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04/10/2006 | SUISSE | N°C.353/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 04 octobre 2006, C.353/05


Cause {T 7}C 353/05 Arrêt du 4 octobre 2006IVe Chambre MM. les Juges Ursprung, Président, Schön et Frésard. Greffière : Mme vonZwehl Secrétariat d'Etat à l'économie, Marché du travail et assurance-chômage,TCRV, Effingerstrasse 31, 3003Berne, recourant, contre P.________, intimé, représenté par Me Pierre Ruttimann, avocat, rueNeuve-du-Molard 5, 1204 Genève, Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 24 novembre 2005) Faits: A.La société à responsabilité limitée X.________ Sàrl avait notamment pour boutle commerce et l'exploitation de distributeurs de jou

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Cause {T 7}C 353/05 Arrêt du 4 octobre 2006IVe Chambre MM. les Juges Ursprung, Président, Schön et Frésard. Greffière : Mme vonZwehl Secrétariat d'Etat à l'économie, Marché du travail et assurance-chômage,TCRV, Effingerstrasse 31, 3003Berne, recourant, contre P.________, intimé, représenté par Me Pierre Ruttimann, avocat, rueNeuve-du-Molard 5, 1204 Genève, Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 24 novembre 2005) Faits: A.La société à responsabilité limitée X.________ Sàrl avait notamment pour boutle commerce et l'exploitation de distributeurs de jouets, machines à sous,jeux de divertissement et de tout distributeur de marchandises. Depuis le 1erseptembre 2003, P.________ en possédait la totalité du capital social(20'000fr.) et en était l'associé-gérant, avec signature individuelle; sasoeur, E.________, était gérante, également avec signature individuelle.Auparavant, P.________ avait travaillé auprès de la société Y.________ SA.Licencié par X.________ Sàrl au 30 juin 2004 en raison de la mauvaisesituation économique dans le secteur des automates, le prénommé a requis leversement d'indemnités de chômage dès le 9 juillet suivant. La faillite de lasociété a été prononcée le 2 décembre 2004 ensuite d'une déclarationd'insolvabilité. X.________ Sàrl a été radiée du registre du commerce le 10août 2005. Par décision du 30 juillet 2004, la Caisse de chômage FTMH (devenue dès le1er janvier 2005 la Caisse de chômage UNIA; ci-après: la caisse) a nié ledroit de P.________ à l'indemnité de chômage au motif que l'intéressé neremplissait pas les conditions relatives à la période de cotisation et qu'ilavait de surcroît une fonction comparable à celle d'un employeur au sein dela société X.________ Sàrl. Saisie d'une opposition, la caisse a confirmé saprise de position initiale dans une nouvelle décision du 7 décembre 2004. B.Par jugement du 24 novembre 2005, le Tribunal administratif du canton de Vauda partiellement admis le recours formé par P.________ contre la décision du15 décembre 2004, annulé cette décision et renvoyé le dossier à la caisseafin qu'elle statue à nouveau dans le sens des considérants. C.Le Secrétariat d'Etat à l'économie (seco) interjette recours de droitadministratif. Il conclut à l'annulation du jugement cantonal. Sous suite de frais et dépens, P.________ conclut, principalement, à laconfirmation du jugement attaqué en tant qu'il constate qu'il a droit auxindemnités de chômage dès le 9 juillet 2004 et, à titre subsidiaire, à lareconnaissance de son droit aux indemnités de chômage dès le 2décembre 2004.La caisse a renoncé à se déterminer. Quant à l'Office régional de placementde Nyon, invité à se prononcer sur le recours en qualité d'intéressé, il s'enest remis à justice. Considérant en droit: 1.Le litige porte sur le droit de l'intimé à des indemnités de chômage à partirdu 9 juillet 2004. 2.Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales et lajurisprudence applicables au cas, en particulier l'art. 31 al. 3 let. c LACIqui exclut du droit à l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travailles personnes qui fixent les décisions que prend l'employeur ainsi que l'ATF123 V 234, lequel étend l'application de cette règle à l'octroi del'indemnité de chômage. Il suffit d'y renvoyer. On rappellera que l'arrêt précité réserve en principe le droit à l'indemnitéd'un assuré qui, s'étant trouvé dans une position assimilable à celle d'unemployeur, a quitté définitivement l'entreprise en raison de la fermeture decelle-ci, ou a rompu définitivement tout lien, à la suite de la résiliationdu contrat de travail, avec une entreprise qui continue d'exister (cf.consid. 7b/bb; voir aussi DTA 2003 n° 22 p. 241 consid. 2 et les références[C 92/02]). Lorsqu'il s'agit d'un membre du conseil d'administration ou d'unassocié d'une Sàrl, l'inscription au registre du commerce constitue en règlegénérale le critère de délimitation décisif (ATF 122 V 273 consid. 3; DTA2004 n° 21 p. 198 consid. 3.2 [C113/03]; DTA 2005 n° 23 p. 270 consid. 3 [C102/04]). La radiation de l'inscription permet d'admettre sans équivoque quel'assuré a quitté la société (arrêt C. du 29 novembre 2005, C 175/04).Autrement, en effet, la possibilité demeure que celui-ci réactivel'entreprise et se fasse réengager. Si, malgré le maintien de l'inscriptionau registre du commerce, l'assuré prouve que concrètement il ne possèdaitplus ce pouvoir de décision, la Cour de céans a déjà jugé qu'il n'y avait pasdétournement de la loi (par exemple arrêt E. du 14 avril 2005, C194/03). 3.En l'espèce, la juridiction cantonale a considéré que le licenciement deP.________ intervenait dans le cadre de la fermeture définitive de lasociété. Se fondant sur divers documents que le prénommé a produits(résiliations des contrats de travail des employés, cession du parc demachines à sous, commandements de payer, exercice du droit de rétention dupropriétaire des locaux occupés par X.________ Sàrl), ainsi que sur lesdéclarations de la soeur de celui-ci, Elisabeth, qui a comparu en son absence(cf. compte-rendu d'audience du 3 novembre 2005), elle a retenu que lasociété n'avait plus de substance économi-que depuis le mois d'avril 2004 etqu'elle se trouvait dans une situation de «faillite virtuelle»irréversible. P.________ n'avait dès lors plus aucune possibilité de laréactiver, si bien qu'il n'y avait pas non plus de risque de détournement dela réglementation en matière d'indemnité en cas de réduction de l'horaire detravail. Un délai-cadre courant du 9 juillet 2002 au 8 juillet 2004 devaitpar conséquent lui être ouvert. S'agissant des conditions relatives à lapériode de cotisation durant ce délai-cadre (art. 8 al. 1er let. e LACI enrelation avec art. 13 al. 1er LACI), les premiers juges ont estimé quel'intéressé avait apporté la preuve qu'un salaire lui avait été effectivementversé du 9 juillet 2002 au mois d'août 2003 (soit 12,6 mois), période aucours de laquelle il avait travaillé pour la société Y.________ SA, mais paspour son activité auprès X.________ Sàrl. Au regard de la jurisprudence duTribunal fédéral des assurances (DTA 2001 n° 27 p.225 ss [279/00]), lesbulletins de salaire versés à la procédure et sur lesquels figurait sasignature et la mention «reçu en cash» n'y suffisaient pas. Cela étant,P.________ remplissait tout de même les conditions relatives à la période decotisation et la caisse était invitée à statuer à nouveau sur le droit auxprestations. 4.4.1Pour le seco, si l'on pouvait admettre que P.________ n'avait plus exercéde fonction comparable à celle d'un employeur à compter du prononcé de lafaillite de X.________ Sàrl, il n'était en revanche pas possible, avant cettedate, de contrôler sa perte de travail. Les graves difficultés de la sociétén'y changeaient rien. Aussi bien, le délai-cadre à prendre en considérationcouvrait-il la période du 5décembre 2002 au 4 décembre 2004. 4.2 L'intimé soutient qu'après la résiliation de son contrat de travail, sonactivité avait uniquement consisté dans la mise en oeuvre des opérationsnécessaires à la dissolution de la société. Il se réfère aux diverses phasesqui ont précédé la déclaration d'insolvabilité de X.________ Sàrl (du 26octobre 2004) et estime avoir démontré que la fermeture définitive del'entreprise avait toujours été la seule et unique action envisagée. Dans cecontexte, le maintien de son inscription comme associé au registre decommerce ne pouvait pas lui être reproché. Le registre du commerce du cantonde Vaud excluait en effet catégoriquement de donner suite à une réquisitionde radiation d'un associé d'une Sàrl lorsqu'il n'en existait qu'un seul -comme dans le cas de X.________ Sàrl - et que la conséquence de la radiationétait l'absence complète d'inscription d'un associé pour la Sàrl. Enfin, ilest d'avis qu'au vu des pièces fournies et des moyens de preuve offerts leversement effectif d'un salaire en sa faveur était plus vraisemblable quel'existence d'un accord fictif à ce sujet. 5.5.1Si l'on ne peut certes nier, au vu des pièces produites, que X.________Sàrl rencontrait des difficultés financières depuis le printemps 2004 déjà,on ne peut pas pour autant retenir que P.________ a définitivement quittél'entreprise en raison de la fermeture de celle-ci ou qu'il a rompu tout lienavec la société avec la résiliation de son contrat de travail. L'assuré a eneffet conservé son pouvoir de disposition sur la société. On notera que cen'est que le 8 septembre 2004 qu'une réunion entre gérants et réviseur a eulieu afin de déterminer de la marche à suivre. A ce moment-là, la décision aété prise d'établir des comptes annuels et intermédiaires pour avoir une vueexacte de la situation de la société (voir procès-verbal de la réunionextraordinaire des associés de X.________ Sàrl daté du même jour). Dansl'intervalle, le but social initial de la Sàrl a perduré et la recherche denouveaux fonds ou d'un repreneur n'était pas exclue, bien que lesperspectives d'avenir de la société semblaient fortement réduites. Enrevanche, on peut admettre qu'au moment où la société X.________ Sàrl aprésenté un avis de surendettement au juge, l'intimé n'avait plus la volontéde maintenir la société en vie et de se réserver la possibilité d'enpoursuivre ou d'en reprendre dès que possible l'exploitation dans le cadre dularge but social fixé dans les statuts. Il s'ensuit que le délai-cadred'indemnisation de l'intimé ne peut lui être ouvert qu'à partir du 26 octobre2004 et que le délai-cadre de cotisation déterminant s'étend du 26 octobre2002 au 25 octobre 2004. 5.2 En application de la récente précision de jurisprudence de la Cour decéans en ce qui concerne la période de cotisation, on ne peut pas non plussuivre les premiers juges lorsqu'ils estiment qu'il n'y a pas lieu de tenircompte de la période d'activité de l'intimé au service de X.________ Sàrl enraison d'un défaut de preuve au sujet du salaire. Dans un arrêt ATF 131 V444, le Tribunal fédéral des assurances a en effet jugé que la seulecondition du droit à l'indemnité de chômage est, en principe, que l'assuréait exercé une activité soumise à cotisation pendant la période minimale decotisation. Aussi la jurisprudence exposée au DTA 2001 n° 27 p. 225 ss (etles arrêts postérieurs) ne devait-elle pas être comprise en ce sens qu'unsalaire doit en outre avoir été effectivement versé; en revanche, la preuvequ'un salaire a bel et bien été payé était un indice important en ce quiconcerne la preuve de l'exercice effectif de l'activité salariée. A premièrevue, il existe plusieurs éléments allant dans le sens d'une activité rémunérépour le compte de X.________ Sàrl. Dans la mesure toutefois où ni la caisse ni les premiers juges n'ont examinéles faits sous cet angle et, le cas échéant, complété l'instruction sur cepoint, il convient de renvoyer la cause à la caisse précitée afin qu'ellerende une nouvelle décision à la lumière des présents considérants. 6.Vu la nature du litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ). Le recourantn'obtient pas entièrement gain de cause, si bien que l'intimé a droit à uneindemnité de dépens réduite (art. 159 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est admis en ce sens que le jugement du Tribunal administratif du24 novembre 2005 ainsi que la décision du 7 décembre 2004 sont annulés, lacause étant renvoyée à la Caisse de chômage UNIA pour qu'elle rende unenouvelle décision et procède conformément aux considérants. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le seco versera à l'intimé le montant de 1'300 fr. (y compris la taxe à lavaleur ajoutée) à titre de dépens pour la procédure fédérale. 4.Le Tribunal administratif du canton de Vaud statuera à nouveau sur les dépensde la procédure cantonale au regard de l'issue du litige en dernièreinstance. 5.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à Unia caisse de chômage,Berne, au Tribunal administratif du canton de Vaud et à l'Office régional deplacement à Nyon. Lucerne, le 4 octobre 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IVe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.353/05
Date de la décision : 04/10/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-10-04;c.353.05 ?
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