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21/08/2006 | SUISSE | N°1P.31/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 août 2006, 1P.31/2006


{T 0/2}1P.31/2006 /col Arrêt du 21 août 2006Ire Cour de droit public MM. et Mme les Juges Féraud, Président, Fonjallaz et Pont Veuthey, Jugesuppléante.Greffier: M. Parmelin. A. ________,recourant, représenté par Me Vincent Spira, avocat, contre B.________,intimée, représentée par Me Françoise Arbex, avocate,Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case postale3565, 1211 Genève 3,Cour de cassation du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case postale3108, 1211 Genève 3. procédure pénale; refus d'ordonner un transport sur place, recours de droit p

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{T 0/2}1P.31/2006 /col Arrêt du 21 août 2006Ire Cour de droit public MM. et Mme les Juges Féraud, Président, Fonjallaz et Pont Veuthey, Jugesuppléante.Greffier: M. Parmelin. A. ________,recourant, représenté par Me Vincent Spira, avocat, contre B.________,intimée, représentée par Me Françoise Arbex, avocate,Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case postale3565, 1211 Genève 3,Cour de cassation du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case postale3108, 1211 Genève 3. procédure pénale; refus d'ordonner un transport sur place, recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation du canton deGenève du 16 décembre 2005. Faits: A.Par arrêt du 11 mai 2005, la Cour correctionnelle avec jury du canton deGenève a condamné A.________ à la peine de vingt-quatre mois de réclusionpour acte d'ordre sexuel avec un enfant et contrainte sexuelle; elle l'a enoutre condamné à payer à la victime la somme de 15'000 fr. à titre deréparation du tort moral.Ce jugement retient en substance qu'en date du 18 février 2003, A.________ ademandé à C.________, né le 25 juillet 1989, de l'aider à descendre descartons dans la cave de l'immeuble où il exploite une bijouterie. Il aprofité du fait que l'adolescent jetait les cartons dans le container pourfermer la porte de la cave et s'approcher de lui. Après avoir baissé sonpantalon et son slip et dénudé C.________, il a introduit son sexe dans lesfesses de la victime et l'a enfoncé partiellement dans l'anus de celle-ci,tout en l'immobilisant avec une clé de bras pour l'empêcher de bouger. Il aensuite tenté sans succès d'amener la tête de l'adolescent vers son sexe pourqu'il lui pratique une fellation, en passant outre les cris et lesprotestations de C.________.La Cour de cassation du canton de Genève (ci-après: la Cour de cassation oula cour cantonale) a rejeté le pourvoi formé contre ce prononcé au terme d'unarrêt rendu le 16 décembre 2005. B.Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande auTribunal fédéral d'annuler cet arrêt et de renvoyer la cause à la courcantonale pour qu'elle statue à nouveau dans le sens des considérants. Ilvoit une violation de son droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst.dans le refus de la Cour correctionnelle d'ordonner un transport sur place.La Cour de cassation se réfère à son arrêt. Le Procureur général du canton deGenève conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. Lamère de la victime, B.________, propose de confirmer l'arrêt attaqué. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Au vu de l'unique argument invoqué, seul le recours de droit public pourviolation des droits constitutionnels au sens de l'art. 84 al. 1 let. a OJest ouvert. Interjeté en temps utile contre une décision finale prise endernière instance cantonale et qui touche le recourant dans ses intérêtsjuridiquement protégés, le recours est recevable au regard des art. 86 al. 1,88 et 89 al. 1 OJ. On peut en revanche se demander si le recours satisfaitaux exigences de motivation qui s'appliquent lorsque, comme en l'espèce, ladécision attaquée a été prise par une autorité cantonale de dernière instancedont la cognition est limitée à l'arbitraire, dans la mesure où le recourants'en prend essentiellement au jugement de première instance (cf. art. 90 al.1 let. b OJ; ATF 125 I 492 consid. 1a/cc p. 494/495). Vu l'issue du recours,cette question peut demeurer indécise. 2.Le recourant reproche à la Cour correctionnelle d'avoir statué sans s'êtrerendue sur les lieux de la prétendue agression. Il dénonce à ce propos uneviolation de son droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. Ilévoque également l'art. 294 al. 1 du Code de procédure pénale genevois (CPPgen.), qui permet à la Cour correctionnelle d'ordonner, s'il y a lieu,d'office ou à la demande des parties, toute nouvelle mesure probatoire utileà la découverte de la vérité, tel que le transport sur place prévu aux art.175 à 177 CPP gen. Il ne prétend toutefois pas que ces dispositions luiconféreraient un droit absolu et inconditionnel d'exiger la mise en oeuvred'une telle mesure. C'est donc exclusivement au regard des garantiesminimales déduites de l'art. 29 al. 2 Cst. qu'il convient d'examiner cegrief; le Tribunal fédéral jouit à cet égard d'une libre cognition (ATF 126 I15 consid. 2a p. 16). 2.1 Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractèreformel, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décisionattaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond. Telqu'il est reconnu par l'art. 29 al. 2 Cst., il comprend notamment le droitpour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance dudossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuvespertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, àtout le moins, de s'exprimer sur son résultat lorsque cela est de nature àinfluer sur la décision à rendre (ATF 129 II 497 consid. 2.2 p. 504; 127 I 54consid. 2b p. 56; 126 I 97 consid. 2b p. 102). Toutefois, le droit d'êtreentendu ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pourdécider de l'issue du litige. Il est ainsi possible de renoncer àl'administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont lesparties veulent rapporter l'authenticité n'est pas important pour la solutiondu cas, qu'il résulte déjà de constatations versées au dossier, lorsqu'ilparvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution dulitige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion. Ce refusd'instruire ne viole le droit d'être entendu des parties que sil'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, àlaquelle le juge a ainsi procédé, est entachée d'arbitraire (ATF 131 I 153consid. 3 p. 157 et les arrêts cités; sur la notion d'arbitraire, voir ATF132 I 13 consid. 5.1 p. 17; 131 I 217 consid. 2.1 p. 219 et les arrêtscités). Ces principes s'appliquent également à la tenue d'une inspectionlocale (ATF 120 Ib 224 consid. 2b p. 229; 112 Ia 198 consid 2b p. 202). 2.2 En l'occurrence, la Cour correctionnelle a refusé d'ordonner un transportsur place parce que les actes de la procédure contenaient suffisammentd'éléments qui lui permettaient de rendre son verdict en connaissance decause sans se déplacer sur les lieux de la prétendue agression et que lesinformations complémentaires susceptibles d'être apportées par une visionlocale n'étaient pas décisives pour la solution du litige. Elle faisaitréférence notamment au transport sur place opéré par la police judiciaire le8 août 2003 et aux photographies prises à cette occasion, qui donnent uneimage détaillée des lieux.Le recourant ne conteste pas qu'un transport sur place avait déjà étéeffectué au cours de l'instruction, ni que des photographies des lieux ontété prises. Il allègue que les déclarations faites par la victime à cetteoccasion contenaient des contradictions par rapport à ses précédentesdéclarations quant à l'emplacement exact de l'agression, voire desallégations irréalistes, de nature à justifier que le jury se rende sur placepour statuer en connaissance de cause. A cet égard, la Cour correctionnelle aconsidéré que les hésitations de la victime concernant la configuration deslieux s'expliquaient par le fait que l'adolescent ne s'était jamais rendudans la cave auparavant et que, durant l'agression dénoncée, il se trouvaitdans un état de confusion habituel en ce genre de situation. Elle a ainsiclairement expliqué les raisons pour lesquelles elle estimait que lesdivergences dans les déclarations de la victime quant à l'emplacement exactoù se serait déroulée l'agression ne nécessitaient pas un transport sur placeet elle refusait de donner suite à cette mesure d'instruction. Le recourantne cherche pas à démonter en quoi il était arbitraire de se fonder sur ceséléments pour écarter sa requête. Ainsi motivé, le refus de procéder à untransport sur place échappe au grief d'arbitraire et ne consacre aucuneviolation du droit d'être entendu du recourant. Au demeurant, comme le relèvela Cour correctionnelle, rien n'empêchait le recourant de requérir un nouveautransport sur place dans le délai prolongé imparti pour présenter des actesd'instruction complémentaires, s'il tenait cette mesure pour indispensable auregard des déclarations contradictoires de l'adolescent. Le fait qu'il étaitalors assisté d'un autre mandataire n'y change rien.Le recourant prétend qu'un transport sur place était nécessaire pour serendre compte de la proximité immédiate de la porte d'entrée de la cave et dela porte du sous-sol de la pizzeria voisine avec le lieu de commission dudélit; il en conclut qu'il n'aurait pas pu prendre le risque de se livrer auxactes qui lui sont reprochés à une heure où il pouvait facilement êtresurpris. Il est exact que les photographies versées au dossier ne montrentpas la porte d'accès à la cave depuis la pizzeria. Cela ne signifie pas qu'untransport sur place s'imposait pour déterminer la distance séparant cetteporte de l'emplacement où les faits dénoncés se seraient déroulés. La Courcorrectionnelle pouvait en effet répondre à l'argumentation que le recourantentendait tirer de la présence d'une porte d'accès en provenance de lapizzeria sans se rendre sur les lieux, dans la mesure où l'on ne voiteffectivement pas en quoi le fait que cette porte puisse s'ouvrir à toutmoment empêchait l'accusé de commettre les actes qui lui étaient reprochés,comme l'a retenu la Cour de cassation. On ne discerne à cet égard aucuneviolation du droit d'être entendu.Enfin, la présence au dossier d'une expertise psychiatrique, qui confirme lacrédibilité des dires de la victime, les témoignages concordants despersonnes se trouvant dans l'entourage de la victime (enseignant, infirmièrescolaire, médecin, psychiatre), les traces physiques constatées par la mèrele lendemain des faits, les crises d'angoisse et cauchemars de l'adolescent,l'absence de bénéfice dont celui-ci pouvait retirer d'une dénonciationinjustifiée, sont autant d'éléments dont la Cour correctionnelle pouvaittenir compte dans son appréciation anticipée des preuves pour admettre qu'untransport sur place était inutile et refuser d'ordonner cette mesured'instruction. Le fait que celle-ci était aisément réalisable vu la proximitédes lieux avec la salle d'audience ne l'imposait pas davantage.Le grief tiré de la violation de l'art. 29 al. 2 Cst. est dès lors mal fondé. 3.Le recours doit par conséquent être rejeté aux frais du recourant quisuccombe (art. 156 al. 1 OJ). Ce dernier versera une indemnité de dépens àl'intimée qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 159al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant. 3.Une indemnité de 1'500 fr. est allouée à l'intimée à titre de dépens, à lacharge du recourant. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, ainsiqu'au Procureur général et à la Cour de cassation du canton de Genève. Lausanne, le 21 août 2006 Au nom de la Ire Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.31/2006
Date de la décision : 21/08/2006
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-08-21;1p.31.2006 ?
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