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25/10/2006 | SUISSE | N°C.24/06

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 25 octobre 2006, C.24/06


Cause {T 7}C 24/06 Arrêt du 25 octobre 2006IVe Chambre MM. les Juges Ursprung, Président, Schön et Frésard. Greffier : M. Métral Z.________, 1963, recourant, contre Caisse publique cantonale vaudoise de chômage,rue Caroline 9, 1014 Lausanne, intimée Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 21 décembre 2005) Faits: A.Z. ________ travaillait pour l'entreprise R.________ AG, en qualité dedirecteur, pour un salaire mensuel brut de 19'825fr. (y compris le 13èmesalaire). Son contrat de travail prévoyait la clause suivante, relative audélai de résiliation : «Nach

Ablauf der Probezeit kann der Vertrag auf dender Kündigung fo...

Cause {T 7}C 24/06 Arrêt du 25 octobre 2006IVe Chambre MM. les Juges Ursprung, Président, Schön et Frésard. Greffier : M. Métral Z.________, 1963, recourant, contre Caisse publique cantonale vaudoise de chômage,rue Caroline 9, 1014 Lausanne, intimée Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 21 décembre 2005) Faits: A.Z. ________ travaillait pour l'entreprise R.________ AG, en qualité dedirecteur, pour un salaire mensuel brut de 19'825fr. (y compris le 13èmesalaire). Son contrat de travail prévoyait la clause suivante, relative audélai de résiliation : «Nach Ablauf der Probezeit kann der Vertrag auf dender Kündigung folgenden Tag unter Berücksichtigung einer Kündigunsfrist von6Monaten gekündigt werden.» Le 30juin 2003, R.________ AG a résilié le contrat de travail la liant àZ.________, pour le 31décembre 2003. Celui-ci a présenté une demanded'indemnités journalières à la Caisse publique cantonale vaudoise de chômage(ci-après : la caisse), pour une perte de travail depuis le 1er janvier 2004.Il a notamment précisé qu'il n'avait pas l'intention d'introduire deprocédure contre son employeur en vue de faire valoir des prétentions desalaire en relation avec le respect du délai de congé. La caisse a alloué lesindemnités journalières demandées. Par mémoire demande du 20juillet 2004, Z.________ a ouvert une action enpaiement d'un montant de 30'000fr. devant le Tribunal X.________. Il fondaitses conclusions, d'une part, sur un solde d'heures supplémentaires(4'575fr.) et de vacances non prises (28'108fr. 80), et d'autre part, surson droit au salaire pour le mois de janvier 2004 (19'825fr., y compris le13ème salaire). Il soutenait que l'échéance du contrat de travail avait étéreportée à la fin du mois de janvier 2004, en raison d'une incapacité detravail d'une semaine subie en octobre 2003. Afin de bénéficier de lagratuité de la procédure, il renonçait à exiger le paiement d'un montantsupérieur à 30'000fr. Les parties au procès civil ont finalement conclu unetransaction judiciaire, le 6septembre 2004, au terme de laquelle R.________AG s'engageait à payer à Z.________ un montant de 25'000fr. brut, pour soldede tout compte. Le 28octobre 2004, R.________ AG a remis à Z.________ un décompte, d'aprèslequel un montant de 25'000fr. brut (22'587fr. 85 net) lui serait payé àtitre de salaire pour le mois de janvier 2004 (13'671fr. 65 brut) etd'indemnités de vacances pour les années 2002, 2003 et 2004 (11'328fr. 35brut). Dans le même temps, l'employeur a informé la caisse de cesmodifications par rapport à l'attestation d'employeur qui lui avait étéremise à la fin de l'année 2003.Par décision du 6décembre 2004, la caisse a exigé de Z.________ qu'ilrestitue les indemnités journalières perçues en janvier 2004, pour un montanttotal de 5'400fr. 40. Elle considérait, en effet, que l'employeur del'assuré lui avait versé un salaire pour la période en cause, compte tenu «dureport du délai de congé pour raison de maladie». Z.________ s'est opposé àcette décision. Il a allégué, en substance, que le paiement de 25'000fr. parson employeur correspondait à la compensation, en espèces, d'heuressupplémentaires et de vacances qu'il n'avait pas pu prendre avant de quitterl'entreprise. Par décision sur opposition du 31mai 2005, la caisse a annulé la décision du6décembre 2004. Elle a considéré que les prestations allouées en janvier2004 l'avaient été conformément aux règles légales, le paiement de 25'000fr.convenu avec R.________ AG ne correspondant pas à un salaire pour la périodeen cause, mais à une indemnité pour le solde d'heures supplémentaires et devacances dues à l'assuré à la fin des rapports de travail. Le 8juillet 2005, la caisse a toutefois rendu une «décision rectificative»,par laquelle elle annulait la décision sur opposition du 31mai 2005,confirmait la décision du 6décembre 2004 et exigeait à nouveau larestitution d'un montant de 5'400fr.40. La caisse motivait ce revirementpar le fait que l'assuré aurait pu prétendre le paiement d'un salaire pour lemois de janvier 2004, auquel il avait renoncé à tort en réduisant à30'000fr. ses prétentions devant le Tribunal X.________, puis en acceptantun montant de 25'000fr. à titre de transaction judiciaire. Cette décisionn'indiquait aucune voie de droit. L'assuré en a demandé le réexamen, eninvoquant notamment l'autorité de chose décidée de la décision sur oppositiondu 31mai 2005. Par lettre du 5août 2005, la caisse a exposé à nouveau lesmotifs qui l'avaient conduite à rendre la «décision rectificative» du8juillet 2005, en précisant que cette décision pouvait faire l'objet d'unrecours devant le Tribunal administratif du canton de Vaud. B.Z.________ a déféré la cause à cette juridiction, qui a rejeté le recours parjugement du 21décembre 2005. C.L'assuré interjette un recours de droit administratif contre ce jugement. Ensubstance, il en demande l'annulation, ainsi que celle de la décision du8juillet 2005. L'intimée s'en remet à justice. L'Office régional deplacement Y.________ et le Secrétariat d'Etat à l'économie ont renoncé à sedéterminer. Considérant en droit: 1.Le litige porte sur le point de savoir si l'intimée était en droit de«rectifier» la décision sur opposition du 31mai 2005 et d'exiger à nouveaula restitution des prestations versées au recourant pour le mois de janvier2004. 2.2.1Aux termes de l'art.52 al.1 LPGA, les décisions peuvent être attaquéesdans les trente jours par voie d'opposition auprès de l'assureur qui les arendues, à l'exception des décisions d'ordonnancement de la procédure. Lesdécisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l'oppositionn'est pas ouverte sont sujettes à recours (art.56 al.1 LPGA). Chaque cantoninstitue un tribunal des assurances, qui statue en instance unique sur lesrecours dans le domaine des assurances sociales (art.57 LPGA). Le recoursdoit être déposé dans les trente jours suivant la notification de la décisionsujette à recours (art.60 al.1 LPGA). 2.2 Les décisions et les décisions sur opposition formellement passées enforce sont soumises à révision si l'assuré ou l'assureur découvresubséquemment des faits nouveaux importants ou trouve de nouveaux moyens depreuve qui ne pouvaient être produits auparavant (révision procédurale;art.53 al.1 LPGA). L'assureur peut également revenir sur les décisions oules décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu'elles sontmanifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable(reconsidération; art.53 al.2 LPGA). Indépendamment de ces conditions,l'assureur peut reconsidérer une décision ou une décision sur oppositioncontre laquelle un recours a été formé, jusqu'à l'envoi de son préavis àl'autorité de recours (art.53 al.3 LPGA). 3.La décision sur opposition du 31mai 2005 n'a pas fait l'objet d'un recoursdevant le Tribunal administratif vaudois. Elle était entrée en force lorsquela caisse a rendu la décision du 8juillet 2005. Partant, cette dernièreconstituait une véritable reconsidération, soumise aux conditions posées parl'art.53 al.2 LPGA, nonobstant sa qualification de «décision rectificative»par l'intimée. Conformément à l'art.52 al.1 LPGA, elle pouvait fairel'objet d'une opposition, dans les trente jours dès sa notification, et nond'un recours devant le Tribunal administratif du canton de Vaud. Celui-ciaurait dû refuser d'entrer en matière sur le recours et le transmettre àl'intimée comme objet de sa compétence, à titre d'opposition. Il convienttoutefois de renoncer à réformer dans ce sens le jugement entrepris, paréconomie de procédure et compte tenu du fait que la caisse, dans la lettre du5août 2005 a explicité les motifs qui l'ont amenée à rendre la décisionrectificative. 4.4.1L'assuré a droit à l'indemnité de chômage, entre autres conditions,lorsqu'il a subi une perte de travail à prendre en considération (art.8al.1 let.b LACI). N'entre pas en considération la perte de travail pourlaquelle le chômeur a droit au salaire ou à une indemnité pour cause derésiliation anticipée des rapports de travail (art.11 al.3 LACI). La pertede travail est prise en considération indépendamment du fait que l'assuré atouché une indemnité de vacances à la fin de ses rapports de travail ouqu'une telle indemnité était comprise dans son salaire (sous réserve de casparticuliers sans pertinence en l'espèce; art.11 al.4 LACI). 4.24.2.1Si la caisse a de sérieux doutes que l'assuré ait droit, pour la duréede la perte de travail, au versement par son ancien employeur d'un salaire oud'une indemnité au sens de l'art.11 al.3 LACI, ou que ces prétentionssoient satisfaites, elle verse l'indemnité de chômage (art.29 al.1 LACI).En opérant le versement, la caisse se subroge à l'assuré dans tous sesdroits, y compris le privilège légal, jusqu'à concurrence de l'indemnitéjournalière versée (art.29 al.2, première phrase LACI). Il s'agit d'unecession légale, opposable aux tiers sans aucune formalité et mêmeindépendamment de toute manifestation de volonté du créancier (art.166 CO).Le débiteur est libéré envers le créancier, mais il doit la prestation autiers qui a désintéressé le créancier (Engel, Traité des obligations en droitsuisse, 2ème éd., p.613). En d'autres termes, l'assuré perd la créance qu'ilaurait pu faire valoir contre l'employeur, à concurrence des prestations del'assurance-chômage; la caisse devient titulaire de cette créance, letravailleur ne conservant ses prétentions que pour la part non couverte parles indemnités journalières (Charles Munoz, La fin du contrat individuel detravail et le droit aux indemnités de l'assurance-chômage, thèse,Lausanne1992, p.208). 4.2.2 En principe, l'application de l'art.29 LACI exclut une procédureultérieure de reconsidération ou de révision de la décision d'octroi desprestations s'il s'avère que les prétentions salariales de l'assuré étaientfondées (cf. ATF 127 V 477 sv. consid.2b/bb, ZBJV141/2005 p.343 [arrêt G.du 23février 2005, C118/04], consid.1.4.2). L'assuré n'est pas tenu àrestitution des prestations, mais la caisse dispose en contrepartie d'unecréance subrogatoire contre l'employeur. Après la subrogation, unetransaction passée entre ce dernier et l'assuré ne lie pas la caisse si ellen'y a pas donné son aval, dans la mesure où l'assuré a transigé sur unecréance dont il n'était plus titulaire. 5.5.1Dans la décision sur opposition du 31mai 2005, l'intimée avait considéréque la transaction judiciaire passée par le recourant avec son ancienemployeur ne portait pas sur le paiement d'un salaire pour le mois de janvier2004, mais d'une indemnité pour des heures supplémentaires et des vacancesque le recourant n'avait pu prendre. Toutefois, dans la décision dereconsidération du 8juillet 2005, l'intimée a considéré qu'elle avait omis,à tort, de tenir compte de la renonciation du recourant à exiger le paiementd'un salaire pour le mois de janvier 2004. Ce droit au salaire résultait dela prolongation du contrat de travail jusqu'au 31janvier 2004, en raisond'une incapacité de travail d'une semaine dont avait été victime le recouranten octobre 2003. La décision sur opposition du 31mai 2005 était doncmanifestement erronée. Tel est également le point de vue des premiers juges. 5.25.2.1Vu le procès civil qui a opposé le recourant à son ancien employeur, etqui portait notamment sur des prétentions salariales pour le mois de janvier2004, le droit aux indemnités de chômage versées en janvier 2004 étaitobjectivement douteux. Partant, on peut se demander si, en allouant sesprestations, la caisse s'est subrogée dans les droits du recourant contre sonemployeur, conformément à l'art.29 al.2 LACI, ou si, au contraire,l'application de cette disposition était exclue, la caisse ayant indemnisél'assuré sans connaître l'existence d'une éventuelle créance de salaire. Iln'est pas nécessaire de trancher la question dans la présente procédure. Eneffet, les doutes qu'elle soulève sur l'application ou non de l'art.29 al.2LACI, et donc sur le caractère exigible ou non d'une restitution desprestations (cf. consid.4.2.2 supra), suffisent à nier le caractèremanifestement erroné la décision sur opposition du 31mai 2005. 5.2.2 Par ailleurs, selon le contrat de travail liant le recourant àR.________ AG, le délai de résiliation du contrat était de six mois, et nonpas de six mois pour la fin d'un mois. Contrairement à l'avis de l'intimée -et à ce que le recourant soutenait dans le mémoire-demande adressé auTribunal X.________ -, l'incapacité de travail alléguée n'a donc pu prolongerles rapports de travail que d'une semaine au plus, conformément à l'art.336cal.2 CO (suspension du délai de résiliation pendant la durée l'incapacité detravail), et non jusqu'au 31janvier 2004. A cela s'ajoute qu'on ne trouve audossier aucun certificat médical établissant l'incapacité de travail durecourant. Dans l'attestation de l'employeur établie le 12décembre 2003,R.________ AG n'a pas fait état d'absences de son employé pendant l'année2003, hormis pour des vacances entre le 14 et le 31juillet. Pour sa part, lerecourant a répondu par la négative à la question «Lors de la résiliation oupendant le délai de résiliation, avez-vous été empêché(e) de travailler enraison de maladie, accident, grossesse, service militaire, service civil oude protection civile?», figurant sur le formulaire de demande d'indemnités dechômage rempli par ses soins le 10janvier 2004. Dans ces conditions, lefondement même d'une créance de salaire pour le mois de janvier 2004 prête àdiscussion, ce qui constitue un second motif de nier le caractèremanifestement erroné de la décision sur opposition du 31mai 2005. Ils'ensuit que cette décision ne pouvait faire l'objet d'une reconsidération etque le recourant se prévaut à juste titre de l'autorité de chose décidée pourcontester toute obligation de restitution des prestations. Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est admis et le jugement du Tribunal administratif du canton deVaud du 21décembre 2005 ainsi que la décision de la Caisse publiquecantonale vaudoise de chômage du 8juillet 2005 sont annulés. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal administratif ducanton de Vaud, à l'Office régional de placement Y.________ et au Secrétariatd'Etat à l'économie. Lucerne, le 25 octobre 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IVe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.24/06
Date de la décision : 25/10/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-10-25;c.24.06 ?
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