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01/11/2006 | SUISSE | N°4P.187/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 01 novembre 2006, 4P.187/2006


{T 0/2}4P.187/2006 /ech Arrêt du 1er novembre 2006Ire Cour civile MM. les Juges Corboz, Président, Favre et Mathys.Greffier: M. Ramelet. M.________,recourante, représentée par Me Dominique de Weck, contre X.________ SA,intimée, représentée par Me Dominique Burger,Chambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève, casepostale 3108, 1211 Genève 3. garantie du juge impartial, appréciation arbitraire des preuves, recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière debaux et loyers du canton de Genève du 12 juin 2006. Faits: A.A.a Le 20 novembre 1985

, N.________ a remis à bail à Y.________ SA, dontC.________ é...

{T 0/2}4P.187/2006 /ech Arrêt du 1er novembre 2006Ire Cour civile MM. les Juges Corboz, Président, Favre et Mathys.Greffier: M. Ramelet. M.________,recourante, représentée par Me Dominique de Weck, contre X.________ SA,intimée, représentée par Me Dominique Burger,Chambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève, casepostale 3108, 1211 Genève 3. garantie du juge impartial, appréciation arbitraire des preuves, recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière debaux et loyers du canton de Genève du 12 juin 2006. Faits: A.A.a Le 20 novembre 1985, N.________ a remis à bail à Y.________ SA, dontC.________ était administrateur, un magasin d'exposition avec arcadecommerciale, à Genève, que le locataire destinait à l'achat, la vente etl'exposition d'automobiles; le bail commercial était conclu pour une durée de10ans, renouvelable de 5 ans en 5 ans. La faillite de Y.________ SA ayant été déclarée le 9 décembre 1993, deuxnouveaux baux ont été conclus, en remplacement de l'accord précité, entreN.________, en tant que bailleur, et, conjointement, Z.________ SA etM.________, épouse de C.________, en tant que locataires. Le premier contratportait sur la location du magasin d'exposition avec l'arcade commerciale,alors que le second avait trait à une annexe au magasin. Ces baux, passéspour une durée initiale de 5 ans, soit du 1er mars 1994 au 28 février 1999,étaient renouvelables ensuite tacitement d'année en année. Les loyersannuels, sans les charges, avaient été fixés à 74'670 fr. pour le magasind'exposition et à 25'470 fr. pour l'annexe. A.b A une date indéterminée, X.________ SA a acquis les biens-fonds deN.________, auquel elle a succédé dans tous ses droits et obligations debailleur. Par avis officiels du 16 janvier 1998, X.________ SA a résilié les deux bauxpour l'échéance du 28 février 1999; ces congés n'ont pas été contestés parles locataires. Les locataires n'ayant pas restitué les locaux à la fin du bail, X.________SA a déposé une demande d'évacuation. Par accord du 21 juin 1999 intervenudevant le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève, Z.________ SA etM.________ ont pris l'engagement de quitter les locaux au 30 juillet 1999. Par la suite, à une date inconnue, Z.________ SA a été déclarée en faillite. A.c Le 31 juillet 1999, un premier procès-verbal d'état des lieux de sortie aété établi. Sous la rubrique "le locataire reconnaît être responsable desdégâts mentionnés ci-dessous. Il s'engage à payer les travaux de réparationou de remise en état sur simple présentation des factures et devis", lestravaux suivants étaient indiqués :«- Réparer et peindre la devanture, - Nettoyer et décaper le blanc sur les vitrines, - Déposer tous les miroirs contre murs et piliers, - Terminer le démontage du bureau intérieur, - Nettoyer les extérieurs et évacuer deux véhicules, - Démonter paroi bois poster Lémania, - Démonter le bac à sable, - Suite démontage du bureau remettre en état le faux plafond». Ce constat, rédigé par D.________, employé de la régie de la bailleresse, aété signé par le prénommé et par C.________. Il a été retenu que dèsl'instant où les locaux étaient encore occupés le 31 juillet 1999, il étaitentendu que C.________ allait effectuer les travaux susdécrits dans lasemaine suivante.Un second procès-verbal d'état des lieux de sortie a été établi le 2août1999. Ce document, dressé et signé par un autre employé de la régiesusmentionnée, qui constatait l'existence de douze dégâts et énumérait lesréparations à opérer, n'a pas été signé par les locataires. L'employé enquestion a déclaré sous la foi du serment que le 2août 1999 «il n'y avaitpas de gros dégâts ... (mais) des interventions que le locataire sortantdevait effectuer». C. ________ a restitué les clés des locaux le 3 août 1999. Le 4 août 1999, à la requête de la société X.________ SA, l'huissierjudiciaire E.________ a examiné les locaux en cause; il a dressé unprocès-verbal de ses constatations, auquel il a joint 20 photographies encouleur, illustrant ce qui suit:«- l'enlèvement d'un cache-radiateur, - le démontage d'un lavabo, - le démontage, voire l'arrachage d'interrupteurs et de prises électriques, - le démontage, voire l'arrachage de canaux électriques, - les bris des miroirs, - l'arrachage de la moquette, - les bris de vitres, - le descellement partiel du coffre-fort, - les détritus alentour». Le 10 août 1999, X.________ SA, par la plume de son conseil, a avisé leslocataires des défauts ayant fait l'objet du constat d'huissier. A.d Le 19 août 1999, l'entreprise W.________, a remis à la bailleresse unrapport émanant d'un ingénieur électricien sur l'état des installationsélectriques des locaux. Il a été constaté que cet ingénieur électricien arelevé que le 11 août 1999 les installations électriques présentaient uncaractère de dangerosité et que «certaines parties» manquaient, le montantdes réparations électriques étant estimé à un minimum de 12'000 fr. B.B.aAprès l'échec d'une tentative de conciliation, X.________ SA (lademanderesse) a saisi le Tribunal des baux et loyers et requis que M.________(la défenderesse) soit condamnée au paiement de diverses réparations, qu'ellea chiffrées comme il suit: «- Electricité 12'000.00 fr. - Maçonnerie pour marbrier 1'562.00 fr. - Réparation sol carrosserie 700.00 fr. - Marbrier selon facture entreprise Rossi 700.00 fr.- Evacuation de divers déchets 3'222.00 fr. - Démolition socle béton et container 2'257.50 fr. - Réparation porte coulissante carrosserie 1'657.20 fr. - Vitrages divers 4'100.00 fr. - Nettoyages divers 2'900.00 fr. - Hampe pour drapeaux et pose 11'550.00 fr- - Porte du local de lavage 10'560.00 fr. - Peinture et restauration intérieure 39'131.30 fr. - Auvent carrosserie 3'500.00 fr. - Réfection imposte 1'076.00 fr. - Démolition miroirs, parois, bureau et estrade 10'836.00 fr.- Conduite de chantier 5'344.00 fr.- Frais d'expertise électrique 1'769.00 fr. - Frais d'huissier 1'952.50 fr._______________total: 115'956.00 fr.». Ce total est toutefois erroné, l'addition des différents postes de la demandedonnant un total de 114'817 fr.50. M.________ s'est opposée à la demande. Elle a notamment fait valoir que leslocaux au moment de leur restitution étaient dans le même état quelorsqu'elle en avait pris possession 15 ans auparavant et que toutedégradation qui serait survenue relèverait de l'usure normale. De plus, enl'absence d'un état des lieux d'entrée, la comparaison avec l'état des lieuxde sortie ne serait pas possible, de sorte que la demanderesse n'est pas àmême de prouver un quelconque dommage. La défenderesse a formé unereconvention tendant au paiement de 28'802 fr. 75 à titre de solde dechauffage. X. ________ SA a admis la reconvention à concurrence de 10'508 fr.30 etdiminué le montant réclamé initialement, qu'elle a ramené à 112'234 fr., sousdéduction du montant dont elle s'est reconnue débitrice.Le Tribunal des baux et loyers a ordonné des enquêtes. Il en ressort quec'est après le départ de la locataire que des déprédations ont été constatées(bris de miroirs, arrachage d'installations électriques et de moquette,démontage d'un faux-plafond, descellement d'un coffre-fort, sciage de mâtsporte-drapeaux), en sorte que les locaux paraissaient laissés à l'abandon. B.b Par jugement du 13 octobre 2003, le Tribunal des baux et loyers acondamné la défenderesse à payer à la demanderesse 2'657 fr. 20, et, surdemande reconventionnelle de M.________, condamné X.________ SA à lui payer10'508 fr. 30. Saisie d'un appel de la demanderesse, la Chambre d'appel en matière de bauxet loyers du canton de Genève, par arrêt du 5 avril 2004, a annulé lejugement précité et renvoyé la cause au Tribunal des baux et loyers pourcomplément d'instruction. La cour cantonale a jugé que la demanderesse avaitavisé en temps utile les locataires des déprédations constatées, si bienqu'il y avait lieu, contrairement à l'opinion du Tribunal des baux et loyers,d'entrer en matière sur la totalité des dégâts décrits dans la demande. Souscet angle, la Chambre d'appel a relevé que ledit Tribunal n'avait pas procédéà des enquêtes pour déterminer le montant définitif du dommage à réparer entenant compte de l'usure normale des installations pendant la durée du bail,d'où la décision de lui renvoyer la cause. B.c Le Tribunal des baux et loyers a ordonné l'ouverture de nouvellesenquêtes, entendant en particulier sept témoins. Par jugement du 30 novembre 2005, il a considéré que le dommage que ladéfenderesse devait rembourser à la bailleresse se montait à un total de85'106 fr.50, plus intérêts à 5 % l'an dès le 30 novembre 2005, et qu'ilfallait donner acte à la demanderesse de son engagement de verser à sonadverse partie la somme de 10'508 fr.30, la compensation avec le premiermontant étant ordonnée à due concurrence. Cette autorité a retenu que 20 postes de dommage devaient être mis à lacharge de la défenderesse. Il s'agit 1) du sol de l'arcade, 2) du sol dudépôt, 3) des objets laissés par la défenderesse, 4) de la démolition du«socle en béton du local container», 5) de la réparation des portes dulocal carrosserie, 6) du remplacement des vitres détruites, 7) du grattage dela peinture sur les vitres, 8) de la repose des mâts sciés, 9) de lafourniture et pose des deux portes du garage, 10) de la réfection du fauxplafond, la dépose du plafond en bois et la pose d'un faux plafond en plâtre,11) de la réfection des murs, vitrages, radiateurs et maçonnerie du bâtimentA, 12) de la réfection du plafond du bâtiment B, 13) de la réfection desmurs, vitrages, radiateurs et maçonnerie du bâtiment B, 14) de la réfectiondu plafond des WC et du local d'accès du bâtiment B, 15) de la remise en étatdes murs, serrureries, radiateurs et tuyaux du garage, 16) de la réparationd'une imposte abîmée, 17) des travaux de remise en état de l'installationélectrique, 18) de la remise en place de l'auvent de la carrosserie, 19) desfrais de l'entreprise W.________ et 20) de la note d'honoraires de l'huissierjudiciaire E.________. Le Tribunal des baux et loyers, à part les postes 1) «sol de l'arcade» et 15)«remise en état des murs, serrureries, radiateurs et tuyaux du garage», n'apas pris en compte l'usure normale, dans la mesure où les locaux avaient étévolontairement saccagés. B.d Statuant par arrêt du 12 juin 2006 sur l'appel de la défenderesse, laChambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève a confirméle jugement du 30 novembre 2005. En substance, la cour cantonale a considéréque la bailleresse avait indiqué à temps à la locataire les défauts quiavaient été constatés après la remise des locaux et que la défenderessedevait donc indemniser la demanderesse à raison des dégâts dépassant l'usurenormale. Etant donné qu'il avait été établi que la chose louée avait subi desdégradations volontaires après l'établissement des états des lieux de sortie,l'objection de la locataire relative à l'usure normale des locaux constituaitun abus de droit. A supposer qu'il faille entrer en matière sur cetteobjection, a poursuivi la cour cantonale, force serait alors de tenir compteque les premiers juges ont largement pris en compte le facteur de vétusté; ladéfenderesse, en se voyant condamner à payer 85'106 fr.50, a en effetbénéficié d'une erreur de calcul de ces derniers, puisque l'addition correctedes réparations se montait à 94'935 fr.50 (recte: 93'216fr.50). De toutemanière, le Tribunal des baux et loyers a réduit les frais relatifs au sol enmarbre de l'arcade en fonction de la durée de vie de ce sol. Enfin,s'agissant des mâts qui ont été sciés, leur niveau d'usure doit êtreconsidéré «comme total et non conforme à l'usage convenu». C.Parallèlement à un recours en réforme, M.________ forme un recours de droitpublic au Tribunal fédéral contre l'arrêt susmentionné. Elle conclut àl'annulation dudit arrêt et à l'annulation du point 1 du dispositif dujugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 30 novembre 2005. Celafait, elle requiert que le Tribunal fédéral prononce ce qui suit: «- Donner acte à Mme M.________ de son engagement de verser à X.________ SAles sommes de CHF 340.-- (sol arcade), CHF 322.20 (évacuation objets), CHF1'657,20 (réparation portes local carrosserie) et CHF 1'000.-- (grattagepeinture sur vitres) soit au total la somme de CHF 3'319.40. - Maintenir les points 2 et 3 du dispositif du jugement du Tribunal des bauxet loyers du 30 novembre 2005. - Ordonner la compensation des montants mentionnés pour l'un sous chiffre 2du jugement du Tribunal des baux et loyers du 30 novembre 2005 et pourl'autre ci-dessus, à concurrence de CHF 3'319.40, la différence devant être àla charge de l'intimée. - Débouter l'intimée de toutes autres ou contraires conclusions. - Condamner l'intimée en tous les dépens, lesquels comprendront une équitableindemnité valant participation aux honoraires d'avocat de la recourante». L'intimée conclut au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt du 12juin 2006. L'autorité cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Conformément à la règle générale de l'art. 57 al. 5 OJ, il convient enl'espèce de statuer sur le recours de droit public avant le recours enréforme. 2.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recoursqui lui sont soumis (ATF 132 I 140 consid. 1.1; 132 III 291 consid. 1 p.292). 2.1 Le présent recours a pour partie un contenu identique au recours enréforme connexe que la défenderesse a déposé. Dans sa jurisprudence, leTribunal fédéral a qualifié d'abusif le procédé consistant à déposer deuxrecours, dans des écritures certes distinctes, mais en mélangeant les griefspropres à une voie de droit avec ceux propres à une autre (ATF 116 II 92consid. 1; 115 II 396 consid. 2a p. 397). Il ne s'ensuit pas que deux recourssont irrecevables du seul fait qu'ils ont la même motivation. Mais il ne serapas entré en matière si les moyens tirés de la violation du droit fédéral etceux tirés de la violation du droit constitutionnel sont exposés pêle-mêle, àtelle enseigne que les arguments avancés à l'appui des deux recoursapparaissent irrémédiablement enchevêtrés les uns aux autres (cf. à ce sujetles arrêts les plus récents suivants: 4P.173/2006 du 5 octobre 2006, consid.2.1 et 4P.17/2006 du 2 mai 2006, consid. 2.1). Lorsque le Tribunal fédéralest confronté à deux recours dont la motivation est similaire, il contrôlerasi, pour chaque acte de recours, les moyens invoqués sont recevables dans lecadre de cette voie de droit et satisfont aux exigences de motivation qui ysont propres. Si la réponse est affirmative, le recours est recevable, quandbien même le recourant reprend textuellement le même grief dans une autreécriture (ATF 118 IV 293 consid.2a p. 294 s.). Dans le recours de droit public, la recourante développe notamment un griefayant trait à la garantie constitutionnelle du juge
impartial (art. 30 al.1Cst.), alors que dans le recours en réforme elle se prévaut explicitement,citations de doctrine et de jurisprudence à l'appui, d'une violation del'art. 267 CO. C'est dire que les deux recours sont recevables, bien qu'ilscomportent dix pages rigoureusement identiques. 2.2 Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre unedécision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens(art. 84 al. 1 let. a OJ). L'arrêt rendu par la cour cantonale, qui est final, n'est susceptible d'aucunautre moyen de droit sur le plan fédéral ou cantonal dans la mesure où larecourante invoque la violation directe d'un droit de rang constitutionnel,de sorte que la règle de la subsidiarité du recours de droit public estrespectée (art. 84 al. 2 et 86 al. 1 OJ). En revanche, si la recourantesoulève une question relevant de l'application du droit fédéral, le griefn'est pas recevable, parce qu'il pouvait faire l'objet d'un recours enréforme (art. 43 al. 1 et 84 al. 2 OJ). La recourante est personnellement touchée par la décision attaquée, qui lacondamne à paiement, de sorte qu'elle a un intérêt personnel, actuel etjuridiquement protégé à ce que cette décision n'ait pas été prise enviolation de ses droits constitutionnels; en conséquence, elle a qualité pourrecourir (art. 88 OJ). Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que lesgriefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'actede recours (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31, 258consid. 1.3 p. 261/262). Dans un recours de droit public pour arbitraire, les moyens de fait ou dedroit nouveaux sont prohibés (ATF 124 I 208 consid. 4b p. 212). Le Tribunalfédéral se fonde dès lors sur l'état de fait tel qu'il a été retenu dansl'arrêt attaqué, à moins que le recourant ne démontre que la cour cantonale aretenu ou, au contraire, ignoré de manière insoutenable des faitsdéterminants pour l'issue de la querelle (ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26). Lerecours de droit public n'étant pas un appel, il n'appartient pas au Tribunalfédéral de substituer sa propre appréciation à celle de l'autorité cantonale;il n'entre par conséquent pas en matière sur les griefs revêtant un caractèreappellatoire (ATF 129 I 113 consid. 2.1 p. 120; 128 III 50 consid. 1c). 2.3 Sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce, le recours de droitpublic n'est qu'une voie de cassation et ne peut tendre qu'à l'annulation dela décision attaquée (ATF 132 III 291 consid. 1.5; 131 I 291 consid. 1.4).Dans la mesure où les conclusions de la recourante ne se limitent pas à cela- ainsi lorsqu'elle s'en prend au jugement du Tribunal des baux et loyers oulorsqu'elle formule des conclusions actives - et où celles de l'intiméeproposent autre chose que l'irrecevabilité du recours ou son rejet, leursconclusions sont irrecevables. 3.3.1A l'appui de son premier moyen, la recourante prétend que la courcantonale a violé les art. 29 al. 1 et 30 al. 1 Cst. en faisant preuve departialité dans l'arrêt entrepris. Se référant aux dépositions de sixtémoins, elle affirme que la Chambre d'appel n'a pas pu admettre qu'il avaitété démontré que les locaux loués à la défenderesse avaient subi desdégradations volontaires postérieurement à l'établissement des états deslieux de sortie, dégâts décrits par l'huissier judiciaire et l'entrepriseW.________. La recourante souligne qu'elle a «la nette impression» que lacour cantonale n'a tenu compte que des témoignages qui étaient favorables àl'intimée, procédé qui «aurait contamin(é) dans sa totalité» l'arrêtcritiqué. 3.23.2.1La recourante ne développe aucune argumentation à propos de l'art. 29al. 1 Cst, qui garantit que le justiciable ait accès aux tribunaux (cf. surcette notion Andreas Auer/Giorgio Malinverni/Michel Hottelier, Droitconstitutionnel suisse, vol. II, ch. 1199 ss, p. 562 ss). De fait, larecourante ne se plaint nullement de déni de justice, mais semble invoquer lapartialité à son endroit de l'autorité cantonale. 3.2.2 Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunalétabli par la loi, compétent, indépendant et impartial (art. 30 al. 1 Cst. et6 par. 1 CEDH), c'est-à-dire par des juges qui offrent la garantie d'uneappréciation parfaitement objective de la cause (ATF 129 III 445 consid.3.3.3 p. 454; 129 V 196 consid. 4.1 p. 198). Des circonstances extérieures auprocès ne sauraient influer sur le jugement d'une manière qui ne serait pasobjective, en faveur ou au préjudice d'une partie, car celui qui se trouvesous de telles influences ne peut être un "juste médiateur" (ATF 129 III 445consid. 3.3.3 p. 454; 128 V 82 consid. 2a p. 84; 125 I 209 consid. 8a p.217). L'impartialité subjective - qui se présume jusqu'à la preuve ducontraire - assure à chacun que seuls des juges qui ne font pas d'acceptionde personnes statuent sur son litige. Si la simple affirmation de lapartialité ne suffit pas, mais doit reposer sur des faits objectifs, il n'estpas davantage nécessaire que le juge soit effectivement prévenu; la suspicionest légitime même si elle ne se fonde que sur des apparences, pour autant quecelles-ci résultent de circonstances examinées objectivement (ATF 129 III 445consid. 3.3.3 p. 454; 128 V 82 consid. 2a p.84; Auer/Malinverni/Hottelier,op. cit., ch. 1238, p. 576). L'impartialité objective tend notamment àempêcher la participation du même magistrat à des titres divers dans une mêmecause (ATF 131 I 113 consid. 3.4 p. 117) et à garantir l'indépendance du jugeà l'égard de chacun des plaideurs, avec lesquels il ne doit, par exemple, pasavoir de liens de parenté ou entretenir des relations professionnelles. 3.2.3 S'agissant de la notion d'impartialité subjective, la recourante nedonne pas le plus petit indice d'une quelconque prévention à son endroit desjuges de la Chambre d'appel. Partant, elle a échoué à renverser laprésomption que l'impartialité dite subjective a été respectée. Quant à l'impartialité dite objective, on ne voit pas quels comportementspassés des magistrats genevois, par lesquels ils auraient tissé des liensavec une partie, pourraient susciter une apparence, même minime, de défautd'indépendance. La recourante n'allègue aucun élément à ce sujet. Enfin,celle-ci ne soutient même pas que les juges en question ont agi précédemmentdans la querelle à des titres différents. Il résulte de la teneur du grief que ce n'est pas la prétendue partialité desmembres de la Chambre d'appel que la défenderesse veut mettre en cause, maiscelle des témoins entendus lors des enquêtes. La garantie du juge indépendantet impartial de l'art. 30 al. 1 Cst. ne saurait être invoquée dans ce but. Lemoyen, qui a en réalité trait à l'appréciation des preuves, singulièrementdes témoignages recueillis, est infondé dans la mesure où il est recevable. 4.4.1La recourante reproche de manière générale à la cour cantonale d'avoirviolé l'art. 9 Cst. pour n'avoir pas tenu compte de l'usure normale de lachose louée dans la fixation de l'indemnité due par la locataire à labailleresse. La défenderesse discute ensuite les 20 postes de dommage que leTribunal des baux et loyers a retenus dans le jugement du 30 novembre 2005,confirmé dans l'arrêt déféré. 4.2 Selon la jurisprudence, la responsabilité contractuelle du preneur n'estengagée que dans la mesure où la détérioration de la chose, qui lui estimputable, excède l'usure normale, laquelle est ainsi à la charge dubailleur, qui reçoit un loyer en contre-partie (cf.arrêt 4C. 131/1995 du 15novembre 1995, consid. 2, in SJ 1996 p. 322 et les diverses références). La notion d'usure normale (ordentliche Abnutzung) ressortit donc au droitfédéral, de sorte que la voie du recours de droit public, vu la valeurlitigieuse de la présente cause, est totalement impropre à en assurer uneapplication conforme audit droit.Dire s'il y a eu dommage et quelle en est la quotité est une question de faitqui lie le Tribunal fédéral saisi d'un recours en réforme. C'est en revancheune question de droit de dire si la notion juridique du dommage a étéméconnue et de déterminer si l'autorité cantonale s'est fondée sur desprincipes de calcul admissibles pour le fixer (ATF 129 III 18 consid. 2.4;128 III 22 consid. 2e, 180 consid. 2d; 127 III 73 consid. 3c, 543 consid.2b). C'est donc uniquement les constatations ayant trait à l'existence desdifférents postes du préjudice qui peuvent être taxées d'arbitraire, àsupposer que le grief soit motivé selon l'art. 90 al. 1 let. b OJ. 4.2.1 Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., nerésulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer enconsidération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral nes'écarte de la décision attaquée que lorsque celle-ci est manifestementinsoutenable, qu'elle se trouve en contradiction claire avec la situation defait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté,ou encore lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justiceet de l'équité. Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, ilne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encoreque la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 132 III 209consid. 2.1; 131 I 57 consid. 2 p.61).En ce qui concerne l'appréciation des preuves et la détermination des faits,le juge tombe dans l'arbitraire si, sans raison sérieuse, il omet de prendreen considération un élément de preuve propre à modifier la décision, s'il sefonde sur un moyen manifestement inapte à apporter la preuve, s'il a, demanière évidente, mal compris le sens et la portée d'un moyen de preuve ouencore si, sur la base des éléments recueillis, il en tire des constatationsinsoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1 et les arrêts cités). 4.2.24.2.2.1La recourante ne conteste plus que le sol de l'arcade soit endommagé,ni le montant du préjudice en découlant. Ce point est acquis au débat. 4.2.2.2 La défenderesse reconnaît qu'elle a laissé quatre trous conséquentsdans le sol du dépôt. Lorsqu'elle prétend que le dépôt a été construit parses soins, de sorte que la bailleresse en retire une plus-value, elleprésente une critique purement appellatoire, reposant sur des faits nouveaux. 4.2.2.3 A propos des objets laissés après son départ, la locataire soutientque le démontage du podium n'était pas prévu dans l'état des lieux de sortiedu 31 juillet 1999, pas plus que l'évacuation des miroirs cassés, élémentsqui ont été retenus arbitrairement. Le témoin F.________ a déclaré qu'après la remise des clés, il a dûnotamment enlever une abondance de déchets et casser un podium. Le témoinG.________ a exposé qu'il avait fallu plus de deux semaines de travail pourenlever les objets à évacuer. On voit ainsi qu'admettre que de nombreuxobjets ont dû être évacués en août 1999 est dénué de tout arbitraire. 4.2.2.4 S'agissant de la démolition du socle du coffre-fort, la recourantesoutient que la demanderesse était d'accord d'enlever ce coffre du mur. Le témoin H.________ a affirmé qu'il a vu deux personnes en train de casser àcoups de barre à mine le mur où était scellé un coffre-fort et que cespersonnes ont dit qu'elles opéraient pour le mari de la locataire. Cetémoignage retire tout arbitraire à la constatation que la défenderesse afait démolir le mur du coffre-fort. 4.2.2.5 La recourante admet avoir endommagé les portes du local carrosserie.Il n'y a pas à y revenir. 4.2.2.6 Concernant le remplacement des vitres détruites, la recouranteprétend qu'elles avaient de toute manière atteint leur durée de vie maximale. La critique a trait au droit fédéral, plus précisément à la longévité desinstallations, d'où son irrecevabilité en vertu de la subsidiarité absolue durecours de droit public (art. 84 al. 2 OJ). 4.2.2.7 La recourante conteste qu'il ait fallu gratter de la peinture sur lesvitres et nettoyer divers sols. Il ressort de l'arrêt critiqué que le témoin I.________ a déclaré qu'après ledépart de la défenderesse, «les locaux paraissaient laissés à l'abandon».Faute d'avoir taxé cette déposition d'arbitraire, la critique appellatoire dela recourante est irrecevable. 4.2.2.8 En ce qui concerne les mâts sciés, la défenderesse fait valoir quec'est elle qui les avait posés, de sorte qu'elle était en droit de lessectionner.Le moyen est privé de toute démonstration d'arbitraire, ce qui le rend ipsofacto irrecevable. 4.2.2.9 La recourante admet avoir repris deux portes du garage, mais prétendqu'elle n'a pas à «payer pour des portes qu'elle avait elle-même faitmettre». Derechef, il s'agit d'une critique totalement appellatoire et, partant,irrecevable. 4.2.2.10 Au sujet de la réfection du faux plafond, de la dépose d'un plafondet de la pose d'un nouveau en plâtre, la défenderesse soutient que cescloisons étaient arrivées en fin de vie à son départ des locaux et qu'elle nedoit pas supporter le coût de l'application sur le nouveau plafond de deuxcouches de peinture. Le moyen, fondé sur des faits nouveaux, ressortit pour le reste à la notiond'usure normale, appartenant au droit fédéral; il est irrecevable. 4.2.2.11 Quant à la réfection des murs, vitrages, radiateurs et maçonnerie dubâtiment A, la recourante arguë que ces installations étaient amorties et quela maçonnerie avait pour fin de transformer le bâtiment A. Comme précédemment, le grief consiste en un mélange disparate de critiques dudroit fédéral saupoudrées de l'invocation de faits nouveaux. Il est bienévidemment entièrement irrecevable (art. 84 al. 2 OJ). 4.2.2.12 La recourante présente des griefs de la même nature concernant- la réfection du plafond du bâtiment B,- la réfection des murs, vitrages, radiateurs et maçonnerie dubâtiment B,- la réfection du plafond des WC et du local d'accès du bâtiment B. L'identité du contenu de ces griefs avec les deux précédents moyens examinésappelle la même solution, à savoir leur entière irrecevabilité. 4.2.2.13 La recourante revient à la charge quant au poste «remise en étatdes murs, serrureries, radiateurs et tuyaux du garage». Aucune part dudommage ne devrait être mis à sa charge pour ces objets, qui étaient arrivésen fin de vie lorsqu'elle a restitué la chose louée. L'huissier E.________ a constaté, sans que l'arbitraire soit invoqué, qu'uncache-radiateur avait été enlevé le 4 août 1999. Pour le reste, le moyens'épuise en de vaines critiques du droit fédéral. 4.2.2.14 En moins d'une page, la recourante fait valoir en vrac quel'imposte, dont elle admet qu'elle a été abîmée en cours de bail, a étéréparée par son entremise et qu'elle avait le droit de reprendre les priseset luminaires qu'elle avait fait installer à ses frais, de même que l'auventde la carrosserie, qui ne tenait qu'à l'aide de ferraille et représentait undanger pour les tiers. Ces griefs appellatoires sont dénués de toute ébauche d'une démonstrationd'arbitraire. Ils sont irrecevables dans toute leur étendue. 4.2.2.15 La recourante affirme, en une ligne, contester devoir s'acquitterdes frais de l'entreprise W.________. Le moyen, qui ne contient aucune motivation, est bien entendu
irrecevable. 4.2.2.16 Enfin, la défenderesse allègue que la note d'honoraires del'huissier judiciaire n'est pas un poste du dommage, car il appartenait à labailleresse d'effectuer un état des lieux complet en sa présence. Le grief est téméraire, puisque qu'il a été retenu, sans invocationd'arbitraire, que de graves dépradations ont été constatées non au moment dusecond état des lieux de sortie, mais après le départ définitif de ladéfenderesse des locaux loués. 5.En définitive, le recours doit être rejeté dans la faible mesure de sarecevabilité. Les frais de la procédure seront mis à la charge de larecourante qui succombe. Celle-ci devra en outre verser à l'intimée uneindemnité pour ses dépens (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2.Un émolument judiciaire de 4'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 3.La recourante versera à l'intimée une indemnité de 5'000 fr. à titre dedépens. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laChambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève. Lausanne, le 1er novembre 2006 Au nom de la Ire Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.187/2006
Date de la décision : 01/11/2006
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-11-01;4p.187.2006 ?
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