La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/09/2006 | SUISSE | N°2A.320/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 11 septembre 2006, 2A.320/2006


{T 0/2}2A.320/2006 /fzc Arrêt du 11 septembre 2006IIe Cour de droit public MM. et Mme les Juges Merkli, Président,Wurzburger et Yersin.Greffier: M. Addy. X. ________,recourant, représenté par Me Laurence Santorelli, avocate, contre Service de la population du canton de Vaud,avenue de Beaulieu 19, 1014 Lausanne,Tribunal administratif du canton de Vaud,avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne. Refus de renouveler une autorisation de séjour, recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif ducanton de Vaud du 1er mai 2006. Faits: A.X. ________, né en 1974, ressortiss

ant de Serbie et Monténégro (Kosovo), estentré en Suiss...

{T 0/2}2A.320/2006 /fzc Arrêt du 11 septembre 2006IIe Cour de droit public MM. et Mme les Juges Merkli, Président,Wurzburger et Yersin.Greffier: M. Addy. X. ________,recourant, représenté par Me Laurence Santorelli, avocate, contre Service de la population du canton de Vaud,avenue de Beaulieu 19, 1014 Lausanne,Tribunal administratif du canton de Vaud,avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne. Refus de renouveler une autorisation de séjour, recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif ducanton de Vaud du 1er mai 2006. Faits: A.X. ________, né en 1974, ressortissant de Serbie et Monténégro (Kosovo), estentré en Suisse en novembre 1991 au titre du regroupement familial. Il a étémis au bénéfice d'une autorisation de séjour qui a été régulièrementrenouvelée par la suite. En janvier 1994, il a épousé une compatriote, née en1976, qui est venue le rejoindre en Suisse au mois d'avril suivant; de cetteunion sont issus deux enfants, nés respectivement en décembre 1994 etdécembre 2000. Depuis son arrivée en Suisse, X.________ n'a jamais occupé durablement unemploi; il a connu plusieurs périodes de chômage. En outre, il a été condamnéà différentes reprises, soit, en particulier: - à une peine de sept mois d'emprisonnement assortie d'une expulsion duterritoire suisse pour une durée de cinq ans avec sursis pendant deux ans,pour vol, utilisation frauduleuse d'un ordinateur et violation grave desrègles de la circulation (jugement du 25 juin 2002 du Tribunald'arrondissement de la Broye, confirmé sur recours le 18 octobre suivant parla Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal); - à une peine, complémentaire à celle précitée, de deux mois d'emprisonnementpour vol, conduite d'un véhicule automobile sans assurance et usage abusif deplaques (jugement du 10 novembre 2003 du Tribunal d'arrondissement de laBroye); - à une peine, complémentaire à celle précitée, de trois ans et demi deréclusion assortie d'une expulsion du territoire suisse pour une durée decinq ans, pour tentative de vol, tentative de brigandage, tentatived'utilisation frauduleuse d'un ordinateur, vol, dommages à la propriété,utilisation frauduleuse d'un ordinateur et violation de domicile (jugement du16 juin 2005 du Tribunal correctionnel du district de La Chaux-de-Fonds). B.Par décision du 4 novembre 2005, le Service de la population du canton deVaud (ci-après: le Service de la population) a refusé de renouvelerl'autorisation de séjour de X.________, au motif qu'au regard descondamnations pénales prononcées à son encontre, l'intérêt public à sonéloignement l'emportait sur son intérêt privé ainsi que sur celui de sonépouse et de ses enfants à ce qu'il demeure en Suisse. X. ________ a recouru contre cette décision devant le Tribunal administratifdu canton de Vaud (ci-après: le Tribunal administratif). A la demande du jugechargé de l'instruction de la cause, le Service pénitentiaire du canton deNeuchâtel a indiqué que, selon une décision du 19 décembre 2005 de l'autoritécompétente, X.________ avait "été libéré le même jour, avec différé de sonexpulsion pénale." Par arrêt du 1er mai 2006, le Tribunal administratif a rejeté le recours. C.Agissant par la voie du recours de droit administratif, X.________ demande auTribunal fédéral d'annuler l'arrêt précité du Tribunal administratif, enconcluant, sous suite de frais et dépens, au renouvellement de sonautorisation de séjour. Il requiert également le bénéfice de l'effetsuspensif. A l'appui de son recours, il produit une lettre de son épouse. Le Tribunal administratif se réfère aux considérants de son arrêt sanss'opposer à l'octroi de l'effet suspensif. Le Service de la population s'enremet, sur le fond, à la détermination du Tribunal administratif, maisdemande le rejet de la requête d'effet suspensif. L'Office fédéral desmigrations propose de rejeter le recours, en se référant à l'arrêt attaqué. Par ordonnance du 21 juin 2006, le Président de la IIe Cour de droit public aadmis la requête d'effet suspensif. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le recourant vit avec son épouse, qui est au bénéfice d'une autorisationd'établissement, ainsi qu'avec ses deux enfants; de ce fait, il peut, enprincipe, au titre du regroupement familial, prétendre au renouvellement deson autorisation de séjour en vertu de l'art. 17 al. 2 LSEE. Comme lesrelations familiales sont apparemment étroites et effectivement vécues, ilpeut également, comme il l'invoque, déduire un tel droit de l'art. 8 CEDH. Le recours est donc recevable sous l'angle de l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3OJ, la question de savoir si les conditions mises au renouvellement del'autorisation de séjour sont, ou non, remplies, relevant du fond de la cause(cf. ATF 119 Ib 81 consid. 2a p. 84; 118 Ib 153 consid. 2a p. 158). 2.2.1Le droit à une autorisation de séjour dans le cadre d'un regroupementfamilial fondé sur l'art. 17 al. 2 1ère phrase LSEE n'est pas absolu. IIs'éteint si l'ayant droit a enfreint l'ordre public (art. 17 al. 2 in fineLSEE) et, a fortiori, s'il existe un motif d'expulsion au sens de l'art. 10al. 1 LSEE. Cette dernière disposition prévoit notamment que l'étranger peutêtre expulsé de Suisse s'il a été condamné par une autorité judiciaire pourcrime ou délit (lettre a) ou si sa conduite, dans son ensemble, et ses actes,permettent de conclure qu'il ne veut pas ou n'est pas capable de s'adapter àl'ordre établi dans le pays qui lui offre l'hospitalité (lettre b).Les conditions d'extinction du droit à l'autorisation de séjour pour atteinteà l'ordre public selon l'art. 17 al. 2 LSEE sont moins strictes que cellesprévues pour la perte du droit à l'autorisation de séjour du conjointétranger d'un ressortissant suisse selon l'art. 7 al. 1 LSEE, lorsqu'ilexiste un motif d'expulsion (cf. ATF 122 II 385 consid. 3a p.390; 120 Ib 129consid. 4a p. 130/131). Toutefois, même si, selon la lettre de l'art. 17 al. 2 in fine LSEE, unesimple violation de l'ordre public suffit à entraîner la déchéance du droit àl'autorisation de séjour du conjoint étranger d'un étranger titulaire d'uneautorisation d'établissement (il n'est pas nécessaire qu'un motif d'expulsionau sens de l'art. 10 al. 1 LSEE soit réalisé), cette extinction doitégalement respecter le principe de la proportionnalité, conformément auxrègles générales du droit administratif. Cependant, étant donné qu'enprincipe une atteinte moindre suffit au regard de l'art. 17 al. 2 in fineLSEE, les intérêts privés opposés pèsent moins lourds dans la balance ques'il s'agissait d'une mesure d'expulsion proprement dite (cf. ATF 122 II 385consid. 3a p. 390; 120 lb 129 consid. 4a p. 130; Alain Wurzburger, Lajurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de police des étrangers,in RDAF 1997 p.320/321). 2.2 La réglementation prévue par l'art. 8 CEDH est similaire: le droit aurespect de la vie familiale (par. 1) n'est en effet pas absolu, en ce sensqu'une ingérence dans l'exercice de ce droit est possible selon l'art. 8 par.2 CEDH, pour autant que celle-ci soit "prévue par la loi et qu'elle constitueune mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécuriténationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à ladéfense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à laprotection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits etlibertés d'autrui". Il y a donc également lieu ici de procéder à une peséedes intérêts en présence (cf. ATF 125 II 633 consid. 2e, p. 639; 122 II 1consid. 2, p. 5/6). 2.3 Dans la pesée des intérêts, il faut en premier lieu tenir compte, en casde condamnation de l'étranger pour crime ou délit, de la gravité des actescommis ainsi que de la situation personnelle et familiale de l'intéressé. Lapeine infligée par le juge pénal est le premier critère servant à évaluer lagravité de la faute et à peser les intérêts. Le risque de récidive estégalement un facteur important qui doit s'apprécier d'autant plusrigoureusement que les faits reprochés sont graves (cf. ATF 120 Ib 6 consid.4c p. 15/16). Il y a lieu ensuite d'examiner si l'on peut exiger des membresde la famille qui ont un droit de présence en Suisse qu'ils suiventl'étranger dont l'autorisation de séjour est refusée. Pour trancher cettequestion, l'autorité compétente ne doit pas statuer en fonction desconvenances personnelles des intéressés, mais prendre objectivement enconsidération leur situation personnelle et l'ensemble des circonstances. Sil'on ne peut pas exiger des membres de la famille pouvant rester en Suissequ'ils partent à l'étranger, cet élément doit entrer dans la pesée desintérêts en présence mais n'exclut pas nécessairement, en lui-même, un refusde l'autorisation de séjour (cf. ATF 122 II 1 consid. 2 p. 6; 120 Ib 129consid. 4b p. 131). 3.Condamné pénalement à plusieurs reprises depuis son arrivée en Suisse en1991, le recourant n'a pas seulement violé l'ordre public au sens de l'art.17 al. 2 LSEE, mais réalise également les motifs d'expulsion prévus à l'art.10 al. 1 lettres a et b LSEE. Dans cette mesure, il n'a pas droit aurenouvellement de son autorisation de séjour, à moins que ses intérêts privéset ceux de son épouse et de ses enfants à pouvoir continuer à vivre ensembleen Suisse sont à ce point prépondérants que la mesure d'éloignement prise àson encontre n'apparaisse disproportionnée. 3.1 Pour l'essentiel, le recourant cherche à minimiser la gravité des actesqu'il a commis et à faire admettre qu'il ne présente plus de risque derécidive. Toutefois, comme l'ont retenu les premiers juges, les peines prononcéescontre lui totalisent plus de quatre ans de privation de liberté. Parailleurs, ces peines n'ont pas sanctionné des actes isolés, mais denombreuses infractions commises entre le 15 septembre 2000 et le 8février2003, soit pendant près de deux ans et demi. En outre, la troisièmecondamnation pénale réprime des actes plus graves que les deux premières,soit, en particulier, une tentative de brigandage commise dans un restaurantde la chaîne Mac Donald's. Le recourant soutient qu'il n'avait pas d'arme etqu'il n'a pas été violent lors de la commission de ce forfait. Il ressortcependant du jugement pénal qu'il n'y a pas joué un rôle de second plan, maisy a pris part en qualité de coauteur, et que le brigandage en cause relève du"grand banditisme" et a "assurément été traumatisant pour les trois victimes"au vu de son déroulement: il s'est fait sous la menace d'un pistolet et aimpliqué trois hommes en cagoules qui ont usé de violence et de brutalité; aureste, même si le recourant n'était effectivement pas armé, il s'est, selonles constatations pénales, accommodé du fait que l'arme utilisée par l'un deses comparses était "peut-être chargée" (jugement du 16juin 2005 du Tribunalcorrectionnel du district de La Chaux-de-Fonds, p. 6/7). Au vu du nombre etde la gravité des infractions commises, la faute du recourant pèse dès lorslourdement en sa défaveur dans la balance, d'autant que plusieurs de cesinfractions, dont la plus grave, ont été commises en état de récidive. Certes, la décision de libération conditionnelle et de différé de l'expulsionjudiciaire retient que l'intéressé a reconnu et "semble regretter sincèrementses actes", que la privation de liberté "semble donc avoir eu sur lui l'effetdissuasif escompté", et que "ses chances de resocialisation sontmanifestement meilleures en Suisse que dans son pays d'origine". Toutefois,la décision du juge pénal de surseoir à l'expulsion d'un condamné étrangerest dictée, au premier chef, par des considérations tirées des perspectivesde réinsertion sociale de l'intéressé. Or, pour l'autorité de police desétrangers, c'est la préoccupation de l'ordre et de la sécurité publics quiest prépondérante dans la pesée des intérêts. En matière d'expulsion, sonappréciation peut donc s'avérer plus rigoureuse que celle de l'autoritépénale (cf. ATF 130 II 176 consid. 4.3.3 p. 188; 129 II 215 consid. 3.2 et7.4, p. 216/217 et 223 et les références citées). Par ailleurs, octroyée demanière quasi automatique dès que le comportement du détenu en prison nes'oppose pas à son élargissement (cf. ATF 124 IV 193 consid. 3, 4d et 5b p.194 ss), la libération conditionnelle n'apparaît pas décisive pour apprécierla dangerosité pour l'ordre public de celui qui en bénéficie et la police desétrangers demeure libre de tirer ses propres conclusions à ce sujet (cf. ATF130 II 176 consid. 4.3.3 p. 188). Quoi qu'il en soit, au vu du parcoursprofessionnel chaotique du recourant, qui est sans formation et n'asemble-t-il, depuis sa venue en Suisse, jamais occupé durablement un emploi,on peut sérieusement s'interroger sur ses réelles chances de réinsertion. Demême ne peut-on ignorer que, bien que marié et père de famille depuis 1994,l'intéressé n'a pas hésité à commettre les nombreuses infractions qui luisont aujourd'hui reprochées, y compris après avoir subi des condamnations; onne saurait donc trop sous-estimer le risque de récidive dans la pesée desintérêts, étant précisé que, pour important qu'il soit, cet élément n'est pasabsolument décisif, la gravité intrinsèque des actes commis constituant lepremier critère à prendre en compte (cf. supra consid. 2.3).3.2 Le recourant soutient également qu'au vu de sa situation personnelle etfamiliale, un retour au Kosovo serait une mesure trop rigoureuse. Il affirmequ'aussi bien lui que son épouse ne comptent plus de famille dans leur paysd'origine. Le recourant et son épouse sont tous deux originaires du même pays où ils ontvécu durant de nombreuses années, jusqu'à l'âge de respectivement 17 et 18ans. On ne saurait donc, s'ils devaient retourner au Kosovo, parler dedéracinement les concernant. A ce jour, l'un et l'autre ont du reste passéplus d'années dans leur pays d'origine qu'en Suisse. Par ailleurs, lerecourant n'a pas réussi à s'intégrer dans son pays d'accueil, commel'attestent les nombreuses infractions qu'il a commises et son parcoursprofessionnel chaotique. L'épouse s'est semble-t-il mieux adaptée à sonnouveau cadre de vie, en particulier, si on l'en croit, sur le planprofessionnel: elle dit occuper un poste à responsabilité comme cheffed'équipe au sein d'une entreprise alimentaire. Pour autant, on ne sauraitdire qu'un retour dans son pays d'origine représenterait pour elle uneperspective inconcevable. Du reste, elle a précisé qu'elle était prête àsuivre son mari en cas de renvoi. Une telle mesure n'aurait donc, enprincipe, pas pour effet de briser la cellule familiale au sens étroit(parents-enfants). En outre, les enfants du couple, surtout le deuxième, sontencore relativement jeunes, et devraient pouvoir s'intégrer dans un nouvelenvironnement. Dans ces conditions, on ne peut suivre l'opinion du recourantlorsqu'il laisse entendre qu'un éventuel retour au Kosovo serait pour lui etsa famille particulièrement dramatique ou pénible. 3.3 Au vu de l'ensemble des circonstances, en particulier de la gravité desinfractions reprochées au recourant et de sa situation personnelle etfamiliale, le refus de renouvellement d'autorisation de séjour qui lui a
étéopposé n'apparaît pas une mesure disproportionnée. 4.Il suit de ce qui précède que le recours doit être rejeté. Succombant, lerecourant doit supporter un émolument judiciaire (cf. art.156 al. 1 OJ) etn'a pas droit à des dépens (cf. art. 159 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis à la charge du recourant. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie à la mandataire du recourant, auService de la population et au Tribunal administratif du canton de Vaud,ainsi qu'à l'Office fédéral des migrations. Lausanne, le 11 septembre 2006 Au nom de la IIe Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.320/2006
Date de la décision : 11/09/2006
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-09-11;2a.320.2006 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award