt du 12 juin 2006, la Chambred'appel en matière de baux et loyers a rejeté l'appel. Elle a notammentretenu que, s'agissant de fixer le loyer initial régulièrement notifié dansune formule officielle, son contrôle devait être opéré par le calcul durendement de la chose louée en application de l'art. 269 CO. Dès lors quecelui-là faisait apparaître comme abusif le loyer payé par le précédentlocataire, il n'était pas possible de maintenir ce dernier, sauf à violer larègle claire de l'art. 269 CO. C.A.________ (le défendeur) interjette un recours en réforme au Tribunalfédéral. Il conclut à la fixation du loyer annuel de l'appartement litigieuxà 20'640 fr., charges non comprises, avec suite de frais et dépens. B. ________ et C.________ (les demandeurs) proposent le rejet du recours,sous suite de frais et dépens. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.1.1 Interjeté par le défendeur, qui n'a pas obtenu le déboutement total desdemandeurs de leurs conclusions en contestation du loyer initial, et dirigécontre une décision finale rendue en dernière instance par un tribunalsupérieur (art. 48 al. 1 OJ), le recours en réforme soumis à l'examen duTribunal fédéral est en principe recevable, puisqu'il a été déposé en tempsutile compte tenu des féries (art. 34 al. 1 let. b et 54 al. 1 OJ) et dansles formes requises (art. 55 OJ). S'agissant d'un contrat de bail reconductible tacitement, soit de duréeindéterminée (ATF 114 II 165 consid. 2b), la valeur litigieuse déterminantedoit être calculée en fonction de la baisse requise, fixée annuellement etmultipliée par vingt (art. 36 al. 5 OJ; cf. arrêt 4C.169/2002 du 16 octobre2002, reproduit in Pra 2003 n. 124 p.661, consid. 1.1). En l'occurrence, ladifférence entre le montant contesté et celui retenu est de 3'180 fr. par an,ce qui établit la valeur litigieuse à 63'600 fr., de sorte que le seuil de8'000 fr. ouvrant la voie du recours en réforme (art. 46 OJ) est largementatteint. 1.2 Saisi d'un tel recours, le Tribunal fédéral conduit son raisonnementjuridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moinsque des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées,qu'il faille rectifier des constatations reposant sur une inadvertancemanifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou compléter les constatations de l'autoritécantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents,régulièrement allégués et clairement établis (art. 64OJ). Dans la mesure oùla partie recourante présente un état de fait qui s'écarte de celui contenudans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une desexceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenircompte (ATF 130 III 102 consid. 2.2 p.106, 136 consid. 1.4). Il ne peut êtreprésenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyensde preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours en réforme n'estdonc pas ouvert pour remettre en cause l'appréciation des preuves et lesconstatations de fait qui en découlent (ATF 130 III 136 consid. 1.4; 129III618 consid.3). 1.3 Au surplus, la juridiction de réforme ne peut aller au-delà desconclusions des parties; en revanche, elle n'est liée ni par les motifsdéveloppés par celles-ci (art. 63 al. 1 OJ; ATF 130 III 136 consid.1.4; 128III 411 consid. 3.2.2 p. 415), ni par l'argumentation juridique adoptée parla cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ; ATF 130 III 136 consid. 1.4; 128 III 22consid. 2e/cc p. 29). 2.En un seul moyen, longuement développé, le défendeur fait grief à la courcantonale d'avoir violé l'art. 270 CO, en ce sens qu'elle ne pouvait pasfixer un loyer initial inférieur au montant payé par le précédent locataire,ce que cette disposition légale prohiberait. Pour l'essentiel, le défendeurfonde son raisonnement sur l'avis de doctrine de Maryse Jornod (cf. Jornod,La limite inférieure de la diminution du loyer initial lors du changement delocataire, Cahiers du bail [CdB] 2005 p. 1 ss). 2.1 Dans le cas particulier, le principe du calcul du rendement de la choselouée en application des art. 269 et 269a CO, auxquels renvoie l'art. 270 al.1 CO, n'est plus contesté en instance fédérale. Le seul problème devantdésormais être tranché demeure celui de savoir si la contestation du loyerinitial permet de le fixer en deçà du montant payé par le précédentlocataire. 2.2 En l'espèce, le bailleur a régulièrement notifié un avis de fixation duloyer initial, qui ouvre le droit pour le locataire de le faire contrôlerpour établir s'il est abusif ou non, en application des art. 269 et 269a CO.Or, une telle opération s'opère par le calcul du rendement de la chose louée,selon la méthode dite absolue, qui n'implique aucune référence au loyerantérieur payé par le précédent locataire. Celle-ci n'intervient que dansl'hypothèse de l'art. 270 al. 1 let. b CO, lorsque le bailleur a sensiblementaugmenté le loyer initial pour la même chose par rapport au précédent loyer,ce qui n'est pas le cas présentement dans la mesure où le loyer annuel apassé de 20'640 fr. à 21'480fr., soit une majoration de 3,9%.De même, comme l'a relevé la cour cantonale, la présente espèce ne traite pasd'un cas de nullité partielle, dans lequel le juge jouit d'un large pouvoird'appréciation pour la fixation du nouveau loyer, qui peut inclure laréférence "à la hauteur du loyer payé par le locataire précédent" (cf. ATF120 II 341 consid. 6c p. 351).Outre que la référence au précédent loyer n'a aucun sens dans le cadre del'application de la méthode absolue, elle pourrait se révéler contraire àl'objectif constitutionnel et légal de protection des locataires contre lesabus, si le loyer précédemment payé était déjà abusif ou le deviendrait, à lasuite d'une diminution des coûts, par exemple (cf.ATF 120 II 341 consid. 6ap. 350). De plus, comme un tel mode de faire serait particulièrementaléatoire et dépendant de circonstances extérieures aux parties au contrat,le respect du principe de la bonne foi entre les cocontractants ne permet pasde le prendre en considération. Ainsi, le nouveau locataire n'a pas à subirle loyer arrêté en fonction de circonstances propres au précédent locataire,notamment lorsque ce dernier avait les moyens de payer un montant que lecalcul de rendement ne justifierait pas, par exemple lorsqu'il louait l'objetpour une période limitée, même à un prix trop élevé, ou que son loyer étaitpayé en tout ou en partie par un tiers, notamment par l'employeur dans le casdu logement du personnel expatrié, d'une entreprise multinationale, ou encoreparce que le locataire avait d'autres rapports de droit avec le bailleur, quil'amenait à négliger la recherche du juste prix de son logement.Dans sa majorité, la doctrine estime que la fixation du loyer initial netrouve pas de limite inférieure dans le loyer dû par le précédent locataire(cf. les références citées par Fetter, La contestation du loyer initial:étude de l'article 270 CO, Berne 2005, n. 502 p.230). Ce dernier auteurcritique la position isolée retenue par Maryse Jornod, selon laquelle leloyer initial ne peut être fixé en deçà du dernier loyer payé par l'ancienlocataire, position qui reviendrait à remettre en vigueur un système desurveillance des loyers, abandonné depuis le 1er juillet 1990. Pour celui-là,le locataire peut faire usage de son droit de contestation même si le loyern'a pas changé par rapport à celui du précédent preneur et si son montantdoit être réduit en cas de rendement excessif, ce qui entraîne commeconséquence la possibilité de fixer un loyer à un niveau inférieur à celuipayé par le précédent locataire. L'interprétation littérale de l'art. 270 al.1 let. a CO conduisait au même résultat, ainsi que la recherche téléologique,puisque la contestation initiale a pour finalité de vérifier si le loyer estabusif ou non, selon la méthode objective, et non pas par rapport à un loyerpayé antérieurement par un tiers. Seule cette possibilité de contrôle duloyer permet de trancher sur son caractère éventuellement abusif,conformément à l'objectif constitutionnel et légal de protection deslocataires, ce qui entraîne comme conséquence la possibilité d'arrêter unmontant du loyer inférieur à celui supporté par le précédent preneur de bail(cf. Fetter, op. cit., n. 505 à 509 p. 231 à 233).Pour l'essentiel, ces considérations rejoignent celles évoquées dans lajurisprudence du Tribunal fédéral, notamment l'ATF 120 II 341 consid. 6a, bet c. Dans ces conditions, le grief de violation de l'art. 270 CO par la courcantonale s'avère infondé et doit être écarté, ce qui entraîne le rejet durecours et, implicitement, la confirmation de l'arrêt entrepris. 3.Compte tenu de l'issue du litige, les frais et dépens seront mis à la chargedu défendeur, qui succombe (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge du défendeur. 3.Le défendeur versera aux demandeurs, créanciers solidaires, une indemnité de3'500 fr. à titre de dépens. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des par-ties et à laChambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève. Lausanne, le 17 novembre 2006 Au nom de la Ire Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.281/2006
Date de la décision : 17/11/2006
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-11-17;4c.281.2006 ?
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