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05/10/2006 | SUISSE | N°1P.365/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 octobre 2006, 1P.365/2006


{T 0/2}1P.365/20061P.366/2006 /ajp Arrêt du 5 octobre 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président, Fonjallaz et Eusebio.Greffière: Mme Truttmann. 1P.365/2006X.________,Y.________,recourantes,toutes deux représentées par Me Philippe Pont, avocat, et 1P.366/2006Z.________,recourant, représenté par Me Philippe Pont, avocat, contre Commune de Montana, 3963 Crans-Montana 1, représentée par Me AntoineZen-Ruffinen, avocat, avenue Ritz 33, case postale 2135, 1950 Sion,Conseil d'Etat du canton du Valais, Palais du Gouvernement, 1950 Sion,Tribunal cantonal du canton du Valais,

Cour de droit public, Palais deJustice, av. Mathieu-Schi...

{T 0/2}1P.365/20061P.366/2006 /ajp Arrêt du 5 octobre 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président, Fonjallaz et Eusebio.Greffière: Mme Truttmann. 1P.365/2006X.________,Y.________,recourantes,toutes deux représentées par Me Philippe Pont, avocat, et 1P.366/2006Z.________,recourant, représenté par Me Philippe Pont, avocat, contre Commune de Montana, 3963 Crans-Montana 1, représentée par Me AntoineZen-Ruffinen, avocat, avenue Ritz 33, case postale 2135, 1950 Sion,Conseil d'Etat du canton du Valais, Palais du Gouvernement, 1950 Sion,Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, Palais deJustice, av. Mathieu-Schiner 1,1950 Sion 2. Aménagement du territoire, zone réservée; recours de droit public contre les arrêts du Tribunal cantonal du canton duValais, Cour de droit public,du 11 mai 2006. Faits: A.X. ________, Y.________ et Z.________ sont respectivement propriétaires desparcelles nos 2141, 2142/2144/797 et 2143/292, du cadastre de la commune deMontana, au lieu-dit "Crête du Lousset". Ces parcelles sont situées àl'intérieur du périmètre de plan de quartier obligatoire "Hôtel du Parc". Cedernier a été homologué par le Conseil d'Etat le 23 mai 2001. B.Par décision du 26 août 2002, les parcelles comprises dans le périmètre duplan de quartier "Hôtel du Parc" ont été classées en zone réservée. Cettedécision, fondée sur l'art. 19 de la loi cantonale concernant l'applicationde la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 23 janvier 1987(ci-après: LCAT), est entrée en force dès sa publication, pour une durée dedeux ans, soit jusqu'au 26septembre 2004, ou jusqu'à l'homologation du planet règlement de quartier. La mesure avait pour but de permettre auxdifférents partenaires concernés d'élaborer un projet de plan de quartier etun dossier d'homologation favorisant la mise en valeur de leurs immeublesrespectifs, la sauvegarde du site de l'Hôtel du Parc et de ses environs,ainsi que la réalisation d'objectifs d'intérêt public. Durant ce délai, rienne devait être entrepris à l'intérieur de cette zone qui puisse entraverl'établissement du plan de quartier. Les oppositions formées par X.________, Y.________ et Z.________ ont étérejetées par le Conseil d'Etat. Le Tribunal cantonal du canton du Valais(ci-après: le Tribunal cantonal) a confirmé la décision du Conseil d'Etat pararrêt du 18 mars 2004. C.Par décision du 24 juin 2004, l'Assemblée primaire de la commune de Montana adécidé de prolonger la zone réservée pour une durée supplémentaire de troisans, soit jusqu'au 26 septembre 2007, ou jusqu'à l'homologation du plan et durèglement de quartier. Par arrêts du 29 juin 2005, le Conseil d'Etat a rejeté les recours deX.________, Y.________ et Z.________. Par arrêts du 11 mai 2006, le Tribunalcantonal a également rejeté leurs recours. D.Agissant par la voie de deux recours de droit public séparés, X.________ etY.________ d'une part, et Z.________ d'autre part, demandent au Tribunalfédéral d'annuler les arrêts du Tribunal cantonal du 11 mai 2006. Ils seplaignent d'une violation de la garantie de la propriété. Z.________ faitégalement valoir une violation de l'art.6 par. 1 CEDH. Le Tribunal cantonal et le Conseil d'Etat ont renoncé à se déterminer sur lesrecours. La commune de Montana a conclu à leur rejet, dans la mesure de leurrecevabilité. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Il convient de joindre les deux recours, dirigés contre des décisionsséparées rendues par la même autorité dans le même complexe de faits, etstatuer par un seul arrêt (ATF 113 Ia 390 consid. 1 p. 394). 2.Le recours est dirigé contre la prolongation de la durée de validité d'unezone réservée au sens des art. 27 LAT et 19 LCAT. A l'égard de tellesdécisions cantonales, en application de l'art. 34 al. 3 LAT, seule la voie durecours de droit public est ouverte. Les recourants, propriétaires deparcelles touchées, ont qualité pour recourir (art. 88 OJ; arrêt du 2 février1995 publié in ZBl 1996 p. 229 et RDAF 1997 I p.488; ATF 107 Ia 77 consid.3a/aa p. 88). 3.Les recourants se plaignent d'une violation de la garantie de la propriété.Ils contestent que les hypothèses prévues par l'art. 27 LAT soient réalisées.Ils font également valoir que la zone protégée ne pourrait pas se superposerà un périmètre de quartier obligatoire. Ils critiquent également lesnouvelles exigences contenues dans le règlement établi par la commune. Ilss'opposent enfin à la volonté communale de réunir le consentement de tous lespropriétaires quant au plan de quartier à adopter. 3.1 Aux termes de l'art. 19 al. 1 LCAT, "s'il n'existe aucun pland'affectation ou s'ils doivent être modifiés, le conseil municipal peutdéclarer des territoires exactement délimités, zones réservées au sens de laLAT. A l'intérieur de ces zones réservées, rien ne doit être entrepris quipuisse entraver l'établissement de ces plans". Une zone réservée, au sens decette disposition ou au sens de l'art. 27 LAT auquel elle renvoie, est unemesure conservatoire ou provisionnelle. La zone réservée équivaut à un pland'affectation et elle entraîne des restrictions à la propriété (ATF 113 Ia362 consid. 2 p. 364; dfjp/ofat, Etude relative à la loi fédérale surl'aménagement du territoire, n. 12 et15 ad art. 27); elle permet notammentd'interdire temporairement toute construction (dfjp/ofat, op. cit., n. 13 adart. 27). Une telle mesure doit cependant, en vertu du droit fédéral, êtrelimitée dans le temps (art. 27 al. 2 LAT): l'art. 19 al. 2 LCAT prévoit unedurée de deux ans, prolongeable jusqu'à un maximum de cinq ans. Dès lors qu'elle constitue un droit fondamental, la propriété ne peut êtrerestreinte qu'aux conditions de l'art. 36 Cst., aux termes desquelles larestriction doit reposer sur une base légale - respectivement sur une loi ausens formel si la restriction est grave (al.1), être justifiée par unintérêt public (al. 2) et respecter le principe de la proportionnalité (al.3). Le Tribunal fédéral examine librement si les mesures critiquées répondentà un intérêt public et à l'exigence de la proportionnalité, mais il s'imposeune certaine retenue dans l'examen de questions d'appréciation ou descirconstances locales dont les autorités cantonales ont une meilleureconnaissance que lui (ATF 129 I 337 consid. 4.1 p. 344 et les arrêts cités). L'art. 27 LAT est considéré comme une base légale suffisante et ne nécessitepas de dispositions cantonales d'exécution (dfjp/ofat, op. cit., n. 7 et 12ad art. 27). L'intérêt public attaché à la création d'une zone réservéeimplique une sérieuse volonté d'aménager et présuppose l'admissibilité duprojet d'aménagement futur; le principe de la proportionnalité exige quant àlui que la zone réservée ne soit pas plus vaste et ne dure pas plus longtempsque ne le requiert le but poursuivi (ATF 113 Ia 362 consid. 2a-c p. 365-367;105 Ia 223 consid.2d p.228s.). Ces conditions sont exprimées en d'autrestermes par l'art.19 al. 3 LCAT, qui dispose que les opposants à une zoneréservée peuvent faire valoir que cette mesure "n'est pas nécessaire, que sadurée est excessive ou que le but poursuivi est inopportun". 3.2 En l'espèce, se prononçant sur le recours des recourants contre ladécision d'adoption de la zone réservée, le Tribunal cantonal, par arrêts du18 mars 2004, a jugé admissible au regard de l'art. 27 LAT, la création d'unezone réservée pour permettre l'établissement d'un plan d'affectationobligatoire, tel que le plan de quartier de l'Hôtel du Parc. L'urbanisationde ce périmètre, situé au coeur de la station de Montana, étantparticulièrement sensible (préservation de la colline, sauvegarde de la vuesur les Alpes et des alentours du lac de Grenon en contrebas, etc.), il aestimé que seule l'adoption d'une zone réservée était de nature à garantir laprise en compte simultanée de tous les intérêts en cause. Cet arrêt a acquis force de chose jugée. Cette notion implique que les mêmesparties ne peuvent plus remettre en cause, devant quelque juridiction que cesoit, sur la base des mêmes faits et des mêmes règles de droit, uneprétention déjà jugée par l'autorité en question (à ce sujet, cf. AndréGrisel, Traité de droit administratif, vol. II, Neuchâtel 1984, p. 882;Blaise Knapp, Précis de droit administratif, 4e édition, Bâle 1991, p. 248ss; Pierre Moor, Droit administratif, vol. II, 2e édition, Berne 2002, p. 323ss). Le principe de la zone réservée a donc été définitivement tranché et nepeut plus être remis en cause dans la présente procédure. Les arguments desrecourants concernant la prétendue non-réalisation des hypothèses de l'art.27 LAT et l'objection selon laquelle une zone réservée ne pourrait pas sesuperposer à un périmètre de plan de quartier obligatoire doivent donc êtrerejetés, les recourants n'apportant au demeurant aucun élément nouveaususceptible de conduire à une nouvelle appréciation de la situation. 3.3 Selon les recourants, la prolongation de la zone réservée permettrait àla commune d'exercer une forme de contrainte sur les propriétaires concernésen leur imposant des règles particulières dépourvues de bases légales. Ilsfont en particulier référence à la perception d'une taxe de remplacementprévue dans le projet de règlement du 17 février 2006 élaboré par la commune. Comme l'a à juste titre relevé le Tribunal cantonal, la critique desrecourants vise exclusivement le contenu matériel du plan de quartier. Legrief est dès lors étranger à la procédure de prolongation de la durée devalidité de la zone réservée et doit être rejeté. 3.4 Les recourants contestent enfin l'exigence du consentement de tous lespropriétaires au plan de quartier. Ils font valoir que ce moyen permettrait àla commune "d'institutionnaliser le déni de justice" en refusant de rendreune décision sur les nombreuses variantes proposées, aussi longtemps que tousles propriétaires concernés n'auraient pas adhéré au plan de quartierproposé. Cet argument concerne en réalité à nouveau la procédure d'adoption du plan dequartier et ne saurait être invoqué dans la présente procédure. Laproblématique du consentement de tous les propriétaires peut toutefois êtreexaminée par le Tribunal de céans sous l'angle du principe de laproportionnalité, ce que les recourants semblent implicitement demander. La zone réservée doit être limitée dans le temps. Elle ne doit pas servir àrepousser indéfiniment la mise à l'enquête ou l'adoption de la nouvelleréglementation. La mesure ne peut trouver aucune justification si elle seprolonge pour toute autre raison que celle d'être au service de l'adoption dela nouvelle réglementation (Manuel Bianchi, Réflexions autour des mesuresprovisionnelles à l'occasion de la révision d'un plan d'aménagement local inZBl 1987 396, p. 407). En l'espèce, la zone réservée, adoptée au départ pour une durée de deux ans,a été prolongée pour une durée supplémentaire de trois ans, ou jusqu'àl'homologation du plan et règlement du plan de quartier. La mesure respectedonc les art. 19 al. 2 LCAT et 27 LAT et le principe selon lequel la mesuredoit être levée dès qu'elle n'est plus nécessaire (Alexander Ruch,Commentaire LAT, n. 56 ad art. 27 LAT; Bernard Waldmann/Peter Hänni,Raumplanungsgesetz, Berne 2006, n.16 ad art. 27 LAT, p. 731). La mise en place d'une zone réservée avait à l'origine été décidée en raisonde l'existence de fortes divergences quant aux variantes envisagées pour lerèglement du plan de quartier à adopter. Il existait donc de grandesincertitudes quant au contenu matériel du périmètre en cause. Or lesrecourants ne soutiennent pas que la situation serait différente aujourd'hui.Il ressort en effet du dossier que le plan de quartier et son règlement n'ontpas encore été homologués. Au contraire, les recourants affichent clairementleur opposition au règlement proposé par la commune. Le Tribunal cantonal ayant relevé que le contenu du plan de quartier àadopter revêtait une très grande importance pour l'image de la station deMontana et l'esthétique des lieux, la précaution avec laquelle l'autoritécommunale traite cet objet est ainsi fondée. La suggestion de la communevisant à ce que tous les propriétaires concernés s'entendent sur leursprojets vise à faciliter l'aboutissement du plan de quartier. Qui plus est,l'autorité communale n'a pas assorti sa demande d'accord d'une menace derefus d'entrer en matière en cas de défaut d'entente. Il n'est du reste pas possible de reprocher à la commune de ralentir laprocédure. En effet, il ressort du dossier que celle-ci contribue activementà la recherche d'une solution pour le périmètre de l'Hôtel du Parc. Ainsiqu'elle l'a exposé dans ses observations, une inspection des lieux a eu lieu,les documents nécessaires à l'homologation du plan ont été élaborés, uneséance réunissant tous les propriétaires s'est tenue pour la présentation dela dernière mouture du projet de règlement du plan de quartier, lespropriétaires ont été invités à faire valoir leurs remarques et objections,et, enfin, le dossier, mis au net, a été adressé au Service de l'aménagementdu territoire en juin 2006 pour examen préalable avant mise à l'enquête. Dans ces conditions, il apparaît que la prolongation de la durée de validitéde la zone réservée ne viole pas le principe de la proportionnalité. Le griefdoit par conséquent être rejeté. 4.Dans un moyen soulevé exclusivement par le recourant, ce dernier soutient quela retenue dont a fait preuve le Tribunal cantonal dans l'examen du principede la proportionnalité s'agissant de l'appréciation des circonstances localesest contraire à l'art. 6 par. 1 CEDH, dans la mesure où le propriétaire a undroit à un contrôle judiciaire des zones réservées. Le droit d'accès à un tribunal prévu par l'art. 6 par. 1 CEDH suppose quecelui-ci soit investi d'un pouvoir d'examen entier, qui lui permetted'examiner aussi bien les faits que le droit (Mark E. Villiger, Handbuch derEuropäischen Menschenrechtskonvention, 2e édition, Zurich 1999, p. 271), cequi est le cas en l'espèce. Quand bien même le tribunal exerce son pouvoird'examen avec retenue - ce qui est compréhensible dans l'examen decirconstances plus familières aux autorités locales qu'à une cour supérieure- ce dernier reste entier (s'agissant du pouvoir d'examen du Tribunalfédéral, cf. André Grisel, op. cit., p.344). Quoi qu'il en soit, l'examen auquel se réfère le recourant avait trait à sonargument selon lequel le blocage de sa parcelle ne serait pas nécessaire, carson projet de construction ne mettrait pas en péril la réalisation du plan etles buts poursuivis par la commune. Or le recourant ne conteste plus ce pointdevant le Tribunal de céans. Il n'est par conséquent pas habilité à seplaindre de la retenue dont aurait fait preuve le Tribunal cantonal à cetégard. Le grief tiré d'une violation de l'art. 6 par. 1 CEDH, pour autantqu'il soit également motivé conformément aux exigences de l'art. 90 al. 1let. b OJ, doit donc être rejeté. 5.Il s'ensuit que les recours de droit public doivent être rejetés. Lesrecourants, qui succombent, doivent supporter l'émolument judiciaire (art.153, 153a et 156 OJ). Ils verseront en outre une indemnité
à titre de dépensà la commune de Montana, qui a procédé avec le concours d'un avocat. La règlegénérale, selon laquelle les collectivités publiques n'ont pas droit à desdépens (art. 159 al. 2 2e phrase OJ), n'est pas applicable aux petitescommunes ne disposant pas d'un service juridique (ATF 125 I 182 consid. 7 p.202; Jean-François Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisationjudiciaire du 16décembre 1942, Berne 1992, n. 3 ad art. 159, p. 161). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Les recours de droit public sont rejetés. 2.Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge solidaire deX.________ et d'Y.________. 3.Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de Z.________. 4.Une indemnité de 1'500 fr., à payer à la Commune de Montana à titre dedépens, est mise à la charge solidaire de X.________ et d'Y.________. 5.Une indemnité de 1'500 fr., à payer à la Commune de Montana à titre dedépens, est mise à la charge de Z.________. 6.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des recourants, à laCommune de Montana, au Conseil d'Etat du canton du Valais et au Tribunalcantonal du canton du Valais, Cour de droit public. Lausanne, le 5 octobre 2006 Au nom de la Ire Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.365/2006
Date de la décision : 05/10/2006
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-10-05;1p.365.2006 ?
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