La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/08/2006 | SUISSE | N°6P.39/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 30 août 2006, 6P.39/2006


{T 0/2}6P.39/20066S.75/2006/svc Séance du 30 août 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Wiprächtiger, Kolly, Karlen et Zünd.Greffière: Mme Kistler. X. ________,recourant, représenté par Me Jean-François Pfefferlé, avocat, contre A.________,intimé, représenté par Me Charles-André Bagnoud, avocat,C.B.________ et L.B.________,H.C.________ et M.C.________,intimés, représentés tous les quatre parMe Jean-Pierre Schmid, avocat,Ministère public du canton du Valais,Palais de Justice, case postale 2050, 1950 Sion 2,Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour

pénale I, Palais de Justice, 1950Sion 2. Procédure pénale; experti...

{T 0/2}6P.39/20066S.75/2006/svc Séance du 30 août 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Wiprächtiger, Kolly, Karlen et Zünd.Greffière: Mme Kistler. X. ________,recourant, représenté par Me Jean-François Pfefferlé, avocat, contre A.________,intimé, représenté par Me Charles-André Bagnoud, avocat,C.B.________ et L.B.________,H.C.________ et M.C.________,intimés, représentés tous les quatre parMe Jean-Pierre Schmid, avocat,Ministère public du canton du Valais,Palais de Justice, case postale 2050, 1950 Sion 2,Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour pénale I, Palais de Justice, 1950Sion 2. Procédure pénale; expertise, droit d'être entendu, présomption d'innocence(art. 9, 29 al. 2 et 32 al. 1 Cst. et art. 6 CEDH). Homicide par négligence(art. 117 CP) et fixation de la peine (art. 64 avant-dernier alinéa CP), recours de droit public et pourvoi en nullité contre le jugement du Tribunalcantonal du canton du Valais,Cour pénale I, du 11 janvier 2006. Faits: A.Le 21 février 1999, vers 20h10, le manteau neigeux qui recouvrait les pentessises entre le Sasseneire (alt. 3254 m) et le Tsaté (alt. 3100 m) au-dessusd'Evolène s'est détaché, provoquant plusieurs avalanches.L'une de celles-ci s'est abattue dans le couloir du torrent du Bréquet. A1420 m, elle a détruit le chalet de M.C.________, causant la mort de ses cinqoccupants. Poursuivant sa progression, elle a traversé la route cantonaleEvolène - Les Haudères quelques dizaines de mètres plus loin, et a enseveliquatre usagers de la route, qui sont décédés. B.Au moment de ces faits, X.________ était président de la commune d'Evolènedepuis six ans. Selon l'organigramme déposé par la commune d'Evolène, ilétait en outre responsable du service de prévention des avalanches. Cuisinierde formation, il exploitait un établissement public au village et n'avaitaucune compétence spécifique en matière de prévention des avalanches.Selon cet organigramme, le chef du service de prévention des avalanches étaitle guide Y.________. Ce dernier a toujours affirmé être le seul responsablede la prévention des avalanches et disposer d'une compétence exclusive pourprendre toutes les mesures nécessaires en la matière, et ce nonobstant l'aviscontraire du conseil municipal. Guide et alpiniste chevronné, il bénéficiaitd'une longue et solide expérience dans la connaissance et l'appréciation desrisques liés au déclenchement spontané d'avalanches sur le territoirecommunal. Ses grandes compétences en la matière n'étaient pas contestées. C.Le dimanche 21 février 1999, X.________, qui avait jugé le risqued'avalanches très élevé, a rencontré, dans son établissement public,Y.________ et le conseiller Z.________, qui était, à l'époque, en charge destravaux publics. Y.________ a expliqué les mesures qu'il avait prises,notamment la fermeture des routes. Il a fait savoir qu'il n'estimait pasutile de procéder à des évacuations hormis celle d'un ou deux chalets en zonerouge. Ni X.________ ni Z.________ ne se souviennent si Y.________ leur aindiqué le degré de danger d'avalanches. D.La commune d'Evolène est découpée en différentes zones, en fonction du degréde danger d'avalanches: zone rouge (danger relativement fréquent et élevé),zone bleue (danger rare et faible), zone jaune (faibles effets d'avalanchespoudreuses) et zone blanche (aucun danger). Alors que, dans la zone rouge, ilest "interdit d'édifier des constructions qui servent d'habitations pour despersonnes ou autres", il est permis de construire, en zone bleue, deshabitations pour des personnes et des animaux, mais seulement "sous formerestreinte (aucun bâtiment ne pouvant assembler un grand nombre de personnes,comme restaurants, écoles, etc., constructions renforcées, évacuationpossible, etc.)".La carte des dangers d'avalanches, dressée dans le rapport de 1973, a étéintroduite dans le règlement sur la police des constructions, homologué parle Conseil d'Etat valaisan le 29 juin 1976. Ce plan, dûment approuvé par leconseil et l'assemblée primaire, respecte la classification officielle deszones rouge (dangers relativement fréquents et sévères), bleue (dangers rareset faibles), jaune (terrains avec faibles effets d'avalanches poudreuses) etblanche (terrains réputés sûrs).Construit en 1979, le chalet de M.C.________, dont les cinq occupants sontmorts ensevelis sous l'avalanche, figurait en zone bleue, la limite entre leszones rouge et bleue se situant à quelques dizaines de mètres en amont de laconstruction. L'autorisation de construire en faveur de M.C.________n'imposait cependant aucune mesure de précaution particulière en vue de parerau danger d'avalanches, ni en ce qui concerne le renforcement du bâtiment, nien ce qui concerne son évacuation. Le chalet de M.C.________ n'était doncmuni d'aucune étrave ni d'aucun renforcement, ce que X.________ savait. E.Les bulletins d'avalanches sont gradués de 1 à 5 conformément à l'échelleeuropéenne des dangers d'avalanches. Le danger est dans l'ordre croissantqualifié de faible (degré 1), limité (degré 2), marqué (degré 3), fort (degré4) et très fort (degré 5). Au degré de danger 5, de nombreux départs degrosses avalanches sont à attendre, y compris en terrain peu raide, avec pourconséquence un danger aigu pour les voies de communication et leshabitations. A ce degré, toutes les mesures de sécurité sont recommandées. F.Le 7 avril 2000, le juge d'instruction valaisan a chargé les expertsD.________ et E.________ de déterminer si les responsables de la sécurité enmatière d'avalanches devaient prévoir, sur la base des données dont ilsdisposaient, que les avalanches du 21 février 1999 atteindraient des zonesd'habitations et des voies de communication. Les experts ont déposé leurrapport de base le 15 décembre 2001 ainsi qu'un rapport complémentaire le 15octobre 2002.De leurs constatations sur place, les experts ont déduit que, si d'autrescouloirs voisins étaient très boisés, signe d'aucune activité avalancheuserécente, le couloir du torrent du Bréquet était assez lisse et dégarni,"preuve de passages d'avalanches pas si anciennes que ça". Ils ont égalementobservé un tronc cassé à mi-hauteur, un autre déplumé dans sa partie haute etdes troncs couchés, signes qui montreraient qu'il y a eu souffle de poudreuseet pas seulement écoulement au sol. Ils ont estimé que la surface de départde l'avalanche était de l'ordre de 0,1 km2, précisant que les 4 km de la zonede décrochement, entre le Sasseneire et le Tsaté, n'étaient pas descendusdans le couloir du Bréquet. Considérant qu'il s'agissait d'une penteclassique à avalanches, ils ont relevé que, contrairement aux petitesavalanches et aux avalanches humides (lourdes), une grande avalanche sèchepouvait arriver jusqu'au fond de la vallée et s'arrêter soit au pied de ladernière barrière rocheuse, soit un peu plus loin au niveau du chalet deM.C.________, soit encore au niveau de la route du fond de la vallée(expertise, p. 3-4).Les experts ont encore effectué une modélisation des avalanches du 21 février1999, avec pour but de reconstituer le plus objectivement possible leurseffets et de vérifier si les zones rouge et bleue étaient raisonnablementimplantées sur les plans de zones de la commune d'Evolène de 1973/1977,respectivement de 1992, à proximité du chalet de M.C.________ et de la routecantonale Evolène - Les Haudères. Ils ont pris différents paramètres etvariables, à savoir: l'épaisseur au décrochement, l'épaisseur de la fracture,la période de retour, le coefficient d'intensité des précipitations,l'altitude de rupture, le coefficient de frottement laminaire, le coefficientde frottement turbulent, la largeur au départ et la vitesse initiale. Lecoefficient de frottement laminaire dépendait de la fluidité de la neige,elle-même fonction de la température et de l'humidité de la neige, et pouvaitosciller entre 0,156 dans une situation de neige extrêmement fluide et 0,35dans une situation stable. Pour ce paramètre, les experts ont retenu troisvaleurs différentes sur le tracé de l'avalanche, à savoir 0,17 dans la zonede départ en altitude, 0,20 dans la zone d'écoulement et 0,22 dans la zoned'arrêt, là où la neige était plus dense. Aux termes de leurs calculs, ilsont conclu qu'une grande avalanche, mais pas de dimension extrême (épaisseurde la fracture de 1 m), calculée pour une période de 30 ans et constituée deneige devenant plus compacte au fur et à mesure de l'écoulement, pouvaitraisonnablement arriver jusqu'à la route. Précisant qu'une telle modélisationne devait pas être prise à la lettre ou au chiffre près, ils ont déclaré queces hypothèses théoriques aboutissaient à des résultats sous forme d'ordre degrandeur des caractéristiques d'une avalanche pas si éloignée de celle quiétait survenue le 21 février 1999 (expertise p. 6-11).Les experts ont répertorié les bulletins d'avalanches qui ont été délivrés du14 février 1999 au 23 février 1999 par l'Institut fédéral de Davos pourl'étude de la neige et des avalanches (ci-après: IFENA). Ils ont constaté quele jour de l'avalanche, l'IFENA indiquait par erreur un risque de degré 4, à17h ou 18h30 (2 ou 3 heures avant l'avalanche), risque qu'il a réajusté audegré 5 dans le bulletin du lendemain. Selon les experts, Y.________ adéclaré qu'il aurait neigé entre 30 et 40 cm par jour, les trois ou quatrejours précédant l'avalanche. Relevant que cela ne correspondait pas auxdonnées de la station de Bréona ni aux prévisions constantes des bulletinsd'avalanches, les experts ont constaté que cette appréciation de Y.________correspondait cependant à la réalité dans la zone de décrochement, en raisondu vent fort à très fort, qui avait soufflé pendant cette période. Lesexperts ont conclu que le vent avait été très fort et que de gros transportsde neige, et donc de grosses accumulations de neige par dépôt dû au vent,avaient eu lieu dans les 3 à 5 jours précédant l'avalanche sur tout leversant sud-ouest de la crête Sasseneire Pointe du Tsaté (expertise p. 27).Les experts ont relevé que, par définition, dans une zone bleue ou rouge, uneavalanche était possible, sinon la zone serait blanche. En revanche, saprévision ou probabilité dépendait des conditions du moment. Avec un risquefaible (1 ou 2), la prévisibilité était faible. Mais, en cas de risque 5, laprévisibilité était très forte (sinon à quoi servirait l'échelle de risque?). Concrètement, dans le couloir répertorié, l'avalanche était possible,mais il était prévisible qu'elle descende jusqu'en bas seulement en cas derisque 5. Selon les recommandations de l'IFENA, un risque 5 (avec plus de 120cm de neige) signifiait: "situation catastrophique, même de grossesavalanches rares ou inconnues sont possibles jusqu'au fond de la vallée.Danger maximum pour les habitations et les voies de communication" (expertisep. 14).Enfin, les experts ont relevé qu'un chalet en bois ne résistait guère à plusde 500 kg à 1000 kg par m2. Ils ont donc admis que les avalanches du 21février 1999 n'avaient sans doute pas atteint trois tonnes par m2 et étaientainsi restées dans les valeurs appliquées à la zone bleue (expertise p. 16). G.Par jugement du 21 février 2005, le Tribunal du IIe arrondissement pour lesdistricts d'Hérens et Conthey a condamné X.________, pour homicide parnégligence, à trois mois d'emprisonnement, avec sursis pendant deux ans.Le chef de la sécurité, Y.________, a été condamné à deux moisd'emprisonnement, avec sursis pendant deux ans, pour homicide par négligenceet entrave à la circulation publique par négligence. H.Par jugement du 11 janvier 2006, la Cour pénale I du Tribunal cantonal duValais a partiellement admis l'appel de X.________ et réduit sa peine à unmois d'emprisonnement, le sursis étant au demeurant maintenu.En résumé, elle a considéré qu'en sa qualité de président de la communed'Evolène et de responsable du service communal de prévention des avalanches,X.________ devait assurer la protection des bâtiments et des personnes contreles éléments naturels, notamment contre les avalanches. Elle a retenu queX.________ savait que la situation était extrême, même s'il n'avait pas étéétabli que Y.________ lui avait communiqué le degré de danger d'avalanches.Dans ces circonstances, le président de la commune ne pouvait se retrancherderrière l'avis de son chef de la sécurité, mais devait examiner lui-même lacarte des dangers d'avalanches de la commune, qui lui aurait révélé ourappelé que le chalet de M.C.________ était situé en zone de danger. Enn'ordonnant pas l'évacuation du chalet de M.C.________, il avait donccontrevenu à son devoir de diligence et devait être reconnu responsable dudécès de ses cinq occupants. Sur le plan de la peine, la cour cantonale aconsidéré que la faute de X.________ était moins grave que celle deY.________, qui était au premier chef compétent pour tirer les conséquencesimposées par le danger qu'il avait identifié, et a fixé en conséquence lapeine de X.________ à un mois d'emprisonnement avec sursis. I.Contre ce dernier jugement, X.________ dépose un recours de droit public etun pourvoi en nullité devant le Tribunal fédéral. Dans le recours de droitpublic, il s'en prend, avant tout, à l'expertise, qu'il qualified'arbitraire. Dans le pourvoi, il fait valoir qu'il a complètement satisfaitaux exigences que lui imposait sa position de garant en s'assurant que sonchef de la sécurité prenne les décisions en matière d'avalanches; en outre,il reproche à la cour cantonale de ne pas avoir tenu compte, dans la fixationde la peine, de la circonstance atténuante du temps relativement long. Dansces deux recours, il conclut à l'annulation du jugement attaqué.Appelés à se prononcer sur le pourvoi, le Ministère public valaisan et lescinq intimés concluent à son rejet. Le Tribunal fédéral considère en droit: I. Recours de droit public 1.1.1 Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre unedécision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens(art. 84 al. 1 let. a OJ). Il n'est en revanche pas ouvert pour se plaindred'une violation du droit fédéral, qui peut donner lieu à un pourvoi ennullité (art. 269 al. 1 PPF); un tel grief ne peut donc pas être invoqué dansle cadre d'un recours de droit public, qui est subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ;art. 269 al. 2 PPF). 1.2 Dans le recours de droit public, le recourant peut se plaindred'arbitraire dans l'appréciation des preuves et dans l'établissement desfaits pertinents pour le prononcé. Le recours de droit public n'est cependantpas un appel qui permettrait au Tribunal fédéral de procéder lui-même àl'appréciation des preuves; le Tribunal fédéral n'établit pas les faits. Ilne suffit pas que le recourant discute de nombreux éléments de preuve, enopposant sa propre appréciation à celle de la cour cantonale. Il doitindiquer, sous peine d'irrecevabilité, quel aspect de la décision attaquéelui paraît insoutenable et en quoi consiste l'arbitraire (art. 90 al. 1 let.b OJ; ATF 128 I 295 consid. 7a p.312; 125 I 492 consid. 1b p. 495).Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer enconsidération ou
même qu'elle serait préférable. Une décision n'est annuléepour cause d'arbitraire que lorsqu'elle est manifestement insoutenable,qu'elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu'elleviole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté, ou encorelorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et del'équité. Il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, ilfaut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 131I 57 consid. 2 p. 61; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9, 173 consid. 3.1 p. 178). 2.Le recourant s'en prend, en premier lieu, à l'expertise, qu'il qualifie delacunaire et de contradictoire. 2.1 En matière technique, le juge ne s'écarte de l'avis d'un expertjudiciaire que pour de sérieux motifs. Il lui incombe d'apprécier les preuveset de résoudre les questions juridiques qui en découlent. Aussi luiappartient-il d'examiner, sur le vu des preuves et des allégués des parties,s'il y a des motifs suffisants de douter de l'exactitude de l'expertise. Sitel est le cas, il doit recueillir des preuves complémentaires pour tenter dedissiper ces doutes. A défaut, en se fondant sur une expertise nonconcluante, il peut commettre une appréciation arbitraire des preuves (art. 9Cst.; ATF 118 Ia 144 consid.1c p. 146). 2.2 Le recourant soutient que les experts tiennent eux-mêmes leur expertisepour imprécise et incomplète. Ainsi, les experts avoueraient ne pas connaîtreprécisément les "conditions initiales dans la zone de décrochement (épaisseurde la fracture, type de neige)". En outre, ils reconnaîtraient que lesquantités de neige fraîche ainsi que le vent en crête auraient joué un rôleprimordial, mais qu'ils ne connaissaient pas "avec une précision acceptable"les quantités de neige mobilisées dans l'avalanche.Les réserves exprimées par les experts montrent, au contraire, qu'ils sontconscients de leurs limites et, partant, prouvent leur professionnalisme.Cela dit, ces réserves portent, pour l'essentiel, sur les valeurs desparamètres utilisés pour réaliser la modélisation de l'avalanche, qui n'avaitque pour but de vérifier les limites entre la zone bleue et la zone rouge, etnon d'établir le risque avalancheux. Pour déterminer ce risque, les expertsse sont fondés sur différents éléments (inspection sur place, étude de lacarte des dangers d'avalanches de la commune d'Evolène, analyse des bulletinsd'avalanches édités par l'IFENA pour la période en question, examen desprévisions données par la station de Bréona). C'est sur la base de l'ensemblede ces éléments que les experts sont arrivés à la conclusion que le recourantdevait prévoir que l'avalanche descendrait jusqu'au fond de la vallée. Malfondé, le grief soulevé doit être écarté. 2.3 Le recourant reproche aux experts de ne pas avoir tenu compte du rapportde l'IFENA "Der Lawinenwinter 1999", qui fournirait des informationsprécieuses sur les conditions météorologiques et sur l'état de la neige aumoment du drame et durant les jours qui l'ont précédé. Les expertsn'auraient, en particulier, pas discuté l'appréciation des spécialistes deDavos, qui ont considéré que l'avalanche en question était exceptionnelle(ausserordentlich).Le recourant n'établit pas en quoi le rapport "Der Lawinenwinter 1999" seraitcontraire à l'expertise. Il ne précise pas non plus les données établies parle rapport de l'IFENA, qui auraient modifié, selon lui, le résultat del'expertise et dont les experts n'auraient pas tenu compte. En page 184, lerapport de Davos constate que "les archives de l'IFENA ne font état d'aucuneavalanche d'une telle ampleur, qui serait descendue si bas dans la vallée,durant les 55 dernières années. L'avalanche d'Evolène est sans aucun doute unévénement extraordinaire" (rapport "Der Lawinenwinter 1999", p. 184).Contrairement à ce que croit le recourant, les experts n'ont pas nié lecaractère exceptionnel de l'avalanche d'Evolène, mais ont considéré quel'avalanche n'était pas imprévisible au vu des circonstances exceptionnellesexistant les jours précédant l'avalanche. Dans la mesure où il est recevable(art. 90 al. 1 let. b OJ), le grief soulevé doit donc être rejeté. 2.4 Le recourant fait valoir que les experts auraient admis, à tort, qu'ils'agirait d'une avalanche de neige sèche. Cette appréciation irait àl'encontre de différents éléments du dossier, à savoir du rapport de police,qui a admis que l'avalanche a "écrasé" le dépôt communal, du témoignage de lavictime F.________, qui a déclaré s'être fait "jeter par une grosse boule deneige" et du bulletin d'avalanches du 21février 1999, qui a fait état"d'avalanches de neige humide qui se sont déclenchées à des altitudesavoisinant 2000 m". Pour le recourant, l'avalanche ne pouvait être qu'uneavalanche de neige humide, de sorte qu'il était tout à fait imprévisiblequ'elle descende si bas. Les experts l'admettraient du reste, puisqu'ilsindiquent que "les avalanches humides (lourdes) s'arrêtent en dessus de laroute supérieure de La Sage-Villaz". Le recourant relève enfin que le rapportd'expertise ne tient absolument pas compte de l'importance et de la quantitéde pluie tombée ce jour-là, ni ne se réfère à des données pluviomètres.Les experts ont considéré que l'avalanche était constituée de neigepoudreuse, accumulée en grandes quantités, dans la zone de décrochement etdans la partie supérieure de la zone d'écoulement, à savoir au-dessus de lalimite des pluies (1700/1800 m), et que cette grande masse poudreuse avaitentraîné le secteur couvert de neige compacte en fin de parcours. Ils ontfondé cette conclusion essentiellement sur leurs observations lors de leurinspection des lieux (troncs cassés et déplumés près de la zone d'arrêt del'avalanche, ce qui était le signe d'un souffle de poudreuse).Le recourant ne démontre pas que la conclusion des experts serait arbitraire.En effet, cette conclusion n'est pas incompatible avec le bulletind'avalanches du 21 février 1999 qui faisait état d'avalanches de neige humidequi se sont déclenchées à des altitudes avoisinant 2000 m, puisque le pointde départ de l'avalanche en question était de 2800 m environ. Elle ne va pasnon plus à l'encontre des témoignages, puisque l'avalanche, qui avaitentraîné toute la couverture neigeuse, constituait une masse lourde en fin deparcours. Enfin, contrairement à ce que soutient le recourant, les expertsn'ont pas méconnu l'humidité de la neige. Ils ont analysé l'ensemble desbulletins de l'IFENA, ont étudié les données de la station de Bréona, quiindiquait le 21 février 1999: "nombreuses avalanches de neige humide, restezones non purgées" et ont tenu compte, dans leur modélisation des avalanches,de l'humidité de la neige dans le cadre du coefficient de frottementlaminaire. Dans la mesure où il est recevable (art. 90 al. 1 let. b OJ), legrief soulevé doit être rejeté. 2.5 Le recourant fait valoir que les experts se sont fondés sur le postulat,selon lequel la vitesse de l'avalanche devait être de 20,73m./sec. en haut,dans la zone de décrochement, de 23,01m./sec. en bas, dans la zoned'écoulement et de 20,26 m./sec., en bas, dans la zone d'arrêt. Les expertsconsidéreraient donc que la vitesse de l'avalanche dans la zone d'arrêts'élèverait encore à presque 75 km/h. Or, selon le recourant, cetteconclusion serait en contradiction avec de nombreux témoignages, quiconcorderaient sur le fait que l'avalanche serait arrivée en bas avec unevitesse "très basse" (20 km/h selon un témoin, 6 km/h selon un autre).Comme vu ci-dessus, pour conclure à la prévisibilité de l'avalanche, lesexperts se sont fondés sur différents éléments, à savoir sur l'analyse duterrain, les bulletins d'avalanches délivrés par l'IFENA, les prévisions dela station de Bréona ainsi que sur la carte des dangers d'avalanches de lacommune. La vitesse contestée par le recourant a été fixée par les expertsdans le cadre de leur modélisation de l'avalanche, dont le but était devérifier si les limites entre les zones rouge et bleue définies par la cartedes dangers d'avalanches de la commune étaient fondées. De l'aveu desexperts, leurs calculs restent cependant des estimations grossières, et il nefaut pas prendre cette modélisation au chiffre près. Cela dit, la vitessed'une avalanche reste difficile à apprécier, preuve en est que lestémoignages mentionnés par le recourant diffèrent, puisque l'un des témoinsparle de 20 km/h et l'autre de 6 km/h. En tous les cas, le résultat del'expertise ne saurait être remis en cause en raison de cet élément, de sorteque la cour cantonale n'est pas tombée dans l'arbitraire en ne demandant pasde preuve complémentaire sur ce point. Mal fondé, le grief soulevé doit êtrerejeté. 2.6 S'agissant de la zone de décrochement, le recourant relève que lesexperts retiennent des chiffres contradictoires, puisqu'à la page 3 de leurrapport, ils déclarent que la surface de départ serait de l'ordre de 0,1 km2et qu'à la page 7, ils tiennent compte d'un décrochement sur environ 300mètres de large. Le recourant fait valoir que cette hypothèse ne serait pascorroborée par le dossier pénal. D'une part, on peut lire dans le rapport depolice du 12 avril 1999 que "tout le manteau neigeux qui recouvrait lespentes sises entre le Sasseneire, altitude 3254 m, et la pointe de Tsaté,altitude 3100 m, s'est détaché en une seule fois, pour une raison qui échappeà tout le monde". D'autre part, les chiffres des experts contrediraient lesdonnées établies par l'IFENA, selon lequel la zone de décrochement serait de4km de la pointe du Sasseneire à la pointe du Tsaté.Les chiffres figurant dans l'expertise ne sont pas contradictoires ou - àtout le moins - le recourant ne le démontre pas. A la page 3, les experts seréfèrent à la surface de la zone de décrochement (0,1km2), alors qu'à lapage 7, ils parlent de la largeur de cette zone (300 m). Ces chiffres necontredisent pas, pour le surplus, le rapport de police ni le rapport del'IFENA. En effet, les experts expliquent que tout le manteau neigeux entrele Sasseneire et le Tsaté, large d'environ 4 km, s'est détaché, mais que cemanteau neigeux de 4 km de large ne s'est pas concentré dans un seul couloir.A la suite de leur visite sur le terrain, les experts ont estimé la zone dedépart de l'avalanche qui s'est abattue dans le couloir du Bréquet à environ300m. Dans la mesure où il est recevable (art. 90 al. 1 let. b OJ), le griefsoulevé doit être écarté. 2.7 Le recourant s'en prend également aux conditions de vent. Les expertsauraient considéré que les "quantités de neige froide et le vent sur lescrêtes ont joué un rôle primordial, le vent faisant déplacer beaucoup deneige sur des grandes distances". Selon le recourant, cela impliquerait quedu vent aurait soufflé en direction sud, sud-ouest, pour former des plaques àvent au lieu du décrochement. Or, d'après le recourant, lorsque le ventsouffle dans cette direction, les crêtes les plus dangereuses sont cellesayant pour orientation le nord ou le nord-est. Autrement dit, selon lerecourant, l'éventuelle présence de plaques à vent aurait plutôt dû êtrecrainte sur le versant conduisant à Moiry.Les experts considèrent que le vent du nord-ouest aurait soufflé pour formerdes plaques à vent au lieu du décrochement. Ils expliquent à cet égard quel'orientation des vents relevés à Bréona du sud-est à sud-ouest ne reflétaitque le régime local, mais que le vent général était au nord-ouest. Suivantles experts, le témoin G.________, géologue et guide de montagne, dont letémoignage est cité par le recourant, admet qu'il y a eu une accumulation deneige sur les flancs orientés à l'ouest compte tenu des vents qui soufflaientouest et nord ouest, même si en théorie cette accumulation aurait dû avoirlieu sur les flancs orientés à l'est.Le recourant ne démontre pas au demeurant en quoi les conditions de ventauraient influencé le résultat de l'expertise. En effet, pour le recourant,il y a eu de fortes chutes de neige, mais le vent ne soufflait pas très fort,alors que, pour les experts, cette neige a été transportée par des ventsforts du nord-ouest. En définitive, ce qui compte, c'est qu'il y avait degrandes quantités de neige dans la zone de décrochement (plus de 120 cm); lescauses de cette accumulation de neige sont en revanche sans importance. Dansla mesure où il est recevable (art. 90 al. 1 let. b OJ), le grief soulevédoit être rejeté. 2.8 Le recourant soutient que l'avalanche serait parfaitement extraordinaire(avec une probabilité annuelle inférieure à 1 sur 300), qui ne saurait entrerdans la définition des avalanches possibles en zone bleue. Il ne s'agiraitpas d'une avalanche avec une pression plus faible que 3t/m2 et dont lapériode de retour est de 30 ans ou moins, puisque les archives de l'IFENAn'ont fait état d'aucune avalanche qui serait descendue si bas dans la valléedurant les 55 dernières années (rapport Lawinenwinter 1999 p. 184). Il nes'agirait pas non plus d'une avalanche "avec une période moyenne de retour de30 à 300 ans" et une pression "de 3t/m2 ou moins", car une avalanche d'unepuissance inférieure à 3t/m2, comme possible en zone bleue, n'aurait passuffit à emporter un chalet et à descendre jusqu'en zone blanche.Par son argumentation, le recourant se borne à affirmer certains faits, maisne démontre pas en quoi l'expertise serait contradictoire. Dans leur rapport,les experts constatent en effet qu'un chalet en bois ne résiste guère à plusde 500 à 1000 kg par m2 (expertise p. 16), de sorte que l'avalanche en causeentre tout à fait dans la catégorie des avalanches possibles en zone bleue.Dans la mesure où il est recevable (art. 90 al. 1 let. b OJ), le griefsoulevé doit être rejeté. 3.Invoquant son droit d'être entendu, le recourant fait valoir qu'il n'auraitpas eu la possibilité de prendre position ni de participer à l'administrationdes preuves s'agissant de l'expertise, puisqu'il est intervenu dans laprocédure comme prévenu le 20 mars 2003, à savoir après le dépôt del'expertise et de l'expertise complémentaire. En particulier, il n'aurait paseu l'occasion de se prononcer sur le choix des experts ni sur les questionsqui leur étaient soumises. Le recourant estime que son droit d'être entendu aégalement été violé par le refus, au stade de l'instruction, d'ordonner uneseconde expertise.Le grief lié à la désignation des experts est dénué de pertinence. En effet,il appartient au juge de désigner l'expert, et ni la CEDH, ni la Constitutionfédérale n'accordent au prévenu ou à une quelconque autre partie un droit àse prononcer au sujet de son choix. Les parties peuvent exiger la récusationde l'expert si la situation ou son comportement sont de nature à faire naîtreun doute sur son impartialité. Elles ne peuvent cependant pas attendre laphase du complément d'instruction pour critiquer seulement à ce moment-là lechoix de l'expert parce que les conclusions livrées leur apparaissentdéfavorables (Piquerez, Procédure pénale suisse, Traité théorique etpratique, Zurich 2000, n. 2217 s.).Le droit d'être entendu permet certes au justiciable de participer à laprocédure probatoire en exigeant l'administration
des preuves déterminantes(ATF 126 I 15 consid. 2a/aa p. 16 et les arrêts cités). Ce droit ne s'étendtoutefois qu'aux éléments qui sont déterminants pour décider de l'issue dulitige. Il est ainsi possible de renoncer à l'administration de certainespreuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporterl'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, lorsque la preuverésulte déjà de constatations versées au dossier, et lorsque le juge parvientà la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ouqu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion. Ce refus d'instruirene viole le droit d'être entendu des parties que si l'appréciation anticipéede la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a ainsiprocédé, est entachée d'arbitraire (ATF 125 I 127 consid. 6c/cc in fine p.135, 417 consid. 7b p. 430; 124 I 208 consid. 4a p. 211, 241 consid.2 p.242, 274 consid. 5b p. 285 et les arrêts cités).Le recourant soutient que s'il avait pu participer à l'administration despreuves, les experts ne seraient probablement pas arrivés aux mêmesconclusions, et que la cour cantonale l'aurait acquitté. L'examen des griefssoulevés contre l'expertise n'a cependant pas conduit à la conclusion quecelle-ci serait douteuse sur des points essentiels, et le recourantn'apporte, dans le cadre du grief tiré de la violation du droit d'êtreentendu, aucun élément complémentaire. Dans ces circonstances, le griefsoulevé ne satisfait pas aux exigences de clarté et de précision posées àl'art. 90 al. 1 let. b OJ et doit en conséquence être déclaré irrecevable.Comme l'appréciation de la pertinence de l'expertise n'est pas entachéed'arbitraire, la cour cantonale n'a pas non plus violé le droit d'êtreentendu du recourant en refusant d'ordonner une seconde expertise. Infondés,les griefs soulevés doivent être écartés. 4.Le recourant reprend, sous l'angle de l'établissement arbitraire des faits(art. 9 Cst.), les griefs qu'il a soulevés à l'encontre de l'expertise. Ilreproche à la cour cantonale d'avoir retenu que l'avalanche en questionn'était pas une avalanche humide, mais une avalanche de poudre, constatationqui irait notamment à l'encontre de divers témoignages, du rapport de policedu 12 avril 1999, du bulletin d'avalanches du 21 février 1999 et du rapport"Der Lawinenwinter 1999". Le recourant se plaint également que la courcantonale se serait méprise sur le sens du vent. Enfin, il fait grief à lacour cantonale de ne pas avoir tenu compte des données du rapport "DerLawinenwinter 1999".Comme vu sous le consid. 2, l'expertise judiciaire est concluante, de sorteque la cour cantonale ne saurait se voir reprocher d'être tombée dansl'arbitraire en reprenant ses conclusions. C'est au contraire en s'écartantde l'expertise, à défaut de circonstances bien établies qui venaient enébranler sérieusement la crédibilité, qu'elle aurait enfreint l'art. 9 Cst.Mal fondés, les griefs soulevés doivent être rejetés. 5.Invoquant la présomption d'innocence, le recourant reprend les objectionssoulevées dans son grief tiré de la violation de l'interdiction del'arbitraire.Consacrée par les art. 32 al. 1 Cst. et 6 par. 2 CEDH, la présomptiond'innocence et le principe "in dubio pro reo", qui en est le corollaire, sontdes garanties de rang constitutionnel, dont la violation ne peut êtreinvoquée que par la voie du recours de droit public (art. 269 al.2PPF; ATF120 Ia 31 consid. 2b p. 35/36 et 2e p. 38). Elles concernent tant le fardeaude la preuve que l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 2c p. 36).En tant que règles sur le fardeau de la preuve, ces principes signifient, austade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et quele doute doit profiter à l'accusé. Comme règles sur l'appréciation despreuves, ils sont violés lorsque le juge, qui s'est déclaré convaincu, auraitdû éprouver des doutes quant à la culpabilité de l'accusé au vu des élémentsde preuve qui lui étaient soumis (ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 88; 120 Ia 31consid. 2c p. 37). Le Tribunal fédéral examine librement si ces principes ontété violés en tant que règles sur le fardeau de la preuve, mais il n'examineque sous l'angle de l'arbitraire la question de savoir si le juge aurait dûéprouver un doute, c'est-à-dire celle de l'appréciation des preuves (ATF 124IV 86 consid. 2a p.88; 120 Ia 31 consid. 2e p. 38).En l'espèce, il n'apparaît pas que la cour cantonale aurait renversé lefardeau de la preuve, ni qu'elle aurait éprouvé un doute qu'elle auraitinterprété en défaveur de l'accusé. La seule question est donc de savoir sila cour aurait dû éprouver un doute, question qui relève de l'appréciationdes preuves et ne peut être examinée que sous l'angle de l'arbitraire, desorte que ce grief se confond avec celui d'appréciation arbitraire despreuves, qui a été déclaré mal fondé. 6.En résumé, il n'est pas contesté que le danger d'avalanche était de degré 5le 21 février 1999 et qu'il s'agissait donc d'une situation exceptionnelle.En outre, le chalet de M.C.________ se situait dans une zone dangereuse (zonebleue). Une expertise judiciaire confirme ces deux éléments et constatequ'avec un danger maximum, on devait s'attendre à ce qu'une avalanchedescende en zone bleue. Au vu de ces éléments, la constatation de fait, selonlaquelle il existait un risque qu'une avalanche puisse atteindre le chalet,n'est pas arbitraire. 7.Dans la mesure où il est recevable, le recours doit être rejeté.Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais (art. 156 al. 1 OJ).Il n'y a pas lieu d'allouer d'indemnité aux intimés qui n'ont pas été invitésà déposer des observations pour se défendre.II. Pourvoi en nullité 8.Le recourant a été condamné pour homicide par négligence pour avoir omisd'ordonner l'évacuation du chalet de M.C.________, dont les cinq occupantsont été tués dans l'avalanche. 8.1 L'art. 117 CP punit de l'emprisonnement ou de l'amende celui qui, parnégligence, aura causé la mort d'une personne. Il s'agit d'une infraction derésultat qui suppose en général une action. En l'espèce cependant, on nesaurait considérer que le recourant a, par sa propre action, causé la mortdes occupants du chalet de M.C.________.Une infraction de résultat peut cependant être également réalisée lorsquel'auteur n'empêche pas le résultat dommageable de se produire, alors qu'ilaurait pu le faire et qu'il avait l'obligation juridique d'agir pour prévenirla lésion de l'intérêt protégé (délit d'omission improprement dit). Un devoird'omission improprement dit est réalisé lorsque la survenance du résultat quel'auteur s'est abstenu d'empêcher constitue une infraction, que ce dernieraurait effectivement pu éviter le résultat par son action et qu'en raison desa situation juridique particulière, il y était à ce point obligé que sonomission apparaît comparable au fait de provoquer le résultat par uncomportement actif (par exemple ATF 113 IV 68 consid. 5a p. 72). 8.2 La doctrine et la jurisprudence distinguent deux types d'obligationjuridique d'agir: le devoir de protection, soit celui de garder et dedéfendre des biens juridiques déterminés contre les dangers inconnus quipeuvent les menacer, et le devoir de contrôle, consistant à empêcher lasurvenance de risques connus auxquels des biens indéterminés sont exposés(par exemple ATF 113 IV 68 consid. 5b p.73; Philippe Graven, L'infractionpunissable, 2ème éd., Berne 1995, p.79s.). Ce devoir d'intervenir, qui doitêtre évident, voire impérieux (ATF 113 IV 68 consid. 5a p. 73), peut résulterde la loi, d'un contrat ou d'une situation de fait (par exemple de lacréation d'un danger; voir à ce sujet Graven, op. cit., p. 83).En l'espèce, il n'est pas contesté que le recourant était le président de lacommune et le responsable du service communal de prévention des avalanches,de sorte qu'il lui incombait la tâche d'assurer la protection des bâtimentset des personnes contre les avalanches sur le territoire communal. Il sied dedéterminer si le recourant ne pouvait cependant pas déléguer cette tâche àune personne expérimentée. Pour la cour cantonale et le Ministère public, lerecourant, qui savait que le danger d'avalanches était élevé, aurait dûconsulter lui-même la carte des zones d'avalanches de la commune et ordonnerl'évacuation du chalet de M.C.________. Le recourant soutient qu'il pouvaitse fier aux mesures prises par son chef de la sécurité. 8.3 Pour délimiter les responsabilités des travailleurs en cas de division dutravail, la doctrine pénale recourt au principe de la confiance, développé enmatière de circulation routière, selon lequel tout conducteur peut compter,en l'absence d'indice contraire, avec une certaine prudence des autrespersonnes (ATF 118 IV 277 consid.4 p. 280 ss). De la même manière, en cas dedivision horizontale du travail, chaque travailleur doit pouvoir légitimements'attendre que son collègue respectera ses devoirs, tant qu'aucunecirconstance ne laisse présumer le contraire. En cas de répartitionverticale, la doctrine subordonne le principe de la confiance à l'obligation,pour le supérieur, de choisir un auxiliaire qualifié, de lui donner lesinstructions nécessaires et de le surveiller correctement (cura in eligendo,custodiendo et instruendo; Seelmann, Basler Kommentar, vol. I, 2003, n. 73 adart. 1, p. 27; Roth, Le droit pénal face au risque et à l'accidentindividuels, Lausanne 1987, p. 88 ss; ATF 120 IV 300 consid. 3d/bb p. 310).En l'espèce, le recourant avait identifié correctement le danger d'avalancheset savait que la situation était extrêmement dangereuse. Alarmé par lagravité de la situation, il a convoqué son chef de la sécurité et s'estinformé des mesures que celui-ci avait prises et de celles qu'il avaitl'intention de prendre. Si le recourant pouvait se fier aux conseils de sonspécialiste pour des questions techniques et notamment pour l'appréciation durisque d'avalanche, il devait s'assurer, en revanche, que ce spécialisteavait bien évalué la situation et qu'il avait pris, compte tenu du danger,les mesures de sécurités qui s'imposaient, en particulier qu'il avait évacuéles zones exposées. La gravité de la situation nécessitait l'intervention durecourant et une concertation avec le chef de la sécurité. Le recourant nepouvait simplement déléguer ses tâches, mais devait assurer un certaincontrôle (cura in custodiendo). Il était du reste conscient de sesresponsabilités, puisque l'arrêt attaqué constate que le recourant savaitqu'il devait intervenir personnellement à certaines occasions, notamment lorsde situations de danger exceptionnel (arrêt attaqué, p.27) et qu'il a dureste, dans le cas particulier, convoqué son chef de la sécurité.Concrètement, le recourant ne pouvait faire l'économie d'une analysepersonnelle des secteurs potentiellement exposés. Il devait s'informer surles différentes zones de danger et apprécier systématiquement le dangerpotentiel pour chacune de ces zones, sur la base de la carte des dangersd'avalanches. En examinant cette carte, le recourant aurait constaté que lechalet de M.C.________ était situé en zone bleue, à savoir dans une zonequalifiée de dangereuse, et il aurait ordonné son évacuation compte tenu dela situation de danger exceptionnelle. L'examen de la carte des dangersd'avalanches aurait aussi amené le recourant à mettre en évidence l'approchecontradictoire de son chef de la sécurité consistant à vouloir protéger leshabitations en zone rouge et à ne prendre aucune mesure pour les voies decommunication théoriquement exposées au même danger puisque sises dans lamême zone.En n'ordonnant pas l'évacuation des habitations en zone bleue, dont celle duchalet de M.C.________, le recourant a violé son devoir de diligence, sescapacités personnelles lui ayant permis d'apprécier la situation de danger etlui permettant d'envisager les risques pour les zones officiellement définiescomme dangereuses. C'est en vain que le recourant soutient que les avalanchesconstituaient un événement tout à fait exceptionnel, extraordinaire etimprévisible, dans la mesure où il s'était rendu compte de la situationexceptionnelle et qu'il devait dans ces conditions s'attendre qu'uneavalanche atteigne les zones bleues. C'est donc à juste titre que la courcantonale a condamné le recourant pour homicide par négligence. Mal fondé, legrief du recourant doit être rejeté. 9.Le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas avoir appliqué l'art. 64avant-dernier alinéa CP, qui permet au juge d'atténuer la peine enapplication de l'art. 65 CP à la double condition qu'un temps relativementlong se soit écoulé depuis l'infraction et que le délinquant se soit biencomporté pendant ce temps. 9.1 Selon la jurisprudence, on ne peut considérer qu'un temps relativementlong s'est écoulé que si la prescription de l'action pénale est près d'êtreacquise, c'est-à-dire si le jugement a été rendu à une date proche de celleoù la prescription (ordinaire) serait intervenue (ATF 102 IV 198 consid. 5 p.209; 92 IV 201 consid. I p. 202 s.). Avec l'introduction des nouvelles règlesen matière de prescription, entrées en vigueur le 1er octobre 2002, lajurisprudence a admis que le juge devait se montrer moins sévère dansl'appréciation de la notion de "date proche de la prescription", pourcompenser l'allongement du délai de prescription et la suppression des règlessur l'interruption. Elle a précisé que cette condition devait en tout casêtre donnée lorsque les 2/3 du délai de prescription étaient écoulés (ATF 132IV 1 consid. 6.2.1 p. 3 s.). Pour déterminer si l'action pénale est proche dela prescription, le juge doit se référer à la date à laquelle les faits ontété souverainement établis, et non au jugement de première instance (momentoù cesse de courir la prescription selon l'art. 70 al. 3 CP). Ainsi, lorsquele condamné a fait appel et qu'en vertu de la procédure cantonale, ce recoursa un effet dévolutif et suspensif, il faut prendre en considération le momentoù le jugement de seconde instance a été rendu (ATF 132 IV 1 consid. 6.2.1 p.4; 115 IV 95 consid. 3; 102IV198 consid. 5 p. 209). 9.2 En l'occurrence, l'infraction reprochée au recourant date du 21février1999. Près de sept ans s'étaient dès lors écoulés lors du jugement sur appel,rendu le 11 janvier 2006. Que l'on se réfère à l'ancien délai (ordinaire) deprescription (cinq ans) ou au nouveau délai de prescription (sept ans), ilfaut admettre qu'un temps relativement long s'est écoulé depuis l'infractionretenue à charge. En outre, il ne ressort pas de l'arrêt attaqué que lerecourant a commis une autre infraction ou des actes incorrects. Le recouranta donc raison en affirmant que la circonstance atténuante en raison d'untemps relativement long est réalisée.A la page 33 de l'arrêt attaqué, la cour cantonale a expressément mentionné,à la décharge du recourant, la longueur de la procédure (sept ans). Il fautdonc admettre qu'elle a tenu compte de la circonstance atténuante du tempsrelativement long lors de la fixation de la peine, même si elle apréalablement déclaré que le recourant n'avait aucune circonstance atténuanteà faire
valoir. En effet, elle n'avait pas l'obligation de prononcer lesarrêts ou l'amende en lieu et place de l'emprisonnement (art. 65 dernieralinéa CP). Selon la jurisprudence, lorsqu'une des circonstances atténuantesmentionnées à l'art. 64 CP, est réalisée, le juge n'est pas tenu de prononcerla peine prévue par l'art. 65 CP, l'effet de cette disposition étantseulement d'étendre vers le bas le cadre normal de la répression (ATF116 IV11 consid. e p. 13 s.). La peine - relativement peu sévère- d'un moisd'emprisonnement ne peut du reste que confirmer cette interprétation.Infondé, le grief tiré de la violation de l'art. 64 avant-dernier alinéa CPdoit être rejeté. 10.Au vu de ce qui précède, le pourvoi doit être rejeté.Les frais seront mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 278 al. 1PPF), et une indemnité sera allouée aux intimés à titre de dépens, lerecourant étant condamné à rembourser les frais (art. 278 al. 3 PPF).Aucune indemnité n'est allouée au Ministère public valaisan (art. 278 al. 3PPF). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: I. Recours de droit public 1.Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2.Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge du recourant.II. Pourvoi en nullité 3.Le pourvoi est rejeté. 4.Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge du recourant. 5.La Caisse du Tribunal fédéral versera une indemnité de 1'000 francs àC.B.________, L.B.________, H.C.________ et M.C.________, créancierssolidaires, ainsi qu'une indemnité de 1'000francs à A.________. 6.Le recourant est tenu de verser à la Caisse du Tribunal fédéral un montant de2'000 francs au titre de compensation.III. Communication 7.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, auMinistère public valaisan et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Courpénale I. Lausanne, le 30 août 2006 Au nom de la Cour de cassation pénaledu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6P.39/2006
Date de la décision : 30/08/2006
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-08-30;6p.39.2006 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award