La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/10/2006 | SUISSE | N°U.379/06

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 octobre 2006, U.379/06


Cause {T 7}U 379/06 Arrêt du 19 octobre 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Lustenberger et Seiler. Greffier : M.Pellegrini A.________, recourante, contre Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1,6004 Lucerne, intimée Tribunal cantonal des assurances, Sion (Jugement du 5 juillet 2006) Faits: A.Né en 1959, B.________, époux de A.________ et père de trois filles, atravaillé en qualité d'aide de production au service de l'entrepriseX.________ SA, à T.________, à partir du 1erseptembre 2001. A ce titre, ilétait assuré auprès de la Caisse

nationale suisse d'assurance en casd'accidents (CNA). Le ve...

Cause {T 7}U 379/06 Arrêt du 19 octobre 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Lustenberger et Seiler. Greffier : M.Pellegrini A.________, recourante, contre Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1,6004 Lucerne, intimée Tribunal cantonal des assurances, Sion (Jugement du 5 juillet 2006) Faits: A.Né en 1959, B.________, époux de A.________ et père de trois filles, atravaillé en qualité d'aide de production au service de l'entrepriseX.________ SA, à T.________, à partir du 1erseptembre 2001. A ce titre, ilétait assuré auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en casd'accidents (CNA). Le vendredi 26 novembre 2004, l'intéressé a dîné en compagnie de son épouseet d'une de ses filles. Aux environs de 15 heures, il s'est rendu au caféY.________ à Z.________où il a consommé de la bière et a discuté avec desclients. Peu après 17 heures, il a quitté l'établissement. Il a été aperçu aumilieu de la voie de chemin de fer à la hauteur de la gare désaffectée deZ.________. Le train voyageur parti de W.________ à 17h10 en direction deV.________ l'a mortellement happé. Saisie d'une déclaration d'accident en décembre 2004, la CNA a recueilli lerapport de police du 16 décembre 2004 ainsi que divers témoignages de membresde la famille, de proches et de connaissances afin de connaître ledéroulement de la dernière journée du défunt et son état d'esprit. Sur cettebase, l'assureur-accidents a considéré que B.________ s'était donné la mortvolontairement et a refusé d'allouer des prestations - à l'exception del'indemnité pour frais funéraires - par décision du 10 juin 2005, confirméesur opposition le 26 juillet suivant. B.Par jugement du 5 juillet 2006, le Tribunal cantonal des assurances du cantondu Valais a rejeté le recours formé par A.________. C.Cette dernière interjette recours de droit administratif contre ce jugementdont elle demande l'annulation en concluant, sous suite de dépens, à ce quel'assureur-accidents lui alloue les prestations légales. La CNA conclut au rejet du recours tandis que l'Office fédéral de la santépublique n'a pas présenté de déterminations. Considérant en droit: 1.Le litige porte sur le point de savoir si le décès de B.________ est dû à unsuicide et, le cas échéant, si au moment où ce dernier a agi, il était, sansfaute de sa part, totalement incapable de se comporter raisonnablement. 2.Le jugement entrepris expose correctement les règles légales et lajurisprudence pertinentes, applicables au cas particulier, de sorte qu'ilsuffit d'y renvoyer. On ajoutera que selon la jurisprudence, celui qui prétend des prestationsd'assurance doit apporter la preuve de l'existence d'un accident, donc aussila preuve du caractère involontaire de l'atteinte et, en cas de suicide, lapreuve de l'incapacité de discernement au moment de l'acte au sens de l'art.16 CC (arrêt B. C. et D. du 9décembre 2003 [U 328/02], A. du 19 juin 1998 [U182/96], in SVZ/RSA 68/2000 p. 201; RAMA 1996 no U 247 p.171 consid. 2a,1988 no U 55 p. 362 consid. 1b). Dans la procédure en matière d'assurancesociale, régie par le principe inquisitoire, l'obligation des partiesd'apporter la preuve des faits qu'elles allèguent signifie seulement qu'àdéfaut, elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence depreuve. Cette règle de preuve ne s'applique toutefois que lorsqu'il estimpossible, en se fondant sur l'appréciation des preuves conformément auprincipe inquisitoire, d'établir un état de fait qui apparaisse au moinsvraisemblablement correspondre à la réalité (ATF 117 V 264 consid.3b et laréférence; SVZ/RSA 68/2000 p. 202). 3.La juridiction cantonale a retenu que malgré l'avertisseur sonore, le défuntest resté immobile au milieu de la voie de chemin de fer, sur son côtégauche, le visage face au Rhône. Cette attitude résignée parlait en faveurd'une décision irrémédiable de mettre fin à ses jours. Cet acte pouvaits'expliquer par le fait qu'il était en proie à des difficultés financières(75 actes de défauts de bien pour un montant total de 62'500 fr. Les dettesde son épouse s'élevaient à 24'659 fr. 75 en mai 2005) alors qu'il devaitsubvenir aux besoins de sa famille nombreuse. Certains témoignages laissaienten outre apparaître quelques dissensions conjugales. Enfin, sur son lieu detravail, son casier ne contenait plus d'effets personnels hormis une prise detéléphone et un gilet. En particulier, les souliers de sécurité, quin'étaient jamais utilisés en dehors de l'usine, ne s'y trouvaient plus. Lespremiers juges ont aussi considéré que B.________ n'était pas, au degré de lavraisemblance prépondérante, totalement incapable de discernement au momentdu drame. Selon la sommelière qui l'avait servi peu avant son décès, iln'apparaissait pas ivre. De plus, le défunt ne présentait pas de troublespsychiques graves susceptibles d'altérer son raisonnement et ne prenait pasnon plus de médicaments. Aussi, ont-ils nié la survenance d'un accident,l'exigence du caractère involontaire de l'atteinte n'étant pas réalisée. De son côté, la recourante fait valoir qu'en raison des manoeuvres àeffectuer par les conducteurs du train et le peu de visibilité, ceux-ci nepouvaient pas observer en détail le comportement de son mari, qui a peut-êtreessayé de bouger au dernier moment. Elle soutient en outre, comme en instancecantonale, que la peur a pu paralyser ses jambes, raison pour laquelle il estdemeuré statique sur la voie ferrée. Quant aux soucis financiers, ils étaienten partie résolus. 4.4.1Quoi qu'en dise la recourante, aucun élément du dossier ne permet demettre en doute le témoignage de C.________, l'un des deux conducteurs dutrain, selon lequel le défunt est demeuré immobile au centre de la voieferrée, sur le côté gauche, le visage face au Rhône au moment où le trains'approchait. Certes, la situation impliquait que plusieurs manoeuvres soienteffectuées, telles qu'actionner le frein d'urgence ainsi que l'avertisseursonore. Toutefois, ces manipulations ont été opérées par le deuxièmemécanicien si bien que C.________ pouvait observer la personne que le trainallait percuter sans avoir à accomplir d'autres tâches. Dès lors même si letémoin admet avoir fermé les yeux lorsque le choc devenait inévitable, ilétait, jusqu'au dernier moment, particulièrement bien placé pour observer lecomportement du défunt. 4.2 L'hypothèse de l'intéressée selon laquelle son mari aurait traversé lesvoies ferrées pour se rendre sur son lieu de travail et aurait été tétanisépar la peur, expliquant ainsi sa présence au milieu des rails et sonimmobilisme, n'est pas vraisemblable. D'une part, il ne ressort pas destémoignages recueillis que B.________ aurait eu l'intention de se rendre àson travail le jour du drame; d'autre part, la recourante n'allègue pas demotifs précis et convaincants qui auraient pu inciter son mari à se rendre àl'usine un vendredi en fin de journée, alors qu'il avait pris quelques joursde congé. Enfin, rien ne justifiait qu'il se soit trouvé sur les voies à cetendroit et à ce moment. Cela étant, on doit conclure, avec les premiersjuges, que B.________ est volontairement demeuré immobile sur la voie ferréelorsque le train voyageur parti de W.________ l'a happé. Objectivement, laprésomption qu'il s'est agi d'un accident est donc renversée. 4.3 En ce qui concerne la raison de cet acte, les premiers juges ont relevéde manière pertinente les indices, tirés des divers témoignages, plaidant enfaveur de l'existence de soucis, fondés ou non, tant sur le plan personnelque financier auxquels le défunt était en proie à l'époque du drame. Certes,la recourante a fourni quelques explications à ce sujet mais elles nepermettent toutefois pas une appréciation différente. En particulier, onobservera, contrairement à ce qu'elle affirme, que les problèmes financiersdu couple n'étaient de loin pas résolus comme le démontre notamment lesextraits du fichier des actes de défauts de biens des 28 avril et 18 octobre2005 figurant au dossier. 5.Enfin, on doit admettre, pour les motifs exposés par les premiers juges auconsidérant 3f du jugement entrepris, que le défunt n'était pas, au degré devraisemblance prépondérante, totalement incapable de discernement au momentde l'acte suicidaire. 6.Mal fondé le recours doit être rejeté. La procédure est gratuite, dès lorsqu'elle porte sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurance (cf.art.134 OJ). La recourante qui succombe n'a pas droit à des dépens (art. 159 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal desassurances du canton du Valais et à l'Office fédéral de la santé publique. Lucerne, le 19 octobre 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IIIe Chambre: p. le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.379/06
Date de la décision : 19/10/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-10-19;u.379.06 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award