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06/10/2006 | SUISSE | N°I.588/06

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 octobre 2006, I.588/06


Cause {T 7}I 588/06 Arrêt du 6 octobre 2006IVe Chambre MM. les Juges Ursprung, Président, Schön et Frésard. Greffière : Mme Fretz Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203Genève, recourant, contre G.________, intimé, représenté par la CAP Compagnie d'assurance de protectionjuridique SA, avenue du Bouchet 2, 1211 Genève 28 Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 26 mai 2006) Faits: A.G. ________, né le 24 août 1993, est atteint d'une parésie sévère du plexusbrachial gauche, reconnue comme une infirmité congénitale et pour laquellel'assurance-inva

lidité a pris en charge diverses mesures médicales. Depuis le mois...

Cause {T 7}I 588/06 Arrêt du 6 octobre 2006IVe Chambre MM. les Juges Ursprung, Président, Schön et Frésard. Greffière : Mme Fretz Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203Genève, recourant, contre G.________, intimé, représenté par la CAP Compagnie d'assurance de protectionjuridique SA, avenue du Bouchet 2, 1211 Genève 28 Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 26 mai 2006) Faits: A.G. ________, né le 24 août 1993, est atteint d'une parésie sévère du plexusbrachial gauche, reconnue comme une infirmité congénitale et pour laquellel'assurance-invalidité a pris en charge diverses mesures médicales. Depuis le mois de décembre 2004, il suit auprès de R.________ des séancesd'acupressure et de magnopuncture. Les séances ont lieu une ou deux fois parsemaine, à raison d'une heure par séance. Elles ont été prescrites par ledocteur P.________, spécialiste FMH en chirurgie plastique reconstructive etesthétique et en chirurgie de la main. Selon ce médecin, les multiplesinterventions chirurgicales subies par l'assuré, associées à différents typesde physiothérapie et d'ergothérapie de rééducation, ont permis d'obtenir unecertaine autonomie dans l'utilisation du membre supérieur gauche.L'épuisement des ressources des techniques classiques de physiothérapie etd'ergothérapie rend désormais nécessaires des approches similaires, maislégèrement différentes. L'acupressure (ou pressothérapie) et la magnopuncture(ou magnothérapie) sont des techniques proches de la physiothérapie et del'ergothérapie conventionnelles, de sorte qu'elles permettent l'acquisitiond'une autonomie plus grande et donc une meilleure utilisation de ce membre.Elles doivent être considérées comme des «variantes» à la physiothérapie età l'ergothérapie conventionnelles (rapport du 18 mars 2005). Par lettre du 3 janvier 2005, le père de l'enfant a demandé à l'Officecantonal genevois de l'assurance-invalidité (ci-après: l'office AI) la priseen charge des séances d'acupressure et de magnopuncture. Par décision du 21 janvier 2005, puis par décision sur opposition du 15avril2005, l'office AI a rejeté cette demande au motif que les mesuresthérapeutiques requises ne répondaient aux exigences ni de la reconnaissancescientifique, ni de la simplicité et de l'adéquation. B.L'assuré a recouru contre cette décision. Statuant le 26 mai 2006, leTribunal cantonal des assurances sociales du canton de Genève a admis lerecours «au sens des considérants» et il a annulé les décisionsprécédentes. Il a retenu que les séances en question se sont révéléesbénéfiques pour l'enfant. A défaut de renseignements plus précis quant auxeffets de l'acupressure et de la magnopuncture sur les séquelles d'un plexusbrachial, on pourrait certes envisager la mise en oeuvre d'une expertise.Cependant, le tribunal a considéré que, compte tenu des circonstances, unetelle mesure ne se justifiait pas. Il convenait de reconnaître d'emblée lecaractère simple et adéquat des mesures préconisées, dès lors qu'elles sontexécutées en lieu et place de séances d'ergothérapie, qu'elles se révèlentplus bénéfiques que ces dernières et qu'elles ne coûtent pas plus cher. C.L'office AI interjette un recours de droit administratif dans lequel ilconclut à l'annulation de ce jugement. G.________ conclut au rejet durecours. Quant à l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS), il proposede l'admettre. Considérant en droit: 1.Sont réputés mesures médicales nécessaires au traitement d'une infirmitécongénitale tous les actes dont la science médicale a reconnu qu'ils sontindiqués et qu'ils tendent au but thérapeutique visé d'une manière simple etadéquate (art. 2 al. 3 de l'Ordonnance du 9décembre 1985 sur les infirmitéscongénitales [OIC]). D'après la jurisprudence, une méthode de traitement estconsidérée comme éprouvée par la science médicale, c'est-à-dire réputéescientifiquement reconnue, si elle est largement admise par les chercheurs etles praticiens. L'élément décisif à cet égard réside dans le résultat desexpériences et dans le succès d'une thérapie déterminée (ATF 123 V 58 consid.2b/aa, 115 V 195 consid. 4b). Ces exigences, valables dans le domaine del'assurance-maladie sociale - sous l'empire de la LAMA et, pour l'essentiel,de la LAMal (cf. ATF 125V 28 consid. 5a, 123 V 61 consid. 2c) - s'appliquentégalement aux mesures médicales de l'assurance-invalidité. Il s'ensuit qu'untraitement qui n'est pas à la charge de l'assurance obligatoire des soins encas de maladie, parce que son efficacité n'est pas démontrée selon desméthodes scientifiques (art. 32 al. 2 LAMal), ne peut en principe pasdavantage être alloué dans le cadre des art. 12 et 13 LAI (ATF 123 V 60consid. 2b/cc et les références; arrêt F. du 16 mai 2006 [I120/04]). Cettecondition relative à l'efficacité s'impose d'autant plus dans le domaine del'assurance-invalidité. Dans ce domaine, en effet, l'assurance accorde desmesures médicales sous la forme d'un traitement en nature et supporte donc lerisque de la réadaptation selon les art. 11 LAI et 23 RAI (ATF 123 V 60consid. 2b/cc; VSI 2001 p. 73 consid. 1b). 2.R.________ est un thérapeute agréé par la Fondation pour la reconnaissance etle développement des thérapies alternatives et complémentaires (ASCA). Ilpratique à X.________. L'acupressure est une technique médicale alternativedérivée de l'acupuncture qui consiste en la stimulation de certains points ducorps au moyen de pressions et de massages. Elle se base sur la théorie des14 grands méridiens d'acupuncture dans lesquels circule l'énergie vitale KIou Chi selon les pays. Quant à la magnopuncture il s'agit d'une méthode quifait usage de champs magnétiques pulsés en lieu et place des aiguilles (voirle site internet www.asca.ch, ainsi que d'autres informations sur un siteconsacré aux thérapies naturelles souswww.medecinesnaturelles.com/pages/santé/acupressure/ index/php). Aucune de ces méthodes, qui relèvent de la médecine dite parallèle oualternative, n'est mentionnée dans l'ordonnance du Département fédéral del'intérieur sur les prestations de l'assurance obligatoire des soins du 29septembre 1995 (ordonnance sur les prestations de l'assurance des soins[OPAS; RS 832.112.31]) au titre des prestations fournies sur prescription ousur mandat médical (sous chapitre 2 en corrélation avec l'art. 25 al. 2 let.a ch. 3 LAMal). L'annexe à l'OPAS ne prévoit la prise en charge, au titre desmédecines complémentaires -pratiquées par un médecin- que de l'acupuncture,mais non, par exemple, de la médecine anthroposophique, la médecine chinoise,l'homéopathie, la thérapie neurale ou encore la phytothérapie. 3.Le fait que les traitements litigieux ne sont pas des prestationsobligatoires selon la LAMal permet d'inférer que leur efficacité n'est pasdémontrée par la science médicale. Du reste, on ne dispose pas au dossier oudans la littérature médicale du moindre indice qui irait en sens contraire.Par conséquent, ces thérapies ne sauraient être prises en charge parl'assurance-invalidité. 4.Les premiers juges, du reste, ne prétendent pas que ces traitements sont àconsidérer comme scientifiquement reconnus. Leur jugement fait référence àl'arrêt Z. du 4 juillet 2002 (I 462/01). Cette affaire concernaitl'hippothérapie, qui figure à l'art. 5 al. 1 let. h ch. 7 OPAS, en vue dutraitement de la sclérose en plaques (pratiquée sur prescription médicale parun physiothérapeute formé spécialement dans cette thérapie). Dans cetteaffaire, la pratique administrative relative à l'art. 13 LAI admettait laprise en charge de l'hippothérapie à titre de mesure médicale pour letraitement de paralysies cérébrales congénitales au sens du ch. 390 del'annexe à l'OIC (Circulaire de l'OFAS concernant les mesures médicales deréadaptation de l'AI, ch. 390.5). On pouvait donc admettre que le caractèrescientifiquement reconnu de l'hippothérapie ne se limitait pas à l'indicationde la sclérose en plaques, mais couvrait éventuellement d'autres atteintes dusystème nerveux. Il s'agissait, dans cette affaire, de deux assuréesatteintes d'ataxie de Friedreich. En l'absence d'éléments précis quant auxeffets de l'hippothérapie sur l'évolution de cette maladie, le tribunal aordonné une expertise, qu'il a confiée à la juridiction cantonale. 5.En l'espèce, on se trouve tout à fait en dehors des prévisions envisagées parcet arrêt puisque les mesures en tant que telles ne sont pas mentionnées dansl'OPAS. Cette jurisprudence n'ouvre pas la voie à une prise en chargegénéralisée par l'assurance-invalidité de traitements qui ne sont pasobligatoirement à la charge des assureurs-maladie en vertu de la LAMal. Quantà l'argument des premiers juges selon lequel les mesures en cause se révèlentbénéfiques, au dire du médecin traitant, il ne suffit pas pour leur conférerde manière générale un caractère scientifiquement reconnu. Enfin,contrairement à ce que suggèrent les premiers juges, il n'est pas décisif queles mesures en cause ne sont pas plus coûteuses que les séancesd'ergothérapie. Le droit à la substitution de la prestation (ou pouvoird'échange) est certes une institution reconnue en matièred'assurance-invalidité (voir p.ex. ATF 131 V 173 consid. 5.1). Il ne doitcependant pas aboutir à ce qu'un traitement dont l'efficacité n'est pasdémontrée scientifiquement soit à la charge de l'assurance, en lieu et placed'une autre mesure qui remplirait cette condition. Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est admis et le jugement du Tribunal des assurances du canton deGenève, du 26 mai 2006, est annulé. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal desassurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Officefédéral des assurances sociales. Lucerne, le 6 octobre 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IVe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.588/06
Date de la décision : 06/10/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-10-06;i.588.06 ?
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