{T 0/2}1P.730/2006 /col Arrêt du 14 novembre 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président,Aemisegger et Reeb.Greffière: Mme Angéloz. A. ________,recourant, représenté par Me Isabelle Poncet Carnicé, avocate, contre Procureur général du canton de Genève,case postale 3565, 1211 Genève 3,Cour de justice du canton de Genève, Chambre d'accusation, case postale 3108,1211 Genève 3. détention préventive, recours de droit public contre l'ordonnance de la Cour de justice du cantonde Genève du 29 septembre 2006. Faits: A.A. ________, ressortissant ivoirien né en 1982, a été arrêté le 4 juin 2006 àGenève. Dans un premier temps, il a été inculpé de viol, puis de complicitéde viol et de tentative de viol.Cette inculpation repose, en substance, sur les faits suivants. Durant lasoirée du 1er juin 2006, A.________ s'est rendu dans une discothèque pour yretrouver des amis. Vers 3 heures, le 2 juin 2006, il a rejoint un comparsedans les toilettes de l'établissement. A cet endroit, il se serait tenudevant la porte de l'une des cabines, en parlant à son comparse, pendant quece dernier faisait subir l'acte sexuel par la contrainte à B.________ àl'intérieur de la cabine où il l'avait enfermée. Quelques minutes plus tard,lorsque son comparse est sorti de la cabine, il y aurait pénétré à son touret, baissant son pantalon, aurait tenté de violer B.________, interrompanttoutefois ses agissements à raison des cris de la victime.La détention de A.________ a été prolongée, pour trois mois, le 9 juin 2006,puis à nouveau le 8 septembre 2006. B. Le 20 septembre 2006, A.________ a sollicité sa mise en libertéprovisoire.Par ordonnance du 21 septembre 2006, le Juge d'instruction a admis larequête, à condition que l'intéressé dépose son permis N et ses éventuelspapiers d'identité ivoiriens. Il a admis l'existence de charges suffisantesde complicité et de tentative de viol, mais a estimé que les besoins del'instruction, vu les investigations menées, ne justifiaient plus un maintienen détention, relevant toutefois que divers témoins devaient encore êtreentendus. Quant au risque de fuite, certes existant, les conditions fixées àla mise en liberté devraient permettre de le prévenir.Sur opposition du Ministère public, le dossier a été transmis à la Chambred'accusation, qui, par ordonnance du 29 septembre 2006, a refusé la mise enliberté provisoire de A.________, considérant, en bref, qu'il existait descharges suffisantes et graves ainsi qu'un risque de fuite important, auquelil ne pourrait être pallié par le simple dépôt du permis N de l'intéressé. C.A.________ forme un recours de droit public au Tribunal fédéral, pourviolation de son droit à la liberté personnelle. Il conclut à l'annulation dela décision attaquée et à sa mise en liberté provisoire, en sollicitantl'assistance judiciaire.Le Ministère public conclut au rejet du recours, sans formulerd'observations. L'autorité cantonale se réfère à sa décision.Ces déterminations ont été communiquées au recourant, qui a indiqué n'avoirpas d'observations à formuler. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Par exception à la nature cassatoire du recours de droit public, laconclusion du recourant tendant à ce que le Tribunal fédéral ordonne salibération provisoire est recevable (ATF 124 I 327 consid. 4b/aa p.333). 2.Le recourant se plaint d'une violation de son droit à la liberté personnelle,découlant de la Cst., de la CEDH et du Pacte ONU II; dans ce contexte, il seréfère également à l'art. 154 du code de procédure pénale genevois (CPP/GE).Il conteste l'existence de charges suffisantes et d'un risque de fuite. 2.1 Selon l'art. 154 CPP/GE, la mise en liberté ne peut être refusée que sila gravité de l'infraction l'exige (let. a), les circonstances font penserqu'il y a un danger de fuite, de collusion, de nouvelle infraction (let. b),l'intérêt de l'instruction l'exige (let. c).Le recourant ne prétend pas que cette disposition lui accorderait uneprotection plus étendue que celle qui, s'agissant d'un maintien en détention,peut être déduite de la liberté personnelle garantie par l'art. 10 al. 2Cst., par rapport auquel les art. 5 CEDH et 9 du Pacte ONU II n'ont pas deportée distincte. Il ne présente d'ailleurs pas d'argumentation différente àl'appui. Il suffit donc d'examiner le grief sous l'angle de l'art. 10 al. 2Cst. 2.2 Le maintien d'une personne en détention est compatible avec la libertépersonnelle garantie par l'art. 10 al. 2 Cst., pour autant qu'il repose surune base légale claire, soit ordonné dans l'intérêt public et respecte leprincipe de la proportionnalité (art. 36 al. 1 à 3 Cst.; ATF 123 I 268consid. 2c p. 270; 114 Ia 281 consid. 3 p. 283; 107 Ia 148 consid. 2 p. 149;106 Ia 277 consid. 3a p. 281 et les arrêts cités). Il postule l'existence decharges suffisantes (ATF 116 Ia 143 consid. 3 p. 144) et doit être justifiépar les besoins de l'instruction et du jugement ou la sauvegarde de l'intérêtpublic à prévenir un risque de fuite, de collusion ou de réitération (ATF 124I 336 consid. 4c p. 340). Sa conformité au principe de la proportionnalitéimplique que sa durée ne dépasse pas celle de la peine privative de libertéqui pourrait, le cas échéant, être prononcée (ATF 126 I 172 consid. 5a p.176/177 et les arrêts cités).L'exigence de charges suffisantes suppose qu'il existe à l'encontre del'intéressé des indices sérieux de culpabilité, c'est-à-dire des raisonsplausibles de soupçonner qu'il a commis une infraction. A cet égard, le lejuge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments àcharge ou à décharge et à apprécier la crédibilité des déclarationsrecueillies; il doit uniquement vérifier l'existence de soupçons raisonnablesde culpabilité (cf. arrêt 1S.1/2006 consid. 3.2). Les exigences quant àl'intensité des charges propres à justifier un maintien en détention ne sontpas les mêmes aux divers stades de l'instruction pénale; alors que, dans lespremiers temps de l'enquête, des soupçons encore peu précis peuvent êtresuffisants, la perspective d'une condamnation doit apparaître vraisemblableaprès l'accomplissement des actes d'instruction envisageables (ATF 116 Ia 144consid. 3c p. 146).Un maintien en détention à raison d'un risque de fuite suppose que ce risqueexiste concrètement. Celui-ci ne peut être déduit uniquement de la gravité del'infraction suspectée, même si, compte tenu de l'ensemble des circonstances,la perspective d'une importante peine privative de liberté permet souventd'en présumer l'existence. Il doit s'analyser en fonction d'un ensemble decritères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources,ses contacts à l'étranger et ses liens avec l'Etat qui le poursuit (ATF 125 I60 consid. 3a p. 62 et les arrêts cités). Lorsqu'elle admet l'existence d'unrisque de fuite, l'autorité doit en outre examiner s'il ne peut être contenupar une mesure moins rigoureuse (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62; 123 I 268consid. 2c p. 271; 108 Ia 64 consid. 3 p. 67; 102 Ia 379 consid. 2ap.381/382 et les arrêts cités), telle que le versement d'une caution. 2.3 Le recourant est soupçonné de complicité et de tentative de viol, soitd'actes de participation et de commencement d'exécution d'une infractiongrave, ce qu'il admet d'ailleurs. Au vu des éléments rassemblés au stadeactuel de l'enquête, qui n'est pas terminée, notamment des déclarationsauxquelles se réfère l'autorité cantonale, il n'est certes pas exclu qu'ilait adopté les comportements dont il est suspecté, sans qu'il y ait lieu,pour le surplus, de procéder ici à une appréciation de la crédibilité desdéclarations faites par les protagonistes. De même, et contrairement à ce quefait surtout valoir le recourant, il n'est pas exclu que les comportementsqui lui sont reprochés puissent tomber sous le coup de la loi pénale, en tantqu'actes de favorisation d'un viol (cf. arrêt 6S.859/2000 consid. 2 et arrêtStr.114/1984 consid. 2 et 3) et de commencement d'exécution d'une telleinfraction (cf. ATF 119 IV 224 consid. 2 p. 227; 117 IV 369 consid. 9 p.383/384; 114 IV 112 consid. 2c/bb p.114). C'est dès lors à juste titre que ladécision attaquée admet l'existence de charges suffisantes. 2.4 Les faits que le recourant est soupçonné d'avoir commis, s'ils devaientêtre retenus à sa charge, l'exposeraient à une peine importante. Certes, unrisque de fuite ne saurait être déduit uniquement de la gravité del'infraction en cause. En l'espèce, compte tenu des circonstances, laperspective de la condamnation qui pourrait être prononcée en fait toutefoisfortement présumer l'existence. Le recourant, qui est célibataire etrequérant d'asile, n'a pas de famille en Suisse, où il n'a d'autre attachequ'une amie suissesse. Comme il l'admet, il n'a en réalité pas de papiersd'identité ivoiriens. En outre, depuis quelque 4 ans qu'il se trouve enSuisse, il a déjà été condamné à plusieurs reprises: en février 2002, à 5mois d'emprisonnement avec sursis pendant 1 an, pour infraction à la loifédérale sur les stupéfiants, puis, en avril 2002, à 20 joursd'emprisonnement, pour infraction à la loi fédérale sur le séjour etl'établissement des étrangers, et, à nouveau, en juin 2003, à 2 moisd'emprisonnement avec sursis pendant 1 an, pour vol, tentative de vol etrupture de ban. Dans ces conditions, on peut sérieusement redouter que lerecourant cherche à se soustraire à la procédure pénale, en quittant le paysou en entrant dans la clandestinité. L'autorité cantonale était dès lorsfondée à retenir l'existence d'un risque de fuite.Pour contenir ce risque, le recourant propose de déposer son permis N et,semble-t-il pour le première fois dans son recours de droit public, des'engager à se présenter aux audiences auxquelles il pourrait être convoqué.Il est cependant, pour le moins, peu vraisemblable que ces mesures puissentsuffire à le dissuader de fuir, face à la perspective d'une peine importante. 2.5 Au reste, le recourant, avec raison, ne prétend pas que la durée de sadétention, compte tenu de la peine encourue, heurterait le principe de laproportionnalité. 2.6 Ainsi, le maintien du recourant en détention ne viole pas la garantie derang constitutionnel qu'il invoque. Le recours doit par conséquent êtrerejeté. Comme ses conclusions étaient d'emblée vouées à l'échec, l'assistancejudiciaire ne peut être accordée (art. 152 al. 1 OJ). Il sera toutefoisrenoncé à la perception de frais. Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.La requête d'assistance judiciaire est rejetée. 3.Il est statué sans frais. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie à la mandataire du recourant, auProcureur général et à la Chambre d'accusation de la Cour de justice ducanton de Genève. Lausanne, le 14 novembre 2006 Au nom de la Ire Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière: