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04/09/2006 | SUISSE | N°5P.126/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 04 septembre 2006, 5P.126/2006


5P.126/2006 /frs{T 0/2} Arrêt du 4 septembre 2006IIe Cour civile MM. et Mme les Juges Raselli, Président, Hohl et Pagan, juge suppléant.Greffier: M. Fellay. X. ________, (époux),recourant, représenté par Me Reynald P. Bruttin, avocat, contre dame X.________, (épouse),intimée, représentée par Me William Dayer, avocat, Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108,1211 Genève 3. art. 9 Cst. (mesures protectrices de l'union conjugale), recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour dejustice du canton de Genève du 17 février 200

6. Faits: A.X. ________, né à Genève le 10 août 1966, de natio...

5P.126/2006 /frs{T 0/2} Arrêt du 4 septembre 2006IIe Cour civile MM. et Mme les Juges Raselli, Président, Hohl et Pagan, juge suppléant.Greffier: M. Fellay. X. ________, (époux),recourant, représenté par Me Reynald P. Bruttin, avocat, contre dame X.________, (épouse),intimée, représentée par Me William Dayer, avocat, Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108,1211 Genève 3. art. 9 Cst. (mesures protectrices de l'union conjugale), recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour dejustice du canton de Genève du 17 février 2006. Faits: A.X. ________, né à Genève le 10 août 1966, de nationalité suisse, et dameX.________, née à Medellin (Antioquia/Colombie) le 19 décembre 1970, denationalité colombienne, ont contracté mariage à Santander (Colombie) le 29mai 1999. Ils sont soumis au régime matrimonial de la séparation de biens etsont domiciliés à Genève. Trois enfants sont issus de leur union: A.________, née le 19 février 2001,B.________ et C.________, jumeaux nés le 10 janvier 2003. B.Le 18 avril 2005, l'épouse a saisi le Tribunal de première instance de Genèved'une requête de mesures protectrices de l'union conjugale et, le 15 juin2005, les conjoints se sont séparés. L'épouse est restée dans l'appartementconjugal en compagnie de ses trois enfants, tandis que le mari, alors aubénéfice de l'assurance invalidité, s'est installé dans un appartement detrois pièces. D'après les explications de la mère, la fille aînée fréquentel'école enfantine les lundi, mardi, jeudi et vendredi de 8 h. à 11 h. 30,ainsi que les mardi et jeudi après-midi de 13 h. 30 à 16 h.; les deux cadetssont placés dans une crèche les lundi, mardi, jeudi et vendredi matin jusqu'à11 h. 55. Par jugement du 6 octobre 2005, le Tribunal de première instance a notammentautorisé les conjoints à avoir des demeures séparées (ch.1) et attribué àl'épouse la jouissance exclusive de l'appartement conjugal (ch. 2), ainsi quele droit de garde sur les trois enfants, sous réserve d'un large droit devisite usuel en faveur du père (ch. 3 et 4), tout en soumettant ce droit devisite à une curatelle de surveillance au sens de l'art. 308 al. 2 CC (ch.5). Le tribunal a par ailleurs condamné le mari à verser à son épouse autitre de contribution à l'entretien de la famille, par mois et d'avance àcompter du 15 juin 2005, la somme de 3'600 fr., allocations familiales noncomprises (ch. 6), précisant que si les rentes dues à l'invalidité du mariétaient versées directement à l'épouse, la contribution d'entretien de 3'600fr. serait imputée du montant des rentes versées directement à l'épouse (ch.7). C.Le 2 novembre 2005, le mari a appelé de ce jugement, mais uniquement sur laquestion du montant de la contribution d'entretien mise à sa charge (ch. 6 et7).Par arrêt du 17 février 2006, communiqué le 22 du même mois aux parties, laCour de justice du canton de Genève a rejeté l'appel et confirmé le jugementattaqué. Elle a notamment constaté que les ressources mensuelles du mari,invalide à 75 %, consistaient en deux rentes totalisant 6'208 fr. 30 et quel'épouse, travaillant dans une entreprise de nettoyage neuf heures parsemaine, était rémunérée à l'heure, ce qui en moyenne lui rapportait 1'000fr. par mois. A cet égard, la Cour a estimé que, contrairement à l'avis de l'appelant quiconsidérait que sa femme était à même de travailler davantage, celle-ci nedisposait guère de plus de deux demi-journées pour travailler, compte tenudes horaires scolaires de l'aînée, des horaires de la crèche dans laquelleétaient placés les jumeaux et du fait que les trois enfants étaient encore entrès bas âge, ce qui entraînait pour la mère la nécessité d'une prise encharge et d'une surveillance quasi constantes de ceux-ci. Au titre des charges mensuelles, la Cour a retenu, s'agissant du mari, unmontant de 2'696 fr. 50 et, s'agissant de l'épouse, un montant (arrondi) de4'530 fr. Le mari disposant de 3'500 fr. par mois, charges déduites, alorsqu'il manquait à sa femme 3'530 fr. pour couvrir son minimum vital, la Courn'a vu aucune raison de modifier la décision entreprise qui déterminait lacontribution du mari à 3'000 fr. Elle a estimé que ce montant permettaitainsi à l'épouse de couvrir les charges de la famille, compte tenu du faitqu'elle devait bénéficier d'allocations familiales représentant 600 fr.mensuellement, et qu'il ne portait nullement atteinte au minimum vital dumari. D.Le mari a formé auprès du Tribunal fédéral, le (lundi) 27 mars 2006, unrecours de droit public pour violation de l'art. 9 Cst., concluant avec suitede frais et dépens à l'annulation de l'arrêt de la Cour cantonale et aurenvoi de la cause à cette autorité pour nouvelle décision dans le sens desconsidérants. Selon lui, il était arbitraire de refuser d'admettre quel'intimée pouvait travailler davantage; il était également arbitraire deconfirmer la contribution d'entretien fixée par le juge de première instance- qui était de 3'600 fr., allocations familiales non comprises - et deretenir en même temps qu'une contribution de 3'000fr., allocationsfamiliales non comprises, couvrait les charges de l'intimée et qu'ils'agissait du montant qui était dû. La demande d'effet suspensif présentée par le recourant a été rejetée parordonnance du 29 mars 2006.L'intimée conclut au rejet du recours avec suite de frais et dépens. La Courcantonale signale que son arrêt comporte une erreur en ce sens que leTribunal de première instance a déterminé la contribution à 3'600 fr et non3'000 fr.; "le dispositif de [son arrêt] devrait:- annuler les points 6 et 7 du jugement du Tribunal de premièreinstance,- déterminer à 3'000 fr., allocations familiales non comprises, lacontribution". Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité d'unrecours de droit public (ATF 131 I 366 consid. 2; 130 I 226 consid. 1; 129 I173 consid. 1, 302 consid. 1). 1.1 Les décisions sur mesures protectrices de l'union conjugale prises endernière instance cantonale peuvent être déférées au Tribunal fédéral par lavoie du recours de droit public, dès lors qu'elles ne constituent pas desdécisions finales au sens de l'art. 48 OJ (ATF 127 III 474 consid. 2a et 2bp. 476 ss et les références citées). Formé en temps utile, en vertu de l'art.32 OJ en relation avec l'art. 1er de la loi fédérale du 21 juin 1963 sur lasupputation des délais comprenant un samedi (RS 173.110.3), contre une telledécision, le présent recours est ainsi recevable au regard des art. 84 al. 2,86 al. 1 et 89 OJ. 1.2 Saisi d'un recours de droit public pour arbitraire, le Tribunal fédérals'en tient en principe aux faits constatés par l'autorité cantonale, à moinsque le recourant ne démontre que ces constatations sont arbitrairementfausses ou incomplètes (ATF 127 I 145 consid. 5c/aa p. 160; 124 I 208 consid.4b; 118 la 20 consid. 5a p.26). En l'absence d'une telle démonstration, l'état de fait présenté par lerecourant, en tant qu'il s'écarte des constatations de la Cour cantonale, nepeut donc être pris en considération. Le Tribunal fédéral s'en tient parconséquent aux faits tels qu'ils résultent de l'arrêt déféré. 2.Appelé à statuer sur un recours de droit public pour arbitraire (art. 9Cst.), le Tribunal fédéral n'annule la décision cantonale que si celle-ci estmanifestement insoutenable, se trouve en contradiction manifeste avec lasituation effective, méconnaît gravement une norme ou un principe juridiqueclair et indiscuté, ou encore heurte de manière choquante le sentiment de lajustice et de l'équité (ATF 126 III 438 consid. 3 p. 440; 125 I 166 consid.2a; 120 Ia 369 consid. 3a; 118 Ia 118 consid. 1c p. 123 s. et les arrêtscités). La violation doit être manifeste et reconnaissable d'emblée (ATF 102Ia 1 consid. 2a p. 4). Pour que la décision soit annulée, il ne suffit pasque sa motivation soit insoutenable; encore faut-il que la décisionapparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 128 I 177 consid. 2.1; 118 Ia118 consid. 1c p.124 et les arrêts cités). Le recourant ne peut se contenterde prétendre que la décision entreprise est arbitraire, mais doit aucontraire démontrer, par une argumentation précise, que la décisionincriminée est insoutenable (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 128 I 295 consid.7a p. 312; 125 I 492 consid. 1b et les arrêts cités), une critique de naturepurement appellatoire étant irrecevable (ATF 107 Ia 186). Il n'y a pasarbitraire du seul fait qu'une solution autre que celle de l'autoritécantonale apparaît concevable ou même préférable (ATF 128 I 273 consid.2.1;126 III 438 consid. 3 p. 440; 125 II 129 consid. 5b p.134). 3.Le grief du recourant selon lequel la Cour de justice aurait arbitrairementrefusé d'admettre que sa femme pouvait travailler davantage ne répond guèreaux exigences qui viennent d'être rappelées ci-dessus (consid. 2). Il necontient en effet aucune démonstration permettant de discerner en quoi ladécision attaquée serait arbitraire sur ce point. Le recourant se borne àinvoquer l'arbitraire en se référant à la jurisprudence, publiée aux ATF 119II 314 et 117 II 16, qui autorise la prise en considération du revenuhypothétique plus élevé d'un époux si ce dernier est en mesure de le réaliseret qu'on peut l'attendre raisonnablement de lui. Il ne présente aucuneargumentation de nature à faire admettre le caractère arbitraire de l'arrêtattaqué, soit de qualifier d'insoutenables les considérations de la Cour dejustice selon lesquelles l'intimée ne dispose pas de plus de deuxdemi-journées pour travailler, compte tenu des horaires scolaires de la filleaînée, des horaires de la crèche pour les jumeaux et surtout du fait que lestrois enfants sont encore en très bas âge et ont besoin d'une prise en chargeet d'une surveillance quasi constantes.A ce propos, le recourant perd de vue que, selon la jurisprudence, on ne peutimposer à une épouse, même si elle est réinsérée sur le plan professionnel,qu'elle reprenne une activité à plein temps tant que son enfant le plus jeunen'a pas atteint l'âge de seize ans, une activité à temps partiel n'entrant enligne de compte que dès que le mineur considéré est âgé de dix ans (arrêt5C.48/2001 du 28 août 2001 consid. 4b p. 5 et 6, publié in FamPra.ch 2002 p.145; ATF 115 II 6 consid. 3c, 427 consid. 5 et arrêts cités), ce qui est loind'être le cas en l'espèce, la fille aînée des parties étant âgée de cinq ans. Certes, ces principes concernent la contribution d'entretien due à un épouxaprès divorce, mais on ne voit pas en quoi ils ne seraient pas valables enmatière de mesures protectrices de l'union conjugale, ce d'autant qu'ilsprennent en considération l'intérêt des enfants des époux, règle fondamentaleen la matière (ATF 117 II 353 consid. 3; 115 II 206 consid. 4a, 317 consid. 2et les références). En effet, il incombe au juge de tenir compte de toutesles circonstances importantes pour le bien de l'enfant. Il s'agit enparticulier de la personnalité de celui-ci, de la situation de chaque parent,de sa disponibilité pour avoir l'enfant durablement sous sa garde, pours'occuper de lui et l'élever personnellement (arrêt 5C.264/2001 du 28 février2002, consid. 4, publié in FramPra.ch 2002 p. 840; Franz Werro, Concubinage,mariage et démariage, Berne 2000, n. 738). Au vu de ce qui précède, on ne saurait reprocher à l'autorité cantonaled'avoir rendu, sur la question de la capacité de gain de l'épouse, unedécision arbitraire au sens rappelé plus haut (consid. 2). 4.Aux termes du dispositif de l'arrêt attaqué, la Cour de justice a confirmépurement et simplement le jugement de première instance et, partant, lacondamnation du recourant à payer une contribution d'entretien de 3'600 fr.par mois, allocations familiales non comprises. Or, dans son considérant 6,elle est arrivée à la conclusion que le montant de 3'000 fr. par moisdéterminé par le premier juge permettait à l'épouse de couvrir les charges dela famille, compte tenu du fait qu'elle devait bénéficier en outre desallocations familiales (600 fr.). On est en présence, là, d'une contradictionflagrante entre le dispositif et les considérants. L'autorité cantonale admetqu'il y a erreur dans le dispositif de sa décision. L'intimée y voit unesimple erreur matérielle typographique, sans conséquence.La contradiction flagrante entre le dispositif et les considérants d'unedécision peut généralement être rectifiée par le moyen de l'interprétation(cf. art. 145 al. 1 OJ, art. 482 CPC VD; Guldener, SchweizerischesZiviprozessordnung, 3e éd. 1979, p. 535, n. 2), moyen - de droit cantonals'agissant d'une décision cantonale - qui doit être saisi préalablement àcelui du recours de droit public (art. 86 al. 1 OJ; cf. arrêt 5P.428/2001 du10 juillet 2003, consid. 3.4.2). Or, le droit genevois prévoit qu'il y a lieuà interprétation d'un jugement seulement "si le dispositif contient ambiguïtéou obscurité dans les expressions ou dans les dispositions" (art. 153 LPCGE); à la différence d'autres législations, il n'ouvre pas la voie del'interprétation pour résoudre une contradiction entre les motifs de ladécision et le dispositif (Bertossa/Gaillard/Guyet/Schmidt, Commentaire de laloi de procédure civile genevoise, n. 3 ad art. 153 LPC). Il suit de là quele présent recours de droit public est recevable sur le point litigieux. La contradiction en question, reconnaissable d'emblée, et d'ailleursspontanément reconnue par la juridiction intimée, est constitutived'arbitraire au sens précisé plus haut (consid. 2); elle justifie parconséquent l'admission partielle du recours et, partant, l'annulation de ladécision attaquée. 5.Vu le sort du litige, il se justifie de répartir l'émolument de justiceproportionnellement entre les parties (art. 156 al. 3 OJ) et de compenser lesdépens (art. 159 al. 3 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est partiellement admis dans la mesure où il est recevable etl'arrêt attaqué est annulé. 2.Un émolument de justice de 2'000 fr. est mis à la charge des parties parmoitié chacune. 3.Les dépens sont compensés. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laChambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. Lausanne, le 4 septembre 2006 Au nom de la IIe Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.126/2006
Date de la décision : 04/09/2006
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-09-04;5p.126.2006 ?
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