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25/08/2006 | SUISSE | N°K.138/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 25 août 2006, K.138/05


Cause {T 7}K 138/05 Arrêt du 25 août 2006IVe Chambre MM. et Mme les Juges Ursprung, Président, Widmer et Frésard. Greffier : M.Berthoud B.________, recourant, contre Organe cantonal de contrôle de l'assurance-maladie et accidents, rueSt-Martin 2, 1001 Lausanne, intimé Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 21 juin 2005) Faits: A.B. ________, né en 1975, ressortissant italien, est employé par la sociétéX.________ SA depuis le 1erjuin 2004. Il est titulaire d'une autorisation deséjour de type B. Le prénommé a souscrit une assurance-maladie auprès d'unassur

eur privé, Healthcare International SA à Londres. Par lettre ...

Cause {T 7}K 138/05 Arrêt du 25 août 2006IVe Chambre MM. et Mme les Juges Ursprung, Président, Widmer et Frésard. Greffier : M.Berthoud B.________, recourant, contre Organe cantonal de contrôle de l'assurance-maladie et accidents, rueSt-Martin 2, 1001 Lausanne, intimé Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 21 juin 2005) Faits: A.B. ________, né en 1975, ressortissant italien, est employé par la sociétéX.________ SA depuis le 1erjuin 2004. Il est titulaire d'une autorisation deséjour de type B. Le prénommé a souscrit une assurance-maladie auprès d'unassureur privé, Healthcare International SA à Londres. Par lettre du 23juillet 2004, l'Office cantonal de contrôle del'assurance-maladie et accidents du canton de Vaud a informé B.________ qu'ilne faisait pas partie des personnes pouvant être dispensées de l'obligationde s'assurer pour les soins en cas de maladie. Il l'a dès lors invité àdemander son affiliation auprès d'un assureur suisse librement choisi et luiadresser une copie de son nouveau certificat d'assurance jusqu'au 31août2004. Le prénommé n'a pas donné suite à cette requête. Par décision du 4novembre2004, confirmée sur opposition le 5janvier 2005, l'office cantonal a affiliéB.________ à la Caisse-maladie CMBB à partir du 1ernovembre 2004. B.B.________ a déféré cette décision au Tribunal des assurances du canton deVaud, qui l'a débouté par jugement du 21juin 2005. C.Le prénommé interjette recours de droit administratif contre ce jugement dontil demande l'annulation. Il invite le Tribunal fédéral des assurances à direque la couverture d'assurance-maladie dont il bénéficie actuellement auprèsd'un assureur privé satisfait aux exigences légales. L'intimé conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral de la santépublique a renoncé à se déterminer. Considérant en droit: 1.Le litige porte sur l'affiliation d'office du recourant à l'assuranceobligatoire des soins. 2.Un des buts principaux de la LAMal est de rendre l'assurance-maladieobligatoire pour l'ensemble de la population en Suisse. Aussi bien l'art.3al. 1 LAMal pose-t-il le principe de l'obligation d'assurance pour toutepersonne domiciliée en Suisse (ATF 126 V 268 consid. 3b et les références,cf. aussi 129 V 161 consid. 2.1). Au regard du but de solidarité fixé par lelégislateur, les exceptions à l'obligation de s'assurer doivent êtreinterprétées de manière stricte (ATF 129 V 78 consid. 4.2; voir aussi leconsid.8.3 de l'arrêt V. du 29 mars 2006, K25/05, destiné à la publicationdans le Recueil officiel). Le domicile qui fonde l'obligation d'assurance, selon l'art. 3 al. 1 LAMal,est défini aux art. 23 à 26 CC (art. 1 al. 1 OAMal; ATF 129 V 78 consid.4.2). A cet égard, la jurisprudence et la doctrine considèrent que lesétrangers titulaires d'une autorisation de séjour ont, en règle ordinaire,leur domicile civil en Suisse, au sens des art. 23 ss CC, même lorsqu'ils serendent chaque année dans leur pays d'origine (RAMA 2005 n° KV 315 p. 28consid. 2.2.1 [arrêt K. du 22 octobre 2004, K 22/04]; Daniel Staehelin,Commentaire bâlois, 2e éd., note 17 ad art. 23; Jacques-Michel Grossen,Personnes physiques, Traité de droit privé suisse, Tome II, 2, p. 71). D'après l'art. 3 al. 3 let. a LAMal, le Conseil fédéral peut étendrel'obligation de s'assurer à des personnes qui n'ont pas de domicile enSuisse, en particulier celles qui exercent une activité en Suisse ou yséjournent habituellement (art. 13 al. 2 LPGA). L'art.1 al.2 let. a OAMal aété édicté en vertu de cette délégation; il prévoit que sont tenus des'assurer les ressortissants étrangers qui disposent d'une autorisation deséjour au sens de l'art. 5 LSEE valable au moins trois mois. Cettedisposition réglementaire vise les étrangers qui n'entrent pas dans le cercledes personnes soumises à l'assurance obligatoire en vertu des art. 3 al. 1LAMal et 1 al. 1 OAMal (ATF 129 V 79 consid.5.1 et la référence). 3.3.1De manière à lier la Cour de céans (cf. art. 105 al. 2 OJ), les premiersjuges ont constaté que le recourant bénéficie d'une autorisation de séjour detype B, valable plus de trois mois, et qu'il réside depuis le 1erjuin 2004 àY.________ où il est employé par la société X.________ SA. Sur la base de ceséléments, la juridiction cantonale de recours a admis que le recourant a sondomicile en Suisse. En procédure fédérale, le recourant objecte qu'il réside en Italie et qu'ilest assuré contre le risque de maladie selon le droit italien. Il ajoutequ'il passe la majeure partie de son temps hors de Suisse en sa qualité dereprésentant de la société X.________ SA. 3.2 Comme le recourant invoque l'existence d'une résidence italienne, il fautcommencer par trancher ce point de droit, car suivant la réponse donnée àcette question, le recourant pourrait faire partie du cercle des personnesvisées par l'annexe II de l'ALCP et être exempté de l'assurance obligatoire(art.2 al.6 OAMal en corrélation avec la sectionA par.1 let.o point3sous let.b de ladite annexe). Le recourant a tenu des propos quelque peu contradictoires au sujet de sarésidence. Dans son recours cantonal, il s'est ainsi prévalu de sa qualité derésident italien, tout en soutenant, en même temps, qu'il réside«actuellement à Y.________» à la suite de son engagement par X.________ SAle 1erjuin 2004. Le dossier ne contient toutefois pas d'indices suffisantspour admettre une résidence en Italie, le recourant n'ayant d'ailleursproduit aucun document (une taxation fiscale, une attestation de domicile,etc.) dont il faudrait inférer que le centre de ses intérêts resterait situéhors de Suisse à compter du 1erjuin 2004. Celui-ci paraît plutôt se trouverà Y.________ depuis ce moment-là; on constate en effet que c'est en Suisse(et non en Italie) que le recourant fait acheminer son courrier (enparticulier les factures de Healthcare International SA, ainsi que les offresd'assurance-maladie de Xundheit, Progrès Assurances SA et ÖKK). A cela, il faut ajouter que par sa nature, l'autorisation de séjour au sensde l'art.5 LSEE dont le recourant bénéficie (à sa demande) depuis le1erjuin 2004 présente un caractère durable. On peut ainsi déduire de cetélément temporel qu'il ne séjourne pas que temporairement en Suisse, au sensde l'art.1er let.i du règlement (CEE) 1408/71, mais désormaishabituellement, au sens de la let.h (à cet égard, voir ATF 131V230consid.7.4). Le recourant a ainsi sa résidence habituelle en Suisse, mêmes'il n'y vit que trois mois par an et qu'il passe le reste de son temps dansplusieurs autres pays pour mener des projets d'audit, de durées moyennes detrois mois (cf. écriture du 22juillet 2004). La présomption d'un séjourhabituel suisse est renforcée par les propos de l'intéressé qui a précisé, enprocédure fédérale, qu'il est employé par X.________ SA pour une duréeindéterminée, tandis qu'il a fait savoir au Tribunal cantonal qu'il résideactuellement à Y.________. 3.3 Le recourant séjourne habituellement en Suisse au bénéfice d'uneautorisation de séjour de type B valable plus de trois mois. Il ne fait doncpas partie des personnes pouvant être exemptées suivant l'annexe II de l'ALCPet est donc tenu, en principe, de s'assurer conformément à l'art.1 al.2let.a OAMal. 4.4.1L'art. 3 al. 2 LAMal délègue la compétence au Conseil fédéral d'excepterde l'assurance obligatoire certaines catégories de personnes. Faisant usagede cette délégation, l'autorité exécutive a ainsi prévu l'exception àl'obligation de s'assurer, sur requête, des personnes dont l'adhésion àl'assurance suisse engendrerait une nette dégradation de la protectiond'assurance ou de la couverture des frais et qui, en raison de leur âge et/oude leur état de santé, ne pourraient pas conclure une assurancecomplémentaire ayant la même étendue ou ne pourraient le faire qu'à desconditions difficilement acceptables (art.2 al.8 OAMal, première phrase). Apropos de la conformité de cette disposition réglementaire à la loi, ilconvient de renvoyer au consid.10 de l'arrêt V. du 29mars 2006, K25/05,précité. Selon l'arrêt V. toujours (consid.8.5.6), l'art.2 al.8 OAMal ne peut êtreinvoqué de manière générale par les personnes pour lesquelles le passage ausystème d'assurance suisse signifie, certes, une couverture d'assurance plusonéreuse ou moins étendue, mais qui peuvent encore s'assurer au-delà duminimum obligatoire au moyen d'assurances complémentaires au sens de la LCA(même si ces assurances offrent globalement une protection moindre, mais quela personne concernée peut bénéficier de cette protection dans la mesure oùelle est disponible en Suisse). Il s'agit par exemple d'une couvertured'assurance complémentaire pour les vacances ou les voyages, dans laperspective de déplacements professionnels à l'étranger, complétant laprotection déjà offerte par l'ALCP et les art.22 et 22bis du règlement (CEE)n°1408/71. L'art.2 al.8 OAMal ne peut être invoqué que par les personnesqui, dans le cadre de l'offre d'assurance disponible en Suisse, ne peuventconclure une assurance complémentaire - ou seulement à des conditionsinacceptables - en raison de leur âge ou de leur atteinte à la santé; ils'agit d'éviter que ces personnes voient leur niveau de protectiond'assurance diminuer, en raison de leur âge ou de leur état de santé, enentrant dans le système suisse. 4.2 Le recourant allègue qu'il souffre de la maladie de Basedow, de sortequ'il doit se soumettre à des analyses de sang tous les trois mois et prendrerégulièrement des médicaments. Il ajoute qu'il effectue de fréquentsdéplacements à l'étranger pour le compte de son employeur, si bien qu'il estcontraint de subir de nombreux traitements hors de Suisse; à son avis, celajustifie de bénéficier d'une couverture d'assurance maladie efficace dans lemonde entier. A cet égard, le recourant fait observer que la prime mensuelleà l'assurance obligatoire des soins auprès de la CMBB s'élève à 318fr.80,tandis que la prime versée à Healthcare International SA ne se monte qu'à141fr.20 par mois. Comme cet assureur privé garantit déjà tous les fraisassurés par la CMBB, le recourant estime qu'il est injuste de le fairedébourser le double (de 141fr.20) pour ne disposer finalement que d'unecouverture d'assurance inférieure. A son avis, les conditions d'uneexemption, suivant l'art.2 al.8 OAMal, sont remplies. 4.3 En l'espèce, on pourrait admettre que la première condition envisagée parl'art.2 al.8 OAMal, savoir la nette dégradation de la protectiond'assurance ou de la couverture des frais, soit réalisée. En effet, àsupposer que le recourant ait été assuré à titre privé par HealthcareInternational SA avant le 1ernovembre 2004 (date à laquelle la décisionlitigieuse déploie ses effets), son adhésion à l'assurance suisseengendrerait une restriction de la protection d'assurance ou de la couverturedes frais aux seules prestations fournies en Suisse. En revanche, en ce qui concerne l'impossibilité de conclure une assurancecomplémentaire en raison de l'âge ou de l'état de santé, il est patent que lerecourant a pu conclure une assurance privée auprès de HealthcareInternational SA qui lui garantit une prise en charge des frais médicaux dansle monde entier, nonobstant ses problèmes de santé. Quant au critère desconditions difficilement acceptables, il faut rappeler que les coûtssupplémentaires engendrés par l'assurance privée s'élèvent à 141fr.20 parmois. Ces coûts représentent environ 44% d'une prime mensuelle del'assurance obligatoire des soins et ne peuvent, a priori, pas être qualifiésde difficilement acceptables au regard de la situation du recourant. Selontoutes apparences en effet, il occupe un poste à responsabilités au serviced'une société multinationale pour laquelle il conduit notamment des projetsd'audit. Du reste, à supposer que le recourant soit en bonne santé et qu'il doiveconclure une assurance complémentaire selon la LCA pour les traitements dansle monde entier, une telle assurance serait à peu près équivalente selon lesoffres figurant au dossier (par ex. la prime mensuelle s'élève à 126fr. pourl'assurance ÖKK Classic Globale). Pratiquement, le recourant se trouve doncdans la même situation qu'une personne obligatoirement assurée en Suisse quidoit souscrire en plus une assurance complémentaire dans la perspective dedéplacements professionnels fréquents à l'étranger. Au regard de cettecomparaison, on ne peut parler de conditions difficilement acceptables. Vu ce qui précède, le recourant ne peut être exempté de l'assuranceobligatoire en vertu de l'art.2 al.8 OAMal. 5.Le recourant soutient que son affiliation d'office à la Caisse-maladie CMBBest contraire à l'art.5 al.2 Cst., dans la mesure où l'intimé auraitrecouru à des moyens disproportionnés et excessifs. Il ajoute que l'intimé aprocédé dans son cas de façon arbitraire au sens de l'art.9 Cst., alléguantque la mesure prise serait injustifiée, incompréhensible ou déraisonnable. Ilse plaint aussi d'une violation des art.8 Cst. et 8 CEDH. L'obligation de s'affilier à un régime obligatoire d'assurance sociale n'està l'évidence pas contraire aux principes constitutionnels ou aux droitsfondamentaux. Dans ce contexte, le Tribunal fédéral des assurances a parexemple jugé que l'obligation d'assurance n'est d'aucune manière contraire àla liberté de conscience et de croyance garantie par l'art. 15 Cst., ni à laliberté d'opinion garantie par l'art. 16 Cst., ni à la liberté économiquegarantie par l'art. 27 Cst. (RAMA 2001 n° KV 151 p. 119 consid. 3a et lesréférences), ni à la liberté d'association garantie par l'art. 23 Cst. (arrêtD. et P. du 26 juin 2001, K 48/01). 6.Il s'ensuit que l'intimé a appliqué correctement le droit fédéral enaffiliant d'office le recourant, conformément à l'art. 6 al. 2 LAMal, auprèsd'une caisse-maladie reconnue. Le recours est infondé. 7.La procédure n'est pas gratuite, s'agissant d'un litige qui ne porte pas surl'octroi ou le refus de prestations d'assurance (art. 134 OJ a contrario). Lerecourant, qui succombe, supportera les frais de justice (art. 156 al. 1OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Les frais de justice, d'un montant de 500fr., sont mis à la charge durecourant et sont compensés avec l'avance de frais, d'un même montant, qu'ila effectuée. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances ducanton de Vaud et à l'Office fédéral de la santé publique. Lucerne, le 25 août 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IVe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : K.138/05
Date de la décision : 25/08/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-08-25;k.138.05 ?
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