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27/10/2006 | SUISSE | N°5C.176/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 27 octobre 2006, 5C.176/2006


{T 0/2}5C.176/2006 /frs Arrêt du 27 octobre 2006IIe Cour civile M. et Mmes les Juges Raselli, Président, Escher et Hohl.Greffière: Mme Borgeat. Dame X.________, (épouse),demanderesse et recourante, représentée par Me François Berger, avocat, contre X.________, (époux),défendeur et intimé, représenté par Me Benoît Ribaux, avocat, divorce (art. 122 al. 1 et 123 al. 2 CC), recours en réforme contre l'arrêt de la IIe Cour civile du Tribunal cantonaldu canton de Neuchâtel du 12 juin 2006. Faits: A.X. ________, né le 26 août 1940, et dame X.________, née le 22 mars 1946, sesont ma

riés à Neuchâtel le 1er décembre 1989, en adoptant le régime de la...

{T 0/2}5C.176/2006 /frs Arrêt du 27 octobre 2006IIe Cour civile M. et Mmes les Juges Raselli, Président, Escher et Hohl.Greffière: Mme Borgeat. Dame X.________, (épouse),demanderesse et recourante, représentée par Me François Berger, avocat, contre X.________, (époux),défendeur et intimé, représenté par Me Benoît Ribaux, avocat, divorce (art. 122 al. 1 et 123 al. 2 CC), recours en réforme contre l'arrêt de la IIe Cour civile du Tribunal cantonaldu canton de Neuchâtel du 12 juin 2006. Faits: A.X. ________, né le 26 août 1940, et dame X.________, née le 22 mars 1946, sesont mariés à Neuchâtel le 1er décembre 1989, en adoptant le régime de laséparation de biens. Aucun enfant n'est issu de leur union. L'épouse était déjà rentière AI au moment de la conclusion du mariage etl'est restée durant toute sa durée. Elle n'a donc pas acquis de prétentionsen matière de prévoyance professionnelle au cours du mariage. B.B.aLe 12 septembre 2003, l'épouse a formé une demande en divorce devant leTribunal matrimonial du district du Val-de-Travers. Dans sa réponse du 4octobre 2004, le mari a rejeté la conclusion de la demanderesse tendant aupartage par moitié des avoirs de prévoyance professionnelle qu'il a accumuléspendant le mariage. Par décision du 4 juillet 2005, le Président du Tribunal civil du district duVal-de-Travers a prononcé le divorce des époux, ordonné le transfert enfaveur de l'épouse de la moitié des avoirs de prévoyance professionnelleaccumulés par le mari durant le mariage et ratifié l'accord partiel réglantles effets accessoires du divorce signé par les parties le 15 juin 2004. B.bStatuant le 12 juin 2006, le Tribunal cantonal a admis le recours de l'épouxet dit qu'il n'y a pas lieu de partager par moitié la prestation delibre-passage du mari. C.L'épouse exerce un recours en réforme contre cet arrêt, sollicitant, à titrepréalable, l'octroi de l'effet suspensif. Elle conclut principalement aupartage par moitié de la prestation de sortie acquise par son mari durant lemariage, soit un montant de 71'091 fr. 50 avec intérêts, ou ce que justiceconnaîtra, et à ce qu'il soit ordonné à la fondation collective LPP de laRentenanstalt de prélever ce montant, ou ce que justice connaîtra, et de leverser en sa faveur. Subsidiairement, elle conclut à ce qu'il soit ordonné àla fondation collective précitée de prélever une part, à fixer à dire dejustice, de la prestation de sortie acquise par son mari pendant le mariageet de la verser en sa faveur. Eventuellement, elle conclut à ce que la causesoit renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau dans lesens des considérants du Tribunal fédéral. Elle sollicite en outre l'octroide l'assistance judiciaire. Par ordonnance du 19 juillet 2006, le Président de la cour de céans a déclarésans objet la demande d'effet suspensif au recours. Le défendeur propose le rejet du recours. Il sollicite également l'octroi del'assistance judiciaire. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recoursqui lui sont soumis (ATF 131 II 58 consid. 1 p. 60 et les arrêts cités). 1.1 Déposé en temps utile contre une décision finale prise en dernièreinstance par le tribunal suprême du canton, le recours en réforme est ouvertsous l'angle des art. 48 al. 1 et 54 al. 1 OJ. La valeur litigieuse estatteinte, en sorte qu'il est aussi recevable du chef de l'art. 46 OJ. 1.2 Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral fonde son arrêt surles faits tels qu'ils ont été constatés par la dernière autorité cantonale, àmoins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient étéviolées, qu'il n'y ait lieu de rectifier des constatations reposant sur uneinadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il ne faille compléter lesconstatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu comptede faits pertinents (art. 64 OJ; ATF 130 III 102 consid. 2.2 p. 106). Hormisces exceptions, il ne peut être présenté de griefs contre les constatationsde fait - ou l'appréciation des preuves à laquelle s'est livrée l'autoritécantonale (ATF 130 III 136 consid. 1.4 p. 140; 129 III 320 consid. 6.3 p.327) - ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). 2.Seul demeure litigieux le sort de la prévoyance professionnelle accumulée parle mari durant le mariage. 2.1 Selon l'art. 122 al. 1 CC, lorsqu'un des époux au moins est affilié à uneinstitution de prévoyance professionnelle et qu'aucun cas de prévoyance n'estsurvenu, chaque époux a droit à la moitié de la prestation de sortie de sonconjoint calculée pour la durée du mariage selon les dispositions de la loidu 17 décembre 1993 sur le libre passage (LFLP; RS 831.42). Aux termes del'art. 124 al. 1 CC, une indemnité équitable est due quand un cas deprévoyance est déjà survenu pour l'un des époux ou les deux, ou quand lesprétentions en matière de prévoyance professionnelle acquises durant lemariage ne peuvent être partagées pour d'autres motifs. Selon la jurisprudence, le législateur a exclu le partage des avoirs deprévoyance en cas de survenance d'un cas de prévoyance essentiellement pourdes motifs pratiques. Par la survenance d'un cas de prévoyance, il fautentendre la naissance d'un droit concret à des prestations de la prévoyanceprofessionnelle, qui rend impossible le partage des avoirs de prévoyance à labase des prestations servies. Ainsi, la survenance de l'âge de la retraite oudu droit à des prestations d'invalidité d'un conjoint qui n'a jamaistravaillé ou qui n'a jamais été affilié à la prévoyance professionnelle, dansla mesure où il n'entraîne aucun droit à des prestations d'une institution deprévoyance, permet encore le partage des avoirs de la prévoyanceprofessionnelle de l'autre conjoint en sa faveur (arrêt du Tribunal fédéraldes assurances B 19/03 du 30 janvier 2004, consid. 5, résumé in: RSAS 2004 p.572; Thomas Sutter/Dieter Freiburghaus, Kommentar zum neuen Scheidungsrecht,1999, n. 1 et 3 ad art. 124 CC; n. 13 ss ad art. 122/141-142 CC). 2.2 En l'espèce, il ressort de l'arrêt attaqué que la demanderesse estrentière AI, que son invalidité est antérieure au mariage et qu'elle n'a pasacquis de prétentions en matière de prévoyance professionnelle durant lemariage. Aucun cas de prévoyance n'est donc réalisé. C'est ainsi à raison que la cour cantonale a considéré que l'art. 122 CC esten principe applicable. 3.Toutefois, la cour cantonale a refusé de partager par moitié la prestation desortie acquise par le mari durant le mariage, en se fondant sur l'art. 123al. 2 CC. La demanderesse invoque la violation de cette disposition etconclut au partage par moitié. 3.1 Les prestations de sortie de la prévoyance professionnelle des épouxdoivent en principe être partagées entre eux par moitié (art. 122 CC).Exceptionnellement, le juge peut refuser le partage, en tout ou en partie,lorsque celui-ci s'avère manifestement inéquitable pour des motifs tenant àla liquidation du régime matrimonial ou à la situation économique des épouxaprès le divorce (art. 123 al. 2 CC). Selon l'intention du législateur, la prévoyance professionnelle constituéependant la durée du mariage doit profiter aux deux conjoints de manièreégale. Ainsi, lorsque l'un des deux se consacre au ménage et à l'éducationdes enfants et renonce, totalement ou partiellement, à exercer une activitélucrative, il a droit, en cas de divorce, à une partie de la prévoyance queson conjoint s'est constituée durant le mariage. Le partage des prestationsde sortie a pour but de compenser sa perte de prévoyance et doit luipermettre d'effectuer un rachat auprès de sa propre institution deprévoyance. Il tend également à promouvoir son indépendance économique aprèsle divorce. Il s'ensuit que chaque époux a normalement un droitinconditionnel à la moitié des expectatives de prévoyance constituées pendantle mariage (ATF 129 III 577 consid. 4.2.1 p. 578). L'art. 123 al. 2 CC doit être appliqué de manière restrictive, afin d'éviterque le principe du partage par moitié des avoirs de prévoyance ne soit vidéde son contenu (Baumann/Lauterburg, FamKomm Scheidung, 2005, n. 59 ad art.123 CC). Seules des circonstances économiques postérieures au divorce peuventjustifier le refus du partage, circonstances que le juge doit apprécier enappliquant les règles du droit et de l'équité (ATF 129 III 577 consid. 4.2.1et 4.2.2 p. 578 et les références citées). 3.2 La cour cantonale a considéré que la procédure d'administration despreuves n'a pas permis d'établir que les époux seraient titulaires d'unefortune, mobilière ou immobilière, en particulier que le mari posséderait unemaison au Kosovo. S'agissant de leurs revenus, la cour cantonale a constaté que l'épouse toucheune rente AI de 1'823 fr. par mois. Au moment où elle atteindra l'âge de laretraite, le montant de sa rente continuera à lui être versé. Quant au mari,il touche une rente AVS de 681 fr. par mois depuis septembre 2005, ainsiqu'une rente LPP de 853 fr. par mois, soit 1'534fr. au total. 3.2.1 La demanderesse reproche à l'autorité cantonale d'avoir refusé lepartage parce qu'il serait "inéquitable" et non, comme le prévoit la loi,"manifestement inéquitable" (cf. art. 123 al. 2 CC).La cour cantonale n'a pas méconnu, dans son exposé en droit, le fait que laloi exige que le partage soit "manifestement inéquitable", même si elle aomis l'adverbe dans sa conclusion. Quoi qu'il en soit, le refus du partage n'apparaît pas manifestementinéquitable, puisque le mari ne dispose pas de fortune et que sa rente, à saretraite, sera inférieure à celle de la demanderesse. La cour cantonale n'adonc pas violé le droit fédéral. 3.2.2 Lorsqu'elle soutient que le défendeur avait un petit terrain au Kosovosur lequel se trouve une vieille maison en mauvais état, et que c'est "sonproblème" s'il a cédé ce bien à sa première femme, que cette maison esthabitable et habitée et que les explications du défendeur sont sujettes àcaution, la demanderesse se fonde sur des faits non établis et remet en causeles constatations de fait de la cour cantonale, ce qui est inadmissible dansun recours en réforme (consid.1.2).3.2.3 L'autorité cantonale considère que la procédure d'administration despreuves n'a pas permis d'établir que le mari aurait racheté une prestation delibre-passage, comme l'alléguait l'épouse en se fondant sur une lettre deSwisslife du 21 mars 2005. Lorsqu'elle soutient que cette lettre ne seprononce pas sur la période antérieure au 1er juillet 1995, qu'elle allègueque son mari n'a jamais cotisé à la LPP avant son mariage et qu'il a rachetéla prestation de sortie à la date du mariage en la finançant au moyen de sonsalaire pendant le mariage et de l'aide financière de son épouse après lemariage, donc au moyen d'acquêts, et qu'il est prouvé que le mari a rachetéune prestation de libre-passage, la demanderesse s'en prend à l'appréciationdes preuves et à la constatation des faits de la cour cantonale, ce qui estinadmissible dans un recours en réforme (consid.1.2).3.2.4 L'autorité cantonale retient que l'épouse touchera en définitive unerente plus élevée que l'époux. La demanderesse, quant à elle, soutient qu'iln'est pas certain que la situation des époux sera fort différente sousl'angle des rentes qu'ils toucheront. Il s'agit là encore d'une critiqueconcernant l'état de fait, irrecevable en recours en réforme (consid. 1.2).3.2.5 La cour cantonale relève que la situation économique de l'épouse n'apas été modifiée par le mariage. A cet égard, la demanderesse voudrait qu'ilsoit tenu compte du fait qu'une bonne part de sa rente a été utilisée enfaveur de son ex-mari et du fils de celui-ci. Il s'agit une nouvelle foisd'une critique des faits inadmissible dans un recours en réforme (consid.1.2).3.2.6 La cour cantonale constate que le défendeur a constitué presqueintégralement son 2e pilier durant son mariage. La demanderesse admet cetélément mais soutient que le défendeur aurait racheté une prestation delibre-passage. Le sort de ce grief a déjà été liquidé ci-dessus. 3.2.7 L'autorité cantonale considère enfin, à raison, que le but du partagen'est pas de permettre à son bénéficiaire d'éponger des dettes qu'il auraitcontractées. Le grief de la demanderesse, qui estime que cela pourraitpromouvoir son indépendance économique et assurer l'égalité entre les époux,est ainsi infondé. 4.En conclusion, le recours en réforme de la demanderesse doit être rejeté,dans la faible mesure de sa recevabilité. Sa requête d'assistance judiciairedoit être rejetée, vu le caractère manifestement dépourvu de toute chance desuccès de son recours (art. 152 al. 1 OJ). Les frais de justice, dont lemontant sera arrêté en fonction de sa situation financière, doivent donc êtremis à sa charge (art. 153a al. 1 et 156 al. 1 OJ). La demanderesse verseraune indemnité de dépens au défendeur, qui s'est déterminé sur le recours(art. 159 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu de prévoir, pour le cas où les dépensseraient irrécupérables, l'indemnisation de son avocat par la Caisse duTribunal fédéral, dès lors que sa requête d'assistance judiciaire doit êtrerejetée au vu de sa situation financière actuelle (salaire mensuel net ycompris 13e: 4'435 fr. + rente AVS: 613 fr., soit 5'048 fr. au total). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2.La requête d'assistance judiciaire de la demanderesse est rejetée. 3.La requête d'assistance judiciaire du défendeur est rejetée. 4.Un émolument judiciaire de 800 fr. est mis à la charge de la demanderesse. 5.La demanderesse versera au défendeur une indemnité de 800 fr. à titre dedépens. 6.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laIIe Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. Lausanne, le 27 octobre 2006 Au nom de la IIe Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.176/2006
Date de la décision : 27/10/2006
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-10-27;5c.176.2006 ?
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