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12/10/2006 | SUISSE | N°1P.617/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 12 octobre 2006, 1P.617/2006


{T 0/2}1P.617/2006 /col Arrêt du 12 octobre 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président,Nay et Fonjallaz.Greffier: M. Rittener. A. ________,recourant, représenté par Me Antoinette Haldy, avocate, contre Procureur général du canton de Vaud,rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne,Tribunal cantonal du canton de Vaud,Cour de cassation pénale, route du Signal 8,1014 Lausanne. demande de mise en liberté, recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale duTribunal cantonal du canton de Vaud du 30 août 2006. Faits: A.Le 2 août 2006, le Tr

ibunal correctionnel de l'arrondissement de la Broye etdu Nor...

{T 0/2}1P.617/2006 /col Arrêt du 12 octobre 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président,Nay et Fonjallaz.Greffier: M. Rittener. A. ________,recourant, représenté par Me Antoinette Haldy, avocate, contre Procureur général du canton de Vaud,rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne,Tribunal cantonal du canton de Vaud,Cour de cassation pénale, route du Signal 8,1014 Lausanne. demande de mise en liberté, recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale duTribunal cantonal du canton de Vaud du 30 août 2006. Faits: A.Le 2 août 2006, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de la Broye etdu Nord vaudois a condamné A.________ - ressortissant marocain né en 1972 etayant obtenu la nationalité suisse par sa naturalisation facilitée en 1997 -à trois ans de réclusion, sous déduction de cent sept jours de détentionpréventive, pour recel et infraction grave à la loi fédérale sur lesstupéfiants. A.________ a été arrêté à l'issue de l'audience du même jour etplacé en détention préventive. Il a recouru le lendemain contre ce jugementet a déposé une demande de mise en liberté provisoire auprès du Président dela Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, qui arejeté cette requête par arrêt du 11 août 2006. En substance, ce magistrat aconsidéré qu'un risque de fuite était avéré en raison des contacts étroits deA.________ avec le Maroc et de ses liens fragiles en Suisse. Son attitude dedéni et la lourde condamnation prononcée à son encontre faisaient égalementcraindre qu'il ne cherche à se soustraire à l'exécution de sa peine. B.A.________ a recouru contre cette décision auprès de la Cour de cassationpénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunalcantonal). Il niait notamment l'existence d'un risque de fuite et seplaignait du fait que son maintien en détention préventive étaitdisproportionné. Le Tribunal cantonal a rejeté le recours par arrêt du 30août 2006, considérant avec le premier juge que le danger de fuite étaitsuffisamment concret et vraisemblable pour justifier le maintien del'intéressé en détention préventive, cette mesure respectant en outre leprincipe de proportionnalité. C.Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande auTribunal fédéral d'annuler cet arrêt et de mettre fin à sa détentionpréventive. Il invoque une violation de son droit à la liberté personnelle(art. 10 al. 2 Cst. et 5 § 1 let. c CEDH) et se plaint d'arbitraire (art. 9Cst.) ainsi que d'une violation du principe de la proportionnalité (art. 36al. 3 Cst.). Il demande en outre l'assistance judiciaire. Le Tribunalcantonal n'a pas présenté d'observations. Le Procureur général du canton deVaud s'est déterminé; il conclut au rejet du recours. Interpellé, lerecourant a renoncé à formuler des observations complémentaires. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Formé en temps utile contre une décision finale prise en dernière instancecantonale et qui touche le recourant dans ses intérêts juridiquementprotégés, le recours est recevable au regard des art. 84 ss OJ. Par exceptionà la nature cassatoire du recours de droit public, la conclusion du recouranttendant à ce que le Tribunal fédéral mette fin à sa détention préventive estrecevable (ATF 124 I 327 consid. 4b/aa p.333). 2.Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la libertépersonnelle, garantie par les art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH, que si ellerepose sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espècel'art. 59 du Code de procédure pénale vaudois du 12 septembre 1967 (CPP/VD).Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principede la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.; ATF 123 I 268 consid. 2c p.270). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiéepar un danger pour la sécurité ou l'ordre public, par un risque de fuite oupar les besoins de l'instruction (cf. art. 59 al. 1 ch. 1 à 3 CPP/VD). Lagravité de l'infraction - et l'importance de la peine encourue - n'est, àelle seule, pas suffisante (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62; 117 Ia 70 consid.4a). Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressédes charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité (art. 5 par.1 let. c CEDH; ATF 116 Ia 144 consid. 3; art. 59 in initio CPP/VD).S'agissant d'une restriction grave à la liberté personnelle, le Tribunalfédéral examine librement ces questions, sous réserve toutefois del'appréciation des preuves, revue sous l'angle restreint de l'arbitraire (ATF123 I 268 consid. 2d p. 271). L'autorité cantonale dispose ainsi d'une grandeliberté dans l'appréciation des faits (ATF 114 Ia 283 consid. 3, 112 Ia 162consid. 3b).Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., ne résultepas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération oumême qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral ne s'écarte de lasolution retenue en dernière instance cantonale que si elle est manifestementinsoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair etindiscuté ou si elle heurte de manière choquante le sentiment de la justiceou de l'équité. Il ne suffit pas que la motivation de la décision soitinsoutenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dans son résultat (ATF132 I 13 consid. 5.1 p. 17; 131 I 217 consid. 2.1 p. 219, 57 consid. 2 p. 61;129 I 173 consid. 3.1 p. 178). En matière d'appréciation des preuves, il y aarbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse,un élément de preuve propre à modifier la décision ou lorsqu'elle tire desconstatations insoutenables des éléments recueillis (ATF 127 I 38 consid. 2ap. 41). 3.Le recourant conteste d'abord l'existence d'un risque de fuite et reproche àl'autorité attaquée d'avoir fait preuve à cet égard d'arbitraire dans laconstatation des faits. 3.1 Le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critèrestels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liensavec l'Etat qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui fontapparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable(ATF 117 Ia 69 consid. 4a p. 70 et la jurisprudence citée). La gravité del'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier la prolongation de ladétention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite enraison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 125 I 60consid. 3a p. 62; 117 Ia 69 consid. 4a p. 70, 108 Ia 64 consid. 3 p. 67). Lefait que l'extradition du prévenu puisse être obtenue n'est pas déterminant(ATF 123 I 31 consid. 3d p. 36 s.).3.2 En l'occurrence, le Tribunal cantonal a retenu que le recourant avaitconservé des contacts étroits avec le Maroc et que ses attaches avec sonépouse en Suisse devaient être relativisées, dans la mesure où il vivait avecune amie lorsqu'il a été placé en détention préventive en 2004. L'autoritéattaquée a par ailleurs constaté que les liens du recourant avec notre paysétaient fragiles, dès lors qu'il n'y était pas bien intégréprofessionnellement. 3.2.1 Quoi qu'en dise le recourant, les constatations précitées ne sont pasarbitraires. Il ressort en effet du dossier que l'intéressé conserve desliens avec sa famille au Maroc, ce qu'il reconnaît du reste dans son écriturede recours. Par ailleurs, la crédibilité de l'attestation de son épouse selonlaquelle celle-ci aurait toujours "vécu en famille" avec lui est d'embléedouteuse, dès lors que dans une lettre du 27novembre 2004 le recourantaffirmait sans équivoque qu'il ne vivait pas avec elle, mais avec sa "petiteamie". Ce fait relativise également l'importance pour le recourant de sesliens avec sa famille en Suisse; les autorités cantonales n'ont dès lorsmanifestement pas procédé à une appréciation insoutenable à cet égard. Il enva de même des attaches sociales que le recourant fonde sur sa qualité demembre d'un club de football, dont on ignore si elle était toujoursd'actualité lorsqu'a débuté la détention préventive qu'il subit actuellement.Enfin, il n'était pas non plus arbitraire de mettre en doute l'intégrationprofessionnelle du recourant, dans la mesure où celui-ci n'a pas exercéd'emploi véritablement stable dans notre pays, mis à part la gestion dunight-club se trouvant au coeur du trafic de stupéfiants pour lequel il a étécondamné ainsi qu'un emploi débuté quelques mois seulement avant sa mise endétention préventive. 3.2.2 Au terme de cette constatation des faits dénuée d'arbitraire, leTribunal cantonal a considéré à juste titre que le risque de voir lerecourant prendre la fuite était suffisamment concret et vraisemblable. Eneffet, l'attitude de déni du recourant et l'importance de la peine qu'ilencourt font craindre qu'il ne cherche à se soustraire à l'exécution decelle-ci. Le recourant semble se plaindre à cet égard d'une violation de laprésomption d'innocence, mais il ne formule pas de grief satisfaisant auxexigences minimales de motivation posées par l'art. 90 al.1 let. b OJ, desorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner cette question (ATF 130 I 258 consid.1.3 p. 261, 26 consid. 2.1 p. 31; 125 I 71 consid. 1c p. 76). Au demeurant,le fait que l'intéressé nie avoir commis la plupart des infractions qui luisont reprochées est effectivement un élément qui peut faire craindre qu'il nese soumette pas à la sanction qui pourra être prononcée contre lui. Parailleurs, c'est en vain que le recourant se prévaut du fait qu'il n'a pastenté de fuir avant sa condamnation définitive à trois ans et demi deréclusion par la justice valaisanne et qu'il s'est présenté pour purger cettepeine. En effet, le fait qu'il ait déjà enduré une détention de longue duréeest de nature à l'inciter à se soustraire à l'exécution de la peine qu'ilrisque actuellement, ce d'autant plus qu'il peut s'attendre à voir saprécédente libération conditionnelle remise en cause. Enfin, sa présence à lalecture du jugement de première instance n'est pas non plus significative,dans la mesure où le recourant - pour peu qu'il ait été conscient del'ampleur de la condamnation qui allait être prononcée - n'aurait eu quequelques jours à compter du réquisitoire du représentant du Ministère publicpour se résoudre à disparaître dans la clandestinité et organiser sa fuitepour une longue durée.Ainsi, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, les liens qui unissent lerecourant à la Suisse ne paraissent pas suffisants pour le retenir de quitternotre pays afin d'échapper à la justice, si bien que ce premier grief doitêtre rejeté. 4.Dans un second moyen, le recourant se plaint d'une violation du principe dela proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.). Il estime que, compte tenu de son"intégration professionnelle" et de ses charges familiales, un éventueldanger de fuite aurait pu être écarté par des mesures moins contraignantestelles que le dépôt des papiers d'identité et le contrôle judiciaire.Le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.) exige que le moyenchoisi soit apte à atteindre le but visé (règle de l'aptitude) et quecelui-ci ne puisse pas être atteint par une mesure moins incisive (règle dela nécessité); en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du butvisé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêtspublics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit,impliquant une pesée des intérêts - ATF 130 II 425 consid. 5.2 p. 438; 126 I219 consid. 2c p. 222 et les arrêts cités).En l'espèce, les mesures de contrôle judiciaire auxquelles le recourantpropose de se soumettre n'apparaissent pas suffisantes au vu de l'importancede la peine qu'il encourt et de l'intensité du risque de fuite, tel qu'ilressort des circonstances particulières exposées précédemment. C'est donc àjuste titre que le Tribunal cantonal a considéré que son maintien endétention était la mesure la plus apte à prévenir tout danger de fuite, cebut ne pouvant pas être atteint par une mesure moins incisive. 5.Il s'ensuit que le recours de droit public doit être rejeté, dans la mesureoù il est recevable. Dès lors que le recourant est dans le besoin et que sesconclusions ne paraissaient pas d'emblée vouées à l'échec, l'assistancejudiciaire doit lui être accordée (art. 152 al. 1 OJ). Le recourant requiertla désignation de Me Antoinette Haldy en qualité d'avocate d'office. Il y alieu de donner droit à cette requête et de fixer d'office les honoraires del'avocate, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral (art. 152al. 2 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 2.La demande d'assistance judiciaire est admise. 3.Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire. 4.Me Antoinette Haldy, avocate à Lausanne, est désignée comme avocate d'officedu recourant et ses honoraires, supportés par la caisse du Tribunal fédéral,sont fixés à 1500 fr. 5.Le présent arrêt est communiqué en copie à la mandataire du recourant, auProcureur général et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour decassation pénale, ainsi qu'au Tribunal d'arrondissement de La Broye et duNord Vaudois. Lausanne, le 12 octobre 2006 Au nom de la Ire Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.617/2006
Date de la décision : 12/10/2006
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-10-12;1p.617.2006 ?
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