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18/10/2006 | SUISSE | N°2A.83/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 18 octobre 2006, 2A.83/2006


{T 0/2}2A.83/2006 /fzc Arrêt du 18 octobre 2006IIe Cour de droit public MM. et Mme les Juges Merkli, Président,Betschart, Müller, Yersin et Camenzind, Juge suppléant.Greffier: M. Vianin. Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe surla valeur ajoutée (TVA),3003 Berne,recourante, contre X.________,intimé,représenté par Me Isabel von Fliedner, avocate, Commission fédérale de recours en matière de contributions, avenue Tissot 8,1006 Lausanne. taxe sur la valeur ajoutée; huissier judiciaire; puissance publique, recours de droit administratif contre la d

écision de la Commission fédéralede recours en matière de con...

{T 0/2}2A.83/2006 /fzc Arrêt du 18 octobre 2006IIe Cour de droit public MM. et Mme les Juges Merkli, Président,Betschart, Müller, Yersin et Camenzind, Juge suppléant.Greffier: M. Vianin. Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe surla valeur ajoutée (TVA),3003 Berne,recourante, contre X.________,intimé,représenté par Me Isabel von Fliedner, avocate, Commission fédérale de recours en matière de contributions, avenue Tissot 8,1006 Lausanne. taxe sur la valeur ajoutée; huissier judiciaire; puissance publique, recours de droit administratif contre la décision de la Commission fédéralede recours en matière de contributions du 9 janvier 2006. Faits: A.X. ________ (ci-après: l'assujetti ou l'intimé) est huissier judiciaire àGenève. Il est immatriculé dans le registre des assujettis à la taxe sur lavaleur ajoutée (ci-après: TVA) depuis le 1er janvier 1995. Les activités des huissiers judiciaires genevois sont notamment lessuivantes: - Ils établissent des constats, dressent des protêts, procèdent à des saisiesprovisionnelles et établissent des inventaires pour le compte de tiers. Letraitement fiscal de ces activités, qui sont soumises à la TVA, n'est paslitigieux en l'espèce. - Ils procèdent à des significations (notifications). - Ils interviennent lors de ventes aux enchères volontaires ou forcées. - Ils assurent un service auprès des tribunaux. - Ils interviennent au stade de l'exécution des jugements, notamment dans lecadre de procédures d'évacuation forcée de locataires. B.Les 11 et 12 octobre 1999 et 17 et 18 janvier 2000, l'Administration fédéraledes contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée(ci-après: l'Administration fédérale ou la recourante) a procédé auprès del'assujetti à un contrôle portant sur les périodes fiscales allant du 1ertrimestre 1995 au 2ème trimestre 1999. Au terme de ce contrôle, elle a établile décompte complémentaire no 121432, d'un montant de 137'825 fr. plusintérêts moratoires. L'assujetti a contesté ce décompte à hauteur de 136'500 fr. Il a notammentcritiqué l'imposition des droits d'enregistrement que le canton de Genèvepercevait par son intermédiaire. Il s'est également prévalu d'assurancesqu'il aurait reçues de l'Administration fédérale en invoquant le principe dela bonne foi. Par décision du 12 février 2003, l'Administration fédérale a ramené lemontant dû par l'assujetti au titre de la TVA pour les périodes fiscalesconsidérées à 106'182 fr. plus intérêts moratoires. Elle a admis que lesdroits d'enregistrement ne faisaient pas partie de la contre-prestation et nedevaient pas être soumis à la TVA. Pour le reste, elle a considéré que lesactivités énumérées ci-dessus n'impliquaient pas de rendre des décisionsobligatoires, de sorte qu'elles ne relevaient pas de la puissance publique etétaient imposables. Elle a également nié que les conditions du droit à laprotection de la bonne foi aient été réunies. La réclamation interjetée contre cette décision a été rejetée par décision du15 septembre 2004. Par compensation avec un solde créditeur de 16'955 fr. 55pour le troisième trimestre 1999, le solde de l'impôt dû pour les périodesfiscales allant du 1er trimestre 1995 au 2ème trimestre 1999 a été ramené à89'226 fr. 45 (= 106'182 ./. 16'955.55) plus intérêts moratoires. La décision sur réclamation a été déférée à la Commission fédérale de recoursen matière de contributions (ci-après: la Commission de recours ou l'autoritéintimée). Après avoir indiqué dans les considérants de sa décision du 9janvier 2006 que le recours devait être admis pour constatation incomplètedes faits et la cause renvoyée à l'Administration fédérale pour qu'elleétablisse l'état de fait déterminant et statue à nouveau (consid. 3c et 5),cette autorité a admis purement et simplement le recours dans le dispositifde sa décision. Elle a considéré que, s'agissant des activités de l'assujettiliées aux ventes aux enchères et à l'exécution des jugements ainsi que duservice auprès des tribunaux, les trois conditions de la délégation del'exercice de la puissance publique au sens de l'art. 17 al. 4 del'ordonnance du 22 juin 1994 régissant la taxe sur la valeur ajoutée (OTVA;RO 1994 II 1464 et les modifications ultérieures) étaient réunies. Lacondition que le délégataire puisse rendre des décisions en son propre nom,était, en particulier, réalisée, même si des voies de droit n'étaient pastoujours ouvertes à l'encontre des décisions; il ne s'agissait pas là, eneffet, d'un élément constitutif de la notion de décision dans le contexte dela délégation de l'exercice de la puissance publique au sens de ladisposition précitée. La Commission de recours a donc estimé que lesactivités de l'assujetti relevaient de la puissance publique, sauf si ellesconstituaient des prestations fournies et facturées directement au canton deGenève, à l'égard de qui l'assujetti ne pouvait exercer la puissancepublique. L'état de fait ressortant de la décision attaquée ne permettant pasde définir la part du chiffre d'affaires se rapportant à de tellesopérations, le dossier devait être retourné à l'Administration fédérale pourqu'elle détermine cette part et rende une nouvelle décision. Au demeurant, laCommission de recours a estimé que les conditions du droit à la protection dela bonne foi n'étaient pas réunies. C.Agissant par la voie du recours de droit administratif, l'Administrationfédérale demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens,d'annuler la décision du 9 janvier 2006 et de confirmer la décision surréclamation du 15 septembre 2004. Elle dénonce une violation de l'art.17 al.4 OTVA. La Commission de recours a renoncé à déposer des observations. Sur le fond,l'intimé conclut en substance à ce que le Tribunal de céans dise que lesémoluments qu'il a perçus sur la base de l'art. 17 du règlement d'exécutionde la loi genevoise sur les ventes volontaires aux enchères publiques (RS/GEI 2 30.01) ne sont pas soumis à la TVA et ordonne la restitution de l'impôt yrelatif, à ce qu'il dise qu'il s'est acquitté de l'intégralité des montantsdus au titre de la TVA pour les périodes fiscales litigieuses et annule ladécision sur réclamation du 15 septembre 2004 ainsi que le décomptecomplémentaire no 121432 et à ce qu'il déboute la recourante de toutes sesconclusions, le tout sous suite de frais et dépens. A titre préalable, ilrequiert son audition ainsi que celle du Procureur de la République et cantonde Genève. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.1.1 Lorsqu'il existe une contradiction entre le dispositif et la motivationd'une décision administrative ou d'un jugement, il convient - sous réserve dudroit à la protection de la bonne foi - d'en dégager le sens véritable, ens'écartant au besoin du sens littéral (ATF 120 V 496 consid. 1; C 280/95consid. 1c). En l'occurrence, il ressort clairement de la motivation de la décisionentreprise qu'elle conduit à l'admission partielle du recours et au renvoi dela cause à l'autorité intimée pour qu'elle complète l'état de fait et statueà nouveau. Le fait que le dispositif prononce l'admission pure et simple durecours semble procéder d'une inadvertance. On est donc en présence d'unedécision de renvoi. Le prononcé par lequel une autorité renvoie la cause à l'autorité inférieurepour qu'elle rende une nouvelle décision constitue en principe une décisionincidente. Il s'agit en effet d'une simple étape avant la décision finale quidoit mettre un terme à la procédure. Une décision de renvoi revêt en revanchele caractère d'une décision finale si elle tranche une question de principede manière à lier l'autorité inférieure (ATF 129 I 313 consid. 3.2; 118 Ib196 consid. 1b). Tel est bien le cas en l'espèce, dans la mesure oùl'autorité intimée a jugé que seules les prestations que l'intimé fournissaitet facturait directement au canton de Genève étaient soumises à l'impôt, lesautres relevant de la puissance publique et étant exonérées. 1.2 Dirigé contre une décision finale qui a été prise par une commissionfédérale de recours (art. 98 lettre e OJ) et qui est fondée sur le droitpublic fédéral, le présent recours, qui a été déposé en temps utile et - quoiqu'en dise l'intimé - dans les formes prescrites par la loi, est recevable envertu des art. 97 ss OJ ainsi que des art. 54 al. 1 OTVA et 66 al. 1 de laloi fédérale du 2 septembre 1999 régissant la taxe sur la valeur ajoutée (loisur la TVA, LTVA, entrée en vigueur le 1er janvier 2001; RS 641.20). En vertu des art. 54 al. 2 OTVA et 66 al. 2 LTVA, l'Administration fédérale aqualité pour recourir (art. 103 lettre b OJ). 1.3 Dans la procédure de recours de droit administratif, la possibilité dedéposer un recours joint n'existe que lorsque la loi le prévoit. Tel n'estpas le cas en matière de TVA (cf. 2A.253/2000, Archives 71 p.251, consid.1c). Par conséquent, les conclusions dans lesquelles l'intimé demande, sur lefond, autre chose que le rejet du recours, sont irrecevables. 1.4 Lorsque le recours est dirigé, comme en l'occurrence, contre la décisiond'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faitsconstatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ouincomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles deprocédure (art. 104 lettre b et 105 al. 2 OJ; ATF 132 I 42 consid. 3.1p.43/44). Aussi la possibilité d'alléguer des faits nouveaux ou de fairevaloir de nouveaux moyens de preuve est-elle très restreinte (ATF 130 II 149consid. 1.2 p. 154; 128 II 145 consid. 1.2.1 p. 150). Selon la jurisprudence,seules sont admissibles dans ce cas les preuves que l'instance inférieureaurait dû retenir d'office, et dont le défaut d'administration constitue uneviolation de règles essentielles de procédure (ATF 131 II 548 consid. 2.4 p.551; 128 II 145 consid. 1.2.1 p. 150). 1.5 L'intimé requiert son audition ainsi que celle du Procureur de laRépublique et canton de Genève, au demeurant sans indiquer précisément cequ'il entend prouver par ce moyen. La Cour de céans s'estime toutefoissuffisamment renseignée sur la base des pièces du dossier, si bien qu'il siedd'écarter cette requête. 2.L'ordonnance régissant la taxe sur la valeur ajoutée, entrée en vigueur le1er janvier 1995, a été remplacée par la loi fédérale du même nom, du 2septembre 1999, entrée en vigueur le 1er janvier 2001. Selon l'art. 93 al. 1LTVA, les dispositions abrogées et leurs dispositions d'exécution restentapplicables, sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce, à tous lesfaits et rapports juridiques ayant pris naissance au cours de leur durée devalidité. L'ordonnance régissant la taxe sur la valeur ajoutée s'applique dèslors au présent litige, qui porte sur les périodes fiscales allant du 1ertrimestre 1995 au 2ème trimestre 1999. 3.L'art. 17 al. 4 OTVA dispose ce qui suit:"La Confédération, les cantons et les communes, les autres institutions dedroit public ainsi que les personnes et organisations auxquelles ont étéconfiées des tâches relevant de l'administration publique ne sont pasassujettis pour les prestations qu'ils fournissent dans l'exercice de leurpuissance publique, même s'ils prélèvent, pour de telles prestations, destaxes, des redevances ou d'autres contributions. [...] Les activités fourniescontre rémunération énumérées de manière non exhaustive dans l'annexe à laprésente ordonnance sont, dans tous les cas, imposables."Selon la lettre de cette disposition, la notion d'exercice de la puissancepublique est plus étroite que celle d'exécution de tâches relevant del'administration publique. Il ne suffit dès lors pas qu'une personne se soitvue confier de telles tâches pour qu'elle soit exonérée, encore faut-ilqu'elle fournisse des prestations dans l'exercice de la puissance publique(2A.93/1999, Archives 69 p. 882, RDAF 2000 II p. 83, RF 55/2000 p. 55,consid. 3c). L'ordonnance régissant la taxe sur la valeur ajoutée ne définit pas la notionde puissance publique. L'art. 17 al. 4 OTVA introduisant une exception auprincipe de la généralité de l'imposition qui découle de la nature de la TVAcomme impôt général sur la consommation, cette notion doit être interprétéede manière autonome et plutôt étroite (2A.233/1997, précité, consid. 4a),conformément à la nature de l'impôt et au principe de la neutralitéconcurrentielle, tout en permettant une application plus simple de la loi.Selon la jurisprudence, une collectivité agit dans l'exercice de la puissancepublique si elle prend des décisions par lesquelles elle oblige, de manièrecontraignante, une ou plusieurs personnes à accomplir un acte ou à s'enabstenir, décisions dont elle peut au besoin obtenir l'exécution. Cetexercice se caractérise par un rapport de subordination. Le transfert del'exercice de la puissance publique à des organismes privés requiert toujoursune délégation légale, voire constitutionnelle. Une personne ou uneorganisation chargée de tâches relevant de l'administration publique fournitdes prestations relevant de la puissance publique au sens de l'art. 17 al. 4OTVA lorsqu'elle remplit les trois conditions cumulatives suivantes: a) lacollectivité déléguante a elle-même la compétence juridique d'effectuerl'activité en cause en exerçant la puissance publique; b) la délégation dudroit d'accomplir cette activité à une personne ou à une organisation estprévue par la loi; c) l'organisation ou la personne qui agit en exerçant lapuissance publique peut prendre en son propre nom des décisions au sens del'art. 5 PA, à l'encontre desquelles des voies de recours sont ouvertes(2A.93/1999, précité, consid. 4b et 4c). Dans une affaire récente, le Tribunal fédéral a précisé que l'habilitation dedéléguer le pouvoir de rendre des décisions devait être contenue dans unebase légale formelle. Outre qu'elle est conforme aux règles posées par ledroit administratif et constitutionnel, l'exigence d'une telle base légalereprésente en effet un critère d'application simple - tant pour lesassujettis que pour l'administration fiscale -, alors qu'il est souventdifficile de déterminer si, lorsqu'il exécute les tâches publiques qui luisont confiées, le délégataire rend des décisions contraignantes (2A.167/2005,consid. 10.2). Selon son texte, l'art. 17 al. 4 OTVA vise la situation où la collectivitépublique ou son délégataire fournit des prestations en exerçant la puissancepublique et où l'administré à l'égard de qui celle-ci s'exerce verse encontrepartie une "taxe", une "redevance" ou une "autre contribution".L'existence d'un rapport d'échange entre les prestations fournies et la"contribution" n'empêche pas que celles-là relèvent de la puissance publique(voir la formulation "même s'ils prélèvent [...]). D'un autre côté, pour quela question de la qualification des prestations se pose, il doit exister unecontre-prestation, car, à défaut, les prestations ne sont pas faites à titreonéreux et, partant, ne sont de toute manière pas soumises à l'impôt (art. 4lettres a et b OTVA). De plus, les prestations prétendument fournies dansl'exercice de la puissance publique doivent se trouver dans un rapportd'échange avec la contribution
versée par l'administré. Cette condition revêtune importance particulière en cas de délégation de la puissance publique.Elle implique en effet de distinguer deux rapports juridiques: d'une part,les relations entre la collectivité déléguante et le délégataire et, d'autrepart, les rapports entre ce dernier et l'administré à l'égard de qui lapuissance publique est exercée et qui verse la contribution; selon sestermes, c'est seulement à ces seconds rapports que l'art. 17 al. 4 OTVAs'applique (cf. 2A.384/2001, Archives 72 p. 226, RDAF 2002 II p. 265, consid.4.4; 2A.105/2000, Archives 70 p. 92, RDAF 2001 II p.535, consid. 5). De mêmeque le délégataire doit pouvoir rendre des décisions en son propre nom, sesprestations doivent être facturées à l'administré à l'égard de qui lapuissance publique est exercée (soit en général au destinataire de ladécision), et non pas à la collectivité déléguante. Cela implique que ledélégataire exerce son activité de manière indépendante - ce qui n'exclut pasun certain contrôle de la part de celle-là - et pour son propre compte(Rivier/Rochat Pauchard, Droit fiscal suisse, La taxe sur la valeur ajoutée,Fribourg 2000, p.180). En outre, des prestations ne sont fournies dans l'exercice de la puissancepublique que si elles ne sont pas commercialisables et ne sont pas ou nepourraient pas être fournies par un tiers, ce principe visant à garantir laneutralité concurrentielle. Le fait que les prestations en cause ont unevaleur économique constitue un indice qu'elles ne sont pas fournies dansl'exercice de la puissance publique, mais qu'elles revêtent un caractèrecommercial et sont effectuées contre rémunération, l'émolument ou ce qui entient lieu en représentant la contre-prestation (ATF 125 II 480 consid. 8b et8d; 2A.92/1999, Archives 70 p. 163, SJ 2000 I p. 396, consid. 8c). L'annexe àl'ordonnance régissant la taxe sur la valeur ajoutée contient une liste - nonexhaustive - d'activités de collectivités ou d'organismes délégataires detâches publiques, qui sont réputées commerciales et, partant, imposables (cf.aussi art. 23 al. 2 LTVA). 4.4.1S'agissant des prestations liées aux ventes aux enchères, la recourantedistingue entre les ventes aux enchères volontaires, organisées pour lecompte de maisons de ventes, celles que l'intimé est chargé d'organiser parle Département des institutions du canton de Genève et celles dontl'organisation lui est confiée par l'Office des poursuites et des faillites.Dans le premier cas, la collectivité déléguante elle-même, à savoir l'Etat deGenève, n'aurait pas de prérogatives de puissance publique en relation avecce type d'enchères. De plus, en organisant celles-ci, l'intimé se limiteraità effectuer des actes matériels; les mesures qu'il peut prendre neconstitueraient pas des décisions contraignantes. Cette dernière conditionferait défaut également dans les deux autres cas, où, par ailleurs, il seraitétabli (ventes aux enchères sur réquisition du Département des institutions)ou hautement vraisemblable (ventes de biens en mains de l'Office despoursuites et faillites) que l'intimé facture ses prestations à l'Etat. Dansle cadre du service auprès des tribunaux, l'intimé accomplirait des actespurement matériels, en facturant de plus ses prestations à l'Etat de Genève.S'agissant de ses activités en relation avec l'exécution des jugementsd'évacuation, la norme de délégation serait insuffisante et l'intimé selimiterait à des actes purement matériels. 4.2 L'intimé critique en partie les faits retenus par la recourante, oul'appréciation que cette dernière en a faite. De son point de vue, il y alieu de s'en tenir à l'état de fait ressortant de la décision attaquée. Selon l'intimé, l'exercice de la puissance publique ne présuppose pas lacompétence de rendre des décisions au sens de l'art. 5 PA, mais, pluslargement, celle de faire usage de la contrainte dans l'intérêt public,condition qui est réalisée en relation avec de nombreux actes matériels(Realakte). L'intimé conteste également le point de vue de l'autorité intiméeselon lequel les prestations qu'il facture à l'Etat de Genève ne relèvent pasde la puissance publique; à son avis, seule la nature de l'activité exercéeest déterminante au regard de l'art. 17 al.4 OTVA. Par ailleurs, le fait quela recourante refuse de prendre en considération les prérogatives depuissance publique que l'Etat de Genève a attribuées aux huissiersjudiciaires serait contraire à l'art. 3 de la Constitution fédérale. S'agissant plus spécifiquement des ventes aux enchères, l'intimé agirait enqualité d'officier public représentant l'autorité et chargé de la police desenchères. Dans le cas des enchères volontaires, son intervention prendrait laforme d'actes matériels mais aussi de décisions sujettes à «plainte». Dansle cas des enchères déléguées par l'Office des poursuites et des faillites ouordonnées par autorité de justice, l'intimé agirait au nom et pour le comptede l'Etat déléguant, dans le cadre de l'exécution des jugements, laquellefait partie de l'exercice du pouvoir judiciaire. S'agissant du service auprèsdes tribunaux, l'intimé serait chargé notamment de la police des audiences etserait amené à prendre des décisions. Son activité ferait partie del'exercice du pouvoir judiciaire, comme celle qu'il déploie en relation avecl'exécution des jugements. Les prestations que l'intimé fournit dans cedernier cadre relèveraient donc également de la puissance publique, même s'ilfallait les qualifier d'actes matériels. 5.5.1Dans le canton de Genève, les huissiers judiciaires sont des officiersministériels au même titre que les notaires. Il s'agit d'une professionlibérale indépendante dont les membres ne sont pas inscrits au registre ducommerce (site Internet officiel de l'Etat de Genève, rubrique «Chambre deshuissiers judiciaires de Genève»). Le statut des huissiers judiciaires est régi notamment par les art. 144 ss dela loi genevoise sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (RS/GE E 205; ci-après: LOJ), par le règlement du Conseil d'Etat sur l'exercice de laprofession d'huissier judiciaire, du 3 juillet 1964 (RS/GE E 6 15.04;ci-après: le règlement) et par celui fixant le tarif des émoluments deshuissiers judiciaires, du 31 octobre 1984 (RS/GE E 6 15.06; ci-après: letarif). Au nombre de neuf (art. 1 du règlement), les huissiers judiciaires sontnommés par le Conseil d'Etat (art. 144 LOJ). Ils ont pour tâchesd'instrumenter dans toute l'étendue du canton et d'assurer le service prèsles tribunaux. Ils sont en outre chargés de tous les actes que la loi leurconfie, en particulier des ventes aux enchères volontaires ou par autorité dejustice. Ils peuvent être appelés à suppléer les huissiers du Parquet ou ceuxde l'office des poursuites et de l'office des faillites (art. 147 al. 1, 3 et4 LOJ). Les huissiers judiciaires «sont tenus d'exercer leur ministèretoutes les fois qu'ils en sont requis et sans acception de personne» (art.12 al. 1 du règlement). Dans l'exercice de leurs activités, ils sont tenus ausecret de fonction (art. 13 al. 1 du règlement) et sont soumis à lasurveillance d'une commission (art. 149 al. 1 LOJ). Sous réserve des art. 17et 18 du règlement d'exécution de la loi sur les ventes volontaires auxenchères publiques, ils ne peuvent réclamer d'autres émoluments ou honorairesque ceux prévus par le tarif (art. 9 al. 1 du tarif). Les contestations yrelatives sont tranchées par une commission de taxation (art. 9 al. 2 dutarif). 5.2 En matière de ventes volontaires aux enchères publiques, les obligationsdes huissiers judiciaires sont déterminées par la loi sur les ventesvolontaires aux enchères publiques, du 24 juin 1983 (RS/GE I 2 30; ci-après:la loi sur les ventes volontaires) et par le règlement d'exécution decelle-ci, précité (art. 15 du règlement sur l'exercice de la professiond'huissier judiciaire). En principe, toute vente volontaire aux enchères publiques d'objets mobiliersdoit être faite par l'intermédiaire d'un huissier judiciaire, agissant enqualité d'officier public (art. 1 al. 1 de la loi sur les ventes volontaires)au sens de l'art. 61 al. 1 CO, dont les rapports avec le vendeur ne sont doncpas soumis aux règles du code des obligations sur le mandat, mais au droitpublic cantonal (rapport de la commission chargée d'examiner le projet de loisur les ventes volontaires aux enchères publiques, Mémorial des séances duGrand Conseil 1981 p.3273 ss, 3307 ad art. 19). Les enchères sont dirigéespar l'huissier ou par un crieur par qui il peut se faire assister, sous saresponsabilité (cf. art. 1 al. 2 de la même loi). L'huissier détermine de casen cas les clauses essentielles des conditions de vente (art. 8 al. 1 durèglement d'exécution de celle-ci). Il exerce la police des enchères. Ilveille à ce que le libre jeu des enchères ne soit en aucune façon entravé oufaussé (art. 17 al. 1 et 2 de la même loi). Il lui est interdit d'exercer sesfonctions pour la vente d'objets qui compromettent les bonnes moeurs oul'ordre public ou qu'il sait ou doit savoir être le produit d'une infractionou être frappés d'un droit faisant obstacle à la vente (art. 3 al. 2 de lamême loi). L'huissier dresse ou fait dresser sous sa responsabilité leprocès-verbal de la vente (art. 10 al. 1 de la même loi), lequel doit porterson sceau et sa signature (art. 15 al. 2 du règlement d'exécution decelle-ci). Des extraits du procès-verbal ne peuvent être communiqués, surdemande écrite et motivée, qu'aux personnes justifiant d'un intérêt légitimeà l'obtention des renseignements qu'ils contiennent; la décision appartientau chef du Département de justice, police et sécurité (art. 16 al. 1 et 3 durèglement d'exécution). Pour le cas où l'adjudication est contestée, l'art. 9al. 5 de la loi sur les ventes volontaires dispose ce qui suit:«En cas de contestation, l'huissier décide si l'enchère est valable; aubesoin, il annule immédiatement l'adjudication. Il inscrit sa décision auprocès-verbal en indiquant et la cause de la contestation et les motifs de sadécision. Il rouvre les enchères.»Selon les travaux préparatoires, l'huissier ne tranche pas le litige endernier ressort, car, en vertu de l'art. 230 CO, tout intéressé peut saisirle juge, dans les dix jours, aux fins de faire annuler les enchères dont lerésultat a été altéré par des manoeuvres illicites ou contraires aux moeurs.La mention de la contestation au procès-verbal permet au juge de statuer enconnaissance de cause (séance du Grand Conseil du 17 septembre 1981,intervention de Bernard Ziegler, Mémorial des séances du Grand Conseil 1981,p. 3334; voir toutefois Denis Piotet, Droit cantonal complémentaire, Traitéde droit privé suisse vol. I t. II, Bâle/Francfort-sur-le-Main 1998, p. 346no 1062 et Jean-Paul Vulliéty, Commentaire Romand, Code des obligations I,Genève/Bâle/Munich 2003, no 39 ad art. 230 CO, selon lesquels la faculté quecertains cantons confèrent à l'autorité qui dirige les enchères de statuersur l'adjudication en cas de contestation est indépendante de la voie del'art. 230 CO). Pour les prestations qu'il fournit dans l'exercice de ses fonctionsd'officier public, l'huissier perçoit des émoluments équivalant à unpourcentage du "produit brut et total de la vente des objets mis en vente parle même vendeur", augmenté du "dixième du prix de réserve total des objetsappartenant au même vendeur retirés faute d'enchères suffisantes" (art. 13 dela même loi; art. 17 al. 1 du règlement d'exécution de celle-ci). Lepourcentage est fixé par un barème dégressif figurant à l'art. 17 al. 1 durèglement d'exécution; le taux (compris entre 0,18 et 4%) décroît à mesureque le produit servant de base de calcul augmente et que le nombre devendeurs regroupés dans une même vente s'accroît. Les émoluments sont à lacharge des vendeurs (cf. rapport précité, Mémorial des séances du GrandConseil 1981 p.3304 ad art. 13). A côté de son ministère, l'huissier peut être mandaté aux fins d'organiser lavente (art. 4 de la même loi). Dans ce cas, il facture des honoraires (art.18 du règlement d'exécution), qui sont soumis à la TVA. Il ressort du rapport de révision et de factures figurant au dossier quel'intimé a facturé ses prestations aux maisons de vente. Les factures enquestion, au nombre de quinze, contiennent d'ailleurs le poste "honoraires"(trois d'entre elles précisent: "honoraires selon tarif de la Chambre deshuissiers judiciaires de Genève"), sans mentionner les émoluments. 5.3 Les huissiers judiciaires procèdent également à des ventes aux enchèrespar autorité de justice (art. 147 al. 3 LOJ). Ainsi, ils sont chargés par leDépartement des institutions (auparavant Département de justice, police etsécurité) du canton de Genève de procéder à la vente aux enchères - autoriséepar le juge - des biens entreposés dans le garde-meuble de l'Etat à la suited'évacuations. Ils facturent alors leurs émoluments et leurs honoraires auDépartement précité. De telles ventes constituent des ventes judiciairesmobilières régies par les art. 498 à 502 de la loi de procédure civile ducanton de Genève du 10 avril 1987 (RS/GE E 3 05; ci-après: LPC). Elles ontlieu «par le ministère d'un notaire ou d'un huissier commis à cet effet»(art. 498 LPC). En pratique, le notaire désigne un huissier pour la vente etassiste à celle-ci (Bertossa/Gaillard/Guyet/Schmidt, Commentaire de la loi deprocédure civile du canton de Genève du 10 avril 1987, Genève 1989 ss, no 5ad art. 498). L'art. 9 de la loi sur les ventes volontaires est applicablepar analogie à l'adjudication (Bertossa/Gaillard/Guyet/Schmidt, op. cit., no3 ad art. 499). Enfin, les huissiers judiciaires sont également mandatés par l'Office despoursuites et des faillites aux fins de vendre aux enchères les objets qui setrouvent sous la garde de celui-ci. Ces ventes relèvent de l'exécution forcéeet sont régies exclusivement par le droit fédéral(Bertossa/Gaillard/Guyet/Schmidt, op. cit., no 1 ad art. 498 ss),principalement par la loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pourdettes et la faillite (LP). 5.4 Dans le cadre du service auprès des tribunaux, les huissiers judiciairesprocèdent aux significations en matière civile (art. 10 LPC) et pénale (art.37, 220, 223 et 254 du code de procédure pénale du 29septembre 1977 [RS/GE E4 20; ci-après: CPP]). Ils n'ont pas le monopole des significations quipeuvent également être effectuées par le greffe (en matière civile, art. 10LPC) et, pour certains actes pénaux, par un agent de la force publique ou parle greffe (dispositions précitées du CPP). Le tarif fixe les émoluments quisont dus aux huissiers judiciaires pour les significations (art. 1 et 4). Lecas échéant, ces émoluments sont dus par la partie qui requiert lanotification (cf. la "note de frais et honoraires" de l'intimé du 20 avril1999). Par ailleurs, les huissiers judiciaires assurent le service des audiencesauprès des tribunaux civils et pénaux. Ils exécutent les ordres du présidentpour tout ce qui est relatif à l'audience et ils accompagnent le tribunal oules juges dans leurs transports sur les lieux (art. 18 al. 1 du règlement).Ils assurent
la police des audiences pendant les suspensions, lorsque leprésident du tribunal n'est pas présent dans la salle. Ils procèdent à lavérification des convocations et de l'identité des parties et des témoins. Cesont eux qui décident si une personne est autorisée à entrer dans la salled'audience. Au pénal, ils vérifient la liste des jurés et l'existenced'éventuels motifs de récusation. Le tarif fixe les émoluments dus auxhuissiers judiciaires (art. 8) qui les facturent aux juridictions concernées.Ces émoluments font partie des «frais exposés dans la cause», qui sont misà la charge de la partie qui succombe (art. 176 al. 1, 181 al. 1 et al. 2lettre b LPC). 5.5 Les huissiers judiciaires interviennent au stade de l'exécution desjugements (cf. art. 45 al. 2 et 105 LOJ, cette dernière disposition énonçantla formule qui doit figurer sur les expéditions exécutoires de tous les acteset jugements), plus précisément des jugements civils portant sur autre chosequ'une somme d'argent ou des sûretés à fournir, c'est-à-dire en dehors duchamp d'application de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et lafaillite. La procédure d'exécution est la suivante. L'autorité compétente pour l'exécution des jugements en question est leMinistère public (art. 45 al. 1 LOJ). Celui-ci «peut, sur la demande desparties, enjoindre aux huissiers de prêter leur ministère et requérirmain-forte, lorsque c'est nécessaire» (art. 45 al. 2 LOJ). Il peut engagerdirectement les agents de la force publique (art. 45 al. 3 LOJ). L'exécution doit être précédée d'une sommation faite au débiteur de seconformer au jugement, qui est effectuée par acte d'huissier. La sommationreproduit le dispositif du jugement et rappelle la teneur de l'art. 477 LPC(art. 473 al. 1 et 2 LPC), disposition selon laquelle toutes lescontestations qui s'élèvent sur l'exécution forcée sont de la compétence duTribunal de première instance. Si le débiteur n'obtempère pas, le jugement est exécuté sur ordre duProcureur général (art. 474 al. 1 LPC). L'exécution est opérée par lacontrainte, par l'intervention d'un huissier judiciaire ou, si nécessaire,par la police. L'huissier judiciaire présente au débiteur la décisiond'exécution du Procureur général; en cas de besoin, il peut faire appel à lapolice (courrier du Procureur général à l'intimé du 10 mars 2006). Dans tousles cas, l'huissier judiciaire dresse un procès-verbal de l'exécution (art.475 LPC). S'agissant en particulier d'une décision d'évacuation, avant qu'il ne soitprocédé à l'exécution, le Procureur général convoque les parties. Après lesavoir entendues, il peut, «pour des motifs humanitaires, surseoir àl'exécution dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement dulocataire» (art. 474A al. 1 et 2 LPC). Cette compétence de surseoir àl'exécution pour des motifs humanitaires appartient donc au Procureur généralet non à l'huissier judiciaire, comme l'indique la décision attaquée. Pour sapart, l'huissier judiciaire se rend sur place muni de l'ordonnanced'exécution du Procureur général. Selon les cas, il fait changer lescylindres de la porte d'entrée par le serrurier qui l'accompagne, se faitremettre une clef par les occupants à qui il accorde un bref délai pourdéménager ou fait expulser ceux-ci par la police. Les huissiers judiciaires perçoivent des émoluments pour l'établissement duprocès-verbal de l'exécution et leur déplacement sur les lieux (art. 7 al. 1et 4 du tarif). «Exceptionnellement», ils peuvent facturer à la partie quirequiert l'exécution des honoraires «en rapport avec l'importance du travailnécessité par l'exécution d'un jugement» (art. 7 al. 5 du tarif). 6.6.1L'intervention des huissiers judiciaires en qualité d'officiers publicslors des ventes aux enchères volontaires tend à assurer le respect desprescriptions légales et le bon déroulement des enchères. Leur rôle relève dela juridiction gracieuse (Piotet, op. cit., p. 343 nos 1048 s. spéc. n. 23).Opposée à la juridiction contentieuse, la juridiction gracieuse ou noncontentieuse est définie de diverses manières par la doctrine (voir l'aperçuin Fridolin Walther, Die aktuelle Situation der Freiwilligen Gerichtsbarkeitnach schweizerischem Recht, Zeitschrift für Zivilprozess 2004, p. 421 ss, 429ss). Les auteurs s'accordent à dire qu'elle désigne l'activité d'une autoritéjudiciaire ou administrative dans des affaires non contentieuses tendant à lacréation, la modification ou la suppression de droits privés (voir enparticulier les définitions de Hohl, Kummer, Staehelin/Sutter et Walder,citées par Walther, loc. cit.). Certains auteurs précisent qu'il s'agit d'uneactivité administrative («Verwaltungstätigkeit»: Guldener et Walder citéspar Walther, loc. cit.) et souveraine (« hoheitliche Tätigkeit»:Staehelin/Sutter cités par Walther, loc. cit.; «obrigkeitliches Verfahren»:Max Guldener, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3ème éd., Zurich 1979, p.42). L'exercice de la juridiction gracieuse dans le cadre des ventes auxenchères volontaires représente ainsi l'exécution d'une tâche relevant del'administration publique; les cantons tirent leur compétence en la matièrede l'art. 236 CO (Piotet, op. cit., no 1037). S'agissant de savoir si l'activité en question relève de la puissancepublique, il convient de distinguer deux rapports: d'une part, les relationsentre les maisons de vente et les huissiers et, d'autre part, les rapportsentre ces derniers et les participants aux ventes aux enchères (vendeurs etenchérisseurs/acheteurs). Le litige porte sur le traitement fiscal desémoluments que les huissiers facturent aux maisons de vente; c'est ainsi lepremier rapport qui est en cause. Ce rapport relève du mandat. Il est vraique les maisons de vente chargent les huissiers d'une tâche prévue par laloi; cela ne change toutefois rien au caractère imposable des prestationsfournies (art. 7 OTVA), car les relations des huissiers avec les maisons devente ne représentent pas un exercice de la puissance publique à l'égard deces dernières. Les huissiers exercent la police des enchères à l'égard desparticipants aux ventes aux enchères (qui au demeurant ne leur versent riendirectement). Il s'agit d'autres rapports juridiques. Par conséquent, àsupposer même que cette dernière activité relèverait de la puissancepublique, elle ne saurait conduire à l'exonération des émoluments versés parles maisons de vente, car elle ne se trouve pas dans un rapport d'échangeavec eux. 6.2 S'agissant des ventes aux enchères judiciaires des biens entreposés dansle garde-meuble de l'Etat et des ventes aux enchères forcées de biens enmains de l'Office des poursuites et faillites, il convient également dedistinguer les rapports entre les huissiers et le Département desinstitutions ou l'Office des poursuites et faillites, d'une part, et lesrelations entre les huissiers et les intéressés dans la procédure de venteaux enchères judiciaires ou forcées (enchérisseurs/acheteurs, poursuivi oufailli), d'autre part. Le litige porte sur le traitement fiscal des montantsque les huissiers facturent aux organes de l'Etat de Genève; il concerne doncles premiers rapports, alors que l'activité relevant prétendument de lapuissance publique s'exerce dans les seconds. Or, l'art. 17 al. 4 OTVA n'apas vocation à s'appliquer dans les rapports entre la collectivité et ledélégataire supposé (cf. consid. 3 ci-dessus). De manière générale, l'activité de l'Office des poursuites et des failliteset du Département des institutions, qui sont des organes de l'Etat de Genève,relève de la puissance publique. C'est ainsi que la notice no 2, à l'usagedes offices de poursuites et faillites, éditée par l'Administration fédéralele 7 février 1995, prévoit que les émoluments que ceux-ci perçoivent en vertude l'ordonnance sur les frais applicable à la loi fédérale sur la poursuitepour dettes et la faillite (actuellement ordonnance du 23 septembre 1996 surles émoluments perçus en application de la loi fédérale sur la poursuite pourdettes et la faillite; OELP; RS 281.35) ne sont pas soumis à la TVA (pt 1;cf. aussi Camenzind/Honauer/Vallender, Handbuch zum Mehrwertsteuergesetz,2ème éd., Berne/Stuttgart/Vienne 2003, n. 306). L'intimé ne peut toutefoiss'en prévaloir en arguant que, dès lors qu'il prend part à la procédure, ilagit lui aussi dans l'exercice de la puissance publique. En réalité, enchargeant les huissiers de réaliser les ventes aux enchères, l'Office despoursuites et des faillites et le Département des institutions externalisent(outsourcing) certaines de leurs tâches. Il s'agit d'un mandat dans le cadreduquel l'huissier facture ses prestations à l'organe de l'Etat qui l'amandaté. Comme le relève à juste titre l'autorité intimée, l'huissier nesaurait exercer la puissance publique à l'égard de l'Etat de Genève. Ausurplus, il n'est pas nécessaire de trancher le point de savoir si l'huissierexerce la puissance publique dans ses rapports avec les administrés(participants aux ventes aux enchères), car, du moment que ce n'est pas à euxqu'il facture ses prestations, il n'existe de toute manière pas de rapportd'échange faute de contre-prestations de ceux-ci. 6.3 En ce qui concerne le service auprès des tribunaux, il convient à nouveaude distinguer les rapports entre les huissiers et les personnes qui lesmettent en oeuvre, d'une part, et les relations entre les huissiers et lespersonnes à l'égard desquelles ils exercent les activités relevantprétendument de la puissance publique, d'autre part. Lorsqu'ils procèdent aux significations, les huissiers sont mandatés par desparticuliers et - semble-t-il - par des autorités judiciaires, à qui ilsfacturent leurs prestations. L'activité relevant prétendument de la puissancepublique s'exerce en revanche à l'égard d'autres personnes, à savoir lesdestinataires des actes notifiés. Dès lors, elle ne saurait conduire àl'exonération des montants facturés aux personnes ou autorités qui requièrentla notification. Cette dissociation existe aussi en ce qui concerne le service des audiences:les huissiers sont mis en oeuvre par les juridictions concernées, à qui ilsfacturent leurs prestations, alors qu'ils exécutent leurs tâches relevantprétendument de la puissance publique à l'égard d'autres personnes telles quele public assistant aux audiences ou les jurés. A cela s'ajoute que leshuissiers n'agissent pas en leur propre nom, de sorte que l'indépendancerequise par l'art. 17 al. 4 OTVA fait défaut. Ainsi, les prestations que les huissiers judiciaires fournissent dans lecadre de leur service auprès des tribunaux ne relèvent pas de la puissancepublique et sont soumises à la TVA. Lorsque ces prestations sont fournies àl'Etat de Genève, le fait que celui-ci les utilise dans l'exercice du pouvoirjudiciaire - civil ou pénal -, lequel relève incontestablement de lapuissance publique, n'y change rien. 6.4 S'agissant de l'exécution des jugements, les huissiers judiciairesfournissent également des prestations à la partie qui requiert l'exécution etqui les mandate à cette fin. C'est à celle-ci qu'ils facturent des émolumentsvoire des honoraires, alors que les actes d'exécution, qui relèventprétendument de la puissance publique, affectent l'autre partie. Au surplus, il n'apparaît pas que les huissiers judiciaires soient habilitésà rendre des décisions au sens de la jurisprudence relative à l'art. 17 al. 4OTVA. La sommation, en particulier, qui se limite à reproduire le dispositifdu jugement et à indiquer la compétence du Tribunal de première instance, neconstitue pas une telle décision. Par ailleurs, lorsqu'il s'agit d'exécuterune décision d'évacuation, la compétence de surseoir à l'exécution pour desmotifs humanitaires appartient au Procureur général. Quand il se rend surplace muni de l'ordonnance d'exécution de ce dernier, l'huissier judiciairejouit certes d'un certain pouvoir d'appréciation, dans la mesure où il peut,notamment, accorder aux occupants un bref et ultime délai pour déménager(délai qui était tout de même de 3 mois dans l'affaire Gaon, cf. article parudans la Tribune de Genève du 26 avril 2002). Il s'agit là toutefois d'unpouvoir de fait, dans la mesure où il ne repose pas sur une base légale(formelle), qui n'est pas exercé sous la forme d'une décision de nature àêtre exécutée. Au vu de ce qui précède, les activités des huissiers judiciaires dans lecadre de l'exécution forcée des jugements civils ne relèvent pas non plus dela puissance publique, de sorte que la TVA doit être perçue sur lesémoluments ou les honoraires qu'ils facturent pour leurs prestations. 7.Il reste à examiner si les conditions du droit à la protection de la bonnefoi sont réunies. 7.1 Découlant directement de l'art. 9 Cst. (cf. aussi art. 4 aCst.) et valantpour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi protègele citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçuesdes autorités, lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, desdéclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 129 I 161consid.4.1 p. 170; 128 II 112 consid. 10b/aa p. 125; 126 II 377 consid.3ap. 387 et les arrêts cités). Selon la jurisprudence, un renseignement ou unedécision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir àun administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, àcondition que (a) l'autorité soit intervenue dans une situation concrète àl'égard de personnes déterminées, (b)qu'elle ait agi ou soit censée avoiragi dans les limites de ses compétences et (c) que l'administré n'ait pas puse rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Ilfaut encore qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont ilse prévaut pour (d) prendre des dispositions auxquelles il ne sauraitrenoncer sans subir de préjudice, et (e) que la réglementation n'ait paschangé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 131 II 627 consid.6.1 p. 636/637; 129 I 161 consid.4.1 p. 170; 122 II 113 consid. 3b/cc p. 123et les références citées). Le principe de la bonne foi régit aussi les rapports entre les autoritésfiscales et les contribuables; le droit fiscal est toutefois dominé par leprincipe de la légalité, de telle sorte que le principe de la bonne foi nesaurait avoir qu'une influence limitée, surtout s'il vient à entrer enconflit avec le principe de la légalité (cf. art. 5 et 9 Cst.; ATF 131 II 627consid. 6.1 p. 637; 118Ib312 consid. 3b p. 316; cf. Jean-Marc Rivier, Droitfiscal suisse, 2e éd., Lausanne 1998, p. 132; Ernst Blumenstein/Peter Locher,System des Steuerrechts, 6e éd., Zurich 2002, p. 28 et les nombreusesréférences). Ainsi, le contribuable ne peut bénéficier d'un traitementdérogeant à la loi que si les conditions mentionnées ci-dessus - qui doiventêtre interprétées de manière stricte - sont remplies de manière claire etsans équivoque (2A.92/1999, Pra 2001 no 7 p. 42, consid. 4a et lajurisprudence citée). 7.2 Après avoir écarté les courriers qui émanaient d'autres autorités,l'autorité intimée a retenu deux courriers adressés par la recourante. Ilressort du premier, daté du 24 mai 1995
et adressé à A.________, un confrèrede l'intimé, que l'ensemble de ses activités est imposable. Le second, datédu 23 juin 1995 et adressé à B.________, de l'étude de A.________, indique enrevanche que les huissiers agissent dans l'exercice de la puissance publiquelorsqu'ils procèdent aux ventes aux enchères par autorité de justice ou surmandat de l'Office des poursuites et des faillites. Ce courrier aurait ététransmis à tous les huissiers judiciaires de Genève. Selon l'autorité intimée, il ne ressort pas du dossier que le destinataire deces courriers serait apparu à l'égard de l'Administration fédéraleexpressément en tant que représentant de l'ensemble des huissiersjudiciaires. Par conséquent, les renseignements fournis n'étaient destinésqu'à Me A.________ et l'intimé ne peut s'en prévaloir au titre du droit à laprotection de la bonne foi. 7.3 L'intimé se prévaut de plusieurs échanges de correspondance entre MeA.________ et l'Administration fédérale, dont il aurait eu connaissanceseulement à la réception du bordereau de pièces joint au recours de cettedernière. Il s'agirait là de faits nouveaux, inconnus de l'autorité intimée -dont la décision reposerait, partant, sur des constatations de faitincomplètes - et qui devraient être pris en considération en vertu de l'art.105 al. 2 OJ. Plusieurs de ces courriers feraient référence à l'ensemble deshuissiers judiciaires de Genève, ce qui démontrerait que l'Administrationfédérale ne pouvait ignorer que les renseignements demandés l'étaient pourl'ensemble de la profession. L'intimé soutient ainsi que toutes lesconditions sont réunies pour qu'il puisse bénéficier du droit à la protectionde la bonne foi et obtenir que les montants qu'il a facturés pour sesprestations dans le cadre de ventes aux enchères ordonnées par le juge ou quilui ont été déléguées par l'Office des poursuites et des faillites ne soientpas soumises à la TVA, conformément au courrier du 23 juin 1995. 7.4 S'agissant des pièces dont l'intimé a eu connaissance seulement enconsultant le bordereau de la recourante, elles n'ont pu avoir aucuneinfluence sur son comportement d'assujetti TVA. Dès lors, l'intimé ne peutrien en tirer au titre de la protection de la bonne foi et il n'est pasnécessaire de trancher la question de savoir si ces pièces peuvent êtreprises en considération au regard de l'art. 105 al. 2 OJ. En ce qui concerne le courrier du 23 juin 1995, il faisait suite à unedemande de renseignements (confirmation d'entretien téléphonique) du 20 juin1995, signée par B.________, qui était collaborateur au sein de l'étude deA.________. Or, rien n'indique que B.________ aurait agi au nom de l'ensembledes huissiers judiciaires de Genève. Il n'en va d'ailleurs pas autrement deA.________: dans aucun des courriers figurant dans le bordereau de larecourante ce dernier n'a indiqué expressément agir au nom de l'ensemble desmembres de sa profession. Il n'est du reste même pas établi que ses confrèresl'aient chargé de telles démarches: selon le procès-verbal de l'assembléegénérale ordinaire de la Chambre des huissiers judiciaires de Genève du 1ernovembre 1994, c'est son confrère C.________ qui a pris contact avec lesautorités cantonales aux fins d'obtenir des renseignements en matière de TVA.Dans ces conditions, l'intimé ne peut se prévaloir du courrier du 23juin1995 aux fins d'être traité de manière plus avantageuse que ne le prévoit laréglementation en vigueur. 8.Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission du recours. Succombant, l'intimé doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1,153 et 153a OJ) et n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ acontrario). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est admis. La décision de la Commission fédérale de recours enmatière de contributions du 9 janvier 2006 est annulée. La décision surréclamation de l'Administration fédérale des contributions du 15 septembre2004 est confirmée. 2.Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge de l'intimé. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie à la recourante, au mandataire del'intimé et à la Commission fédérale de recours en matière de contributions. Lausanne, le 18 octobre 2006 Au nom de la IIe Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.83/2006
Date de la décision : 18/10/2006
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-10-18;2a.83.2006 ?
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