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19/10/2006 | SUISSE | N°I.210/06

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 octobre 2006, I.210/06


Cause {T 7}I 210/06 Arrêt du 19 octobre 2006IIe Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffier : M.Cretton F.________, recourante, contre Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203Genève, intimé Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 26 janvier 2006) Faits: A.F. ________, née en 1959, travaillait à mi-temps comme femme de ménage et seconsacrait à l'entretien de son foyer pour le surplus. En arrêt maladiedepuis le 18 janvier 1998, elle n'a plus repris d'activité lucrative et arequis des prestations de l'assurance-invalid

ité le 23 novembre suivant. L'Office cantonal genevois de l...

Cause {T 7}I 210/06 Arrêt du 19 octobre 2006IIe Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffier : M.Cretton F.________, recourante, contre Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203Genève, intimé Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 26 janvier 2006) Faits: A.F. ________, née en 1959, travaillait à mi-temps comme femme de ménage et seconsacrait à l'entretien de son foyer pour le surplus. En arrêt maladiedepuis le 18 janvier 1998, elle n'a plus repris d'activité lucrative et arequis des prestations de l'assurance-invalidité le 23 novembre suivant. L'Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité (ci-après: l'Office AI)s'est procuré une copie du dossier de l'assureur-maladie: les médecinstraitants faisaient état d'une protrusion en L5-S1, d'une discopathie enL3-L4, de lombo-sciatalgies, d'une gastrite, d'obésité et d'un étatanxio-dépressif (rapports des docteurs G.________ et S.________ des 16 mars,26 juin et 3 décembre 1998); les experts mentionnaient une décompensationsous forme de syndrome douloureux chronique due à la difficulté del'activité, au manque d'intégration et à l'ignorance de la langue; leurpronostic quant à la reprise d'un travail était défavorable (rapports desdocteurs C.________, chirurgien, et A.________, interniste, des 25 mai et2octobre 1998). L'Office AI a également recueilli l'avis des praticiens qui se sont exprimésultérieurement. Le docteur G.________ a précisé son rapport; il notaitl'importance relative des affections diagnostiquées, ainsi que l'existenced'un adénome thyroïdien, d'un colon spastique et d'une stéatose hépatique(rapport du 6 février 1999). Le docteur S.________ a admis la présence d'unsyndrome douloureux et a décrit la symptomatologie dépressive (insomnie,irritabilité, etc.), ainsi que les limitations rencontrées par l'assurée; ilse prononçait pour une incapacité totale de travail (rapports des 15 mars et7 décembre 1999). Le docteur M.________, médecin traitant, n'a retenu aucuneaffection nouvelle; il estimait que l'intéressée était apte à travailler àmi-temps dans une activité ne nécessitant pas le port de charge ou la stationdebout (rapports des 19 avril 2000 et 4 avril 2002). L'administration a encore procédé à une enquête économique sur le ménage quiexposait la situation familiale et financière de F.________, ainsi que lesempêchements rencontrés dans l'accomplissement de ses tâches habituelles,sans en tirer de conclusions chiffrées (rapport du 24 octobre 2000). Enfin, la situation étant confuse (rapports des docteurs L.________ etE.________, médecins-conseil, ainsi que U.________, service médical de l'AIpour la région lémanique, des 16 et 24 avril, 18 juillet 2002),l'administration a mis en oeuvre une expertise bidisciplinaire. Les docteursP.________, rhumatologue et interniste, et B.________, psychiatre, ontdiagnostiqué des lombalgies chroniques communes, une obésité morbide, unadénome thyroïdien et une stéatose hépatique; l'examen psychiatrique n'a pasmontré de dépression majeure, ni de décompensation psychotique, de troublephobique ou de la personnalité morbide, ni de limitations fonctionnellesafférentes; le trouble douloureux assurait une aide et une sollicitudeaccrues de l'entourage, mais ne revêtait pas le caractère d'une comorbiditépsychiatrique; la capacité de travail était théoriquement complète dans uneactivité sédentaire n'exigeant pas le déplacement ou le port de chargessupérieures à 8 kg, ni le travail à genoux ou en antéflexion et enporte-à-faux statique du tronc; aucune mesure médico-chirurgicale ne pouvaitaméliorer la capacité de travail et un reclassement professionnel semblaitdifficile à envisager, compte tenu de l'absence totale de qualification, dela méconnaissance de la langue française et de l'analphabétisme de l'assurée;l'incapacité de travail était totale dans l'ancienne profession (rapport du19 mai 2003) Le docteur L.________ ne retenait aucun empêchement notable dansl'accomplissement des activités ménagères et estimait l'incapacité s'yrapportant à 15 ou 20 % (avis du 23 janvier 2004). Par décision du 29 janvier 2004 confirmée sur opposition le 6 avril suivant,l'Office AI a rejeté la demande de l'intéressée, considérant que celle-ciétait apte à travailler à 100 % dans une activité simple et légère et que lesempêchements rencontrés dans l'accomplissement des tâches ménagèresn'engendraient qu'un taux d'invalidité de 8 %. A l'appui de son opposition,F.________ avait déposé de nombreux rapports médicaux figurant déjà audossier pour la plupart et dont les diagnostics et conclusions étaient déjàconnus pour les autres (rapports des docteurs Q.________, G.________ etI.________, radiologues, ainsi que D.________ et T.________, division derhumatologie de l'Hôpital X.________, des 11 octobre 1994, 8 mars 1995, 10juin 1998 et 8 août 2000). B.L'assurée a déféré la décision sur opposition au Tribunal cantonal desassurances sociales. Elle concluait à l'octroi d'une rente entière, arguantnotamment d'une péjoration de son état de santé et de l'absence deconclusions chiffrées relatives à l'enquête économique sur le ménage, quiavait du reste été réalisée quatre ans auparavant. L'administration a fourni lesdites conclusions en se référant à son rapportdu 24 octobre 2000. L'intéressée a produit de nombreux certificats médicauxfaisant tous état d'éléments connus (rapports des docteurs H.________,Y.________ et Z.________, radiologues, W.________, V.________, J.________,K.________ et N.________, policlinique de médecine de l'Hôpital X.________,des 11 et 27 février, 22 juillet 1998, 14 mai 2003, 30 avril, 16 et 22novembre 2004) et d'une détérioration de la situation pour certains (rapportdes doctoresses X.________ et N.________, policlinique de médecine généralede l'Hôpital X.________, du 22 décembre 2005). La juridiction cantonale a débouté F.________ de ses conclusions (jugement du26 janvier 2006). C.L'assurée interjette recours de droit administratif contre ce jugement. Elleconclut à l'octroi d'une rente entière d'invalidité à partir du 1erdécembre1998 et, à titre subsidiaire, à la mise en oeuvre d'une expertise et d'unenouvelle enquête économique sur le ménage. L'Office AI a conclu au rejet du recours. L'Office fédéral des assurancessociales a renoncé à se déterminer. Considérant en droit: 1.1.1 Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d'invalidité,singulièrement sur le taux à la base de cette prestation. 1.2 La loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit desassurances sociales (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003,entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domainede l'assurance-invalidité. Conformément au principe selon lequel les règlesapplicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquementdéterminants se sont produits (ATF 130V445), le droit litigieux doit êtreexaminé à l'aune des dispositions de la LAI en vigueur jusqu'au 31 décembre2002, pour la période courant jusqu'à cette date, puis à celle de la nouvelleréglementation pour la période postérieure. Les dispositions de la novelle du21 mars 2003 modifiant la LAI (4e révision), entrées en vigueur le 1erjanvier 2004 (RO 2003 3852), sont régies par le même principe. Par ailleurs, le présent cas n'est pas soumis à la loi fédérale du 16décembre 2005 modifiant la loi fédérale sur l'assurance-invalidité, entrée envigueur le 1er juillet 2006 (RO 2006 2003), apportant notamment desmodifications relatives à la procédure conduite devant le Tribunal fédéraldes assurances (art. 132 al. 2 et 134 OJ), dès lors que le recours de droitadministratif a été formé avant le 1er juillet 2006 (ch.II let. c desdispositions transitoires relatives à la modification du 16 décembre 2005). 1.3 Le jugement entrepris expose correctement les normes (dans leur teneur envigueur jusqu'au 31 décembre 2002) et la jurisprudence relatives à ladéfinition de l'invalidité (art. 4 aLAI) et aux différentes méthodesd'évaluation de cette dernière (générale: art. 28 al. 2 aLAI; spécifique:art. 27 aRAI; mixte: art. 27bis aRAI). Dans la mesure où ces notions n'ontpas été modifiées par l'entrée en vigueur de la LPGA (cf. ATF 130 V 343) oune diffèrent de leur version antérieure que sur le plan rédactionnel ousystématique, il suffit de renvoyer aux considérants des premiers juges surces points. Il en va de même des principes jurisprudentiels applicables aurôle des médecins en matière d'invalidité, à la valeur probante de leursrapports, y compris ceux émanant des médecins traitants, et au principegénéral de diminution du dommage. On précisera encore que le nouveau droit n'a pas modifié l'échelonnement desrentes (art. 28 al. 1 LAI) en tant qu'il se rapporte au quart et à lademi-rente, mais qu'il permet désormais d'octroyer trois-quarts de rente àl'assuré dont le degré d'invalidité atteint 60 %, alors que le taux ouvrantdroit à une rente entière est passé de 66 2/3 à 70 %. 2.L'intéressée reproche aux premiers juges d'avoir retenu qu'elle était enmesure d'exercer une activité répétitive, non-qualifiée, dans l'industriemanufacturière; elle soutient de manière générale que son état de santé ne lelui permet pas. 2.1 On notera au préalable que tous les rapports médicaux figurant au dossierconcordent en ce qui concerne les diagnostics posés. En effet, les avis des nombreux spécialistes consultés en cours de procédureont été collectés par les médecins traitants successifs et figurent dans lesrapports de ces derniers. Il apparaît que la recourante souffraitprincipalement de douleurs lombaires (avec protrusion en L5-S1 etdégénérescence discale en L3-L4), d'obésité (morbide), ainsi que de problèmesà la glande thyroïde (adénome thyroïdien) et au foie (stéatose hépatique);certains praticiens ont également évoqués l'existence de troubles anxieux oudépressifs sans toutefois dépasser le stade de la simple constatation. Ceséléments se retrouvent à l'identique dans l'expertise mise en oeuvre parl'Office intimé; les docteurs P.________ et B.________ ont cependant exclul'existence de troubles psychiatriques invalidants (pas de troubles de lamémoire, de la concentration ou de l'attention; pas de signes de la lignéedépressive en faveur du diagnostic de dépression majeure; pas d'angoissespersistantes, ni d'attaques de panique; pas de troubles de la lignéepsychotique tels que délire ou hallucination; pas de troubles de lapersonnalité). On relèvera encore que l'intéressée faisait état de nombreuses doléances quine rencontraient pas d'écho sur le plan organique (syndrome douloureuxchronique, douleurs migrantes sans pathologie nette). 2.2 Les différentes opinions exprimées divergent cependant quant à lacapacité de travail découlant des handicaps retenus. La plupart des médecins se sont contentés d'émettre un pronostic peufavorable quant à une reprise éventuelle du travail, sans véritablementargumenter. Il semble en outre que ledit pronostic était plus lié au manqued'intégration, à la méconnaissance de la langue, à l'analphabétisme de larecourante et à sa situation financière familiale précaire, critères dontl'assurance-invalidité n'a pas à tenir compte (sur la portée des facteurspsychosociaux et socioculturels, cf. ATF 127V299 consid. 5a), qu'auxproblèmes de santé rencontrés par l'intéressée. Le docteur S.________ mentionnait l'impossibilité pour la recourante dereprendre une activité lucrative quelconque en raison de son caractère trèsalgique et de ses capacités intellectuelles limitées; il décrivait de façondétaillée les limitations auxquelles elle était soumise: positions à genoux,en inclinaison du buste, accroupies, longs parcours à pied, port de charge,mouvements répétitifs des membres ou du dos, horaires de travail irréguliersou de nuit, déplacements sur sol irrégulier ou en pente, travaux en hauteuret contacts interpersonnels. Le docteur M.________ retenait une capacité detravail de 50 % dans une activité sans port de charge, ni station debout sansplus ample motivation. Les experts ont conclu à une pleine capacité de travail dans une activitésédentaire, prohibant le déplacement et le port de charges supérieures à 8kg, ainsi que le travail à genoux, en antéflexion ou en porte-à-faux statiqueprolongé du tronc; ils ont par ailleurs pu observer une patiente souriante,avenante et collaborante, pouvant rester assise plus d'une heure sansressentir de gêne particulière, s'habillant et se déshabillant de manièrefluide, avec des enchaînements harmonieux. Ils ont également constaté unenette discordance entre les plaintes douloureuses majeures et lesconstatations objectives, ce qui suggérait une part d'amplification desplaintes. 2.3 Au regard de ce qui précède, les premiers juges étaient donc fondés àretenir une pleine capacité de travail dans une activité adaptée en seréférant principalement au rapport d'expertise. Ils ont à juste titre relevéque ledit rapport prenait en considération l'ensemble des affectionsprésentées par l'intéressée, ainsi que les interférences possibles entre cesdernières, et qu'il répondait parfaitement aux conditions posées par lajurisprudence en matière de valeur probante (cf. ATF 125 V 352 consid. 3a),ce qui n'était pas le cas des autres documents médicaux qui, soit étaientétablis par des médecins traitants dont on sait qu'ils ont tendance à prendreparti pour leur patient en raison de la relation de confiance qui les unit(cf. ATF 125V353 consid. 3b/cc), soit ne se référaient aucunement aucontexte ou à l'anamnèse et ne présentaient pas de conclusions documentées,soit n'avaient qu'une vision sectorielle de l'état de santé de la recourante. On ajoutera que les rapports médicaux déposés postérieurement à l'expertisene mentionnent aucune affection nouvelle et ne se prononcent pas sur lacapacité de travail; ils se contentent d'affirmer qu'une reprise sembledifficile, sans argument supplémentaire. Certains documents parlentd'aggravation de l'état de santé, mais il n'y a pas lieu d'en tenir compteétant donné qu'ils se prononcent sur une situation postérieure à la décisionlitigieuse (cf. ATF 121 V 366 consid. 1b). Par ailleurs, le dossier contenant suffisamment d'indications médicalesfiables, une expertise supplémentaire se révèle inutile. 3.L'intéressée sollicite en outre la mise en oeuvre d'une nouvelle enquêteéconomique sur le ménage. 3.1 On relèvera au préalable la contradiction entre cette demande et le faitde soutenir, en première instance, que son statut aurait été celui d'actif sison état de santé le lui avait permis. Cet argument a d'ailleurs été discutépar la juridiction cantonale qui a justement retenu que la recourante avaittoujours travaillé à mi-temps, même lorsqu'elle avait débuté son activité en1990 et que ses problèmes de santé ne se posaient pas encore, mais qued'autres facteurs, tels que les enfants en bas âge, auraient pu influencerson taux d'occupation d'alors. 3.2 Quoiqu'il en soit, une telle enquête détaillée a été réalisée en octobre2000; l'Office intimé n'a toutefois fourni les résultats découlant de
sesconstatations (pondération du champ d'activité, empêchement, degréd'invalidité) qu'en septembre 2004 (taux d'invalidité de 23 %). Dans lamesure où aucun élément médical n'attestait une aggravation de l'état desanté de la recourante prévalant à l'époque, cette façon de faire n'est pascritiquable, d'autant plus que les chiffres avancés par cette dernière eninstance cantonale ne reposaient sur aucun fondement médical, uniquement surdes impressions subjectives. On ajoutera au vu de ces résultats que le degréd'invalidité obtenu ne justifierait pas l'octroi d'une rente, quelque soit lestatut retenu (actif ou mixte). On constatera enfin que c'est seulement quatre ans après l'établissement desfaits que l'intéressée en a modifié sa version. Dans de telles circonstances,le Tribunal fédéral des assurances estime qu'il faut s'en tenir aux premièresdéclarations (ATF 121 V 47 consid. 2a et les références; VSI 2000 p. 201consid. 2d; voir également le commentaire de Kieser/Pribnow, paru in PJA 2000p. 1195). 3.3 Au regard de ce qui précède, il n'est donc pas nécessaire de procéder àune nouvelle enquête économique sur le ménage, les résultats figurant audossier étant suffisamment clairs pour en déduire des conclusions pertinentesquant à la capacité d'accomplir les tâches habituelles. Le recours est doncen tout point mal fondé. 4.Vu la nature du litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ dans sa teneuren vigueur jusqu'au 30 juin 2006). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal desassurances sociales et à l'Office fédéral des assurances sociales. Lucerne, le 19 octobre 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances La Présidente de la IIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.210/06
Date de la décision : 19/10/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-10-19;i.210.06 ?
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