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09/11/2006 | SUISSE | N°I.916/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 09 novembre 2006, I.916/05


Cause {T 7}I 916/05 Arrêt du 9 novembre 2006IIe Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffière :Mme Moser-Szeless R.________, recourante, représentée par Me Alain Schweingruber, avocat,avenue de la Gare 49, 2800Delémont, contre Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura, rue Bel-Air 3, 2350Saignelégier, intimé Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances,Porrentruy (Jugement du 8 novembre 2005) Faits: A.R. ________, domiciliée à B.________, a travaillé comme secrétaire médicaleau Centre X.________ jusqu'au

1erseptembre 2001, date à partir de laquelleelle a été mise e...

Cause {T 7}I 916/05 Arrêt du 9 novembre 2006IIe Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffière :Mme Moser-Szeless R.________, recourante, représentée par Me Alain Schweingruber, avocat,avenue de la Gare 49, 2800Delémont, contre Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura, rue Bel-Air 3, 2350Saignelégier, intimé Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances,Porrentruy (Jugement du 8 novembre 2005) Faits: A.R. ________, domiciliée à B.________, a travaillé comme secrétaire médicaleau Centre X.________ jusqu'au 1erseptembre 2001, date à partir de laquelleelle a été mise en arrêt de travail. Atteinte d'un cancer mammaire bilatéral,elle a subi une mastectomie bilatérale en octobre 2001 et suivi un traitementde chimiothérapie. Elle a été en mesure de reprendre son activité à 25 % dèsle 1er avril 2003, puis à 30 % dès le 2 juin suivant. Après la fermeture del'institut médical qui l'employait, elle s'est retrouvée au chômage à partirdu mois de mars 2004. Entre-temps, le 2 décembre 2002, R.________ avait présenté une demande deprestations de l'assurance-invalidité. Après avoir recueilli divers avismédicaux, l'Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura (ci-après:l'office AI) a confié une expertise au Professeur E.________, médecin-chef dela division de médecine interne de l'Hôpital Y.________. Selon l'expert, lapatiente, qui souffrait d'un cancer du sein bilatéral en rémission complètedepuis deux ans, disposait du point de vue somatique d'une capacité detravail entre 80et 100 % dans son activité de secrétaire médicale (rapportdaté du 6 janvier 2003 [recte 2004]). Le médecin précisait encore qu'enraison de l'état dépressif présenté par l'assurée, celle-ci ne se sentaitcependant pas en mesure de travailler à plus de 30 %; il préconisait parailleurs une évaluation psychiatrique. Compte tenu de ces conclusions,l'office AI a chargé le docteur U.________, psychiatre et psychothérapeute,d'examiner l'assurée. Le spécialiste a diagnostiqué un état de stresspost-traumatique (F41.9) ayant évolué vers une modification durable de lapersonnalité (F62) après diagnostic et traitement curatif d'un cancer dusein, chez une personnalité présentant préalablement une accentuation detraits de personnalité dépendante et émotionnellement instable (Z73.1). Il aconclu qu'en raison de la pathologie post-traumatique, l'assurée étaitincapable de travailler à plus de 40 % d'un horaire normal de secrétairemédicale; par ailleurs, la capacité résiduelle de travail nécessitait unenvironnement professionnel ayant une tolérance pour les variations marquéesdu rendement, l'horaire de travail devant si possible être déterminé parl'intéressée elle-même. Par décision du 6 août 2004, l'office AI a mis R.________ au bénéfice d'unedemi-rente d'invalidité du 1er septembre 2002 au 31décembre 2003, puis d'untrois-quarts de rente dès le 1er janvier 2004, fondés sur un tauxd'invalidité de 60 %. Saisi d'une opposition de l'assurée contre cettedécision, l'office AI l'a rejetée le 12 novembre 2004, après avoir demandédes informations complémentaires au docteur U.________ sur l'horaire detravail exigible (courrier du 21 octobre 2004 de l'expert àl'administration). B.L'assurée a déféré la décision sur opposition du 12 novembre 2004 à laChambre des assurances du Tribunal cantonal de la République et canton duJura qui l'a déboutée par jugement du 8 novembre 2005. En bref, se fondantsur les conclusions des docteurs E.________ et U.________, la juridictioncantonale a retenu que l'intéressée était apte à travailler à 40 % dansl'activité exercée avant la survenance de l'atteinte à la santé, de sorte queson incapacité de gain s'élevait à 60%. C.R.________ interjette un recours de droit administratif contre ce jugement,dont elle demande l'annulation, sous suite de frais et dépens. Elle requiertpar ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire. L'office AI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral desassurances sociales a renoncé à se déterminer. Considérant en droit: 1.La loi fédérale du 16 décembre 2005 modifiant la loi fédérale surl'assurance-invalidité est entrée en vigueur le 1er juillet 2006 (RO20062003), apportant des modifications qui concernent notamment la procédureconduite devant le Tribunal fédéral des assurances (art. 132 al. 2 et 134OJ). Toutefois, le présent cas n'est pas soumis au nouveau droit, du momentque le recours de droit administratif a été formé avant le 1er juillet 2006(ch. II let. c des dispositions transitoires relatives à la modification du16 décembre 2005). 2.Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d'invalidité,singulièrement sur le taux d'invalidité qu'elle présente. A cet égard, lajuridiction cantonale a exposé correctement les dispositions légales et lesprincipes jurisprudentiels en matière d'invalidité et de son évaluation chezles assurés actifs, ainsi que sur l'appréciation des rapports médicaux, sibien qu'on peut renvoyer au jugement entrepris sur ces points. On ajoutera qu'en ce qui concerne l'échelonnement des rentes selon le tauxd'invalidité, l'art. 28 al. 1 et 2 LAI, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31décembre 2003 (RO 1987 p. 449), prévoyait que l'assuré avait droit à un quartde rente s'il était invalide à 40 % au moins, à une demi-rente s'il étaitinvalide à 50 % au moins, et à une rente entière s'il était invalide à 66 2/3% au moins. Depuis le 1er janvier 2004, cette disposition prévoitl'échelonnement des rentes comme suit: un quart de rente pour 40 %d'invalidité au moins, une demi-rente pour 50 % d'invalidité au moins,trois-quarts de rente pour 60 % d'invalidité au moins et une rente entièrepour 70 % d'invalidité au moins. 3.La recourante reproche à la juridiction cantonale d'avoir retenu qu'elledisposait d'une capacité résiduelle de travail de 40 %. A ses yeux, le tauxde 40 % déterminé par le docteur U.________ devrait encore être réduit enfonction du taux d'incapacité de travail de 20 % fixé par le ProfesseurE.________ au regard des limitations sur le plan physique uniquement. Ellefait encore valoir qu'un emploi adapté tel que décrit par le docteurU.________ (avec un horaire déterminé par l'assurée et permettant unrendement variable) n'existe pas sur le marché équilibré du travail. Elle endéduit que sa capacité de gain résiduelle ne saurait dépasser 10 à 20 % aumaximum. 4.4.1Appelé à se prononcer sur la capacité de travail de la recourante, leProfesseur E.________ a expliqué que celle-ci souffrait sur le plan physiquede douleurs au niveau des cicatrices opératoires qui n'avaient cependantqu'une influence «minime» sur son aptitude à travailler. Il concluait queR.________ - qui travaillait au moment de l'expertise à raison de 30 % -était, du point de vue somatique, en mesure d'exercer son activité desecrétaire médicale «à un pourcentage nettement plus élevé (80 %-100 %) quejusqu'à présent», mais ne se sentait pas apte à travailler davantage enraison de ses problèmes psychiques. De son côté, dans son rapport du 24 mai2006, le docteur U.________ a fait état d'une pathologie psychiatrique quilimitait la capacité de travail de la recourante; il estimait qu'«un horairede 40 % par[aissait] raisonnablement exigible actuellement», une augmentationà 50 % étant envisageable à l'avenir pour autant que l'assurée bénéficiât deconditions particulièrement adaptées à ses troubles (travailler seule dans unenvironnement non-bruyant avec la possibilité de gérer elle-même sonhoraire). Au vu de ces conclusions médicales, on ne saurait retenir que la recourantedispose d'une capacité de travail qui serait inférieure à 40% en raisond'une atteinte physique, contrairement à ce qu'elle voudrait. Il ressort eneffet du rapport du docteur E.________ que l'influence des troubles physiquesn'a qu'une répercussion minime sur la capacité de travail - celle-ci étant de80-100 % sur le plan phy-sique-, et que c'est essentiellement lasymptomatologie psychique qui empêche la recourante de mettre à profit sacapacité de travail résiduelle. Il n'y a dès lors pas lieu de s'écarter del'évaluation du docteur U.________, selon laquelle on peut exiger del'assurée qu'elle exerce son activité professionnelle à 40 %. Au demeurant, àsupposer qu'une limitation de la capacité de travail de 20 % sur le planphysique doive être prise en compte, on devrait considérer, au regard desconclusions du docteur E.________ complétées par celles de son confrèrepsychiatre, qu'elle serait déjà couverte par les répercussions des troublespsychiques; les deux rapports médicaux en question ne contiennent aucunindice qui permettrait de retenir que l'atteinte à la santé physiquenécessiterait un allègement supplémentaire du temps de travail, par rapport àl'incapacité de travail de 40 % admise en raison de l'atteinte psychique. 4.2 Quant à l'affirmation de la recourante selon laquelle il n'existerait pasd'emploi sur le marché équilibré du travail qui serait adapté à seslimitations, elle est déjà contredite par la circonstance qu'elle a exercéune telle activité (quoique à un taux de 30 %) jusqu'à la fermeture del'institut qui l'employait. Par ailleurs, au regard des différentes tâchesqu'englobe l'activité de secrétaire (médicale), il ne paraît pas irréalistequ'un marché équilibré du travail propose des postes adaptés à laproblématique de la recourante, dont on peut exiger, selon le docteurU.________ (courrier du 21 octobre 2004), qu'elle travaille un nombred'heures fixe par semaine. 4.3 Dans ces circonstances, les premiers juges ont admis à juste titre uneincapacité de travail de 40 % dans une activité adaptée, à savoir celleexercée par la recourante jusqu'à la survenance de l'atteinte à la santé. Toutefois, contrairement à ce qu'a implicitement retenu la juridictioncantonale à la suite de l'intimé, on ne peut, au regard des périodesd'incapacité de travail attestées par les pièces médicales au dossier,retenir que la recourante était en mesure de mettre à profit sa capacité detravail résiduelle dès le 1er septembre 2002, date à partir de laquelle ledroit à une demi-rente d'invalidité lui a été reconnu. D'une part, le docteurE.________ a fait état de l'évolution de l'incapacité de travail comme suit:100 % du 1er septembre 2001 au 31 mars 2003, 75 % du 1er avril au 1er juin2003, 70 % à partir du 1er juin 2003. Par la suite, le docteur U.________ aattesté d'une incapacité de travail de 60 % à partir de la date del'expertise, le 24 mai 2004 («un horaire de 40 % paraît raisonnablementexigible actuellement»). Aussi, convient-il de retenir qu'après une périoded'incapacité de travail complète (se réduisant progressivement à 70 %), onpouvait raisonnablement exiger de la recourante, vu l'améliorationprogressive de son état de santé depuis l'intervention chirurgicale, qu'ellereprît son activité à raison de 40 % à partir du mois de juin 2004. Comptetenu des effets de l'incapacité de travail sur le plan économique, ils'ensuit que R.________ a droit à une rente entière del'assurance-invalidité, fondée sur un degré d'invalidité de 100 %(respectivement 75, puis 70%) du 1er septembre 2002 au 31 mai 2004. Dès le1er juin suivant, elle a droit à un trois-quarts de rente fondé sur uneincapacité de gain de 60 % (art.88a al. 1 RAI; ATF 125 V 417). Le jugemententrepris doit être réformé en ce sens. Partant, le recours se révèle partiellement bien fondé. 5.Vu la nature du litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ dans sa teneuren vigueur jusqu'au 30 juin 2006). La recourante, qui obtient partiellementgain de cause, a droit à une indemnité de dépens réduite (art. 159 OJ enrelation avec l'art. 135 OJ). Sa demande d'assistance judiciaire est dès lorssans objet. Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est admis en ce sens que le jugement de la Chambre des assurancesdu Tribunal cantonal de la République et canton du Jura du 8 novembre 2005est réformé en ce sens que R.________ a droit à une rente entièred'invalidité du 1er septembre 2002 au 31 mai 2004, puis à un trois-quarts derente à partir du 1er juin 2004. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.L'Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura versera à R.________ lasomme de 1'500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de dépenspour l'instance fédérale. 4.Le Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre desassurances, statuera sur les dépens pour la procédure de première instance auregard de l'issue du procès en dernière instance. 5.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de laRépublique et canton du Jura, Chambre des assurances, et à l'Office fédéraldes assurances sociales. Lucerne, le 9 novembre 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances La Présidente de la IIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.916/05
Date de la décision : 09/11/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-11-09;i.916.05 ?
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