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06/10/2006 | SUISSE | N°5C.122/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 octobre 2006, 5C.122/2006


{T 0/2}5C.122/2006 /fzc Arrêt du 6 octobre 2006IIe Cour civile MM. et Mmes les Juges Raselli, Président,Escher, Meyer, Hohl et Marazzi.Greffier: M. Abrecht. X. ________,demandeur et recourant,agissant par son tuteur, l'Union Départementale des Associations Familialesde Charente-Maritime (UDAF), elle-même représentée par Mes Jean-YvesSchmidhauser et Pierre Banna, avocats, contre A.________,B.________,C.________,défendeurs et intimés,tous trois représentés par Me Isabelle Poncet Carnicé, avocate. prescription acquisitive d'une servitude, recours en réforme contre l'arrêt de la Cham

bre civilede la Cour de justice du canton de Genève du 17 fé...

{T 0/2}5C.122/2006 /fzc Arrêt du 6 octobre 2006IIe Cour civile MM. et Mmes les Juges Raselli, Président,Escher, Meyer, Hohl et Marazzi.Greffier: M. Abrecht. X. ________,demandeur et recourant,agissant par son tuteur, l'Union Départementale des Associations Familialesde Charente-Maritime (UDAF), elle-même représentée par Mes Jean-YvesSchmidhauser et Pierre Banna, avocats, contre A.________,B.________,C.________,défendeurs et intimés,tous trois représentés par Me Isabelle Poncet Carnicé, avocate. prescription acquisitive d'une servitude, recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civilede la Cour de justice du canton de Genève du 17 février 2006. Faits: A.A.a X.________, fils de Y.________ et Z.________, né le 31 décembre 1959, denationalité française, est officiellement domicilié en Charente-Maritime(France). Le 2 décembre 1970, il a hérité de D.________, son grand-onclematernel. Il a ainsi notamment reçu, dans le partage de cette succession, undomaine sis sur l'ancienne parcelle n° xxx de la Commune de Dardagny (GE),constitué notamment d'une habitation avec dépendance, d'un bois, d'un pré,d'un jardin et d'une vigne. A.b Selon un certificat médical établi le 21 mai 1996 par le Dr E.________,psychiatre, X.________ est invalide à 80%; il souffre des séquelles d'uneencéphalopathie néo-natale et présente les symptômes d'un retard mentalprofond au sens du DSM-IV 318.2, soit d'un handicap correspondant à un QI de20/25. Entendu en qualité de témoin, le Dr E.________ a indiqué qu'il avaitété consulté, en 1996, pour "homologuer" une carte d'invalidité française; iln'avait pas eu connaissance du dossier médical de X.________, mais s'étaitfondé sur les renseignements donnés par son père; l'entretien avec X.________avait duré 50 minutes; il lui avait demandé d'écrire son nom, ce qu'il avaitfait en formant les lettres comme l'aurait fait un enfant; il avait unecapacité de lecture et d'écriture rudimentaire; s'il pouvait comprendre lanotion de vente, il ne pouvait saisir la portée d'un tel acte, ni celle d'uneservitude. A.c F.________, responsable au sein de l'UDAF, organisme français chargé dela tutelle de X.________ depuis 2002 (cf. lettre D infra), a indiqué que cedernier, qu'elle a rencontré à plusieurs reprises, ne présentait aucuneparticularité physique; il était introverti, timide, anxieux; il nesaisissait pas la portée des choses qui dépassaient la vie de tous les jours. B.B.aA.________ est actif dans l'achat et la vente d'immeubles, la promotion etle courtage de biens immobiliers ainsi que la gestion immobilière. À l'époquedes faits, il exerçait selon son dire la profession d'ingénieur hydrauliqueet n'avait pas de connaissances particulières du domaine immobilier. En 1976, A.________ est devenu propriétaire des parcelles nos aaa et bbb dela Commune de Dardagny (GE). Il a emménagé sur la parcelle n° bbb en 1977avec son épouse. Ultérieurement, soit par acte du 21 décembre 2000,A.________ a cédé la propriété des parcelles nos aaa et bbb à son épouseB.________ et à sa fille C.________, conservant toutefois un droitd'habitation sur la parcelle n° bbb. B.b Les parcelles n° xxx (propriété de X.________) et nos aaa et bbb(propriété de A.________, puis de B.________ et C.________) sont voisines,les habitations qui y sont construites étant distantes de quelques dizainesde mètres et donnant sur la même rue du village; les propriétés sont séparéespar un mur et une épaisse haie. Lorsque X.________ était enfant, il ne séjournait à Dardagny que durant lesvacances d'été. A.________ se rappelle l'avoir vu à une ou deux reprises dansle jardin de ses parents et l'avoir vu circuler à vélo ou à moto; B.________dit n'avoir fait que l'apercevoir ou le croiser. C.C.aLe 8 septembre 1980, Z.________ a informé A.________ de son désir devendre une partie de la parcelle n° xxx, soit environ 2'500 m2. A.________s'est déclaré intéressé à l'achat, pour autant que le terrain vendu puisseêtre desservi par un chemin d'accès, inexistant à l'époque. X.________ n'apas personnellement pris part à la négociation. A. ________ et B.________ soutiennent n'avoir alors pas été informés queX.________ souffrait d'un handicap ou d'un retard mental. Y.________ affirmequant à lui que A.________ connaissait le handicap de son fils, qui seremarquait à sa façon de parler, pour l'avoir rencontré lors des vacancespassées à Dardagny. C.b Le 6 novembre 1981, X.________, Y.________ et A.________ ont signé unacte de promesse de vente et d'achat devant G.________, notaire à Genève.X.________ a ainsi promis de vendre à A.________ une partie à détacher de laparcelle n° xxx et de constituer sur le restant de la parcelle une servitudede passage au profit de la partie vendue, moyennant un prix de vente de 135fr. 25 le m2. À la signature de cet acte, X.________ a reçu un acompte de150'000 fr., à imputer sur le prix de vente et versé à titre d'arrhes et dedédit. Y. ________ affirme avoir indiqué au notaire que son fils était atteint d'unhandicap, mais que celui-ci ne lui a pas demandé s'il était sous tutelle ousous curatelle. A.________ et B.________ affirment n'avoir fait lors de laséance de signature aucune constatation particulière au sujet de l'étatmental de X.________, qui leur a simplement paru "effacé". C.c À teneur d'un deuxième acte authentique instrumenté par H.________,notaire à Genève, les 25 juin et 6 juillet 1982, X.________ a déclarépartager la parcelle n° xxx en trois parcelles nos xxxA, xxxB et xxxC, ets'est engagé à céder la parcelle n° xxxC à A.________ et B.________ ainsiqu'à un tiers. Les conditions de la promesse de vente du 6 novembre 1981 ontété modifiées, en ce sens que le prix de la parcelle promise vendue étaitfixé à 678'835 fr. et que la vente définitive devait intervenir avant le 31juillet 1982. X.________ avait la faculté, à cette échéance, de renoncer à lavente en restituant l'acompte de 150'000fr. et en versant un montant égal àtitre de dédit, ou d'y renoncer sans pénalité, mais moyennant constitutiond'une servitude de non-bâtir sur la parcelle n° xxxB et sur la partie de laparcelle n°xxxA la prolongeant, au profit des parcelles nos aaa et bbb. C.d L'acte de vente définitif n'a pas été signé et, par un troisième acteauthentique instrumenté le 28 juillet 1982 par le notaire H.________,X.________ a déclaré résoudre la promesse de vente du 6 novembre 1981 et lamodification du 25 juin/6 juillet 1982. A.________ a déclaré accepter cetterésolution, moyennant restitution de l'acompte de 150'000fr. et constitutiond'une servitude de non-bâtir sur la parcelle n° xxxB et sur la partie de laparcelle n°xxxA la prolongeant vers le nord, au profit des parcelles nos aaaet bbb. La servitude a été inscrite au registre foncier le 2 septembre 1982. C.e Les trois actes précités mentionnent qu'à la signature, X.________ est"assisté de ses parents", respectivement "de son père"; ils sont signés tantpar X.________ que par Y.________. La signature de X.________ apposée sur lesactes est enfantine, dans le sens qu'elle est formée de lettres majusculesnon rattachées entre elles. A. ________ ne s'est pas étonné que les parents de X.________ aient étéprésents et aient négocié toute l'opération, vu le jeune âge de ce dernier;il savait en outre qu'ils s'étaient également occupés de la vente d'autresimmeubles auxquels leur fils était intéressé. Lors de la signature des actes instrumentés par ses soins, le notaireH.________ ne s'est pas assuré de la capacité de discernement de X.________;il a affirmé qu'il n'opérait pas systématiquement une telle vérification etne refusait de prêter son concours à un acte que si la capacité dediscernement, qui est présumée, "manquait de façon manifeste". Il avait étéinformé que X.________ n'était ni sous tutelle, ni incapable de discernement,mais, son père ayant toujours été présent lors des discussions, il l'avaitégalement fait intervenir lors de la signature des actes. Il n'avait pas étésurpris du caractère enfantin de la signature de X.________, qu'il neconnaissait pas et avec lequel il n'avait pas discuté au préalable. D.Le 22 avril 1994, le Ministère français des affaires sociales et de lasolidarité a délivré à X.________ une carte d'invalidité, fixant son tauxd'incapacité à 80%. Sur cette base, le COTOREP, organisme officiel français,lui a accordé une rente d'invalidité mensuelle de 510 euros. Précédemment, leCOTOREP avait refusé d'intervenir, pendant la minorité de X.________,considérant que le handicap de ce dernier n'était pas suffisant. Le 12 octobre 1994, le juge des tutelles du Tribunal d'instance de Marennes(France) a, à la requête du COTOREP, prononcé la mise sous tutelle deX.________ et désigné Y.________ en qualité de tuteur. La décision se fondesur une expertise psychiatrique constatant que X.________ souffre d'uneencéphalopathie prénatale. Le 18 mars 2002, le juge des tutelles du Tribunal d'instance de Marennes aremplacé Y.________, dans ses fonctions de tuteur de X.________, par l'UnionDépartementale des Associations Familiales de Charente-Maritime (UDAF). E.Le 3 juin 2002, X.________, représenté par l'UDAF, a actionné A.________,B________ et C.________ devant le Tribunal de première instance du canton deGenève, en concluant à la constatation de la nullité de l'acte authentique du28 juillet 1982 et de tous les actes ayant abouti à la constitution de laservitude de non-bâtir grevant sa parcelle n° ccc (issue de la réunion desparcelles nos xxxA et xxxB) au profit des parcelles nos aaa et bbb, à laradiation de la servitude au registre foncier et au redressement de celui-cien conséquence; dans ses dernières conclusions de première instance, il aencore conclu à la constatation qu'il était incapable de discernement, tantau sens du droit suisse que du droit français. Par jugement du 26 mai 2006, le Tribunal de première instance a rejeté lademande avec suite de frais et dépens. F.Par arrêt du 17 février 2006 rendu sur appel du demandeur, la Chambre civilede la Cour de justice du canton de Genève a annulé le jugement de premièreinstance et, statuant à nouveau, a prononcé, en application de l'art. 489CCfr., la nullité de l'acte authentique instrumenté le 28 juillet 1982 par lenotaire H.________ mais, considérant que les défendeurs pouvaient seprévaloir d'une prescription acquisitive de la servitude litigieuse, au sensde l'art. 661 CC, a débouté X.________ de ses autres conclusions et acompensé les dépens de première instance et d'appel. La motivation de cetarrêt, dans ce qu'elle a d'utile à retenir pour l'examen du recours, est ensubstance la suivante:F.aX.________ étant domicilié en France au moment de la passation des acteslitigieux, l'exercice de ses droits civils est régi par le droit français(art. 35 LDIP), lequel règle également les effets de l'incapacité sur lavalidité d'actes juridiques (cf. ATF 82 II 169). Le demandeur ne le contested'ailleurs pas, puisqu'il fonde en définitive son action sur les art. 503 et489 CCfr. F.b Alors que tous les actes passés postérieurement au jugement d'ouverturede la tutelle par la personne protégée sont nuls de plein droit (art. 502CCfr.), les actes antérieurs sont en principe valables, mais peuvent êtreannulés si la cause qui a déterminé l'ouverture de la tutelle existaitnotoirement à l'époque des faits (art. 503 CCfr.). Selon la jurisprudence dela Cour de cassation française, la notoriété de la cause de tutelle, dont lapreuve incombe à l'incapable, doit s'entendre d'une notoriété générale, àlaquelle il convient d'assimiler la connaissance personnelle qu'avait lecocontractant de la situation de l'intéressé à l'époque de l'acte litigieux. En l'espèce, il doit être retenu que la cause de la tutelle ouverte parjugement du 12 octobre 1994 (cf. lettre D supra) réside dansl'affaiblissement des facultés mentales de X.________ consécutif à uneencéphalite néo-natale, et que cette cause existait déjà lors de la signaturede l'acte litigieux. F.c Encore faut-il, pour justifier l'application de l'art. 503 CCfr., que lacause de la tutelle ait été notoire ou connue du cocontractant au moment dela signature, soit en 1982. Or le demandeur n'a produit à la procédure aucunélément permettant de retenir que son incapacité était notoire en 1982. Par ailleurs, les défendeurs ont déclaré n'avoir pas eu de contacts avec ledemandeur, mais l'avoir seulement croisé à quelques reprises ou vu circuler àvélo, puis à moto, dans le village de Dardagny (cf.lettre B.b supra). Aucunélément du dossier ne vient contredire ces affirmations; en particulier, rienn'établit que les défendeurs auraient eu avec le demandeur des contacts plusétroits. D'après les renseignements fournis par le père du demandeur, lafamille ne s'est durablement établie à Dardagny, tout en conservant sondomicile en France, qu'en 1993, et, à l'époque des faits, le demandeur neséjournait dans cette commune que durant les vacances d'été. Enfin, lors de la signature des actes notariés, le demandeur a simplementparu "effacé", tant au notaire qu'aux défendeurs, étant rappelé qu'aucuneparticularité physique ne révèle le retard mental dont il est affecté; si lepère du demandeur a indiqué avoir informé le notaire que son fils souffraitd'un handicap, il n'a pas été allégué ni établi que cette information auraitété donnée en présence des défendeurs ou à ceux-ci. La condition de lanotoriété prévue à l'art.503 CCfr. n'étant ainsi pas remplie, l'actelitigieux ne saurait être annulé en application de cette disposition. F.d Il convient encore d'examiner si l'acte litigieux peut être annulé enapplication de l'art. 489 CCfr., qui dispose que pour faire un acte valable,il faut être sain d'esprit, mais que c'est à ceux qui agissent en nullitépour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment del'acte. En l'espèce, le demandeur souffre d'un retard mental profond, consécutif àune encéphalopathie néo-natale, ce qui correspond, à teneur du DSM-IV 318.2,à un QI de 20/25. Son état mental, s'il lui permet de faire illusion devantdes tiers, dans le cadre d'une conversation normale, et d'appréhender lanotion de propriété, ne lui permet pas de saisir la portée d'une servitude denon-bâtir (cf. lettres A.b et A.c supra). Il doit ainsi être retenu que ledemandeur, au moment de la signature de l'acte du 28 juillet 1982, étaitincapable de discernement, soit atteint d'un trouble mental au sens de l'art.489 CCfr., ce qui entraîne la nullité de l'acte constitutif de la servitudede non-bâtir du 28 juillet 1982. F.e Pour s'opposer à la radiation de la servitude litigieuse, les défendeursse prévalent d'une prescription acquisitive ordinaire de la servitudelitigieuse, au sens de l'art. 661 CC. Aux termes de cette disposition - qui s'applique par analogie à l'acquisitiond'une servitude, par renvoi de l'art. 731 al. 2 CC -, les droits de celui quia été inscrit sans cause légitime au registre foncier comme propriétaire d'unimmeuble ne peuvent plus être contestés lorsqu'il a possédé l'immeuble debonne foi, sans interruption et paisiblement pendant dix ans. Les règlesadmises pour la prescription
des créances s'appliquent à la computation desdélais, à l'interruption et à la suspension de la prescription acquisitive(art. 663 CC). Le titulaire de la servitude inscrite indûment au registrefoncier doit l'avoir possédée, paisiblement et sans interruption, pendant dixans; si la servitude est négative, il suffit que le propriétaire du fondsservant se soit effectivement abstenu des actes d'utilisation visés par laservitude (Steinauer, Les droits réels, tome II, 3e éd. 2002, n. 2241 ss). Le propriétaire du fonds dominant doit avoir été de bonne foi pendant toutela durée du délai de prescription (mala fides superveniens nocet). Est debonne foi le bénéficiaire de la servitude qui n'a pas le sentiment quel'inscription dont il bénéficie a été faite indûment, soit qu'il neconnaissait pas le vice affectant le titre d'acquisition, soit que, leconnaissant, il n'a pas eu conscience d'avoir agi de manière incorrecte; s'ilest de bonne foi lors de l'inscription, il ne devient par la suite demauvaise foi que s'il connaît de manière suffisamment fondée les motifs del'irrégularité de l'inscription, un simple doute ne suffisant pas (Steinauer,op. cit., n. 2241 et n. 1581h). F.f En l'espèce, la servitude a été inscrite indûment, puisqu'en vertu d'unacte constitutif qui doit être annulé en application de l'art. 489 CCfr. Ledélai de dix ans de l'art. 661 CC a commencé à courir le jour del'inscription de la servitude au registre foncier, soit le 2 septembre 1982.Rien ne justifie de le faire courir, comme le souhaiterait le demandeur, dujour du prononcé de sa tutelle seulement; en effet, l'art. 134 al. 1 ch. 6CO, qui prévoit la suspension de la prescription lorsque le créancier estdans l'impossibilité d'agir devant un tribunal suisse, suppose une causeobjective, extérieure à la personnalité du créancier (ATF 124 III 449 consid.4a). Il n'est enfin pas contesté que les défendeurs, propriétaires du fondsdominant, ont joui de manière paisible et ininterrompue de la servitude denon-bâtir pendant les dix ans qui ont suivi son inscription. Le demandeur n'a pas prouvé que les défendeurs aient eu connaissance de sonincapacité de discernement lors de la constitution de la servitude (cf.lettre F.c supra). Les défendeurs pouvaient en outre avoir le sentimentd'agir correctement, puisque l'acte litigieux avait été précédé de deuxautres actes authentiques, que les deux notaires successifs les ayantinstrumentés n'avaient pas mis en cause la capacité civile du demandeur etque ce dernier était assisté de son père, ce qui pouvait s'expliquer par unâge encore jeune (23 ans) ou une inexpérience en affaires. F.g Le demandeur n'a pas non plus établi que les défendeurs auraient apprisqu'il était affecté dans son discernement ou auraient connu cettecirconstance de manière suffisamment fondée avant l'échéance du délai de dixans, soit avant le 2 septembre 1992. Il n'a pas allégué de faits dont ilrésulterait que les familles X.________ et A.________ auraient entretenu desrelations plus étroites que celles découlant du simple voisinage. Il ressortdes déclarations du père du demandeur que les séjours de celui-ci se sontlimités aux vacances d'été jusqu'en 1993, soit pendant toute la durée dudélai de dix ans (cf.lettre F.c supra). Les contacts du demandeur avec lesdéfendeurs ont donc nécessairement été limités pendant la période pertinente,soit de septembre 1982 à septembre 1992. Or selon l'appréciation tant de sonpère que de sa tutrice, le demandeur ne présente aucune particularitéphysique en raison de son handicap et "donne le change" lors d'uneconversation banale. Rien ne permet ainsi de retenir que les défendeurs aientpu s'apercevoir, lors des contacts superficiels et lointains qu'ils disentavoir eus avec le demandeur, du retard mental dont celui-ci est affecté. Ledemandeur n'a pas davantage fait état de circonstances précises lorsdesquelles les défendeurs auraient eu affaire à lui et auraient pu apprendrel'existence dudit retard mental ou concevoir des doutes sérieux au sujet desa capacité de discernement. Les défendeurs sont donc fondés à se prévaloir d'une prescription acquisitivede la servitude litigieuse, ce qui conduit au rejet des conclusions dudemandeur tendant à la radiation de cette servitude du registre foncier. G.Contre cet arrêt, le demandeur exerce en parallèle un recours de droit publicet un recours en réforme au Tribunal fédéral. Le recours de droit public aété rejeté, dans la mesure où il était recevable, par arrêt rendu ce jour parla Cour de céans. Dans son recours en réforme, le demandeur conclutprincipalement à la réforme de l'arrêt attaqué, en ce sens que soientordonnés la radiation de la servitude litigieuse au registre foncier et leredressement de celui-ci en conséquence; à titre subsidiaire, il conclut àl'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de l'affaire à l'autoritécantonale pour qu'elle complète au besoin le dossier et statue à nouveau. Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.L'arrêt entrepris, par lequel la cour cantonale a notamment rejeté lesconclusions du demandeur tendant à la radiation de la servitude litigieuse auregistre foncier, tranche une contestation civile portant sur des droits denature pécuniaire, au sens de l'art. 46 OJ (cf. ATF 130 III 554, consid. 1.2non publié; 121 III 52, consid. 1 non publié; 114 II 426, consid. 1 nonpublié; 107 II 331, consid. 1 non publié). Contrairement à ce que prescriventles art. 51 al. 1 let. a et 55 al. 1 let. a OJ, ni l'arrêt attaqué, ni l'actede recours n'indiquent que la valeur litigieuse exigée par l'art. 46 OJ estatteinte, le demandeur partant de l'idée erronée qu'il s'agirait d'un litigeportant sur un droit de nature non pécuniaire. Cela n'affecte toutefois pasla recevabilité du recours, car il peut être constaté d'emblée aveccertitude, sur le vu de l'acte de recours et de l'arrêt entrepris, que lavaleur litigieuse dépasse largement 8'000fr. (ATF 109 II 491 consid. 1c/ee;90 IV 267 consid. 1; 87 II 113 consid. 1; 83 II 245 consid. 2; 82 II 592; 82III 94; 81 II 309; 79 III 172; 120 II 393 consid. 2 in fine). Il s'ensuit quele recours, interjeté en temps utile (cf. art. 54 al. 1 OJ) contre unedécision finale prise par le tribunal suprême du canton de Genève et qui nepeut pas être l'objet d'un recours ordinaire de droit cantonal (cf.art. 48al. 1 OJ), est recevable. 2.2.1Le demandeur fait grief à la cour cantonale d'avoir violé les art.3 et661 CC en retenant que les défendeurs pouvaient invoquer leur bonne foi tantlors de l'inscription de la servitude que pendant toute la durée du délai dedix ans prévu par l'art. 661 CC. Il rappelle que si la bonne foi est présuméeen vertu de l'art. 3 al. 1 CC, cette présomption peut être combattue enétablissant que la bonne foi présumée n'existe pas, autrement dit quel'intéressé est de mauvaise foi; en outre, celui qui invoque la présomptionprécitée est déchu de son droit d'invoquer la protection légale si sa bonnefoi est incompatible avec l'attention que les circonstances permettaientd'exiger de lui (art. 3 al. 2 CC). Or le demandeur soutient qu'en l'espèce, les constatations de fait opéréespar la Cour de justice démontreraient que les défendeurs ne pouvaient quesavoir que le demandeur était incapable de discernement. En effet, enprésence d'une personne portant les stigmates graves d'un retard mentalprofond au sens du DSM-IV 318.2, possédant un quotient intellectuel de 20/25et invalide à 80%, tout un chacun ne pourrait que se rendre compte de sonincapacité de discernement. De plus, les défendeurs avaient été, avant ledébut des pourparlers avec les parents du demandeur le 9 septembre 1980, sesvoisins directs pendant plus de trois ans. Ce serait précisément parce quel'incapacité de discernement du demandeur était connue des défendeurs queceux-ci ont conduit les pourparlers, pendant plus de deux ans, avec lesparents du demandeur et non directement avec lui, en sa qualité depropriétaire majeur du domaine. Ce serait également la raison pour laquellele concours des parents du demandeur, respectivement de son père, a paruindispensable tant à A.________ qu'aux notaires qui ont instrumenté lesdivers actes successifs. Enfin, il n'a jamais été contesté que la signaturedu demandeur apposée sur les actes en question était enfantine, ce quin'avait pas échappé au notaire H.________. À cela s'ajouterait que A.________ a admis lors de son audition que ledemandeur, lors de la séance de signature du premier acte du 6 novembre 1981,lui était "simplement apparu comme très effacé". À cet égard, la courcantonale, en retenant de manière erronée que le demandeur avait "simplementparu effacé" aux défendeurs (cf. lettre C.b in fine supra), aurait faitpreuve d'une inadvertance manifeste qui devrait être corrigée. En outre, lepère du demandeur a déclaré lors des enquêtes qu'il avait "mentionné aunotaire qui [avait] rencontré [son] fils que celui-ci avait un handicap. Lenotaire, pas plus que M.A.________, ne [lui avait] demandé si [son] filsétait sous tutelle ou devait l'être". Or la cour cantonale n'aurait pasretenu, par une inadvertance manifeste, que A.________ était présent lorsqueY.________ a déclaré au notaire que son fils avait un handicap. Selon le demandeur, l'ensemble des constatations précitées seraient amplementsuffisantes pour démontrer que les défendeurs avaient connaissance de l'étatde santé mentale du demandeur ou ne pouvaient à tout le moins pas de bonnefoi l'ignorer, et que dans tous les cas, ils n'ont pas fait preuve de ladiligence requise pour bénéficier de la présomption de bonne foi de l'art. 3al. 1 CC. 2.2 Avant d'examiner le bien-fondé de ces griefs, il sied de rappeler lesprincipes applicables. 2.2.1 Aux termes de l'art. 661 CC, les droits de celui qui a été inscrit sanscause légitime au registre foncier comme propriétaire d'un immeuble nepeuvent plus être contestés lorsqu'il a possédé l'immeuble de bonne foi, sansinterruption et paisiblement pendant dix ans. Cette disposition s'appliquepar analogie à l'acquisition d'une servitude, par renvoi de l'art. 731 al. 2CC (ATF 105 II 329). Le titulaire de la servitude inscrite indûment auregistre foncier doit l'avoir possédée, paisiblement et sans interruption,pendant dix ans. Si la servitude est négative (par exemple, une interdictionde bâtir), il faut que le propriétaire du fonds servant se soit effectivementabstenu des actes d'utilisation visés par la servitude (Steinauer, Les droitsréels, tome II, 3e éd. 2002, n. 2241d; cf. ATF 95 II 605 consid. 5).L'inscription de la servitude au registre foncier, dans la mesure où elle aété requise par le propriétaire du fonds servant ou lui a été communiquée parle conservateur (cf. art. 969 CC), emporte la présomption que l'abstention,par ce propriétaire, des actes d'utilisation visés par la servitude est laconséquence de cette inscription, laquelle manifeste la volonté dupropriétaire du fonds dominant d'exercer la servitude (Liver, ZürcherKommentar, Band IV/2a/1, 1980, n. 136 et 138 ad art. 731 CC). 2.2.2 La bonne foi est généralement définie comme l'ignorance non fautive duvice (Haab, Zürcher Kommentar, Band IV/1, 1977, n. 12 ad art. 661-663 CC;Meier-Hayoz, Berner Kommentar, Band IV/1/2, 1964, n. 24 ad art. 661 CC;Piotet, La bonne foi et sa protection en droit privé suisse, in RSJ 64/1968p. 81-88 et 100-103, p. 82). N'est par exemple pas de bonne foi l'acquéreurqui sait que l'aliénateur n'a pas la capacité de discernement (art. 16 CC),si bien que l'acte de disposition n'a pas d'effet juridique (art. 18 CC) etque l'inscription au registre foncier a été faite sans cause légitime(Meier-Hayoz, op. cit., n.24 ad art. 661 CC). La bonne foi de l'acquéreur,respectivement du propriétaire du fonds dominant, doit exister non seulementlors de l'inscription, mais aussi pendant toute la durée du délai deprescription (mala fides superveniens nocet), les exigences posées à la bonnefoi pendant la durée de la prescription étant toutefois moins élevées qu'aumoment de l'acquisition (Meier-Hayoz, op. cit., n. 25 ad art. 661 CC; Haab,op. cit., n. 12 ad art. 661-663 CC; Laim, Basler Kommentar, ZivilgesetzbuchII, 2e éd. 2003, n.14 ad art. 661 CC; cf. Steinauer, op. cit., n. 1581h). 2.2.3 La bonne foi, qui s'apprécie selon les critères de l'art. 3 CC, estprésumée (art. 3 al. 1 CC), mais l'adversaire de la partie prétendument debonne foi peut renverser cette présomption en apportant la preuve quel'intéressé avait connaissance du vice (Laim, op. cit., n.14 ad art.661 CC;ATF 119 II 23 consid. 3a). Cette preuve vise un fait interne qui ne peut êtreétabli qu'à partir de circonstances extérieures, par exemple unecommunication faite à l'intéressé (Deschenaux, Le Titre préliminaire du Codecivil, in Traité de droit privé suisse, t. II/1, 1969, p. 203 s.); touchantau fait, elle ressortit exclusivement au recours de droit public (arrêt nonpublié 5C.50/2003 du 13 août 2003, consid. 3.3; Poudret, Commentaire de laloi fédérale d'organisation judiciaire, vol.II, 1990, n.4.3.2 et 4.6.2 adart. 63 OJ et les arrêts cités). 2.2.4 L'adversaire de la partie prétendument de bonne foi peut aussi fairevaloir que l'intéressé est déchu du droit d'invoquer la protection légaleattachée à la bonne foi parce qu'il n'a pas fait preuve de l'attention queles circonstances permettaient d'exiger de lui (art. 3 al.2 CC; Laim, op.cit., n.14 ad art. 661 CC; ATF 119 II 23 consid. 3a). Dans ce cas, le débatne se place plus sur le terrain de la preuve et du fait, mais sur celui dudroit à la protection de la bonne foi; cette question peut donc être revuedans un recours en réforme (Deschenaux, op. cit., p. 204 et p. 215 note 40;arrêt non publié 5C.50/2003 du 13 août 2003, consid. 3.4.1; Honsell, BaslerKommentar, Zivilgesetzbuch I, 2eéd. 2002, n.30 ad art. 3 CC). La mesure de l'attention exigée par les circonstances, au sens de l'art.3al. 2 CC, est une notion soumise à l'appréciation du juge (art. 4 CC; ATF 122III 1 consid.2a/aa; Deschenaux, op. cit., p.214). Elle s'apprécie danschaque cas particulier en tenant compte de l'ensemble des circonstances etselon des critères objectifs, tirés de ce que ferait un honnête homme placédans une situation analogue (ATF 119 II 23 consid. 3c/aa; Deschenaux, op.cit., p. 216; Honsell, op. cit., n.37 ad art. 3 CC). La partie de bonne foiqui a fait preuve de négligence, même légère, par rapport au degréd'attention ainsi fixé par hypothèse pour la situation donnée est déchue dela protection légale (Deschenaux, op. cit., p. 217; Baumann, ZürcherKommentar, Band I/1, 3e éd. 1998, n. 59 ad art. 3 CC; Honsell, op. cit.,n.35 ad art. 3 CC; Piotet, op. cit., p. 102). 2.3 Il convient maintenant d'appliquer ces principes au cas d'espèce, et cesur la base des faits retenus par l'autorité cantonale. Si l'on peut donneracte au demandeur que A.________ a effectivement déclaré lors de son auditionque le demandeur lui était "simplement apparu comme très effacé" lors de laséance de signature de l'acte du 6 novembre 1981, ce qui ne change pasfondamentalement les choses, il ne
ressort pas de l'audition du père dudemandeur, contrairement à ce que prétend ce dernier, que A.________ auraitété présent lorsque Y.________ aurait déclaré au notaire que son fils avaitun handicap. Il n'y a donc pas d'inadvertance manifeste de la part des jugescantonaux, qui ont au contraire expressément relevé que si le père dudemandeur avait indiqué avoir informé le notaire que son fils souffrait d'unhandicap, il n'avait pas été allégué ni établi que cette information auraitété donnée en présence des défendeurs ou à ceux-ci (cf. lettre F.c supra). Force est ainsi de constater qu'il n'est pas établi en fait que lesdéfendeurs auraient eu connaissance de l'incapacité de discernement dudemandeur lors de la constitution de la servitude, ni pendant les dix ans quiont suivi. Sur la base des constatations de fait de l'arrêt attaqué, on nesaurait par ailleurs dire que les défendeurs n'ont pas fait preuve del'attention requise par les circonstances. Les éléments mis en avant par ledemandeur n'étaient pas propres à susciter chez un honnête homme placé dansune situation analogue des doutes sur la capacité de discernement dudemandeur. Ainsi, le fait que tous les pourparlers ont été conduits avec les parents dudemandeur et que ce dernier était assisté de son père lors de la signaturedes actes authentiques pouvait sans autre s'expliquer par un âge encore jeune(23 ans) et/ou une inexpérience en affaires, ainsi que la cour cantonale l'arelevé à raison (cf. lettre F.f supra). Il n'apparaît pas insolite qu'unjeune homme s'en remette à ses parents pour négocier une opérationimmobilière et qu'il se fasse assister de ceux-ci lors de la signature desactes authentiques finalisant l'opération. Quant au fait que, lors de lasignature des actes notariés, le demandeur est apparu aux défendeurs commeeffacé, ou même très effacé, il pouvait bien plutôt être perçu commerévélateur d'un trait de caractère que d'une éventuelle déficience mentale,étant rappelé par ailleurs qu'aucune particularité physique ne révèle leretard mental dont le demandeur est affecté. Au demeurant, les défendeursavaient d'autant moins de raisons de douter de la capacité civile dudemandeur que l'acte litigieux du 28 juillet 1982 avait été précédé de deuxautres actes authentiques, des 6 novembre 1981 et 25 juin/6 juillet 1982 etqu'aucun des deux notaires - qui, en tant qu'officiers publics, sont tenus deveiller aux intérêts de l'ensemble des parties à l'acte - ayant instrumentéces actes successifs n'ont mis en cause cette capacité. Dans cescirconstances, le seul caractère "enfantin" de la signature du demandeur, quin'a pas étonné le notaire et dont il n'est pas établi qu'il ait même étéremarqué par les défendeurs, n'était pas de nature à éveiller des doutes surla capacité de discernement du demandeur. Il convient enfin d'observer que la servitude litigieuse a été inscrite auregistre foncier sur la base de l'acte du 28 juillet 1982, qui comprenait uneréquisition d'inscription. Or comme les défendeurs étaient fondés à se fierde bonne foi à l'apparente capacité civile du demandeur, ils pouvaientégalement partir du principe que l'abstention effective par le demandeur desactes d'utilisation visés par la servitude était la conséquence del'inscription au registre foncier et peuvent donc, dans les circonstances del'espèce, se prévaloir de la prescription acquisitive de la servitude selonl'art. 661 CC (cf. consid. 2.2.1 supra). Il résulte de ce qui précède que les moyens du demandeur tirés d'uneprétendue violation des art.3 et 661 CC doivent être rejetés. 3.3.1Le demandeur reproche à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 663 CC,ainsi que l'art. 134 al. 1 ch. 6 CO, pour avoir refusé de considérer que ledélai de prescription acquisitive était suspendu tant que le demandeur, dontil est établi qu'il était déjà privé de la capacité civile active lors de laconstitution de la servitude, n'avait pas de représentant légal, soit jusqu'àsa mise sous tutelle le 12 octobre 1994. Il fait valoir que si, selon lajurisprudence suivie par la cour cantonale, l'art.134 al. 1 ch. 6 CO prévoitune cause de suspension objective, extérieure à la personnalité du créancier(cf. lettre F.f supra), plusieurs auteurs proposent de l'appliquer égalementaux cas dans lesquels le créancier qui n'a pas la capacité civile active n'apas de représentant légal. 3.2 Aux termes de l'art. 134 al. 1 ch. 6 CO, la prescription ne court pointet, si elle avait commencé à courir, elle est suspendue tant qu'il estimpossible de faire valoir la créance devant un tribunal suisse. Selon lajurisprudence, cette disposition ne s'applique que si le créancier estempêché d'intenter une action en Suisse par des circonstances objectives, quine tiennent pas à lui, soit notamment lorsqu'il n'y a pas de for en Suisse(ATF 124 III 453 consid. 4a; 90 II 428 consid. 6 à 9; cf. ATF 88 II 283consid. 3a; Däppen, Basler Kommentar, Obligationenrecht I, 3e éd. 2003, n. 7ad art. 134 CO; Berti, Zürcher Kommentar, Band V/1h, 3e éd. 2002, n. 16 adart. 134 CO; Pichonnaz, Commentaire romand, Code des obligations I, 2003,n.9 ad art. 134 CO). Par son interprétation restrictive de la dispositionprécitée, le Tribunal fédéral a ainsi fortement relativisé la portée duprincipe rendu par l'adage contra non valentem agere non currit praescriptio,qui veut que la prescription soit suspendue lorsque le créancier est entravé,pour quelque raison que ce soit, dans la poursuite de son droit; il asouligné qu'il convient de se montrer strict relativement à la natureobjective - soit indépendante de la situation personnelle du créancier - descirconstances pertinentes pour l'application de l'art. 134 al. 1 ch. 6 CO,une certaine souplesse étant en revanche de mise lorsqu'il s'agit de décidersi la circonstance objective relevée dans un cas concret entre ou non dansles prévisions de cette disposition (ATF 124 III 453 consid. 4a). 3.3 Certes, comme le relève le demandeur, plusieurs auteurs proposent que lacause de suspension de l'art. 134 al. 1 ch. 6 CO soit étendue aux cas danslesquels le créancier qui est privé de la capacité civile active n'a pas dereprésentant légal (Spiro, Die Begrenzung privater Rechte durch Verjährungs-,Verwirkungs- und Fatalfristen, Band I, 1975, p. 237 s.; Bucher,Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil ohne Deliktsrecht, 2e éd.1988, p. 462, avec référence aux dispositions expresses de plusieurs codeseuropéens et sud-américains; cf. Gauch/Schluep/Schmid/Rey, SchweizerischesObligationenrecht, Allgemeiner Teil, Band II, 8e éd. 2003, n. 3527).Toutefois, le sens et le but des dispositions du droit positif suisse sur lasuspension de la prescription, tels qu'ils ont été analysés de manièredétaillée aux ATF 90 II 428 consid. 9, s'opposent à une telle extension, etil n'y a pas lieu de revenir sur ce point, confirmé aux ATF 124 III 453consid.4a. Il s'ensuit que, comme la cour cantonale l'a retenu à bon droit, le délai dedix ans de l'art. 661 CC, qui a commencé à courir le jour de l'inscription dela servitude litigieuse au registre foncier, soit le 2 septembre 1982, estarrivé à échéance le 2 septembre 1992. 3.4 Le demandeur soutient que les défendeurs n'auraient pas possédé laservitude paisiblement pendant dix ans; en effet, la prescription acquisitivede la servitude aurait été suspendue jusqu'au 12 octobre 1994, jour de lamise sous tutelle du demandeur, si bien que l'ouverture de la présente actionle 3 juin 2002 aurait mis fin à la possession paisible avant l'échéance dudélai de dix ans. Ce grief tombe toutefois à faux, puisqu'il repose sur leprésupposé erroné - comme on vient de le voir - que la prescriptionacquisitive de la servitude aurait été suspendue jusqu'à ce que le demandeurait été pourvu d'un tuteur. 4.En définitive, le recours en réforme, mal fondé, doit être rejeté. Ledemandeur, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 156 al.1OJ). Il n'y a en revanche pas lieu d'allouer de dépens, dès lors que lesdéfendeurs n'ont pas été invités à procéder et n'ont en conséquence pasassumé de frais en relation avec la procédure devant le Tribunal fédéral(art. 159 al. 1 et 2 OJ; Poudret/Sandoz-Monod, Commentaire de la loi fédéraled'organisation judiciaire, vol. V, 1992, n. 2 ad art. 159 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 5'000 fr. est mis à la charge du demandeur. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laChambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. Lausanne, le 6 octobre 2006 Au nom de la IIe Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.122/2006
Date de la décision : 06/10/2006
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-10-06;5c.122.2006 ?
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